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Conférence : l’hérésie vue par les historiens avec le médiéviste André Vauchez

heresie_heretiques_histoire_medievale_historiographie_video_conference_andre_vauchez_moyen-age_centralSujet : hérésie, historiographie,  cathares, albigeois, hérétiques, Histoire, méthodologie
Média : conférence
Titre : Les hérétiques  au Moyen Âge, approches historiographiques. 
Période : du Moyen Âge central  à nos jours
Auteur : André VAUCHEZ

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous vous proposons d’aborder le sujet des « hérésies » et des mouvements hérétiques de l’antiquité au Moyen Âge tardif, examiné  du point  de vue critique  et comparatif de  l’historiographie.

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Repenser les hérésies médiévales
en perspective de l’historiographie

S’il est un sujet entre tous qui a questionné et fasciné nombre d’historiens médiévistes, à travers le temps, c’est bien celui des différentes  » hérésies ».

Or, dans le domaine de l’historiographie,  ce thème reste privilégié pour une raison particulière. La notion même « d’hérésie » situe, en effet, déjà l’historien du côté de l’autorité ecclésiastique  puisque c’est cette dernière qui nomme et qualifie ce qui est « hérétique » de ce qui ne l’est pas.  Pour des raisons de neutralité, on serait donc plutôt enclin de nos jours,  et de nombreux historiens le font, à plutôt  utiliser le terme de dissidence pour désigner ces pratiques religieuses qui se différenciaient de la ligne officielle de Rome, tout en prônant tout de même souvent un retour à un christianisme des origines.

Au delà du simple fait qui a longtemps consisté à  prendre, en quelque sorte « au comptant »,  une « hérésie » qui stigmatisait socialement des catégories de pratiques sur des bases théologiques mais aussi forcément idéologiques,  un autre problème  auxquels les historiens ont dû faire face dans l’étude de ces mouvements et Jean-Louis Biget  le souligne bien dans ses travaux sur « l’hérésie » cathare, histoire_medieval_moyen-age_historiographie_methodologie_historique_video_conferencec’est que les sources qui permettent de les analyser sont, bien souvent, des documents laissés par les tribunaux d’inquisition eux-mêmes. De fait, sans totalement les remettre en question, un certain nombre d’historiens nous invite aujourd’hui à les manier avec précaution.

A quel point les  questions soumises aux accusés ne les piégeaient-ils pas dans une grille de réponses déjà préconstruites ? A quel point encore, les « hérésies » dualistes et manichéennes auxquelles s’était frotté Saint Augustin  durant l’antiquité sont-elles venues servir de modèles aux clercs et religieux du Moyen Âge central pour être  mises au service de visées politiques ? Jugements biaisés ou stratégies calculées ? Une fois qualifiée et nommée, l’hérésie n’était-elle qu’un instrument idéologique au service d’intérêts « corporatistes » ? Voilà les questions que tout historien sérieux soulève nécessairement, aujourd’hui, face à  ce délicat objet d’étude.

Au delà, penser « l’hérésie » en historiographie pour tenter de la reconstruire de manière objective  est  un exercice  qui permet de bien comprendre le mouvement et les avancées de la science historique dans son approche méthodologique comme dans son nécessaire recul critique. A travers son analyse critique des mouvements hérétiques,  Andre Vauchez  nous invite à une belle leçon d’Histoire sur l’Histoire.

Conférence: hérésies et hérétiques
dans l’Occident médiéval

La conférence  sur l’historiographie n’étant plus disponible  pour des raisons inconnues, depuis ce jour sur le site  de l’Ecole nationale des Chartes et en espérant que cela soit temporaire, nous vous présentons ici une autre conférence donnée par André Vauchez sur le même sujet. Nous laissons tout de même temporairement le lien vers la conférence  que proposait alors l’ENC en espérant qu’il soit restauré dans le temps.

Conférence alternative : « La Marche de l’Histoire, France inter
Les hérétiques du Moyen Âge, André Vauchez (nov 2014).

Si difficultés, lien vers le même Podcast sur le site de France Inter

André Vauchez, portrait d’un historien médiéviste et d’un académicien français

Formé à l’école normale supérieure, reçu premier à l’agrégation en Histoire, André Vauchez a fait de sa spécialité l’histoire de la spiritualité et de la Sainteté au Moyen Âge, et de manière plus large, le christianisme médiéval. Depuis sa thèse sur l’histoire de la canonisation et de la sainteté à la fin du Moyen Âge, on lui doit un certain nombre d’ouvrages sur  le sujet dont un sur heresies_heretiques_histoire_medievale_historiographie_video_conference_andre_vauchez_moyen-age_central Saint François d’Assise qui lui a valu le prix chateaubriand en 2010. Il a aussi contribué à des ouvrages d’ordre plus général sur le monde médiéval et son Histoire du Moyen Âge, coécrit avec le médiéviste Robert Fossier (1927-2012), lui a également valu le prix Balzan en 2013.

Sur le sujet de l’hérésie, il a publié en  2014,  « les hérétiques au Moyen Âge : Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ? ». Il y revisitait l’histoire des mouvements hérétiques pour y faire tout à la fois le portrait de l’église et de ses intentions, mais aussi celui des mentalités médiévales sous-tendues par ces mouvements.

andre_vauchez_conferences_histoire_historiographie_historien_medieviste_heresies_christianisme_medieval_moyen-age_centralProfesseur émérite des universités, André Vauchez  a également été directeur de l’Ecole Française de Rome et est encore membre, depuis 1998, de l’Académie des inscriptions et des belles lettres, dont il fut même le président en 2009.

 Sa participation  et ses travaux dans le domaine de l’histoire médiévale et l’histoire du christianisme lui ont valu de recevoir  le titre d’officier de la légion d’honneur,  celui de commandeur de l’ordre des palmes académiques et encore celui d’officier de l’ordre national du mérite. Hors de France, ses contributions et ses publication sont largement reconnues. Il est en effet Docteur Honoris Causa de l’université de Genève, Commandeur de l’ordre national du mérite de la république italienne et membre de plusieurs académies à l’étranger (Italie, Tunis, Vatican, Belgique). Très actif dans son domaine, il y fait autorité et il est encore membre de la British Academy et correspondant de la Medieval Academy of America. Ajoutons pour finir qu’il dirige la revue Mabillon,  revue internationale consacré à  l’histoire et la littérature religieuse.

Vous l’avez compris, il s’agit là d’un prestigieux intervenant qui maîtrise parfaitement son sujet et c’est un grand plaisir de vous faire découvrir ici cette conférence, autant que son parcours autour de l’histoire médiévale.

En vous souhaitant un excellente journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com.
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

La résonance du moyen-âge chrétien et de ses valeurs, selon le grand Carl Jung

Sujet : citation moyen-âge, Carl G. Jung,   psychologie, histoire, monde médiéval, moyen-âge chrétien.

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Bonjour à tous,

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour le cas où nous doutions encore de l’ancrage et de la résonance du moyen-âge chrétien jusque  dans notre monde moderne et jusque dans les couches les plus profondes  de notre  psyché, cette citation du grand  Carl Jung (1875-1961)   vient aujourd’hui nous le rappeler.  Et si certains aspects de cette réalité sont même quelquefois descendus sous le seuil de notre visibilité,  les faits demeurent, on ne peut  simplement effacer  d’un simple coup de gomme  plus de  mille cinq cents ans d’histoire.

« Notre mentalité tout entière, nos conceptions des choses sont nées du moyen âge chrétien, qu’on le veuille ou non. Le « siècle des lumières » n’a rien effacé; l’empreinte du christianisme se retrouve jusque dans la façon dont l’homme voulut rationaliser le monde. La vision chrétienne du monde est, par suite, une donnée psychologique qui échappe aux explications intellectuelles. C’est un passé qui, dans ses traces et ses conséquences, sera, comme tout passé, un éternel présent. Nous sommes, une fois pour toutes marqués, au coin du christianisme. Mais il n’en est pas moins vrai que nous portons également le signe de ce qui l’a précédé. »
C.G. Jung, (1875-1961), L’Homme à la découverte de son âme.

En vous souhantant une merveilleuse journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses  formes.

Saint-Augustin d’Hippone, naissance d’une philosophie chrétienne à l’aube du moyen-âge

moyen-age_chretien_saint_augustin_philosophie_monde_medievalSujet :  réflexions, philosophie, raison, citations médiévales, Saint chrétien, moyen-âge chrétien, théologie. mystique chrétienne.
Auteur : Saint-Augustin d’Hippone (354-430)
Période :  aube du moyen-âge, fin de l’antiquité
Ouvrages : les confessions, la cité de Dieu, De la trinité.

“Les hommes s’en vont admirer la cime des montagnes, les vagues énormes de la mer, le large cours des fleuves, les côtes de l’océan, les révolutions et les astres, et ils se détournent d’eux-mêmes.”
Saint-Augustin d’Hippone (354-430) – Les confessions

Bonjour à tous,

P_lettrine_moyen_age_passion copiahilosophe, théologien, brillant orateur, auteur confirmé  et grand mystique chrétien de la toute fin de l’antiquité, par les réflexions et les nombreux écrits qu’il léguera, Saint-Augustin influencera de manière profonde le moyen-âge chrétien. Au delà du monde médiéval, il restera même, jusqu’à nos jours, un grand auteur de référence de la théologie chrétienne et de son enseignement, même si les conceptions de Saint Thomas d’Aquin viendront à partir du XIIIe siècle quelque peu atténuer l’influence augustinienne. Sans prétendre faire ici l’hagiographie d’Augustin d’Hippone,  l’oeuvre, l’homme autant que son influence ne pouvant être traités  dans le cadre d’un seul article,  il est tout de même important d’en dire quelques premiers mots,

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Eléments de biographie

Une vie de bonheur, n’est-ce pas la chose que tout le monde veut et quepersonne au monde ne refuse? Mais où l’a-t-on connue pour la vouloir tant? Où l’a-t-on vue pour en être si épris?
Saint-Augustin d’Hippone (354-430) – Les confessions

Issu d’une famille de petits propriétaires fonciers romains, Saint Augustin naît en 354, près de la fin de l’Antiquité, dans  la ville de  Souk-Ahras  sur le territoire de l’Algérie actuelle, appelée alors Thagaste. Il  mourra 76 ans plus tard, en 430 à Annaba, l’Hippone d’alors. Durant les années de sa vie et notamment durant son ministère, Rome connaîtra de nombreuses crises sous l’impulsion des incursions medieval_frisure_decoration_ornement_moyen-age_passionbarbares et bien que se tenant en Afrique, Augustin se tiendra toujours proche et  à l’écoute des problématiques de l’Eglise Romaine.

Dans un IVe siècle  qui voit triompher et s’officialiser la religion chrétienne comme religion unique de l’Empire romain, les écoles de pensée philosophiques et  les débats théologiques essaiment, et avec eux, l’interprétation des textes et les grandes questions qu’elle soulève: manichéisme, néo-platonisme, pélagianisme, donatisme, arianisme. Au fil de sa vie,  la pensée de Saint-Augustin se définira par ses propres expériences personnelles et par les écoles philosophiques l’ayant influencées, autant que par les détracteurs de l’Eglise catholique ou les différents schismes auxquels sa charge d’évêque le conduira à faire face. Ces tensions dogmatiques et philosophiques lui permettront d’affiner sa propre vision de la conversion, autant que de se prononcer sur la place de l’homme  face au divin et face au monde, dans sa solitude comme dans ses cités.

Portrait de Saint-Augustin d’Hippone attribué à Caravaggio début XVIIe siècle (1600)

Les questionnements de l’homme et du divin

« Cependant, si faible que soit l’esprit humain, vicié par le péché, l’âme humaine, toujours raisonnable et intelligente… parce qu’elle a été faite à l’image de Dieu, peut, à l’aide de la raison et de l’intelligence, comprendre et voir Dieu »
Saint-Augustin d’Hippone (354-430) – De la trinité

A la frontière de la philosophie et de la théologie, on glose alors, durant ces IVe, Ve siècles autour de la relation de l’homme au divin, mais aussi de l’homme au monde et les questions sont multiples.

Elles touchent la philosophie, comme la spiritualité : comment articuler foi et raison?  Quel est la part de Dieu dans l’homme? Peut-il  être saisi par l’esprit? Fait de chair et de matière (impure?) l’homme est-il condamné à contenir le mal en lui ou en être  le foyer, contre la perfection divine de l’univers, comme les manichéens le pensent alors? Peut-il s’élever vers le divin sans renoncer totalement au monde ou se mortifier? Quelle est la place du choix dans le processus et le long chemin qui conduit à  la pureté? En tant que créature de Dieu, ne la contient-il pas?   Son libre arbitre seul peut-il suffire à le faire adhérer au bien et à l’affranchir du  mal? Et finalement, à travers tout cela, on s’interroge sur la manière dont l’homme peut s’inscrire dans le dessein divin et y prendre sa place.

Saint-Augustin d'Hippone, vu par Sandro Boticelli (1445-1510)
Saint-Augustin d’Hippone, vu par Sandro Boticelli (1445-1510)

Tout au long de son ministère et à toutes les questions posées par la philosophie mais aussi par des théologiens menaçant l’église de leurs interprétations et donnant lieu aux premières hérésies, Saint-Augustin apportera la contradiction  et, avec elle, la vision d’une conversion et d’une élévation faite d’une mélange entre psychologie, raison et œuvre divine, Sans démystifier l’importance des desseins et de la grâce divine à l’œuvre dans la conversion et tout en leur laissant leur part d’insaisissable et de mystère, il brossera le portrait d’une alchimie divine qui opérera le bien à travers l’homme, pour peu que ce dernier l’appel de ses vœux et soit persévérant.  Se faisant, ce grand penseur, que l’on a souvent à juste titre désigné comme l’un des premiers philosophes chrétiens, se prononcera sur l’importance de l’homme,  de sa raison et de ses choix au sein du destin divin.

Au delà de tous ces questionnements, Saint-Augustin introduira encore l’idée de Dieu dans la gestion de la cité et la politique et  jettera les bases d’une théocratie qui entendra soumettre le pouvoir medieval_frisure_decoration_ornement_moyen-age_passionpolitique au divin et à ses représentants sur terre, comprenez l’Eglise et les  papes.

“Ne t’en vas pas au dehors, rentre en toi-même; au cœur de la créature habite la vérité”
Saint-Augustin d’Hippone (354-430) –  Du maître.

Relations entre grâce et Salut, questionnement sur la liberté humaine et affirmation de la nécessité de recherches introspectives articulant foi et raison pour retrouver  le chemin qui mène au divin dans une incessante quête de pureté, cité de Dieu contre cité des hommes, et tant d’autres thèmes encore,  ce qui deviendra  après Saint-Augustin l’augustinisme sera longtemps enseigné comme base de la philosophie. Et jusqu’à la redécouverte d’Aristote et les réflexions de Thomas d’Aquin au XIIIe siècle, les écrits  et les pensées de l’évêque d’Hippone influenceront grandement le moyen-âge chrétien et la manière de penser la relation de l’homme au divin.  Plus tard, dans le courant du XVIe siècle, ses pensées auront encore une grande influence sur le luthéranisme et la naissance du protestantisme. A ce jour, il demeure encore par son leg et ses œuvres une source d’inspiration et de réflexion pour les pères de l’église comme pour les philosophes chrétiens ou non d’ailleurs.

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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Des prélats égarés et de la mauvaise utilisation du pouvoir, sous la houlette du Jean de Meung

Une citation médiévale Jean  De Meung, moyen-âge central

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Bonjour à  tous,

O_accent_lettrine_moyen_age_passion joie cruelle et fallacieuse de la citation hors contexte,  nous voici encore au pied du Codicille du bon maître Jean de Meung, alias  Jean Clopinel ,  grand co-auteur du Roman de la Rose et érudit du  XIIIe siècle, pour nous délecter de sa sagesse toute médiévale.

Et dans ce codicille qu’il nous lègue, appendice d’un autre testament qu’il a rédigé par ailleurs, il fustige de son verbe et sans complaisance,  ses contemporains et,  par dessus tout, les religieux ou même les clercs savants. En l’occurrence dans cet extrait que nous vous proposons aujourd’hui en forme de citation, il s’adresse plus précisément aux chefs de l’église et aux prélats: abbés et évêques. Satire? peut-être un peu. Sermon, sans aucun doute.  Mais  comme tant d’autres auteurs le feront frise_vent_deco2 durant ce moyen-âge central et ce XIIIe siècle, c’est en homme pieu, soucieux de religion et de salut de l’âme, autant que de justice  qu’il s’exprime. Il ne cherche donc pas à mettre le feu aux poudres, (ce qui serait en plus un peu anachronique pour l’époque) mais plutôt à ramener dans la juste parole et,  plus encore, la juste pratique les brebis égarées de la haute hiérarchie de  l’Eglise.

Pourtant, oublieux un instant du contexte, comme elle est grande la tentation, en ne prenant que ces quatre pieds de vers, de les étirer un peu et d’en faire une morale du bon ou plutôt du mauvais exercice du pouvoir sous toutes ses formes, et de sauter,  allègrement hors de l’église et hors du temps :


“Se tu veulx mal user de ta grant seigneurie,
Se povres gens te foulent*, je ne m’en merveille mye;
Car quant la congnoissance est trop ensevelie,
Droiz et Dieu se consent que telz gens t’humilie.”
Jean de Meung (1250-1305) Le Codicille

« Si tu veux mal user de ta  grande seigneurie,
Si pauvres gens te  foulent, point ne m’en ébahis,
 car  quand la connaissance est trop ensevelie,
Justice* et Dieu s’accordent que tels gens t’humilient. »

*justice naturelle, nature,


Mais avant de nous reprendre par quelques médiévistes que notre glissement conceptuel et temporel  ferait soudain sortir légitimement de leurs gonds, empressons-nous de revenir au contexte et  au sens étroit  de ces vers de Jean De Meung.  Comme nous le disions, il s’adresse ici clairement au prélats et les enjoint d’être justes envers leurs propres clercs tout autant qu’envers les gens du simple. On trouvera, un peu plus haut dans son codicille, les lignes  suivantes qu’il leur adressent encore:

« Sçavoir vous appartient com chascun se moyenne,
Soyent clercs, soyent laiz, soyent communs ou moyenne »

frise_vent_deco2 Et pour ramener encore dans le giron d’une pratique plus proche de leur mission première,  ces ecclésiastiques dévoyés  par leur propre « fortune » et leurs propres richesses, autant que par les jeux de séduction de cour et de pouvoir, il  leur  dira aussi  dans le  même passage :  « Tout est perdu fors ce qu’on fait en charité; »

Difficile de ne pas  lire, en filigrane, dans ce sévère rappel à l’ordre de la part de l’auteur médiéval, la marque de ce même mouvement qu’on retrouvera encore dans les fabliaux, ou dans ces doigts qui pointeront les richesses des moines blancs ou celles des évêques, dans un XIIIe siècle qui mesure la distance laissée entre les petites gens et certains dignitaires de l’église, véritable caste aristocratique  affichant les marques ostentatoires de  pouvoir et d’argent,  au point d’être même rappelés ici par l’auteur à ses devoirs élémentaires de charité. 

En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
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