
Période: moyen-âge tardif,
Auteur: François Villon (1431-1463)
Titre: Le testament (extrait)
« Nécessité faict gens mesprendre Et faim saillir le loup des boys. »
François Villon – maître de poésie médiévale. Extrait du Testament.
Bonjour à tous,

« Et saichiez qu’en grant poverté,
Ce mot se dit communement,
Ne gist pas grande loyaulté. «
L’Histoire de l’anecdote sur Alexandre le Grand et le pirate Diomedés

Cette anecdote, connue surtout par Saint-Augustin qui la mentionne dans la Cité de Dieu pour illustrer le fait que les empires sans justice ne sont que des entreprises de brigandage, est tirée originellement de la République de Cicéron :
« Alexandre demandait à un pirate par quel attentat il osait infester la mer avec un misérable brigantin. Par le même droit, dit-il, qui vous fait ravager le monde » Cicéron – La république – Livre III.
Voici l’extrait de Saint-Augustin :
« Que sont les empires sans la justice, sinon de grandes bandes de brigands ? De même, une bande de brigands est-elle autre chose qu’un petit empire, puisqu’elle forme une espèce de société gouvernée par un chef, liée par un contrat, et où le partage du butin se fait suivant 
Saint Augustin – La cité de Dieu
Utilisant l’anecdote dans le testament pour plaider en faveur de ses propres déboires et de ses inconduites, voilà ce que Villon conclut :
« Se Dieu m’eust donné rencontrer
Ung autre pitieux Alixandre
Qui m’eust fait en bon coeur entrer,
Et lors qui m’eust veu condescendre
A mal, estre ars et mis en cendre
Jugié me feusse de ma voys.
Necessité fait gens mesprendre
Et fain saillir le loup du boys. »
Francois Villon – Le testament
Ce qui très librement adapté en français moderne donne :
Si Dieu m’eut donné de rencontrer
Un être aussi compréhensif que le fut Alexandre
Qui m’eut permis de vivre en honnête homme
Et que l’on m’eut alors surpris à m’abaisser à faire le mal
Je me serai jugé moi-même
Bon à être brûlé et mis en cendres
Nécessité fait gens mesprendre
Et faim saillir le loup du bois.
L’extrait complet de la poésie
dans la langue de maître François Villon
Après l’explication et la synthèse et pour varier un peu, voilà l’extrait complet de Villon dont est tirée cette citation :
Au temps qu’Alixandre regna,
Ungs homs nommé Dïomedés
Devant lui on lui admena,
Engrillonnné pousses et detz
Comme larron, car il fut des
Escumeurs que voyons courir;
S y fut mis devant ce cadés
Pour estre jugiez a mourir.
L’empereur si l’araisonna:
» Pourquoy es tu laron en mer? »
L’autre responce lui donna:
» Pourquoy laron me faiz clamer?
Pour ce qu’on me voit escumer
En une petïote fuste?
Se comme toy me peusse armer,
Comme toy empereur je feusse.
Mais que veulx tu! de ma fortune,
Contre qui ne puis bonnement,
Qui si faulcement me fortune,
Me vient tout ce gouvernement.
Excusez moy aucunement
Et saichiez qu’en grant poverté,
Ce mot se dit communement,
Ne gist pas grande loyaulté. «
Quant l’empereur ot remiré
De Dïomedés tout le dit:
» Ta fortune je te mueray
Mauvaise en bonne « , ce lui dist.
Si fist il; onc puis ne mesdit
A personne, mais fut vray homme;
Valere pour vray le bauldit
Qui fut nommé le Grant a Romme
Se Dieu m’eust donné rencontrer
Ung autre pitieux Alixandre
Qui m’eust fait en bon eur entrer,
Et lors qui m’eust veu condescendre
A mal, estre ars et mis en cendre
Jugié me feusse de ma voys.
Necessité fait gens mesprendre
Et fain saillir le loup du boys.
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Une belle journée à tous!
Fred
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