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Un bol d’argent plein d’amertume: le miracle de la Cantiga de Santa Maria 152

 musique_espagne_medievale_cantigas_santa_maria_alphonse_de_castille_moyen-age_centralSujet :  musique médiévale, Cantigas de Santa Maria, galaïco-portugais, culte marial, miracles, Sainte-Marie.
Epoque : moyen-âge central, XIIIe siècle
Auteur :  Alphonse X  (1221-1284)
Titre :  Cantiga 152, le bol d’argent
Tantas nos mostra a Virgen
Direction : Eduardo Paniagua  (2003) 
Album : Caballeros, Cantigas de Alfonso X, el sabio

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous poursuivons ici l’exploration des Cantigas de Santa Maria, chansons médiévales toutes entières dédiées au culte marial et à la vierge, léguées à la postérité par le roi espagnol Alphonse X de Castille, dans le courant du XIIIe siècle. Aujourd’hui, c’est la Cantiga numero 152 que nous vous présentons par le détail.

Culte Marial

La bonté d’une Sainte et la bienveillance d’une mère, au secours de l’homme médiéval

C’est une évidence mais on ne peut s’intéresser au moyen-âge en Europe occidentale, sans se pencher sur ses aspects profondément chrétiens et, dans ce cadre, on peut encore moins occulter le culte qui s’y développe autour de la vierge Marie, et ce monument qu’il lui est dédié et que représentent les Cantigas de Santa Maria.

En Occident, le culte marial s’intensifie autour du VIIe siècle avec l’entrée dans le calendrier de fêtes destinées à célébrer la Sainte incarnée et sa maternité. Cette force s’affirmera encore du IXe au XIe siècle et, au XIIe siècle, les images et les réflexions associées à la « madre dolorosa » accompagnant son fils sur la croix lui conférera plus que jamais un statut unique dans le coeur des croyants. Entre le ciel et la terre, la mère de Dieu sera alors devenue celle de tous les hommes, capable de leur offrir le salut et prompte à les secourir. Mère de miséricorde, le XIIe et le XIIIe la vénéreront encore culte_marial_sainte_vierge_marie_moyen-age_chretien_miracles_cantigas_santa_maria_musique_medievaleintensément à travers des productions artistiques dans tous les domaines et de nombreux récits de Miracles. (1)

Au XIIIe siècle, les Cantigas de Santa Maria sont chantées à la cour d’Espagne, elles résonnent aussi dans les chants des pèlerins et les accompagnent sur le chemin de la rédemption au long des grandes routes souvent périlleuses du moyen-âge. A la faveur de certains prêcheurs de l’Eglise, cet « amour » de la Sainte héritera même par endroit des formes et des contours de la lyrique courtoise. L’émotion qu’elle suscite chez bon nombre d’hommes occidentaux, au coeur du moyen-âge, nous est sans doute aujourd’hui difficile à percevoir dans toute sa profondeur et sa complexité mais elle recouvre une réalité indubitable dont nous gardons encore de nombreux témoignages.

Sainte miraculeuse, mère des mères, dames des dames, touchée par la grâce divine et pleine de miséricorde, icone féminine sublime de bonté et de pureté, cette « notre dame » qui est même devenue le symbole de l’Eglise toute entière est, pour l’homme médiéval, capable plus encore que tout autre Saint d’intercéder efficacement auprès de son fils, le Christ, le Dieu mort en croix et d’obtenir son oreille et sa mansuétude. A lui, on n’ose pas toujours d’adresser directement, jamais tout à fait certain d’en être digne, ni d’avoir son écoute et comme on la crédite de cette bonté infinie. tout autant que de cette proximité, elle apparaît aussi, souvent et se montre quand on l’appelle, pour peu qu’on le fasse avec une foi sincère. Ainsi, l’histoire de la Cantiga 152 est encore celle d’un miracle et d’une apparition.

La Cantiga 152 par Eduardo Paniagua

Eduardo Paniagua et les chevaliers dans les cantigas de Santa Maria

Nous avions déjà dédié à Eduardo Paniagua, un long article à l’occasion de notre présentation détaillée de la Cantiga 23  (celle du miracle du vin). Aussi, si vous désirez en savoir plus sur ce brillant et talentueux musicien espagnol entièrement dévoué au répertoire médiéval, nous vous invitons à le consulter.

Rappelons simplement que dans les nombreuses productions musicales médiévales qu’il a ramené à la lumière et réinterprétées, on doit à Eduardo Paniagua l’immense travail d’avoir recompilé et musique_espagne_medievale_culte_marial_eduardo_paniagua_alphonse_de_castille_caballeros_cantigas_santa_maria_chevalier_moyen-ageenregistré l’ensemble des Cantigas de Santa Maria.

Dans un album de 2003 ayant pour titre Caballeros, il proposait une selection des Cantigas d’Alphonse le Sage, sur le thème des chevaliers et de la chevalerie. C’est de cet album qu’est tiré l’interprétation de la Cantiga 152 du jour.  Vous le trouverez disponible à la vente en ligne sous ce lien : Caballeros


La Cantiga 152 Un bol d’argent plein d’amertume pour un chevalier débauché

P_lettrine_moyen_age_passion copiaetits pélerins, simple gens, marchands, bourgeois, seigneurs et princes, les miracles des Cantigas de Santa Maria ne font pas d’ostracisme social et la vierge ne distingue pas entre les classes pour accomplir ses prodiges. Bien au contraire, la multiplicité des exemples ne fait que renforcer l’idée que la Sainte est à portée de tous.  Le Miracle, cette fois-ci, concerne un chevalier.

Como u bon cavaleiro d’armas, pero que era luxurioso, dezia sempr’ «Ave Maria», e Santa Maria o fez en partir per sa demostrança.

Comment un bon chevalier d’armes, mais qui était plein de luxure, disait toujours « Ave Maria » et comment Sainte Marie par sa démonstration lui permis de s’en défaire.

Bien qu’il invoqua souvent le nom de la vierge en disant « Ave Marie », l’homme ne se rendait jamais aux messes, ni aux offices et ne priait guère non plus. Fort talentueux dans les arts de la guerre et doté d’un grand courage, il demeurait aussi arrogant et licencieux, se rendant coupable de tous les péchés de luxure, les plus grands comme les plus petits.

cantigas_santa_maria_miracle_culte_marial_chevalier_moyen-age_alphonse_X_espagne_medievaleUn jour, l’homme se trouva en grande lutte avec lui-même, désireux de s’amender au fond de son âme mais au dilemme, car son corps ne voulait abandonner les plaisirs de chair qu’il goûtait par ailleurs et auxquels il s’était habitué. Et tandis qu’il était au débat, ne sachant trancher, la « glorieuse » lui apparut, tenant dans sa main un magnifique bol d’argent grand et luisant. A l’intérieur du récipient, se tenait un mets de couleur jaunâtre et abjecte, à la saveur amère et à l’odeur  nauséabonde et fétide.

A la vue du liquide, le chevalier fut pris d’une grande peur et somma l’apparition de vouloir se nommer. La Sainte lui répondit : « Je suis Sainte Marie et je viens avec ce bol te décrire ta situation afin que tu les abandonnes tes erreurs. Car, vois-tu, ce bol te montre que tu es beau et doté de très grandes qualités. Et pourtant, comme tu es aussi plein de péchés et sale dans ton âme, tu empestes comme ce mets malodorant et tu iras en enfer, qui est plein d’amertume.

Ayant prononcé ces mots, la vierge s’en fut, et depuis cet instant là jusqu’à la fin de ses jours, le chevalier s’amenda et vécut dans la droiture. Et quand son âme fut séparée du corps, il s’en fut dans le lieu de Paradis où il vit la vierge sainte qui est la dame des dames.

Refrain « La vierge nous montre tant de merci et d’amour
Que jamais et pour aucune raison nous ne devons être de mauvais pêcheurs. »


La Cantiga de Santa Maria 152
en  galaïco-portugais original

Como u bon cavaleiro d’armas, pero que era luxurioso, dezia sempr’ «Ave Maria», e Santa Maria o fez en partir per sa demostrança.

Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

E dest’ un mui gran miragre mostrou por un cavaleiro
que apost’ e fremos’ era e ardid’ e bon guerreiro;
mas era luxurioso soberv’ e torticeiro,
e chẽo d’ outros pecados muitos, grandes e mẽores.
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

Este per ren madodynnos nen vesperas non oya,
nen outras oras nen missa; pero en Santa Maria
fiava e muitas vezes a saudaçon dizia
que ll’ o Sant’ Angeo disse, de que somos sabedores.
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

E un dia, u estava cuidando en ssa fazenda
com’ emendass’ en sa vida, e avia gran contenda,
ca a alma conssellava que fezesse dest’ emenda,
mas a carne non queria que leixasse seus sabores;
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

El estand’ en tal perfia, pareceu-ll’ a Groriosa
con ha branqu’ escudela de prata, grand’ e fremosa,
chẽa dun manjar mui jalne, non de vida saborosa,
mas amarga, e sen esto dava mui maos odores.
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

U a viu o cavaleyro, foi con medo [e]spantado
e preguntou-lle quen era. Diss’ ela: «Dar-ch-ei recado:
eu sõo Santa Maria, e venno-te teu estado
mostrar per est’ escudela, porque leixes teus errores.
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

Ca ves, esta escudela mostra-ti que es fremoso
e ás muitas bõas mannas; mas peccador e lixoso
es na alma, poren cheiras com’ este manjar astroso,
per que yrás a inferno, que é chẽo d’ amargores».
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.

E pois ll’ ouv’ aquesto dito, a Virgen logo foy ida;
e el dali adeante enmendou tant’ en sa vida,
per que quando do seu corpo a ssa alma foy partida,
foi u viu a Virgen santa, que é Sennor das sennores.
Tantas nos mostra a Virgen de mercees e d’ amores
que per ren nunca devemos seer maos pecadores.


Retrouvez l’index de toutes les Cantigas de Santa Maria traduites et commentées, avec leur interprétation  par les plus grands ensembles de musique médiévale,

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

(1) Voir  Débora González Martínez, Sur la translatio de miracles de la Vierge au Moyen Âge. Quelques notes sur les Cantigas de Santa Maria, FMSH-WP-2014-57, janvier 2014

« Echos et Merveilles », un grand festival aux couleurs médiéval-fantastique, celtiques et « fantasy » en Occitanie

festival_musique_animations_moyen-age_fantastique_medieval_fantaisie_occitanie_echos_merveilles_Sujet : fêtes, festival, médiéval fantastique, médiéval fantaisie, fantasy, marché, animations médiévales, concerts, folk, neo-folk médiévale
Evénement :  Festival Echos & Merveilles 2018
Lieu : Bruguières,  Haute-Garonne, Occitanie
Dates : du 26 au 28 avril 2018

Bonjour à tous,

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour ceux qui se trouveront en région occitane et dans le sud de France cette fin de semaine, un grand festival est à retenir. Il se tient à Bruguières, à quelques lieues au nord de Toulouse et il a pour nom « Echos et Merveilles ».

Créé à l’origine par le groupe Neko Light Orchestra, (collectif de compositeurs et orchestre de rock mélodique spécialisé dans la ré interprétation des musiques des « cultures de l’imaginaire »), relayé depuis par l’Association Echos & Merveilles, cet événement festival_medieval_fantastique_echos_et_merveilles_moyen-age_fantasy_musique_folk_medievalcélèbre, cette année, sa  3ème  édition.

Du point de vue thématique, ce festival se situe « au carrefour des cultures de l’imaginaire, des cultures médiévales, celtiques et de la fantasy ». Au delà de son aspect musicalil propose encore une foule d’autres animations et s’articule autour de deux grands axes festifs. Le premier, en journée, se concrétise autour de la mise en place d’un grand « village des légendes ». Le second axe est nocturne et rejoint la vocation musicale initiale de l’événement avec trois soirées, les jeudi, vendredi et samedi autour de concerts exceptionnels.

Le  « Village des Légendes »

Animations, spectacles, concerts, conférences, grand marché artisanal, rencontre d’auteurs, …

I_lettrine_moyen_age_passion copianstallé au coeur d’un théâtre de verdure de plusieurs hectares – le Parc du Bascala de Bruguières -, le Village des Légendes du festival Echos et Merveilles propose sur les journées du vendredi et du samedi quantités d’activités et de divertissements autour des thèmes du médiéval-fantastique, des cultures celtiques et encore du monde de la fantasy. L’accès à l’ensemble de cette partie de l’événement est gratuit.

festival_medieval_fantastique_imaginaire_culture_celtique_folk_animations_concerts_echos_et_merveilles_occitanieOn pourra ainsi y trouver des compagnies médiévales avec leurs campements (démonstrations d’escrime ancienne, vie quotidienne, etc…) mais aussi des espaces dédiés à des jeux grandeur nature ou de plateaux, et encore bien d’autres divertissements et surprises. Au coeur du parc et toujours en journée, l’amphithéâtre proposera également un programme continu riche en contes, conférences et concerts.

Quelques campements, compagnies et artistes présents au village

Asso Armadag – Escrime médiévale – La Loubatière d’Occitanie – Escape Game Thème Magie – Florant Mercadier – Les Becuts de Gascogne – Béhourd – Les Compagnons d’Ancelin – Les Afustés – Troubadours – Asteria Karavan – Libertalia – Barbar’O Rhum – The Deep ones – Mestr Tom

La bande annonce du Festival 2018

Grand Marché Artisanal

On pourra aussi trouver sur place un grand marché artisanal totalement original  puisque les exposants proposeront là des créations et produits en relation avec l’esprit et les thèmes du festival. Plus de cent artisans devraient être au rendez-vous de cette édition 2018.

Rencontre d’auteurs  et d’illustrateurs

La dimension « salon » ne sera pas non plus en reste puisque un espace sera dédié aux auteurs et illustrateurs du genre fantasy, médiéval fantastique ou imaginaire. Près d’une vingtaine d’entre eux seront présents pour présenter et dédicacer leurs oeuvres.

Tavernes & Restauration sur place

Côté ripailles, un large espace est dédié aux restaurateurs et aux tavernes.

Découvrir le programme détaillé du Village

Trois grandes soirées de concerts

E_lettrine_moyen_age_passionfestival_concerts_echo_merveilles_folk_celtique_medieval_fantastique_fantasy_geekn nocturne et comme nous le disions plus haut, le Festival Echos et Merveilles ouvrent ses portes sur trois grandes soirées concerts avec des groupes venus de toute la France, mais aussi d’Angleterre et d’Allemagne. Au programme :  Neo Folk, Folk médiéval, « Dark » Folk, Folk Celtique ou irlandais, et même encore une touche de pop, de rock et d’inclassables pour faire bonne mesure.

Jeudi 26 avril
Luc Arbogast – Fanel – Guilhem Desk

Vendredi 27 avril
Echos de Poudlard – Nekko light Orchestra  – The Greenaways – The Rowan Tree – Firdan

Samedi 28 avril
Faun – La Horde –  Les Compagnons du Gras Jambon – Stille Volke

(la soirée du samedi est prolongée par une spéciale à la taverne jusqu’à tard dans la nuit)

Pour le détail des groupes, les tarifs, accès, hébergement, etc, voir le site de l’événement  – Page FB officiel ici

En vous souhaitant une belle journée et un beau festival Echos & Merveilles 2018 si vous avez l’opportunité de vous y rendre.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen-Age sous toutes ses formes.

Nouveauté : Thibaut de Champagne, son art poétique, ses chansons et leurs variantes mélodiques chez Honoré Champion

thibaut_le_chansonnier_troubadour_trouvere_roi_de_navarre_comte_de_champagneSujet : chansons, musique, poésie médiévale, amour courtois, poésie lyrique, trouvère, vieux français. livre,
Période : Moyen Âge central
Auteur : Thibaut IV de Champagne (1201-1253), Thibaut 1er de Navarre
Ouvrage : « Thibaut de Champagne, textes et mélodies »
Auteurs : Christopher Callahan, Marie-Geneviève Grossel, Daniel E. O’Sullivan
Editeur : Honoré Champion (avril 2018)

Bonjour à tous,

D_lettrine_moyen_age_passionepuis près d’un siècle et demi, la prestigieuse maison d’édition Honoré Champion publie de diffuse les plus grands titres de la recherche universitaire de l’espace francophone. De fait et sur le sujet qui nous préoccupe, nous lui devons nombre des ouvrages sur la littérature, la poésie médiévale et ses auteurs que nous avons déjà cités ici. Depuis ses premières parutions, la maison a poursuivi son oeuvre sans relâche et avec plus de 10 000 titres déjà parus, elle s’est s’imposée comme une référence incontournable dans son honore_champion_edition_livres_litterature_poesie_medievaledomaine de prédilection.

Sur la partie médiévale, à la lumières des nouvelles découvertes et des avancées des romanistes ou médiévistes, elle revisite régulièrement des œuvres ou des auteurs déjà édités longtemps auparavant. C’est le cas de l’ouvrage que nous vous présentons aujourd’hui puisqu’elle nous fait le grand plaisir de publier un livre tout entier consacré à Thibaut de Champagne et à ses chansons. Un siècle s’étant écoulé depuis le dernier ouvrage en date dédié au grand roi poète du XIIIe siècle, il était grand temps de réexaminer son œuvre et c’est désormais chose faite.

Exhaustif & ambitieux : art poétique, chansons adaptées & variations mélodiques

Avec un ouvrage qui déborde les huit-cent pages, les auteurs ne se sont pas contentés ici de présenter et d’adapter en français moderne le legs poétique de Thibaut le Chansonnier, ce qui aurait déjà représenté, en soi, un travail conséquent. Au delà des traductions de ses œuvres, ils ont aussi compilé les nombreuses variantes mélodiques associées à ses chansons. De ce point de vue, en plus des férus d’histoire, de littérature et de moyen-âge, ce livre devrait encore ravir les amateurs de musique ancienne désireux de restituer, au plus près, l’art du roi de Navarre et seigneur-trouvère de thibaut_de_champagne_trouvere_chansonnier_livres_chansons_partitions_lyrique_courtoise_honore_championChampagne.

Comme nous l’indiquions plus haut, l’ouvrage bénéficie encore des éclairages les plus récents en matière de littérature médiévale. En plus des éléments biographiques rassemblés sur Thibaut de Champagne, mais aussi  de la revue des manuscrits anciens dans lequel on peut retrouver  ses chansons, une large partie du livre est ainsi consacrée à l’analyse de sa poétique; il s’agit ici de remettre en perspective son originalité et son art dans le contexte de la lyrique courtoise de son siècle.


Un mot des auteurs

Trois  grands experts de littérature, de vieux-français d’oil et de lyrique courtoise  se sont attelés à cet ambitieux projet. Il s’agit de Christopher Callahan, Marie-Geneviève Grossel, et Daniel E. O’Sullivan et il convient d’en dire quelques mots.

Christopher Callahan est professeur de français et de littérature médiévale et renaissante à l’Université Wesleyan de Bloogmington, dans l’Illinois, Passionné par cette période historique, cet universitaire américain s’est fait une véritable spécialité de la poésie lyrique du moyen-âge et on lui doit nombre de contributions, articles et parutions dans ce champ. Au sujet des trouvères des XIIe et XIIIe siècle, on retiendra notamment sa participation à deux ouvrages sur Les Chansons de Colin Muset, parus également chez Honoré Champion en 2005.

thibaut_de_champagne_oeuvres_chansons_musiques_poesies_medievales_vieux_français_oilMaître de conférence à l’Université de Valenciennes où elle enseigne le français médiéval et le latin, Marie-Geneviève Grossel, est, de son côté, une spécialiste reconnue de la Champagne du XIIIe siècle et de son bouillonnement littéraire et artistique d’alors. L’art et les chansons des trouvères de cette période, ainsi que les codes de l’amour, de la séduction et de la lyrique courtoise font donc partie de ses grands sujets de prédilection et on lui doit des ouvrages reconnus sur la question ou sur des sujets connexes: Le Milieu littéraire en Champagne sous les Thibaudiens: 1200-1270, (1994), Les chansons de langue d’oïl: l’art des trouvères (2008), pour ne citer que ces deux-là. On peut encore retrouver nombre de ses contributions ou articles dans des ouvrages collectifs ou actes de colloques portant sur le moyen-âge.

Enfin, « last not least« , professeur de français médiéval à l’Université du Mississippi, Daniel E. O’Sullivan s’est fait une spécialité de l’approche comparative et interdisciplinaire de la musique, la littérature et la culture de l’Europe médiévale. Il a lui aussi, à son actif, de nombreuses parutions sur la période, sur des thèmes aussi variés que le culte marial dans la lyrique française du XIIIe siècle (Marian Devotion in Thirteenth-century French Lyric, 2005), la formation et la naissance de la courtoisie dans la France médiévale (Shaping Courtliness in Medieval France, 2013) ou même encore sur le jeux d’échecs du moyen-âge à l’entrée de l’ère moderne. On doit également à cet universitaire des articles de référence sur la lyrique de Thibaut de Champagne.

Il fallait bien l’oeil aiguisé et la collaboration de ces trois érudits pour approcher de manière complète et avec toute la rigueur que l’on pouvait en attendre, l’oeuvre du seigneur trouvère croisé, élevé dans la grande effervescence culturelle et artistique de la cour de Champagne des débuts du XIIIe siècle (1).


Où se procurer l’ouvrage ?

Ce nouvel ouvrage autour de Thibaut de Champagne avec lequel il faudra désormais compter vient juste de paraître. Vous le trouverez donc dans  toutes les bonnes librairies et il est aussi disponible en ligne, sur le site de l’éditeur et à l’adresse suivante :   Thibaut de Champagne, Chansons, Textes et Mélodies

thibaut_champagne_chansonnier_trouvere_poesie_chanson_partition_medievale_traduite_moyen-age

En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes

(1) Sur le sujet de la cour de Champagne et des trouvères champenois de la fin du XIIe et des débuts du XIIIe siècle, on pourra valablement consulter nos articles sur Blondel de Nesle, sur Gace Brûlé et bien sûr sur Thibaut de Champagne.

« Tant con je vivrai » un rondeau d’Amour courtois du trouvère Adam de la Halle par l’ensemble TENET

trouveres_troubadours_musique_poesie_medievale_musique_ancienneSujet :  musique, chanson médiévale, poésie médiévale, vieux français, trouvères d’Arras, rondeau, chansons polyphoniques, amour courtois, loyal amant, rondeau.
Période :  moyen-âge central, XIIIe siècle
Auteur :  Adam de la Halle (1235-1285)
Titre :  Tant con je vivrai
Interprètes  : TENET
Média : concert donné à l’église Saint-Malachie de New-York, en 2015 (extrait)

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous revenons sur les trouvères du nord de la France, et notamment d’Arras, avec le célèbre Adam de la Halle et une de ses chansons d’amour courtois. C’est un rondeau polyphonique à trois voix, comme le poète et artiste médiéval en laissa un certain nombre (dix-sept).  Son interprétation nous entraîne du côté des Etats-Unis avec une formation du nom de Tenet,  originaire de New York, que nous aurons ainsi l’occasion de vous présenter.

Tan con je vivrai, par l’ensemble TENET

Tenet, de la france médiévale des XIIIe, XIVe, aux Etats-unis du XXIe

Fondé en 2009 par la chanteuse soprano Jolle Greenleaf, l’ensemble New-yorkais TENET couvre une longue période musicale qui, partant du moyen-âge, va jusqu’à la renaissance et la période baroque et s’étend même jusqu’à des œuvres classiques plus récentes. Puisant à la source du répertoire profane ou liturgique, on peut retrouver la formation  sur des œuvres variées : Claudio Monteverdi, Michael Praetorius, Guillaume de Machaut, etc…, et nous sommes donc avec elle dans le champ des musiques anciennes (Early Music) au sens large.

Jolle_Greenleaf_soprano_tenet_ensemble_musiques_anciennesEn 2015-2016, TENET se proposait de faire une incursion dans la France du moyen-âge et des trouvères, pour explorer « l’avant-garde de la musique médiévale » avec des pièces en provenance des XIIe au XIIIe siècles. C’est dans ce cadre que la formation présentait la belle interprétation du rondeau Tant con je vivrai du trouvère Adam de la Halle. On peut la retrouver sur leur chaîne youtube  sur laquelle ils partagent très généreusement nombre de leurs travaux.

A l’occasion de ce programme « Song of trouvères », l’ensemble recevait aussi  Robert Mealy,  directeur d’orchestre, musicien, violoniste baroque et joueur de vièle et encore professeur dans le domaine des musiques historiques à l’Université de Yale. Fondateur par ailleurs de l’orchestre de musique baroque d’Harvard en 2004, cet artiste très renommé outre-Atlantique a également été primé par un Awards  dans le champ de l’enseignement des musiques anciennes.

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Du point de vue de l’actualité de TENET, le programme réadapté et rebaptisé « the Sounds of time : medieval music from France » fait toujours partie de la large palette de concerts que ces artistes accomplis proposent au public américain de la région de New-York mais aussi au delà, en Amérique latine et, bien que plus rarement, en Europe.

Site web officiel de TENET (en anglais)

Tant con je vivrai,
rondeau d’Adam de la Halle

Léger et court, comme il se doit pour un rondeau, la chanson du jour, bien qu’en vieux français, ne présente pas de difficultés particulières de compréhension. En bon loyal amant, le poète y prend un engagement amoureux envers sa dame et lui fait la promesse de se dédier tout entier à la servir.

chanson_musique_poesie_medievale_adam_de_la_halle_rondeau_tant_con_je_vivrai_moyen-age_central
Partition et notations musicales tirées des Oeuvres complètes du trouvère Adam de la Halle: poésies et musique, par ‎Charles Edmond Henri de Coussemaker, 1872

Tant con je vivrai
N’aimerai
Autrui que vous.
Ja n’en partirai,
Tant con je vivrai.
Ains vous servirai
Loiaument mis m’i sui tous.
Tant con je vivrai
N’aimerai
Autrui que vous.


En vous souhaitant une belle journée.

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
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