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légendes arthuriennes : Arthur, les premières sources historiques, un article traduit de Brittania.com

sources_historiques_galloises_legendes_arthuriennes_annales_cambriae_bataille_de_badon_hilSujet : Roi Arthur, légendes arthuriennes, roman arthurien, sources historiques, Saint-Gildas, Annales CambriaeNennius, Arthur historique.
Période : haut moyen-âge, Xeme, VIe siècle.
Sources : Britannia.com
Auteur : David Nash Ford
Traduit de l’anglais par moyenagepassion.com

Bonjour à tous,

C_lettrine_moyen_age_passionomme nous l’avions déjà fait par le passé, nous vous proposons aujourd’hui une nouvelle traduction d’un article du site Britannia.com sur le thème des Légendes Arthuriennes. Cette fois-ci, l’historien anglais David Nash Ford nous entraîne sur les pistes des sources historiques les plus anciennes mentionnant un roi du nom de Arthur et en examine la possible véracité. C’est un sujet que nous avons déjà évoqué partiellement dans des articles précédents mais, il y a derrière ce travail de traduction l’idée de  mettre à portée des non anglophones ou de ceux qui sont à la recherche de sources en français, d’autres contributions sur le sujet, notamment vue par les historiens de l’autre côté de la manche.

Nous en profitons, au passage, pour ajouter quelques illustrations d’intérêt que vous ne trouverez pas dans la source originale, agrémentées d’un passage de l’Excidio Britanniae de Saint-Gildas, traduit également de l’anglais.

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Le roi Arthur au Mont Badon, gravure de 1898 par George Woolliscroft Rhead & Louis Rhead

Big up pour britannica donc et encore merci à David Nash Ford pour ses travaux et ses articles sur les légendes arthuriennes. Vous pourrez trouver la version originale anglaise de cet article, à l’adresse suivante:   Early References to a Real Arthur – A discussion by David Nash Ford


Les Premières références à un véritable Arthur, par David Nash Ford

« Il n’y a qu’une seule source arthurienne contemporaine qui puisse être examinée de nos jours. Concerning the Ruin of Brittain (« A propos de la ruine de la Grande-Bretagne »), ou De Excidio Britanniae a été écrit par le moine nord britannique, Saint-Gildas, au milieu du sixième siècle. Malheureusement, Gildas n’était pas un historien. Son unique préoccupation était de déplorer la perte du mode de vie romain et d’adresser des reproches aux dirigeants britanniques (Constantin, Aurelius Caninus, Vortepor, Cuneglasus et Maglocunus) qui avaient usurpé le pouvoir impérial et mis à mal les valeurs chrétiennes.

Il n’y a aucune mention d’Arthur dans l’ouvrage, mais Gildas y fait bien référence à un personnage appelé « The Bear », signification du mot celtique, Art-. Il fait l’éloge de Ambrosius Aurelianus et mentionne également le siège du mont Badon, bien qu’il ne dise rien du nom du vainqueur. Les écrits de Gildas sont datés d’immédiatement avant 549 ( date de la mort de Maglocunus, l’un de ses « usurpateurs »). Le passage mentionnant Badon date le siège de quarante-quatre ans avant cela. Cela situe Arthur, de manière ferme, au tournant du 6ème siècle. (Voir Alcock 1971) (1).


Citation extraite de De Excidio Britanniae Saint Gildas
Citation extraite de De Excidio Britanniae Saint Gildas

« Leur chef était Ambrosius Aurelianus, un homme qui fut peut-être le seul des Romains à avoir survécu au choc de cette tempête considérable: il est certain que ses parents, qui avaient porté le pourpre, y furent massacrés. De nos jours, ses descendants sont devenus notablement en dessous de l’excellence de leurs grand-pères. Sous ses ordres, notre peuple a retrouvé ses forces et défié les vainqueurs de se battre. Le Seigneur a donné son accord et la bataille s’est déroulée comme il se doit. À partir de ce moment, la victoire est revenue tantôt à nos compatriotes, tantôt à leurs ennemis; afin que dans ce peuple le Seigneur puisse juger (comme il tend toujours à le faire) de son Israël actuel pour voir s’il l’aime ou non. Tout cela a duré jusqu’à l’année du siège de Badon Hill, à peu près la dernière défaite des méchants, et certainement pas la moindre. C’était l’année de ma naissance …  »     

De Excidio Britanniae Saint Gildas


Les Annales de la Pâque galloise ou Annales Cambriae, censées avoir été écrites durant les années auxquelles elles font référence , de 447 à 957 après JC (bien que des entrées très anciennes aient probablement été écrites quelque temps après les événements), sont parmi les premières sources à mentionner Arthur. Utilisé pour calculer les dates de Pâques, ce document enregistre également de nombreux événements historiques, au fil de ses entrées annuelles. Deux d’entre elles mentionnent Arthur. L’année 516 après JC évoque : « La bataille de Badon, au cours de laquelle Arthur porta la Croix de Notre Seigneur Jésus-Christ pendant trois jours et trois nuits sur ses sources_historiques_galloises_legendes_arthuriennes_annales_cambriaeépaules et où les Britanniques (brittons) furent vainqueurs ».

L’entrée pour l’année 537 ap-JC mentionne « Le conflit de Camlann durant lequel Arthur et Medraut (Mordred) ont péri ». Tous les personnages inclus dans ces annales sont, par ailleurs, fiables et se sont avérés être de vrais personnages historiques. Il n’y a donc aucune raison de supposer qu’Arthur et Mordred ne le soient pas également. On a suggéré que, du point de vue stylistique, l’apparition d’Arthur dans l’entrée qui mentionne Badon aurait pu être une interpolation. Les critiques à l’égard de la durée de la bataille sont cependant infondées, puisque Gildas (cité plus haut), se réfère, de façon plus correcte, à cette bataille, comme à un siège. L’affirmation selon laquelle Arthur portait « la croix de Notre Seigneur sur ses épaules »  peut faire référence à une amulette contenant une morceau de la vraie croix ou il peut s’agir, plus probablement, d’une erreur de transcription du gallois « shield » (bouclier) en « shoulder » (épaule), indiquant que la croix était simplement une armoirie sur le bouclier. (Voir Alcock 1971).

Arthur se voit gratifier d’un commentaire passager, dans le poème des débuts du VIIe siècle, Y Gododdin de Aneirin, le célèbre barde de la Maison Royale des Pennines du Nord* (chaîne de montagnes anglaises). Cet écrit glorifie les contributions des armées legendes_arthuriennes_roi_arthur_la_charge_du_mont_badon_haut_moyen-agebritanniques du nord, dirigées par celle de Din-Eityn et de Gododdin, lors de la bataille de Catraeth vers 600 ap. J.-C., et un guerrier y est décrit comme ayant « des nuées de corbeaux noirs sur les remparts du fort, bien qu’il ne s’agisse pas d’Arthur « .

Le Roi Arthur, la charge du Mont Badon, gravure de 1898 par George Woolliscroft Rhead & Louis Rhead

On a prétendu que cela démontrait de la diffusion précoce de la renommée d’Arthur. Malheureusement, au regard des sous-entendus en usage dans le langage du  nord, cela peut se référer à un contemporain d’Arthur, originaire du nord, le Roi Arthwys des Pennines.

La dernière référence arthurienne majeure se situe dans l’ouvrage du 8ème siècle Historia Brittonum ou Histoire des Britanniques, apparemment écrite par un historien gallois du nom de Nennius et qui a peut-être été un moine de Bangor Fawr (Gwynedd)* (ndt région du pays de Galles). Nennius s’est servi de nombreuses chroniques pour assembler cette compilation historique des peuples britanniques, suivie de généalogies et d’une liste des 28 villes de Grande-Bretagne. Ce legendes_arthuriennes_sources_anciennes_Historia_brittonum_Nennius_MS_Harleian_3859travail est particulièrement connu pour son chapitre concernant les campagnes d’Arthur et qui raconte ses douze batailles.

Ces dernières sont peut-être un résumé en latin d’une ancienne liste de batailles galloises, probablement antérieures à la bataille de Camlann qui s’y trouve passée sous silence. A-t-on chanté cela à la cour d’Arthur ? Chaque bataille est nommée à tour de rôle, mais l’ennemi n’est pas spécifié et les lieux demeurent difficiles à identifier. Nennius affirme que, durant toutes ces batailles, Arthur « les » a combattu, en faisant référence aux Saxons originaires du Kent qu’il mentionne précédemment, bien que cela semble improbable. (Voir Alcock 1971).« 

David Nash Ford


Une belle journée à tous.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

 (1) Arthur’s Britain by Leslie Alcock 

De Caradog de Liancarfan à Kaamelott, Méléagant, sombre héros des légendes arthuriennes

excalibur_legendes_arthuriennes_conference_histoire_medieval_litterature_moyen-age_michel_pastoureauSujet : légendes arthuriennes, Méléagant, héros arthuriens, roi Arthur, table ronde, chevaliers, littérature médiévale, roman arthurien, Lancelot.
Période : moyen-âge central, haut moyen-âge
Auteurs : Chrétien de troyes et divers auteurs du XIIe à nos jours.
Sources: Britannia, Universalis, Le Chevalier de la Charrette, Kaamelott.

Bonjour à tous,

S_lettrine_moyen_age_passionombre héros du roman Arthurien, Méléagant y est présenté tantôt comme un roi ou un prince, tantôt comme un chevalier arrogant et perfide. Mystérieux héritier d’un « royaume de l’été » (aestiva regione) est-il humain ? Dans le roman arthurien, il l’est, en général, même si certains auteurs ont avancé que son personnage avait pu être originellement inspiré par un personnage surnaturel et même une divinité obscure du monde celtique et des légendes Galloises. De là, vient sans doute le fait que son « royaume de l’été » est quelquefois interprété comme le pays des morts ou encore une lande mystérieuse dont nul ne revient. De son côté, l’historien anglais David Nash Ford,  spécialiste  des légendes arthuriennes, nous apprend plus prosaïquement qu’il s’agit sans doute  d’une référence au Royaume celtique de Glastening, situé au Sud de Domnonée et devenu le  « Somerset » anglo-saxon.

kaamelott_meleagant_Carlo_Brandt_legendes_arthuriennes_roman_arthurien_moyen-age

Première apparition : la vie de St Gildas et l’enlèvement de la reine Guenièvre

Dans les faits, la première apparition de Méléagant (ou Melwas originellement) dans le roman arthurien date de la première partie du XIIe siècle et c’est encore  David Nash Ford qui nous le confirme ici.

« … On peut trouver dans la vie de St Gildas, de Caradog de Liancarfan, écrit autour de 1130, une histoire qui conte l’intervention de St Gildas entre le roi arthur et un chevalier Melwas du pays de l’été (royaume, contrée). Melwas a enlevé Guenièvre et la retient dans sa forteresse de Glastonbury qu’Arthur viendra bientôt assiéger. Toutefois, Gildas, en éternel promoteur de la paix, persuadera Melwas de libérer Guenièvre et deco_medievale_epeeles deux monarques auront tôt fait de régler leur différent. On peut également retrouver cette histoire dans un poème gallois connu comme « The Dialogue of Melwas and Gwenhwyfar » (le dialogue de Melwas et de Genièvre) dont les manuscrits préservés, de nos jours, datent du XVIe siècle. Chrétien (de Troyes) reste l’auteur le plus connu pour son utilisation de cet épisode dans son histoire de Lancelot, mais il nous y conte que le chevalier avait tué Melwas (alias Melegaunce, Méléagant), ce que l’histoire St Gildas n’a jamais mentionné. »

David Nash Ford,
Brittania GLASTONBURY TOR Queen Guinevere’s Prison?
(la tour de Glastonbury, prison de la reine Guenièvre)

Comme beaucoup de personnages du roman arthurien au fil des siècles, Méléagant restera un personnage changeant qui tiendra des rôles plus ou moins importants en fonction des auteurs, même s’il conservera toujours son côté sombre. Dans des récits plus tardifs, c’est Mordred qui enlèvera la reine, dans d’autres encore, ce dernier fera appel aux services de Méléagant pour le faire. Au passage, enfanté d’un pernicieux sortilège (miroir de celui qui enfanta Arthur), le fils incestueux d’Arthur et de sa demi-soeur Morgane deviendra sans conteste, le personnage le plus sombre de la matière bretonne, bien loin devant l’arrogant chevalier du « royaume de l’été ».

Le Méléagant de Chrétien de Troyes

En souscrivant à la version de Caradog de Liancarfan et sa Vie de St Gildas, Chrétien de Troyes baptisera pour la première fois le personnage du nom de Méléagant et continuera d’en faire le ravisseur de Guenièvre. Le personnage retiendra la reine prisonnière jusqu’à ce qu’elle se fasse délivrer par Gauvain et Lancelot. Ce dernier, dans le récit de l’auteur médiéval, finira  par occire Méléagant et se verra même féliciter par Arthur pour cela. Décrit comme le fils du roi Baudemagus du pays de Gorre, Méléagant intervient dès le tout début du Chevalier de la Charrette et se présente d’emblée comme un ennemi d’Arthur.  Dès sa première apparition, Il vient, en effet, lui signifier qu’il retient emprisonné un certain nombre de ses sujets et le défie avec arrogance et assurance.

« Rois Artus, j’ai en ma prison,
De ta terre et de ta meison,
Chevaliers, dames et puceles.
Mes ne t’an di pas les noveles
Por ce que jes te vuelle randre ;
Ençois te voel dire et aprandre
Que tu n’as force ne avoir
Par quoi tu les puisses avoir ;
Et saches bien qu’ainsi morras
Que ja aidier ne lor porras. »
Lancelot ou le chevalier de la charrette, Chrétien de Troyes.

Mélégant dans la série télévisée Kaamelott

kaamelott_chretien_de_troyes_legendes_arthuriennes_graal_lancelot_meleagant_roman_arthurien_moyen-ageSous la plume d’Alexandre Astier, Méléagant (incarné  avec talent à l’écran par l’acteur Carlo Brandt) campera le personnage le plus inquiétant de la série ( à ce jour en tout cas, puisque Mordred n’y est pas encore apparu et que Morgane, même si elle reste « prometteuse », est pour l’instant demeurée, à demi, dans l’ombre).

Maléfique et manipulateur, les mobiles véritables de Méléagant ne sont pas très clairs. A l’évidence, il voue une haine farouche au roi Arthur et ambitionne de détruire le royaume  de Logres ou, en tout cas, la table ronde, en se servant de Lancelot (Thomas Cousseau à l’écran) comme son bras armé,  mais il reste difficile de connaître les méandres véritables de son plan. Personnage tortueux et nimbé de mystères, il semble aussi, par moments, omniscient et on renoue ici sans doute avec l’hypothèse d’un Melwas surhumain, ou « ange de la mort », venu tout droit de la mythologie celtique. Dans la série le personnage fait d’ailleurs écho à une terrible prophétie, découverte un peu avant, par Arthur dans un livre ancien :

« Siècle des larmes, hurlements…
Au jour, Dieu Roi de Logres…
Fait affront du Lac combattant frère à l’épée
Femme de Vannes épousée commet faute
Panique, ruines, fin d’un monde
Sur Terre sans démons ni sorcières
Viens, dieu des morts solitaire des frayeurs
Du ciel à l’insulte la Réponse »
Kaamelott – Alexandre Astier

Méléagant s’annoncera lui-même explicitement comme cette réponse des Dieux insultés par les écarts de conduite du roi Arthur et notamment son aventure et ses épousailles avec la dame d’un de ses proches chevaliers. Sur la dimension mystique du personnage, on trouvera encore cette tirade d’anthologie née sous la plume inspirée d’Alexandre Astier et qui donne, tout entière, le ton.

« Moi, quand j’ai plus rien à faire ici, je me retire… Plus une goutte d’eau. Plus un rayon de soleil. Je me dessèche, de la tête aux pieds, en un petit cadavre sous un tas de feuilles… Les saisons me survolent sans me soupçonner… Et puis, un jour, la corneille raconte qu’elle a entendu au loin quelqu’un qui recommence à pleurer. Guenièvre ! Guenièvre ! Alors là, j’ouvre un œil, je rampe, mangeant la neige, léchant l’eau croupie… et mes ennemis tressaillent, car à me voir boire, ils comprennent que je suis de retour.
Kaamelott – Alexandre Astier

kaamelott_lancelot_thomas_cousseau_meleagant_melwas_legendes_arthuriennes_roman_arthurien_moyen-agePour parvenir à ses fins, Méléagant approchera un Lancelot fragilisé par la perte de Guenièvre et rongé par le désespoir, La manipulation échouera en partie, mettant quelques bémols à sa nature divine et à son omnipotence (sauf à invoquer la toute puissance du libre arbitre humain), et quelques restes peut-être d’amitié ou de conscience, doublés d’un concours de circonstances, arrêteront Lancelot au moment fatidique.

Plus loin dans le temps et dans l’oeuvre, le sombre personnage va-t-il enlever Guenièvre,  comme il le fait dans le roman de Chrétien de Troyes ? Même s’il n’est pas vraiment possible de le savoir tant que la suite de Kaamelott n’est pas encore connue, il demeure plus probable qu’Alexandre Astier ait décidé de réécrire totalement la partition jouée par Méléagant dans la légende du célèbre auteur médiéval, en laissant l’épisode de l’enlèvement loin derrière. Dans son approche des légendes arthuriennes, c’est d’ailleurs plutôt Lancelot qui hérite de cet aspect classique de Méléagant, puisqu’il finit, durant quelques épisodes, par lier Guenièvre pour s’assurer qu’elle ne retourne au château, durant son absence. Pour le reste, le Chevalier du Lac finira-t-il encore comme chez Chrétien de Troyes par occire l’odieux manipulateur ? Pourquoi pas ?  Quoiqu’il en soit, pour le savoir, il faudra encore attendre.

En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

Excalibur, l’épée d’Arthur: aux origines de la légende

excalibur_legendes_arthuriennes_conference_histoire_medieval_litterature_moyen-age_michel_pastoureauSujet : Roi Arthur, légendes arthuriennes, roman arthurien, Excalibur, épée, tradition celtes, mythologie et légendes.
Période : haut moyen-âge et moyen-âge central
Sources : Excalibur, Britannia.com
Auteur : David Nash Ford (historien britannique),
Traduit de l’anglais

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous remontons aux sources des légendes arthuriennes et notamment à la partie qui concerne la célèbre épée du roi : Excalibur. Nous le faisons en bonne compagnie puisque nous vous proposons, cette fois-ci, la traduction d’un article issu du très sérieux site Britannia.com.

Nous le devons à David Nash Ford, jeune historien et archéologue britannique littéralement tombé, enfant, dans les légendes arthuriennes, après avoir visité le site du château de Tintagel et qui s’en est fait, depuis, une spécialité.  Pour faire bonne mesure, en plus de sa traduction depuis l’anglais, nous y adjoignons quelques notes et éléments explicatifs, ainsi que des illustrations provenant d’autres sources.

En vous souhaitant une très bonne lecture !

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EXCALIBUR
Une discussion sur les origines de l’épée du Roi Arthur, par D Nash Ford

La tradition

Llegendes_arthuriennes_excalibur_symbole_origine_archeologiee nom Excalibur fut utilisé pour la première fois par les romanciers français pour désigner l’épée du Roi Arthur . Ce n’était pas alors la célèbre « épée du rocher » (qui s’est brisée lors d’une bataille), mais une deuxième épée acquise par le roi par l’intermédiaire de son conseiller  druidique Merddyn (Merlin). Inquiet qu’Arthur puisse tomber à la bataille, Merlin emmena le roi jusqu’à un lac magique où une main mystérieuse jaillit de l’eau, brandissant une épée magnifique. C’était la Dame du lac offrant à Arthur une épée magique incassable, forgée de la main même d’un elfe forgeron d’Avalon, ainsi qu’un fourreau qui permettrait de la protéger autant que son porteur, tant qu’il l’aurait sur lui. (ndt; le fourreau en lui-même était doté du pouvoir magique d’empêcher la mort de son porteur en cas de perte de sang occasionnée par des blessures). 

Près de la fin du règne d’Arthur, durant les temps troublés de la rébellion de Medrod (Mordred ou Mordred), Excalibur fut volée par la demi-soeur sorcière d’Arthur, la Fée Morgane. Bien que l’épée fut retrouvée, le fourreau, quant à lui, fut perdu à jamais.

excalibur_legendes_arthuriennes_epee_arthur_fee_morgane_jete_fourreau_magiqueLa fée Morgane se débarrasse du fourreau magique d’Excalibur (gravure de Henri Justice Ford 1902)

C’est ainsi qu’Arthur fut mortellement blessé durant la bataille de Camlann*. Suite à cela, le roi donna l’instruction à Bedwyr (ou Girflet) (le chevalier de la table ronde nommé Bedivere)  de rendre Excalibur au lac d’où elle était venue. Toutefois, questionné sur les circonstances autour du retour d’Excalibur dans l’eau, Bedwyr clama n’avoir rien noté d’extraordinaire. Arthur sut dès lors que Bedwyr avait gardé Excalibur pour lui-même et le renvoya une nouvelle fois au Lac. Ayant cette fois lancé l’épée dans les eaux troubles, Bedwyr vit la main mystérieuse apparaître et s’emparer d’Excalibur pour l’entraîner dans les fonds du lac pour la dernière fois.

L’évolution du nom

Les histoires arthuriennes les plus anciennes nomment l’épée du Roi Arthur Caladwich, un nom gallois dérivé de Calad-Bolg et qui signifie « Foudre puissante » (« Hard Lightning »). Par la suite, le nom a évolué pour devenir « Caliburn » chez Geoffroy de Monmouth, ce qui a finalement donné lieu au francisé Excalibur que nous connaissons aujourd’hui.

Les origines anciennes

Des figures légendaires sont associées à des épées magiques à travers le monde, ces dernières représentant souvent le symbole de leur pouvoir royal. Il est intéressant de noter que Curtana, une épée  datant du XVIIe siècle et succédant à l’épée originale de Ogier de Danemarche (Ogier the Dane, chevalier Danois légendaire) est encore utilisée jusqu’à ce jour durant les cérémonies de couronnement anglaises.  La légende du roi Arthur a aussi des similarités particulières avec la légende nordique de Sigurd, mais des parallèles encore plus frappants peuvent être faits avec le héros irlandais: Cu Chulainn (Cúchulainn) qui possédait lui aussi une épée du nom de Caladbolg.

Cuchulainn_heros_mythologie_irlandaise_celtique_legendes_arthuriennes_excaliburCúchulainn héros et guerrier aux pouvoirs extraordinaires parmi les plus importants personnage de la mythologie celte irlandaise.

De telles épées étaient en général réputées avoir été créées par un forgeron elfe. Dans la mythologie saxonne, on le connait sous le nom de Wayland, mais pour les celtes il s’appelait Gofannon. On peut encore l’identifier au Dieu romain Vulcain et au Dieu grec Hephaistos (Hephaestus) qui forgèrent des armes magiques que les muses donnèrent à Persée, et que Tétis (Thétis) donna a Achille. La capitulation ou la destruction ultime de l’épée est une symbole universel bien connu de défaite. Dans le cas présent, elle est emblématique de la mort elle-même.

Curtana, épée cérémonielle britannique du XVIIe siècle
Curtana, épée cérémonielle britannique du XVIIe siècle

Le « dépôt » d’épée, d’armes ou d’autres objets de valeurs dans les lacs sacrés et les rivières était une pratique répandue chez les peuple celtes. Strabon (historien géographe grec -64 BC. +25 AC)  a mentionné de tels rituels près de Toulouse en France et a noté que d’autres lacs sacrés ont existé à travers l’Europe. Grégoire de Tours (538-594) fait une allusion à des festivités de trois jours autour du lac Gévaudan dans les Cévennes, dédiées à ces rites_celtiques_legendes_arthuriennes_excalibur_origine_legende_dame_du_lacrituels. Certains érudits avancent que de telles pratiques faisaient parties des rites funéraires celtes.

Guerriers celtes et « dépôt » d’armes. Illustration sur la base de découvertes archéologiques dans la Ljubljanica  (rivière de Slovènie).

Des découvertes archéo-logiques de dépôts de pièces de métal venues de lointaines destinations, sont attestés dans le lac de Llyn Fawr  dans le comté de Glamorgan (Morgannwg- Sud du pays de Galles). Elles incluent des haches et des faucilles datant de l’an 600 avant JC. D’autres armes ont été découvertes dans le lac de Llyn Cerrig Bach de l’île galloise d’Anglesey. Leur datation va du 2e siècle avant J.C. jusqu’au 1er siècle Après J.C. De tels dépôts dans les rivières, durant l’âge de fer celtique,  sont si nombreux qu’on ne peut les compter. Parmi les plus célèbres d’entre eux, on peut mentionner le superbe bouclier de Battersea ainsi que le Casque du Waterloo Bridge trouvés dans la Tamise. La grande majorité des rivières anglaises semble avoir été communément  utilisée pour y déposer des épées du type de celle d’Arthur.« 

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David Nash Ford (historien britannique),
Traduit de l’anglais par moyenagepassion.com.

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*Bataille de Camlann : dernière bataille auquel Arthur aurait pris part, la plus ancienne référence historique de sa mention se trouve dans les annales de Galles (Annales Cambriae). Ce manuscrit datant du Xe siècle est vraisemblablement une compilation d’auteurs divers. Voilà ce que dit l’entrée pour l’année 516 et 537 de notre ère:

« 516. La bataille de Badon, durant laquelle Arthur porta la croix de notre seigneur Jésus-Christ durant trois jours et trois nuits sur ses épaules et les bretons furent victorieux.
« 537. La bataille de Camlann, durant laquelle Arthur et Medraut (Mordred) tombèrent. Et il y eu de nombreux morts (« plague ») sur l’ïle de Bretagne (Britain) et en Irlande. »

Une belle journée à tous.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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