Sujet : poésie médiévale, fable médiévale, langue d’Oil, vieux français, anglo-normand, auteur médiéval, ysopets, poète médiéval. Période : XIIe siècle, moyen-âge central. Titre : Dou Cheval qui s’afola d’un prei Auteur : Marie de France (1160-1210) Ouvrage : Poésies de Marie de France Tome Second, par B de Roquefort, 1820
Bonjour à tous,
our aujourd’hui, voici une fable courte de Marie de France. C’est finalement une version médiévale de l’adage « l’herbe est toujours plus verte ailleurs », à ceci près que vient s’y ajouter le thème de la « convoitise » même si celle dont il est question ici,
s’exerce à l’égard de ses propres désirs ou volontés.
Concernant le titre Dou Cheval qui s’afola d’un prei, dans le lexique de l’ancien français Godefroy(version courte), Afoler est défini de deux manières: « rendre fou » ou « blesser, meurtrir« . Ce double-sens se prête assez bien au contenu de cette fable et sa moralité.
Dou Cheval qui s’afola d’un prei
de Marie de France
« Uns Chevaus vit herbe qui crut Dedenz un pré ; mais n’aparçut La haie dunt ert enclos li prez ; Au saillir ens s’est eschiflez.
Moralité
Ce funt Plusur, bien le savez ; Tant cunveitent lur vulentez Ne voient pas qu’ele aventure En vient après pesans è dure. »
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Un cheval vit l’herbe qui croissait Dans un pré mais point ne vit Autour du pré, la haute haie ; Voulant sauter, il s’est meurtri.
Moralité
Ainsi font certains, on le sait, Qui tant convoitent (suivent) leurs volontés Qu’ils ne voient pas que l’aventure En sortira, triste et dure.
En vous souhaitant une belle journée.
Frédéric EFFE
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Sujet : poésie médiévale, fable médiévale, langue d’Oil, vieux français, anglo-normand, auteur médiéval, Phèdre, ysopets, poète médiéval. Période : XIIe siècle,moyen-âge central. Titre : Dou Chamel è del Puche. Le chameau & la puce. Auteur : Marie de France (1160-1210) Ouvrage : Poésies de Marie de France Tome Second, par B de Roquefort, 1820
Bonjour à tous,
our changer un peu des fables d’Eustache Deschamps en voici une de la poétesse des XIIe, XIIIe siècles Marie De France. Bien que vivant en Angleterre, cette dernière écrivit dans une langue d’Oil teintée de formes dialectales anglo-normandes et elle est, de ce fait, considérée comme une des premières auteur(e)s françaises. D’autres femmes l’ont précédé sur le terrain de l’écriture, comme Héloise, mais elles s’y étaient exercées en latin.
Au titre de son legs littéraire, Marie de France a laissé trois grandes oeuvres :
Un recueil de lais adaptés de légendes ou de contes bretons et celtiques. Elle apportera ainsi sa contribution à la matière de Bretagne en mêlant courtoisie et créatures fantastiques, ou merveilleuses.
Une traduction du Purgatoire de Saint-Patrice, le Tractatus de Purgatorio Sancti Patricii du moine cistercien Henry de Saltrey; c’est un récit qui relate le voyage au purgatoire d’un chevalier Irlandais pour expier ses péchés.
Et enfin un recueil de fables adaptées d’Esope et de Phèdre qui est également le premier ysopet connu historiquement en langue française. C’est de ce dernier ouvrage de la poétesse que provient le texte du jour.
Dou Chamel è del puche
dans la langue d’Oil de Marie de France
ette fable est tirée de l’oeuvre de Phèdre (15-50 av JC): Pulex et Camelux.Ce dernier a repris en grande partie les fables d’Esope dans ses écrits, mais celle-ci compte, semble-t-il, au nombre de ses créations originales. Elle traite de la vanité de ceux qui, dans l’ombre des puissants, finissent par se penser plus importants aux yeux de ces derniers, qu’ils ne le sont en réalité. Quatre siècles après Marie de France, Jean de la Fontaine en tirera, quant à lui, dans un tout autre style et déroulement, le rat et l’éléphant.
Cette fois-ci et pour changer, nous faisons suivre après la version originale, une adaptation libre, plutôt qu’une traduction littérale.
Une Puce, ce dit, munta Sor un Chameul, sel chevalcha Deci à une autre cuntrée ; Dunc s’est la Puche purpencée Si a mercié le Camoil, Ki si soef dedens sun poil L’aveit ensenble od li portée Jamès sans li ne fuit alée. Par sun travoil le servereit Mult volentiers s’ele poveit. Li Cameus li ad respundu K’unques de li carkiez ne fu: Ne ne sout qu’ele fut sor lui Ne qu’ele li feist nul anui.
Ainsi vet de la puvre gent Se as Rikes unt aproichement, Forment les cuident currecier Damaige faire et mult charger.
Du chameau et de la puce Adaptation français moderne
Une puce, un jour, monta Sur un chameau et chevaucha Vers de nouvelles contrées ; Leur long voyage achevé
La puce se piqua bientôt De remercier le chameau Qui, bien gentiment, dans sa laine l’avait porté en terre lointaine, « Sans vous je n’aurais pu le faire. Comment puis-je vous satisfaire ? Je vous servirais volontiers Par tout travail, si je pouvais » Étonné de la trouver là, Le chameau répondit, narquois Qu’il n’avait pas senti son poids ou même noté sa présence, ni le signe de son existence.
Ainsi va-t’il des petites gens Quand ils s’approchent des puissants Leur prétention va cheminant. Bien vite, ils se croient importants Pensant pouvoir leur faire ombrage Ou leur causer quelques dommages.
En vous souhaitant une excellente journée.
Frédéric EFFE
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Sujet : poésie médiévale, morale, satirique, ballade, moyen français, fable, ingratitude Période : moyen-âge tardif, XIVe siècle Auteur : Eustache Deschamps (1346-1406) Titre : « le paysan et le Serpent» Ouvrage : Poésies morales et historiques d’Eustache Deschamps , Georges Adrien Crapelet (1832)
Bonjour à tous,
oici, pour aujourd’hui, une nouvelle fable médiévale à la façon d’Eustache Deschamps. Comme on le verra, elle n’est pas sans rappeler le fabliau du pêcheur (ou fabliau des deux compères), que nous avions publié ici il y a quelque temps et dont nous avions même proposé une lecture audio.
Il y était question du peu de gratitude d’un homme manquant de se noyer, et qui, sauvé des eaux par un pêcheur charitable et étant malencontreusement blessé à l’oeil pendant l’opération, finissait, après avoir largement goûté à l’hospitalité de son bienfaiteur, par l’attaquer devant le tribunal pour en obtenir réparation. Sous la forme d’un proverbe alors bien connu du moyen-âge, et même au delà de la France d’une partie de l’Europe médiévale, la morale du fabliau restait implacable:
Raember de forches larron Quant il a fait sa mesprison, Jamès jor ne vous amera
Sauvez un larron de la potence Une fois qu’il a commis son crime Il ne vous aimera jamais pour autant
En fait de larron, la fable du jour met en scène un serpent et elle adresse plus largement l’ingratitude sous toutes ses formes. Elle fait partie des ballades de moralité de Eustache Deschamps et de ses poésies critiques dont il avait le secret.
A l’image des autres fables de l’auteur médiéval (voir Le Corbeau et le renard et encore les Souris et les Chats) celle-ci lui a été directement inspirée par Esope (Le Laboureur et le Serpent). Elle a été aussi été reprise par La Fontaine, quelques siècles plus tard, sous le titre Le villageois et le serpent. On se souvient de la morale enlevée qu’en tirait ce dernier :
Il est bon d’être charitable, Mais envers qui ? c’est là le point. Quant aux ingrats, il n’en est point Qui ne meure enfin misérable.
Jean De Lafontaine – Le villageois et le Serpent
Dans le style de la ballade qu’il affectionne particulièrement, Eustache Deschamps oppose ici à une morale finale un joli vers qui scande la poésie tout du long et qui, au passage, invite à réfléchir par son « on » inclusif, même s’il ne l’est, au fond, pas tant que ça, pour l’auteur au moins : « Mais on rent mal en lieu de bien, souvent. »
Ballade : le paysan et le Serpent
d’Eustache Deschamps
J’ay leu et veu une moralité Où chascuns puet assez avoir advis, C’uns païsans, qui par neccessité Cavoit terre, trouva un serpent vis Ainsis que mort ; et adonques l’a pris, Et l’apporta ; en son celier l’estent. Là fut de lui péus* (de paistre, nourri, reconforté), chaufez, nourris : Mais on rent mal en lieu de bien, souvent.
Car li serpens , plains de desloyauté, Roussiaulx* (traître), et fel* (perfide,félon), quant il se voit garis Au païsant a son venin getté ; Par lui li fut mal pour bien remeris : Par bien faire est li povres homs punis, Qui par pitié ot nourri le serpent. Moult de gens sont pour bien faire honnis : Mais on rent mal en lieu de bien, souvent.
C’est grant doleur quant l’en fait amisté A tel qui puis en devient ennemis ; Ingratitude est ce vice appellé , Dont pluseurs gens sont au monde entrepris, Rétribuens le mal à leurs amis, Qui leur ont fait le bien communément. Ainsis fait-on; s’en perdront paradis : Mais on rent mal en lieu de bien, souvent.
En vous souhaitant une très belle journée.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com. A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.