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Danses médiévales et manuscrits anciens : deux musiciens virtuoses et une belle découverte dans le registre des musiques médiévales

musiques_anciennes_medievales_youtube_voices_of_music_coup_de_coeur_moyenagepassionSujet : musiques médiévales et anciennes, danse médiévale, estampies royales
Période : moyen-âge central, XIIIe siècle,
Titre : La Septime Estampie Royale et l’Istampitta In Pro
Tirées de     manuscrit du Roy (Roi), chansonnier du Roy, manuscrit 844, manuscrit add 29987
Interprètes   : Hanneke van Proosdij & Peter Maund
Média : vidéo, chaîne youtube  Voices of Music

Bonjour à tous,

V_lettrine_moyen_age_passion copiaoici un peu de musique du moyen-âge central pour égayer cette journée. Nous restons dans le registre des Estampies avec deux pièces successives dans une seule même vidéo: l’une est tirée du chansonnier du Roi (le manuscrit 844 de la BnF): la Septime estampie royale. L’autre provient du manuscrit de Londres (manuscrit add 29987) et il s’agit de l’Istampitta in Pro. Au niveau de l’orchestration, les interprétations qui nous en sont proposées ici, par deux musiciens uniquement, pourraient sembler minimalistes mais c’est sans compter sur le fait que nous avons à faire à deux grands virtuoses.

Voices of Music : quand San Francisco se met à l’heure des musiques anciennes

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J_lettrine_moyen_age_passione vois avouer avoir découvert récemment cette excellente chaîne youtube  et le projet qu’elle porte et je vous la conseille vivement, si vous aimez les musiques anciennes, antérieures au XIXe siècle.

chaine_youtube_coup_de_coeur_monde_medieval_histoire_musique_ancienne_moyen_agePlus qu’une simple chaîne youtube, Voices of Music est, en réalité, une formation musicale américaine, originaire de San Francisco. Son projet est à la fois simple et ambitieux, faire revivre et faire partager les musiques anciennes et antiques, et ce que l’on appelle, en bon anglais, la  « Early music ». Le répertoire est donc vaste et inclut des musiques médiévales mais il s’étend aussi largement vers les musiques de la renaissance et celles de l’ère Baroque. Au delà d’être un ensemble qui se produit en concert Voices of Music se présente encore comme suit :

« Notre but en tant qu’artistes et enseignants est d’offrir des concerts et des enregistrements de musique composés avant 1800, des programmes éducatifs abordables pour les enfants et les adultes, une formation avancée pour la prochaine génération de jeunes professionnels et une sensibilisation du public. Nous entendons proposer aussi de la musique d’excellence et de haute qualité en concert. Grâce à une programmation innovante ainsi qu’à notre passion artistique et créatrice, nous proposons, au niveau mondial, la découverte de la musique classique ancienne auprès de nouveaux publics de tous âges. »
Voices of Music

Deux musiciens et interprètes d’exception

U_lettrine_moyen_age_passionn pari d’ouverture et d’excellence, la passion et le sens du partage, auxquels il faut ajouter, bien sûr, un répertoire qui s’aventure sur le terrain des musiques anciennes, et, en l’occurrence médiévales, il n’en fallait guère plus pour que nous réservions, ici, une juste place à l’ensemble Voices of Music. Comme vous pourrez en juger avec la pièce du jour, les musiciens sont talentueux et la qualité des enregistrements exceptionnels sur leur chaîne youtube. N’ayant pas la possibilité d’aller les entendre à San Francisco qui reste tout de même leur ville de prédilection pour les concerts, cela tombe plutôt bien. Concernant les deux pièces médiévales et musicales du jour, elles sont interprétées par deux pointures dont il faut ici dire un mot :

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Peter Maund, percussionniste inspiré

musique_ancienne_medieval_percussionniste_exceptionnel_peter_maund_estampie_royale_voices_of_musicSorti tout droit du conservatoire de San Francisco, le percussionniste américain Peter Maund a derrière lui une longue carrière dans le registre des musiques anciennes, médiévales  et celtiques, mais également dans le registre de la musique classique. Le quotidien écossais Glasgow Herald a même écrit de lui qu’il était un des percussionnistes les plus renommés et les plus imaginatifs de son temps.

Hanneke van Proosdij, flûtiste,  claveciniste et compositeur

musique_ancienne_medieval_flutiste_claveciniste__talent_hanneke_van_proosdij_estampie_royale_voices_of_musicDe son côté, Hanneke van Proosdij, formée au conservatoire Royale de la Hague, est à la fois flûtiste mais joue également du clavecin et est encore compositeur. On ne compte plus les formations dans lesquelles elle a joué ou fait des apparitions, Hespérion XXI est d’ailleurs dans la liste, Avec plus de 40 disques et enregistrements à son actif, elle a également fondé et animé, pendant sept ans, une fondation dédiée aux musiques de l’époque médiévale et de la renaissance. Etablie à San Francisco, elle est aussi rien moins que la co-fondatrice du projet Voices of Music et en assume la direction.

En espérant que vous apprécierez cette belle interprétation du jour, issue de deux manuscrits de musique ancienne parmi les plus célèbres qui nous soient parvenus du moyen-âge central, autant que ce coup de coeur musical et « youtubesque ».

Une très belle journée à tous.

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

O fortune l’introduction du Carmina Burana de Carl Orff

carmina_burana_goliards_poesie_humour_medievale_moyenagepassionSujet : poésie et chanson médiévales, poésie morale, poésie goliardique, golliards, poésie latine, traduction français moderne.
Période : XIIe, XIIIe siècle, moyen-âge central
Titre :  O fortuna, Carmina Burana
Manuscrit ancien : chants de Benediktbeuern
Compositeur : Carl Orff (Karl)
Chef d’Orchestre :
 Eugen Jochum
Orchestre: 
Berlin Orchestra German Opera 

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous revenons, aujourd’hui, vers une pièce d’anthologie de la musique classique « moderne » composée dans les années 35 par Carl Orff et basée sur le manuscrit ancien des chants de Benediktbeuern du nom du monastère dans lequel on le trouva dans le courant du XIXe siècle. Véritable anthologie de la poésie lyrique, profane et goliardique des XIIe, XIIIe siècles, l’ouvrage contient plus de trois cent chants aux thèmes aussi divers que le jeu, l’amour, l’alcool, des pièces satiriques et moralisantes mais aussi deux pièces de théâtre d’inspiration plus liturgique. La grande majorité des textes est en latin et quelques uns des textes sont en germain et en langue romane. Certains des chants sont annotés musicalement mais ce n’est pas le cas de tous.

carl_orff_karl_carmina_burana_poesie_medievale_latine_o_fortuna_paroles_traductionLe compositeur allemand Carl Orff (1895-1982) a grandement contribué à la popularisation d’une partie de ces poésies qui lui ont inspirées la cantate « Carmina Burana« .  L’œuvre a fait, depuis, le tour du monde, et son succès ne se tarit toujours pas puisqu’elle continue d’être jouée jusqu’à ce jour par de nombreux orchestres et dans de nombreux pays. Ici, c’est la mythique introduction et fermeture de cette œuvre gigantesque que nous vous proposons et qui a pour titre « o Fortuna ».

Du point de vue du manuscrit, la pièce du jour se trouve sur le même feuillet que celui de l’illustration de la roue de la Fortune (voir reproduction ci-dessous). La  symbologie en est claire, la roue tourne dans le sens des aiguilles d’une montre et conte l’impermanence de la « Fortune » pris au sens « chance » « succès » « destinée(heureuse) » « sort » et pas nécessairement monétaire comme on l’entend souvent au sens moderne du terme.

Regno, regnavi, sum sine regno, regnabo, « Je règne, j’ai régné, je ne règne plus, je régnerai ». Le roi perd sa couronne, choit, n’est plus rien et puis, la regagne. Jouet de la fortune, l’homme ne contrôle pas sa poesie_medievale_goliardique_latine_goliard_fortune_carmina_burana_carl_orffdestinée. Il ne peut que subir ce que le sort (personnifié ici au centre de l’illustration), lui réserve.

On trouve encore sûrement derrière cela, l’idée qu’il faut se résoudre à n’avoir que peu de prise et de satisfaction en ce bas-monde. Dans le moyen-âge chrétien et même pour la pensée la plus profane de cette époque, le paradis reste à jamais un ailleurs que se situe toujours dans l’après-vie.

poesie medievale morale manuscrit carmina burana roue de la fortune
Le manuscrit des chants de Benediktbeuern ou Carmina Burana (1225-1250)

« O Fortuna » de Carmina Burana
les paroles traduites en français actuel

O fortuna
Velut Luna
statu variabilis,
semper crescis
aut decrescis;
vita detestabilis
nunc obdurat
et tunc curat
ludo mentis aciem,
egestatem,
potestatem,
dissolvit ut glaciem.

O Fortune
Comme la lune
A l’état changeant
Toujours tu croîs
Ou tu décrois.
La vie détestable
D’abord opprime
Et puis apaise
Par un jeu à l’esprit aiguisé.
La pauvreté
Le pouvoir
Elle les fait fondre comme la glace.

Sors immanis
et inanis,
rota tu volubilis,
statu malus,
vana salus,
semper dissolubilis
obumbrata
et velata
michi quoque niteris;
nunc per ludum
dorsum nudum
fero tui sceleris.

Sort monstrueux
Et informe,
Toi la roue changeante,
Une mauvaise situation,
Une prospérité illusoire,
Fane toujours,
Dissimulée
Et voilée
Tu t’en prends aussi à moi
Maintenant par jeu,
Et j’offre mon dos nu
A tes intentions scélérates.

Sors salutis
et virtutuis
michi nunc contraria
est affectus
et defectus
semper in angaria
Hac in hora
sine mora
corde pulsum tangite,
quod per sortem
stemit fortem,
mecum omnes plangite!

Sort qui apporte le salut
Et le courage
Tu m’es maintenant opposé
Affaibli
Et épuisé
Comme de la mauvaise herbe.
A cette heure,
Sans tarder
Cœur de cordes vibrantes
Puisque le sort
Renverse même le fort
Venez tous pleurer avec moi !


En vous souhaitant une fort belle journée!

Fred
Pour moyenagepassion.com.
« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus  Ier s. av. J.-C

Manuscrit de Londres & Danses toscanes des XIIIe & XIVe siècles: Saltarello I

artefactum_musique_danse_et_repertoire_medieval_moyen-age_central_a_tardifSujet : danse, musique médiévale, saltarelle, saltarello, Italie
Période : moyen-âge tardif, XIVe siècle.
Auteur : anonyme
Source : Manuscrit Add 29987, Manuscrit de Londres, British Museum
Interprètes : Arte Factum
Album: « Saltos brincos y reverencias »

Bonjour à tous,

L_lettrine_moyen_age_passion‘ensemble espagnol ArteFactum nous donne l’occasion, aujourd’hui, de revenir sur le manuscrit de Londres, référencé Add 29987, manuscrit du XVe siècle conservé au British Museum dont nous avons déjà parlé ici. C’est donc avec un joyeux et virevoltant saltarello que nous découvrons une pièce de plus de cet ouvrage ancien, précieux témoin  des musiques et des chansons de l’Italie médiévale du XIVe siècle.

Artefactum, l’Andalousie à la conquête des musiques médiévales

Comme tous les Saltarello(s) contenus dans ce manuscrit ancien, la pièce du jour est restée, pour l’instant, anonyme.  Concernant son interprétation, comme nous le disions plus haut, nous la devons à la très sérieuse formation andalouse qui s’est, depuis sa création en 1994, spécialisée dans les répertoires de musiques du moyen-âge central et tardif. Ajoutons encore que ce Saltarello est tiré de l’album « Saltos brincos y reverencias ». Pour l’acquérir ou pour les soutenir, n’hésitez pas à visiter leur site web.  Vous pouvez également le trouver à l’achat en ligne à l’adresse suivante : Saltos, Brincos y Reverencias ou cliquer sur l’image ci-dessous.

danse_medievals_artefactum_saltarello_manuscrit_add_29987_londres_british_museumPour les voir en concert, aux dernières nouvelles et début novembre, ils jouaient à Tokyo, ce qui montre le bien le rayonnement de la musique médiévale dans le monde entier. Comme c’est un peu loin, avec un peu de patience, nul doute qu’ils reviendront proposer leur talent d’interprétation et leur répertoire du côté de l’Europe dans les mois qui viennent.

En vous souhaitant une excellente journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus  Ier s. av. J.-C

Une chanson d’amour Courtois par le roi poète Thibaut de Champagne

thibaut_le_chansonnier_troubadour_trouvere_roi_de_navarre_comte_de_champagneSujet : chanson médiévale, poésie, amour courtois, roi troubadour, roi poète
Période : moyen-âge central
Auteur : Thibaut de Champagne (1201-1253)
Titre : chanson d’amour ou « Por conforter ma pesance »
Manuscrit ancien : le chansonnier du roi
Interprètes : Alla Francesca. Vocal: Emmanuel Vistorky, Harpe: Brigitte Lesne

Bonjour à tous,

C_lettrine_moyen_age_passion‘est toujours un plaisir que d’approfondir la découverte de Thibaut de Champagne à travers ses chansons et ses compositions. Roi de Navarre, Comte de Champagne, il est entré dans la légende comme Thibaut le Chansonnier en léguant à la postérité pas moins de soixante chansons. Son répertoire est large et va de la chanson courtoise à des chansons plus engagées sur le plan politique ou religieux, en passant encore par le jeu-parti, ce divertissement médiéval qui prenait la forme de  joutes verbales entre troubadours où alternant les couplets chaque protagoniste défendait une positon contraire. Au niveau stylistique, on prête généralement à ce noble chevalier et poète d’avoir revisité des formes classiques de son temps tout en y amenant sa propre touche d’humour et de distance.

Pour ce qui est de la pièce du jour, comme son titre l’indique, il s’agit d’une chanson d’amour courtois dans laquelle le roi poète, victime impuissante et consentante de ses sentiments amoureux, chante  à sa dame la douce flamme qui le retient prisonnier.

Alla Francesca : à la découverte du Thibaut de Champagne et du Chansonnier du roi

On doit à la très sérieuse formation artistique et musicale Alla Francesca, spécialisée dans le répertoire des musiques anciennes et médiévales un album entier sur le roi troubadour.

Les chansons sont tirées du manuscrit du roy (roi) ou chansonnier du roi, ouvrage d’importance majeure pour la musique médiévale des XIIe et XIIIe siècles qu’il s’agisse de danses, de pièces instrumentales, comme de chansons monophoniques ou polyphoniques.

chanson_musique_medievale_amour_courtois_thibaut_de_champagne_roi_troubadour_chansonnier_alla_francesca

chanson_musique_medievale_amour_courtois_thibaut_de_champagne_troubadour_chansonnier_alla_francesca_Emmanuel_VistorkyL’interprétation qu’ils font de cette pièce d’amour courtois de Thibaut de Champagne, tout en délicatesse avec une harpe pour seul accompagnement et cette voix tout en notes graves vous emportera peut-être à la cour de Champagne ou de Navarre du XIIIe siècle, pour vous y faire revivre les plus belles heures du roi chansonnier. Nous n’avons bien entendu aucune trace de la voix originelle de ce dernier, mais je dois avouer que l’incarnation subtile et toute en élégance qu’en fait le chanteur Emmanuel Vistorky est fort convaincante, en plus d’être très agréable à écouter.

Les paroles de la chanson d’amour de Thibaut le Chansonnier & leur adaptation en français moderne

Por conforter ma pesance
Faz un son.
Bons ert, se il m’en avance,
Car Jason,
Cil qui conquist la toison,
N’ot pas si grief penitance.
E! é! é!

Pour soulager mon cœur lourd
Je compose un air.
Il  serait bon qu’il puisse m’aider
Car Jason,
Celui qui conquit la toison,

Ne subit pas si dure pénitence.
Hé, hé, hé !

Je meïsmes a moi tence,
Car reson
Me dit que je faz enfance,
Quant prison
Tieng ou ne vaut raençon;
Si ai mestier d’alejance.
E! é! é!

Je me fais à moi-même des reproches
Car ma Raison
Me dit que je fais une folie
De rester dans une prison
Où il n’y a de rançon qui vaille.
J’ai donc bien besoin de soulagement.
Hé, hé, hé !

Ma dame a tel conoissance
Et tel renon
Que g’i ai mis ma fiance
Jusqu’en son.
Meus aim que d’autre amor don
Un regart, quant le me lance.
E! é! é!

Ma dame est si reconnue
Et renommée
Que j’ai mis toute confiance
jusqu’en elle

Plus  que l’amour d’une autre,  je préfère
un seul regard,   quand c’est elle qui me le lance.
Hé, hé, hé !

Melz aim de li l’acointance
Et le douz non
Que le roiaume de France.
Mort Mahon!
Qui d’amer qiert acheson
Por esmai ne pour dotance!
E! é! é!

J’aime mieux sa présence
Et son doux nom
Que le royaume de France.
Maudit soit, par Mahomet !
Qui l’Amour veut accuser
En ce qu’il apporte peine et souffrance.
Hé, hé, hé !

Bien ai en moi remenbrance
A conpaignon;
Touz jorz remir sa senblance
Et sa façon.
Aiez, Amors, guerredon!
Ne sosfrez ma mescheance!
E! é! é!

J’ai en moi  mes souvenirs
Qui m’accompagnent ;
Pour chaque jour contempler son image
Et son visage.
Amour, accordez-moi récompense,
Ne souffrez pas mon malheur !
Hé, hé, hé !

Dame, j’ai entencion
Que vos avroiz conoissance.
E! é! é!

Dame, j’espère bien
Que vous saurez faire preuve de discernement.
Hé, hé, hé !

En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.