Sujet : musée, figurines historiques, artisans d’art, figurines d’art, passionnés, passion. Histoire, reconstituteurs. lieu d’intérêt Période : de l’antiquité à la première guerre mondiale, nombreuses pièces du moyen-âge central à tardif. Lieu : Musée de la figurine, le Souffle de l’Histoire, centre historique du Bourbonnais. Adresse :Le Champ de la Garde, Droiturier, Allier, Auvergne-Rhône-Alpes.
Bonjour à tous,
l y a bien des manières de vivre et partager une passion pour l’Histoire. En dehors des oeuvres littéraires, illustrées ou cinématographiques, des reconstitutions en 3D, ou même encore des compagnies et mesnies de reconstituteurs qui se piquent de recréer, grandeur nature, des batailles médiévales ou des tranches de vie quotidienne du moyen-âge, il existe aussi des espaces où l’artisanat et l’art, à travers le modelage, la sculpture, la peinture et la reconstitution patiente, peuvent redonner vie aux personnages ou aux plus grands moments du passé et nous transporter, émerveillés, au coeur même de l’Histoire.
Nous avions déjà parlé ici du travail d’orfèvre de Pascale Laîné autour de ses maquettes médiévales et nous voulons aujourd’hui vous entraîner dans l’univers magique de deux autres artisans d’art : Hervé et Marie Maneval, créateurs et conservateurs du Musée de la figurines historiques d’Art : « le souffle de l’Histoire », à Droiturier, dans l’Allier.
Une collection de figurines d’art unique
epuis 30 ans, ses deux artisans passionnés façonnent de leurs mains d’incroyables figurines historiques, reconstituées minutieusement, à l’appui de sources documentaires d’époque, et mises en scène dans des dioramas, au coeur d’événements qui ont fait l’Histoire de France. Il faut insister sur le fait que nous sommes ici dans le domaine tout à fait à part, de la figurine d’Art puisqu’en plus de faire l’objet de toutes les attentions, chaque pièce présentée est unique. Du côté historique, la période couverte va de l’antiquité à la première guerre mondiale mais le moyen-âge y trouve une large place : des croisades à la guerre de cent ans et au plus funeste jour de la bataille d’Azincourt, en passant par d’autres scènes épiques ou encore d’autres chevaliers célèbres du monde médiéval, en provenance du bourbonnais ou d’autres provinces.
Du point de vue de sa taille, la structure s’étale sur trois salles et sur plus de 120 m2. La figurine d’art ayant l’avantage d’occuper peu d’espace, vous trouverez là l’une des plus belles collections qui soit dans ce domaine.
En plus de la découverte de cette exposition totalement originale dans son entier, la visite vous permettra de contempler près d’une centaine d’armes d’époque, mais encore des documents, tableaux et livres anciens, des armoriaux et d’autres raretés historiques uniques.
Vous y apprécierez également la qualité d’accueil et la passion autant que l’érudition de ses guides, auront tôt fait de vous transporter au coeur d’un grand voyage à travers les siècles. Au passage, vous y trouverez aussi quelques éclairages sur la réalisation de ces petites merveilles artistiques qui se tiennent, avec l’Histoire, au centre de leur passion.
Ajoutons encore que si Marie est plus spécialisée dans la réalisation des oeuvres, Hervé Maneval est aussi, de son côté, un expert attaché à l’évaluation de pièces historiques et un découvreur de trésors cachés. A ce titre, il est même conseiller de plusieurs commissaires priseurs. Vous pouvez donc compter sur lui quand il s’agit de prendre l’Histoire au sérieux.
Collections privées et travail à façon
En plus de la collection exposée au musée, ces deux artistes proposent encore la réalisation sur mesure de pièces à façon et sur commande: figurines, personnages, dioramas et scènes historiques, ou même encore tableaux, à destination de collectionneurs privées: grandes familles désireuses de faire revivre leurs prestigieux aïeux mais encore institutions ou monuments historiques soucieux de valoriser leur histoire et leur patrimoine, à travers les personnages ou événements qui les ont fondées, côtoyées ou marquées.
Pour plus d’informations sur le musée de la figurine historique d’art de Droiturier, voici les liens utiles : Site officiel – Facebook – Twitter
En vous souhaitant une très belle journée.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.
Sujet : poésie, littérature médiévale, poète médiéval, Bourgogne, poète bourguignon, Bourgogne médiévale, poésie réaliste, temps, Période : Moyen Âge tardif, XVe siècle Auteur : Michault (ou Michaut) Le Caron, dit Taillevent ( 1390/1395 – 1448/1458) Titre : Le passe-temps
Bonjour à tous,
ous parlons aujourd’hui du Passe-temps de Michault le Caron dit Taillevent. C’est un poème assez long, six-cent cinquante et un vers et quatre vingt treize strophes pour être très précis et comme c’est aussi une véritable perle de poésie du XVe siècle, plutôt que d’en livrer quelques extraits épars, ou même de le publier en un seul bloc sans aucune explication, nous avons préféré le prendre dans l’ordre et publier ici les onze premières strophes, en vous fournissant quelques clés de vocabulaire et de lecture.
Œuvre d’anthologie ?
S’il est toujours délicat de souligner une partie d’une œuvre d’un auteur comme la plus importante sans prendre le risque de déprécier tout le reste, on peut à tout le moins constater que le passe-temps est une des poésies de Michault Taillevent qui aura le plus survécu au temps. Disons cela toute proportion gardée car la postérité n’a pas réservé à ce poète médiéval la réputation qu’elle a pu concéder à d’autres et ce poète médiéval est encore aujourd’hui étudié dans un cercle qui concerne tout de même plus des spécialistes de littérature du moyen-âge tardif ou renaissant que le grand public. Il en fut semble-t-il autrement de son temps, d’ailleurs la présence de ce passe temps dans un nombre assez important de manuscrits l’atteste.
Pour mesurer encore le succès de cette poésie auprès de ses contemporains, on apprendra avec Pierre Champion (Histoire poétique du XVe siècle Tome 1, ed 1966) que l’expression « Contempler le passe-temps de Michault » a même été utilisée à l’occasion par certains auteurs, comme une locution proverbiale :
« … Faulte d’argent a tous propos lui fault D’en brief ravoir a tousjours esperance En contemplant le Passe Temps Michault…
Henri Baude . Ballade du gorrier bragard.Pierre Champion(opus cité)
Pierre Chastellain, autre poète du XVe siècle, (proche de Michault et peut-être même disciple de ce dernier?) publiera d’ailleurs entre le passe-temps et avant le testament de Villon, un contre passe-temps en réponse à notre auteur. Cette poésie de Chastellain qui ouvre sur un hommage à Michault et que l’on sait écrite après 1440 et peut-être même autour de 1448, permet d’ailleurs de déduire que le passe-temps dont on ne connait pas la date de publication précise, lui est forcément antérieur, même si c’est sans doute de peu. Sachant que Michault ne semblait plus en fonction à la cour de Bourgogne autour de 1448, on peut supposer qu’il rédigea le passe-temps autour de sa cessation d’activité, après ou même alors qu’il pensait bientôt ne plus l’être.
« En contemplant mon temps passé Et le passe temps de Michaut, J’ay mon temps perdu compassé Duquel a present bien m’y chault. Mais apres, souvent me souppe Ire De temps perdu, dont fort me deulx »
Pierre Chastellain – Le temps perdu.
On dit du passe-temps, et au moins de certaines de ses strophes qu’elles inspirèrent peut-être directement à Villon quelques vers de son testament. Il est vrai que certaines ressemblances sont assez troublantes. Ce sont en tout cas deux oeuvres contemporaines à quelques années près qui approchent magistralement la question du temps mais qui se signent aussi par l’usage du « je » ou d’un « moi » poétique qui soliloque et livre ses douleurs et ses drames tout au long de leur vers. Pierre champion (opus cité) dira même que le passe-temps de Michault est en terme de facture, pratiquement la seule oeuvre que l’on puisse rapprocher de celle de Villon, dans le courant du XVe siècle.
Sur ces similitudes (et leurs limites) entre le temps dans les deux oeuvres, et leur usage du « Je » poétique, quelques experts de littérature médiévale se sont penchés dans le détail sur le sujet et l’on pourra utilement s’y référer : Poétiques du quinzième siècle – Situation de François Villon et Michault Taillevent, Jean-Claude Mühlethaler (1983) ou encore Villon at Oxford: The Drama of the Text. Proceedings of the Conference Held at St Hilda’s College,Michael Freeman & Jane H. M. Taylor (1996) .
Emergence d’un « je » poétique au XVe siècle
Simple passe-temps comme on pouvait considérer alors la poésie (tout en la prenant très au sérieux), ces vers de Michault autour du temps qui passe et « jamais ne retourne » et qui mettent au coeur de leur poésie ce « Je », sont, selon certains auteurs, dont Robert Deschaux, ( Un poète bourguignon du XVe siècle, Michault Taillevent, 1975),annonciateurs de nouvelles formes poétiques du XVe plus subjectives et plus expressives dont Villon se fera l’un des représentants les plus éclatants.
Ayant dit cela, on se souviendra tout de même, avec Michel Zink que le « Je » n’est pas une invention propre de la poésie du XVe siècle, même s’il fait un peu l’effet d’une exception hors des thèmes amoureux dans les siècles précédents. On n’a pu, en effet, en trouver les traces dans la poésie des goliards, mais aussi chez un Rutebeuf au XIIIe siècle (qu’on a d’ailleurs parfois décrit lui-même comme un, sinon « Le », précurseur dans ce domaine), ou encore, contemporain de ce dernier chez un Colin Muset et, plus tard dans le temps, dans certaines ballades du XIVe siècle signées d’Eustache Deschamps .
Le passe-temps de Michault Taillevent,
oeuvre de maturité
Le temps a passé sur le jeune joueur de farces de la cour de Bourgogne et cette poésie est clairement une oeuvre de la maturité. A l’insouciance de la jeunesse et de ses jeux, vient succéder la peur de la vieillesse, autant que celle, plus angoissante encore de la pauvreté. Sans rente et redoutant les affres de la misère, Michault opposera dans des vers poignants le vieillard pauvre et misérable à celui qui a su prévoir. A qui la faute s’il risque de se retrouver bientôt sans rien ? Il s’en prendra à lui-même et à ce temps qu’il n’a pas su dompter. Dans les strophes que nous publions aujourd’hui, il n’entre pas encore aussi loin dans ses développements et pose le cadre.
Comme la déroute, cette poésie n’est, à l’évidence, pas le résultat d’une commande. Sans dénigrer les autres poésies de Michault, on se prend quelquefois à regretter que ses fonctions et son long office au service de Philippe le Bon, à la cour de Bourgogne ne lui aient donné plus de temps pour laisser voguer sa plume sur des oeuvres plus personnelles du type de celle-ci. Bien sûr, ayant dit cela, il faut encore être juste et souligner la valeur de témoignage historique qu’il nous a laissé à travers ses autres poésies plus proches du pouvoir, de ses fastes et de ses enjeux.
Au niveau compréhension, ce texte en moyen français présente peu de difficultés. On notera que chaque strophe finit par un locution en forme de proverbe.
Je pensoie, n’a pas sept ans, Ainsy qu’on pensse a son affaire Par maniere d’un passe-temps, Ou si come en lieu de riens faire. Mais a renouer & reffaire Trouvay trop en mes pesans fais: A longue voye* (chemin, trajet) pesans fais.
Et quant j’euz bien partout visé, Il m’ala aprez souvenir De la joye du temp(s) passé Et de la douleur advenir, Ou il me convendra venir, Car ainsi va qu’ainsi s’atourne: Temps passé jamais ne retourne.
Com(m)e j’euz maule & empraint (1) Mes faiz & en mon cuer escript, Pensay ainsy que cilz* (comme celui) qui craint Que j’avoye mon preterit*, (passé) jeune de co[u]rps & d’esperit, Gaste*(perdu, gâché), dont fuz tout esperdu: Ou conseil n’a tout est perdu.
Ou futur gisoit l’aventure De ma douleur ou de ma joye. Autre espoir, n’autre couverture, N’autre remede n’y songoye, Fors qu’en penssant mon frain rongoye En la face de mes ans cours: A mal prochain hastif secours. (2)
De ma jeunesse ou meilleur point, Ainsi que ses ans on compasse, Encores ne pensoye point Comment temps s’en va & se passe En peu d’eure & en peu d’espasse, Et la nuit vient aprez le jour: Contre joye a plaisant sejour.
A celle heure que je vous compte Le temps joieusement passoye. Je ne tenoye de riens compte, A nulle chose ne pensoye, Ou pend file & ou pend soye Qu’on fait aux champs, qu’on fait aux bours: Cuer lyet* (joyeux) ne songe que tambours.
Je n’estoye mort ne målades, Ne fortune ne me troubloit. Je faisoye ditz & ballades, Et le temps mes doulz ans m’embloit*, (me déroba) Et a celle heure me sembloit Qu’il ne me fauldroit jamais rien: De maison neufve viel merrien*. (vieilles planches, vieux bois)
Comme cil quy jeunesse mayne, Pour le temps qui si me plaisoit, Ung moys ne m’estoit pas sepmaine, Ung an qu’un mois ne me faisoit. Mon cuer en riens ne meffaisoit Qu’a maintenir joyeusete: Tousdiz* (toujours) n’est pas joieux este.
Ainsy jeunesse me maintint, Et quant j’euz beaucoup sejourne, Dedens la sienne ma main tint Et dit qu’estoit a ce jour ne Le bien ou j’estoye adjourne.(dans lequel je me tenais) Elle me bailla ce lardon* (raillerie, moquerie): Jeune poucins de peu lardon. (3)
Neantmoins tousjours com(m)e dessus Mon fait en jeu s’entretenoit. Point ne cuidoie estre decus, D’enviellir ne me souvenoit; Et jour aloit, et jour venoit, Et le jour se passoit tousdiz: Quant bergier dort, loup vient tousdiz.
Ainsi dont en jeunesse estoye, Sans tenir rigle ne compas, Et le temps par mes ans hastoye* (de hâter), Que je ne m’en guettoye pas. (guetter. sans que j’y prête attention) Viellesse m’attendoit au pas Ou elle avoit mis son embusche: Qui de joye ist* (de eissir, issir : sortir) en dueil trebusche.
(1) Mouillé et imprégner : remis en mémoire, repasser en revue (2) Quand le mal/la maladie est proche, il faut se hâter d’agir (3) La jeunesse manque d’expérience ou est insouciante,
Sujet : musique médiévale, Cantigas de Santa Maria, galaïco-portugais, culte marial, Sainte-Marie, rose, littérature courtoise, chant médiéval chrétien. Epoque : moyen-âge central, XIIIe siècle Auteur : Alphonse X (1221-1284) Titre : Cantiga 10 rosas das rosas Interprète : Marina Lys(2015) Bonjour à tous,
ous poursuivons ici notre présentation, adaptation et traduction des Cantigas de Santa Maria, qui nous viennent de l’Espagne médiévale du XIIIe siècle et du règne d’Alphonse X le Sage.
Aujourd’hui, c’est une des plus célèbres de ces cantigas que nous abordons : la dixième. Elle est, comme toutes les autres, en galaïco- portugais, elle a pour titre « Rosa das Rosas » (rose d’entre les roses) et c’est une chant allégorique entre la rose, fleur des fleurs de l’occident médiéval et la Sainte vierge. Nous sommes donc à nouveau au coeur du culte marial si prégnant au moyen-âge central, et nous verrons en particulier ici comment cette place réservée à la sainte a pu hériter dans certains textes ou chants chrétiens d’alors, d’aspects tout droit sortis de la littérature profane des XIIe, XIIIe siècles, et notamment de la lyrique courtoise des troubadours et de leur fin’amor (ou fine amor).
Pour parler de cette Cantiga, nous avons choisi une belle version de l’artiste, chanteuse et musicienne Marina Lys que cet article va aussi nous donner le grand plaisir de vous présenter.
La Cantiga Santa Maria 10 : Rosa das rosas par Marina Lys
Marina Lys, chanteuse, musicienne et belle égérie sur la route des fêtes médiévales
ormée au conservatoire de musique d’Orly, Marina Lys excelle autant dans le chant que dans les instruments à cordes ou à archet.
A ses premières passions pour la guitare, du registre Jazz manouche au classique, son goût pour les musiques anciennes et médiévales l’a rapidement conduite à compléter sa formation pour y ajouter, sous la houlette d’artistes et professeurs reconnus dans ce domaine, le chant mais encore des instruments aussi variés que la vièle à archet, le luth, le luthare, le bouzouki irlandais, la flûte et même la harpe ou la harpe-lyre, à l’occasion.
Le travail artistique de Marina évolue des chants chrétiens anciens aux envoûtantes mélopées séfarades du moyen-âge central, en passant par des registres plus variés et folkloriques (tziganes, celtiques ou nordiques) mais toujours inspirés par les musiques anciennes. Entre restitution historique, émotion et adaptations artistiques plus libres, elle déroule encore ses talents vocaux dans un répertoire qui couvre près de dix langues, de l’araméen, à l’hébreu, en passant par le latin, le serbe, le galaïco-portugais, le tzigane russe ou encore le suédois.
A la manière de bien des artistes, trouvères ou trobairitz des XIIe et XIIIe siècles, c’est, pour l’instant, de manière itinérante que Marina a décidé de faire partager sa passion pour les musiques anciennes, bien décidée à les faire découvrir au plus large public. Aussi, c’est dans l’ambiance enjouée d’une belle fête médiévale, dans la fraîcheur et l’atmosphère propice d’une église, ou encore dans un beau jardin,, au milieu d’un parterre de fleurs, que vous pourrez avoir le plaisir de la rencontrer et de découvrir son art.
Elle ne sera d’ailleurs pas toujours seule puisqu’elle a fondé en 2012 la troupe musicale « Jàdys » qui se dédie à un répertoire d’inspiration festif plus ouvert : musiques tzigano-médiévales et danses et chants du monde, au programme. Trois ans après sa création, le travail artistique de la formation a d’ailleurs été salué par la Fédération Française des Fêtes et Spectacles Historiques et lui a valu d’être distinguée comme le meilleur groupe 2014-2015.
Rosa das rosas, les paroles de la Cantiga 10 et leur traduction en français moderne
Questa è di lode a Santa Maria, come è bella e buona e ha gran potere.
Cette Cantiga est une louange à Sainte-Marie, à sa beauté et sa bonté et à son grand pouvoir.
Rosa das rosas e Fror das frores, Dona das donas, Sennor das sennores.
Rose d’entre les roses, fleur d’entre les fleurs Dame d’entre les dames, reine d’entre les reines
Rosa de beldad’ e de parecer e Fror d’alegria e de prazer, Dona en mui piadosa ser Sennor en toller coitas e doores. Rosa das rosas e Fror das frores, Dona das donas, Sennor das sennores.
Rose de beauté et belle apparence Et fleur de joie et de plaisir. Dame de grande piété (miséricorde) Reine pour ôter peines et douleurs Rose d’entre les roses, fleur d’entre les fleurs
Dame d’entre les dames, reine d’entre les reines
Atal Sennor dev’ ome muit’ amar, que de todo mal o pode guardar; e pode-ll’ os peccados perdõar, que faz no mundo per maos sabores. Rosa das rosas e Fror das frores, Dona das donas, Sennor das sennores.
Telle seigneuresse* (reine) doit-on bien aimer Qui de tout le mal nous peut préserver Et peut pardonner pour tous les péchés Qu’on fait dans le monde par mauvais goût ( à mauvais escient) Rose d’entre les roses, fleur d’entre les fleurs
Dame d’entre les dames, reine d’entre les reines
Devemo-la muit’ amar e servir, ca punna de nos guardar de falir; des i dos erros nos faz repentir, que nos fazemos come pecadores. Rosa das rosas e Fror das frores, Dona das donas, Sennor das sennores.
Nous devons l’aimer (beaucoup) et bien la servir Car elle peut nous garder des fautes Et nous faire repentir des erreurs Que nous commettons, nous, pécheurs, Rose d’entre les roses, fleur d’entre les fleurs
Dame d’entre les dames, reine d’entre les reines
Esta dona que tenno por Sennore de que quero seer trobador, se eu per ren poss’ aver seu amor, dou ao demo os outros amores. Rosa das rosas e Fror das frores, Dona das donas, Sennor das sennores.
Cette dame là que je tiens pour reine et dont je veux être le troubadour Si je pouvais obtenir (gracieusement) son amour Je laisserai au démon tous les autres amours Rose d’entre les roses, fleur d’entre les fleurs
Dame d’entre les dames, reine d’entre les reines
Culte Marial et lyrique courtoise
Littérature profane, littérature religieuse
vec cette Cantiga 10 et ses louanges à la Sainte-Vierge, nous nous situons dans le registre du grand chant « adapté » de la lyrique courtoise profane, appliqué au culte marial. Ici, le croyant s’assimile en effet lui-même au troubadour et les sentiments voués à la Sainte viennent pratiquement se calquer sur la lyrique courtoise, ou y être transposés. C’en est même au point que le poète se dit prêt à « jeter au diable » toutes ses autres amours s’il gagnait l’amour de la Vierge.
A partir de son émergence à la fin du XIIe et dans le courant du siècle suivant, c’est une tendance que l’on retrouvera souvent dans le culte marial. Certains médiévistes feront même l’hypothèse que l’entrée de la lyrique courtoise au sein des chants liturgiques et de la littérature religieuse mariale a été une forme de réponse « politique » pour, en quelque sorte, reprendre à son compte les éléments de la littérature profane, tout en proposant une alternative pieuse et acceptable à la Fin’amor, qui, par ses transgressions et ses formes assez clairement adultérines n’était pas tout à fait du goût de l’église. Quelques auteurs parlent de calquage littéral, ou même de « registre parasite » de la littérature courtoise profane, d’autres médiévistes restent un peu plus nuancés et mettent l’accent sur une forme adaptée et recomposée. Sans non plus verser dans la naïveté, peut-être n’y a-t-il pas eu là que des volontés d’instrumentalisation, mais aussi, par moments, quelques élans sensibles de la part des auteurs religieux qui, inspirés par certains éléments de la lyrique courtoise et par certaines de ses valeurs chevaleresques aussi, se mettent au diapason d’une société qui à travers sa littérature et son art, est en train de repenser le sentiment amoureux au coeur même de ses valeurs (1).
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.
(1)Hors de l’Espagne médiévale et des Cantigas de Santa Maria, on trouvera un exemple saisissant de ces questions de transposition de la lyrique courtoise au culte marial, dans l’oeuvre du trouvère et moine bénédictin Gautier de Coinci et on pourra valablement se reporter, comme point de départ, à un article publié en 2010 par Jean-Louis Benoit dans la revue Le Moyen : « La dame courtoise et la littérature dans Les Miracles de Nostre Dame de Gautier de Coinci »
Sujet : monnaies médiévales, économie, histoire médiévale, numismatique, histoire de la monnaie, vidéo-documentaire Période : Antiquité jusqu’au Moyen-âge central (XIIIe siècle) Auteur : Depeyrot Georges Production : CNRS, l’Histoire en Pièces Réalisateur : Fontenoy Philippe . 1999
Bonjour à tous,
uite à notre article d’hier sur les Lombards, ces Marchands banquiers italiens si décriés au Moyen-âge, voici un documentaire produit en 1999 par le CNRS et permettant de mieux approcher l’histoire de la monnaie de l’Empire Romain au XIIIe siècle.
Les monnaies médiévales de Georges Depeyrot et Philippe Fontenoy
Georges Depeyrot, Historien versé dans l’histoire de la monnaie et la numismatique
Georges Depeyrot est un historien spécialisé dans l’Histoire de la monnaie et la numismatique. Il a rejoint le CNRS dés 1982 et il y occupe, aujourd’hui, les fonctions de directeur de recherches. Chercheur affilié à l‘Institut Louis Bachelier, il a encore enseigné et pris une part active aux recherches, dans la cadre de l’Ecole de Hautes Etudes en Sciences Sociales et de l’Ecole Normale supérieure.
Son souci de privilégier une approche historique globale et sa participation à de nombreux programmes de recherche au niveau européen et méditerranéen en font aujourd’hui un grand expert de ses sujets de prédilection.
Membre de nombreux comités scientifiques et comités de gestion et pilotage dans le domaine de la recherche, il est membre honorifique de nombreux instituts archéologiques ou numismatiques en France et à l’étranger, et on lui doit encore la fondation de la Maison d’édition Moneta, dédiée à la publication autour de la numismatique et de l’économie monétaire. Pour plus de détails, vous pourrez trouverez son parcours détaillé ici.
Contributions, publications et ouvrages
Georges Depeyrot est auteur et co-auteur d’une foultitude d’ouvrages très pointus sur l’économie antique et médiévale et sur l’histoire des monnaies, du monde romain au moyen-âge mérovingien et carolingien et central. jusqu’à des périodes plus récentes.
Vous pourrez retrouver sur sa chaîne Youtube d’autres documentaires et vidéos sur le sujet. Voici également quelques liens vers certains de ses ouvrages qui pourraient vous intéresser.