
Période: moyen-âge central (XIe, XIIe siècles)
Titre: l’Ecole de Salerne (traduction de 1880)
Auteur : collectif d’auteurs anonymes
Traducteur : Charles Meaux Saint-Marc
Bonjour à tous,

Nous sommes toujours dans le chapitre concernant l’hygiène et ses principes généraux et on y apprendra entre autre que le régime alimentaire, le repos, les exercices et même « l’amour » ont intérêt à se calquer sur le rythme de la nature et sa saisonnalité. Même si nous le pratiquons encore un peu intuitivement « manger moins l’été, manger plus riche l’hiver, » etc… , la vie moderne et urbaine – ses rythmes, ses exigences, ses produits toujours disponibles qui ne suivent plus aucune saisonnalité – nous 
A tout celà, il faut ajouter que ces recommandations du Flos Medicinae ne peuvent être dissociées de la théorie des humeurs. Cette dernière guide alors le médecin dans ses diagnostics, autant que dans ses prescriptions, à la recherche d’une santé qui se situe dans l’équilibre des quatre humeurs présentes dans le corps, et que le climat et les saisons viennent encore influencer. Il y est notamment fait allusion clairement dans le paragraphe sur l’Eté :
« L’Été sec et brûlant survient: sache qu’alors
La bilieuse humeur domine dans le corps. »
Bile jaune, chaude et sèche comme le feu, propice aux états colériques que l’été vient faire bouillonner, pour être devenue la saison des congés payés et des doigts de pieds en éventail sur la plage, à premier vue, nous nous sommes un peu distanciés de la vision médiévale de cette saison, en terme de représentations.
La saignée, un pratique médicale
ancestrale et médiévale

Au moyen-âge, la saignée est encore un moyen comme les purgatifs de rétablir l’équilibre des humeurs. Elle s’inscrit donc dans cette théorie. Pratiquée depuis l’antiquité, si Hippocrate (460-370 av J-C) la limitera dans son utilisation, Gallien (129-200 av J-C) en élargira le champ d’application, au risque d’en faire une remède applicable dans un grand nombre de cas de figures. L’influence de ce dernier sur le sujet sera durable et perdurera jusqu’au XVIIe siècle.
Dans le courant du moyen-âge central, Salerne suivra ce mouvement en faisant notamment de cette saignée une mesure d’hygiène préventive, et en préconisant même la « saignée de précaution ». On continuera toutefois de ne pas la prescrire aux personnes âges, aux enfants, et aux personnes en grand état de faiblesse. Curiosité propre à ce moyen-âge chrétien et conséquence de l’ascétisme sexuel que le Concile de Latran est venu imposer à ses moines et au personnel de l’épiscopat romain, dans le courant du XIIe siècle, au delà de cet usage préventif sur la santé, on retrouvera même une utilisation de cette pratique dans le champ spirituel en direction des ecclésiastiques, pour « affaiblir leurs désirs et leurs appétits de chair » .

Quoiqu’il en soit, même si elle en élargit quelque peu le champ en la plaçant du côté de la médecine préventive, l’Ecole de Salerne continuera, nous l’avons dit, d’encadrer cette pratique de la saignée ne la recommandant qu’à certaines périodes, comme on le voit dans notre extrait du jour. En réalité, les médecins de Salerne iront même plus loin que cela en ne la prescrivant qu’à certaines dates et même qu’à certaines heures de la journée ou certains jours du calendrier lunaire. En remontant un peu plus loin dans le temps, on retrouvera encore chez Avicenne un champ d’intervention assez précis la concernant et elle ne s’adressera pas, là non plus et loin de là, à tous les cas, ni à tous les malades.
En réalité, pour rendre justice à cette pratique dans le cadre de la médecine médiévale, il semble que c’est largement plus le siècle de Molière, le XVIIe qui fera de cette saignée une véritable panacée et en élargira encore le champ et la pratique, au point de la rendre totalement abusive.
La saignée dans la médecine moderne

Tout d’abord, les globules rouges contiennent du fer, et la saignée par le prélèvement d’un peu de sang permet de favoriser l’élimination d’un éventuel excédent de fer dans le sang. On apprendra encore que ce dernier finit souvent par se déposer en d’autres endroits du corps et peut être, notamment une cause de cirrhose du foie. Des cas d’anémies, également dus à cet excès de fer, peuvent être encore traités partiellement et sous contrôle médical, bien évidemment, par le prélèvement de sang. Dans ces cas là, il semblerait que la saignée, 
Rebaptisés en médecine moderne « phlébotomies », ces prélèvements sont encore en usage chez les médecins urgentistes qui les pratiquent dans un certain nombre de cas. Si elle a changé de nom et si on ne l’utilise plus aujourd’hui de manière aussi large que l’on pouvait le faire aux périodes antérieures, la saignée est donc toujours pratiquée par la médecine moderne.
Du régime suivant les saisons
Printemps.
Le Printemps et l’Été, l’Automne, enfin l’Hiver
Se partagent l’année. Humide et doux est l’air
Au printemps; pour saigner le moment est propice;
D’un amour modéré goûte le pur délice:
La saison te prescrit les purgatifs, les bains,
exercice, sueur, liberté d’intestins.
Été.
L’Été sec et brûlant survient: sache qu’alors
La bilieuse humeur domine dans le corps.
Plus d’amour; des mets froids sur la table discrète;
De bains et de saignée abstinence complète;
De longs repos; ne bois qu’avec sobriété;
Le corps est desséché des jeûnes de l’été:
Un vomitif chassant les humeurs viciées
Lave de l’estomac les routes balayées.
Automne.
L’Automne est froid et sec; par ses fruits redoutables;
Aux mets chauds unis donc les bons vins sur la table.
Garde-toi de saignée et de mets farineux;
D’un amour trop ardent fuis l’excès dangereux.
Hiver.
L’Hiver, saison glacée, humide et rigoureuse,
Chargera de mets chauds la table copieuse;
Satisfais à ton aise un appétit actif;
Qu’on te saigne, mais peu; jamais de purgatif.
Mange rôtis les mets que la campagne donne;
Toute viande de poivre assaisonnée est bonne.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

ous poursuivons, ici, notre étude de la médecine de l’Ecole de Salerne en suivant le fil de ce long poème appelé le Flos medicinae et qui fut populaire aux XIe XIIe siècles et même jusqu’à bien des siècles plus tard.
explique le deuxième paragraphe de l’extrait que nous publions aujourd’hui. C’est une idée sans doute plus incongrue dans le contexte de la médecine occidentale moderne que la précédente. Même si les médecins actuels n’ignorent sans doute pas que certains endroits ou climats sont bons pour le rétablissement ou la convalescence (on pense notamment aux villes thermales et à la qualité de leurs eaux), il n’existe pas véritablement, à ma connaissance, de carte répertoriant des lieux géographiques et climatiques propices à soigner précisément telle ou telle maladie ou faiblesse et encore moins en fonction des vents qui y soufflent ou des saisons.




le retraduire, une sorte de transmutation ou de distillation empathique. Et comme il est question d’empathie, rien ne pourrait mieux la traduire qu’une maxime un peu étirée: 

Du côté de la chimie, autant que du silicone, il me semble, mais ça n’engage que moi, que certaines branches de la médecine se sont quelque peu égarées dans les méandres du libre marché et ses ambitions financières, en s’éloignant radicalement des objectifs premiers autant que de l’humilité de leur discipline qui nous sont ici rappelées. Au fond peut-être notre monde manque-t-il simplement de mots pour désigner et nommer les choses qui usurpent leurs noms, les branches qui ne font plus partie de l’arbre? Si ça continue comme ça, vous verrez qu’un jour il y aura des boulangeries qui nous vendront du pain sans en faire. Heureusement,nous n’en sommes pas là.