Archives par mot-clé : Moyen Âge tardif

Jeunesse, écarts de conduite et retours de bâton avec Meschinot

Sujet : poésie morale, poésie médiévale, poète breton, ballade médiévale, ballade satirique, auteur médiéval, Bretagne médiévale, grands rhétoriqueurs.
Période : Moyen Âge tardif, XVe siècle
Auteur : Jean (Jehan) Meschinot (1420 – 1491)
Titre : Le baston dont il est bastu
Manuscrit médiéval : MS français 24314 BnF
Ouvrage :  poésies et œuvres de Jean MESCHINOT, éditions 1493 et 1522.

Bonjour à tous,

ous repartons, aujourd’hui, pour les rives du Moyen Âge tardif pour y découvrir une nouvelle ballade morale de Jean Meschinot. Ce poète du XVe siècle occupa diverses fonctions à la cour de Bretagne. Il y fut notamment écuyer et hommes d’armes sous quatre ducs et fut aussi maître d’hôtel de Anne de Bretagne.

L’œuvre et le legs de Jean Meschinot

Son œuvre principale « Les Lunettes des Princes » valut longtemps à Meschinot une popularité posthume qu’atteste le grand nombre d’éditions produites après sa mort. Ce legs fut bientôt éclipsé par la renaissance. On le connaît aussi pour ses 25 ballades contre Louis XI dans lesquelles il emprunta les envois au Prince de Georges Chastellain. Il composa encore d’autres poésies, ballades et rondeaux dont même quelques pièces religieuses.

La poésie grave & vertueuse du banni de liesse

Jean Meschinot se distingue par une poésie morale et satirique qui ne s’épanche guère dans la farce et l’amusement. Quand ses préoccupations ne portent pas sur ses propres misères et déboires, elles vont aux devoirs de la noblesse et à la dénonciation des déviances et du manque de valeurs morales chrétiennes de son temps (abus politiques, cupidité, perfidie, etc…).

Cette œuvre dense et engagée a même valu à Meschinot un surnom qu’il reprend volontiers à son compte : « le banni de liesse ». Il se désigne notamment ainsi, à maintes reprises dans une pièce intitulée « la supplication que fist ledit Meschinot au duc de Bretaigne, son souverain seigneur« . Plus qu’un exercice littéraire, il s’agit d’une requête officielle qu’il déposa auprès de François II de Bretagne suite à un différent l’opposant à un autre noble du nom de Jean de BoisBrassu (1).

La postérité littéraire de Jean Meschinot

Cette gravité et cette mélancolie n’empêcheront pas Clément Marot de rendre un hommage posthume au poète breton dans ses vers, même si la postérité de ce dernier restera finalement de courte durée, à l’échelle de la littérature médiévale française. Après que ses Lunettes des Princes furent éditées dans le courant du XVIe siècle et sa première moitié, l’œuvre de Jean Meschinot fut peu reprise aux temps suivants. Le Moyen Âge entrait dans son hiver littéraire.

Pour ne rien ôter à Meschinot de sa  renommée, ni du prestige de son œuvre, précisons que de 1492 à 1539, on compte 25 éditions de ses Lunettes des Princes, ce qui en fait un vrai best seller, médiéval ou renaissant suivant les préférences de chacun en matière de chronologies.

Bien plus tard, à la fin du XIXe siècle, l’historien et chartiste Arthur de La Borderie fit paraître une belle biographie qui contribua à rediffuser l’œuvre du banni de liesse, en lui donnant un souffle nouveau (op cité). Reste que Meschinot n’a pas, pour autant, la reconnaissance d’un Rutebeuf, d’un Chartier ou d’un Villon pour une œuvre qui garde pourtant de l’intérêt.

Une poésie morale de Jean Meschino sur les écarts de conduite et les retours de bâton

Ballade morale du bâton pour se faire battre

Nous voilà donc rendu à la ballade du jour. En fait de refrain, Meschinot se sert d’un proverbe alors déjà connu depuis plusieurs siècles : « Tel garde et tient en sa maison Le baston dont il est bastu » nous dit il.

Si cette idée est encore en usage en français, sous une forme un peu différente (tendre le bâton pour se faire battre), on la retrouvait déjà dans un vieux poème occitan du milieu du XIIe siècle : « molt i fai grant foldat Cil qui nurrist lo basto ab que·s bat » autrement dit : « Il fait grande folie celui qui porte le bâton avec lequel on le bat”, Aigar et Maurin, chanson de geste provençale (vers 1152). Cet adage continuera, semble-t-il, de circuler en langue française aux siècles suivants et jusqu’au Moyen Âge tardif de l’auteur breton.

Pour Meschinot, cette ballade sera une nouvelle façon d’adresser les valeurs morales chrétiennes. Dans la fougue de la jeunesse, on peut se distraire mais attention à ne pas perdre de vue, son honneur, ni à s’égarer sur les sentiers de l’orgueil ou de la mécréance, au risque d’en payer le prix en retour. Entre plaisir, orgueil et folie, la vertu l’emporte toujours chez l’auteur breton. L’histoire ne dit pas si cette ballade s’adressait à un fils ou une fille de puissant dont il aurait pu avoir l’éducation en charge ? Mais peut-être ne fait-il que nourrir ici le même propos que ses lunettes de princes, en offrant un miroir pour éduquer les puissants.

Exercice de style et réthorique

Au delà du fond, Meschinot étale, dans cette poésie, son goût des pirouettes et des jeux de mots virtuoses : « le fol lye« , « se aise on« , « esbat eu« ,…). Avec le recul du temps, d’aucuns trouveront que le parti-pris alourdit un peu le propos et peut même nuire à la compréhension. D’autres en goûteront la saveur un peu désuète. Dans tous les cas, ces exercices de style sont assez caractéristiques des grands rhétoriqueurs dont Meschinot fut un des représentants reconnus au XVe siècle, avec Henri Baude, Olivier de la Marche, Georges Chastellain et quelques autres.

Aux sources anciennes de la ballade du jour

La ballade médiévale de Jean Meschinot dans le français 24314 de la BnF

Cette pièce fait partie d’une série de poésies qui fait immédiatement suite aux ballades adressées à Louis XI dans les éditions complètes des œuvres de Meschinot.

Du point de vue des sources, vous pourrez la retrouver dans le très coloré manuscrit médiéval Français 24314 de la BnF (à consulter sur Gallica). Pour la transcription en français moderne, nous nous sommes appuyés sur les éditions imprimées de 1493 et 1522.


Ballade morale du retour de bâton
dans le moyen français de Jean Meschinot

Jeunesse mère de folie
Partie adverse de raison
Par plusieurs façons le fol lye
(lie)
Pour le mener a desraison
Commettre luy fait maulx foison
Mais en fin tout bien debatu
Tel garde et tient en sa maison
Le baston dont il est bastu.

La maniere n’est pas jolie
De foloyer
(s’égarer, faire le fou) toute saison
Bien pour chacer mélencolie
En folie honneste se aise on
Mais pour dieu jamais ne faison
Que notre honneur soit rabatu
Car le maulvais a de moeson
(moisson)
Le baston dont il est bastu.

Un orgueilleux a chere lye
(à la mine joyeuse)
Prent peine sans comparaison
Plus que celluy qui s’humilie
En aymant dieu et oraison
Se bien nostre corps or aison
(aisier,satisfaire, mettre à l’aise)
Quand le foul est bien esbatu
(diverti, agité,… )
Son vice est sans aultre achoison
(prétexte, motif)
Le baston dont il est bastu.¨

Prince du jeune nous taison
Ayt mal plaisir ou esbat eu
Il doit hayr plus que poyson
Le baston dont il est bastu.


 En vous souhaitant une belle journée.

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.

Notes

(1) voir « Jean Meschinot, sa vie et ses œuvres, ses satires contre Louis XI », Arthur de la Borderie 1895, Bibliothèque de l’École des chartes.

Un rondeau fataliste d’Eustache Deschamps sur la chance et le sort

Sujet  : poésie médiévale, auteur médiéval,  moyen-français, manuscrit ancien, rondeau, malheur, malchance, chance.
Période  : Moyen Âge tardif,  XIVe siècle.
Auteur :  Eustache Deschamps  (1346-1406)
Titre  :  «Eur et meseur, a tout considerer»
Ouvrage  :  Œuvres  complètes d’Eustache Deschamps, T IV,   Marquis de Queux de Saint-Hilaire (1878)

Bonjour à tous,

ujourd’hui, nous retrouvons Eustache Deschamps, le temps d’un rondeau. Cette courte pièce fera écho à quelques autres ballades déjà croisées chez ce poète et officier de cour du Moyen Âge tardif, sur le thème de la fortune : « eur », « heur » (la chance, le sort, la bonne fortune) et son opposé « meseur » (le malheur, le mauvais sort, la malchance).

Roue de fortune et fatalisme

Comment échapper à la roue de fortune ? Dans les mentalités médiévales, elle tourne inexorablement entrainant, sans distinction, les plus puissants comme tous les autres dans la chute au moment où ils s’en croyaient prémunis, ou faisant, au contraire, monter au pinacle (mais pour combien de temps ?) ceux qui se pensaient condamnés à rester indéfiniment déshérités et malchanceux.

Cette roue du sort aurait-elle arrêté de tourner pour le pauvre Eustache Deschamps ? A maintes reprises dans son œuvre, il nous aura conté ses misères et ses déboires, qu’ils siègent dans l’ingratitude et le manque de reconnaissance de son travail par les puissants, ou encore dans sa pauvreté, son domaine pillé et mis à sac, ou dans la vieillesse qui l’assaille et le trouve sans grand moyen et en santé précaire à l’hiver de sa vie.

Dans le rondeau du jour, on retrouvera notre poète du XIVe siècle résigné et fataliste. L’homme aura beau y faire si fortune ne l’accompagne pas et que le malheur suit ses pas, quoi qu’il entreprenne, il ne fera que se trouver encore plus accablé. A l’inverse, si le sort lui sourit, il aura gagné, quoiqu’il fasse, une sorte d’immunité contre l’adversité. Le propos semble générique mais ne laisse guère de doute sur l’humeur de celui qui tient la plume. Il peut même personnellement témoigner que chacun peut nuire à celui pour lequel le vent de la chance a tourné.

Le rondeau D'Eustache Deschamps accompagné d'une enluminure sur la roue de Fortune tirèe d'un Manuscrit médiéval du XIVe siècle.

Aux sources manuscrites de ce rondeau

Aux sources de cette poésie, nous revenons, une fois encore, au Français 840 de la BnF (consultable sur le site Gallica.fr). Ce manuscrit, daté du début du XVe siècle, est tout entier consacré à Eustache Deschamps. Sans grandes fioritures, il étale sur près de 1200 feuillets, l’œuvre extrêmement prolifique de l’auteur du Moyen Âge tardif.

Pour la transcription moderne de ce rondeau, nous nous dirigeons, à l’habitude, sur le large travail de compilation effectué entre la deuxième moitié du XIXe siècle et le début du XXe par le Marquis de Queux de Saint-Hilaire et Gaston Paris. Vous pourrez donc retrouver cette pièce au Tome IV des Œuvres  complètes d’Eustache Deschamps établies par le bon soin de ces deux auteurs.

La mise en scène de soi dans la poésie d’Eustache

Le rondeau D'Eustache dans le manuscrit médiéval Français 840 de la BnF.

Comme les goliards ou un Rutebeuf l’avaient fait avant lui et comme un François Villon ou un Meschinot y souscriront un peu plus tard, dans son œuvre, Eustache Deschamps ne s’est pas privé de mettre en scène ses propres déboires et les revers de sa destinée.

Dans cette posture du poète qui cible un auditoire, en général, plutôt aristocratique (princes, courtisans, gens de cour, etc…), afin de le prendre à témoin de ses malheurs personnels, on est bien enclin d’imaginer que l’auteur force quelquefois le trait pour s’attirer quelques faveurs. A défaut d’en appeler à des jauges psychologiques mal calibrées, il faut au moins faire le constat qu’Eustache Deschamps s’inscrit ici dans une tradition littéraire qu’il prolonge et étoffe à la lumière de son propre chemin de vie (1).

Dans d’autres textes, la mise en scène de ces traits ira même chez lui jusqu’à l’exagération comique et l’auto-dérision. L’humour prendra alors, des tours physiques et burlesques quand il se couronnera, lui-même, « roi des laids ». Ce n’est pas le cas dans le rondeau du jour dont le ton assez fataliste et impersonnel laisse deviner un Eustache plutôt désabusé face à son propre sort.


Eur et meseur, a tout considerer
dans le Moyen Français d’Eustache

Au monde n’a au jour d’hui que ces deux
Eur et meseur, a tout considerer,
Dont l’un fait bien et l’autre desperer:
Aler partout peu cil qui est eureux
On ne lui peut ne nuire ne grever ;
Au monde n’a au jour d’hui que ces deux
Eur et meseur, a tout considerer.


Maiz bien se gard toudiz le maleureux
Car il ne peut fors meschance trouver :
Chascuns li nuit si puis dire et prouver ;
Au monde n’a au jour d’uy que ces deux
Eur et meseur, a tout considerer,
Dont l’un fait bien et l’autre desperer:

Traduction en Français actuel

A notre époque, tout bien considéré,
seul importe la chance ou le mauvais sort
l’un fait le bien, l’autre le désespoir.
Celui qui est chanceux peut aller en tout lieu
Nul ne pourra lui nuire ni lui faire du tort ;
De nos jours, tout bien considéré,
Seuls comptent la chance ou le mauvais sort.


Mais qu’il se défie bien de tout, le malheureux,
Car, quoiqu’il fasse, il ne pourra trouver que malchance.

Chacun lui nuira, ainsi puis-je l’affirmer et le prouver ;
En notre temps, tout bien considéré,
Il n’y a que la chance ou le mauvais sort qui comptent
l’un fait le bien, l’autre le désespoir
.


Quelques autres poésies médiévales & articles sur le même sujet :
La roue de fortune, Anonyme
Fortune & ses joies, Christine de Pizan
De Fortune me doit Plaindre, Guillaume de Machaut
La paix de Rutebeuf, sur le je & le jeu du poète médiéval

En vous souhaitant une belle journée
Fred
Pour moyenagepassion.com
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(1) Voir l’article François Villon au miroir d’Eustache Deschamps Florence Bouchet Université Toulouse – Jean Jaurès PLH : Patrimoine, Littérature, Histoire, dans Villon à la lettre, articles réunis par Nathalie Koble, Amandine Mussou, Anne Paupert et Michelle Szkilnik,

NB : l’enluminure de l’illustration (roue de fortune) provient du Manuscrit 0264 de la Bibliothèque de l’Institut de Paris. Daté du XIVe siècle, cet ouvrage contient la Consolation de Philosophie texte demeuré anonyme, ainsi que le testament de Jean de Meun et divers autres textes liturgiques. Vous pouvez consulter quelques-unes de ses enluminures sur le site de la bibliothèque.

Ars nova : les déboires amoureux du compositeur Francesco Landini

Sujet :  musique médiévale, musiques anciennes, ballade polyphonique, Ars nova, chanson médiévale, amour courtois, sentiment amoureux.
Période :  Moyen Âge tardif, XIVe siècle
Auteur : Francesco Landini (1325-1397)
Titre :  Gran piant agli ochi
Interprètes :  Ensemble 400
Concert : Eglise de Saint-Georges Martyre, Milan, Italie (2022).

Bonjour à tous,

ous partons, aujourd’hui, à la découverte de nouvelles musiques médiévales, du côté de l’Italie du Moyen Âge tardif. A cette occasion, nous croiserons, à nouveau, l’organiste et maître de musique Francesco Landini, grand représentant de l’Ars Nova florentin du XIVe siècle.

Tristesse & douleur de la séparation

La chanson du jour est une ballade polyphonique. C’est aussi une nouvelle pièce courtoise du compositeur florentin du trecento. Meurtri par une séparation brutale d’avec sa belle, Landini nous contera ses déboires amoureux. Dans le pur style de l’amant courtois, il y fera étalage de sa douleur et de sa peine et, s’adressant à l’objet de son désir, il lui affirmera sa volonté de ne plus s’enticher d’aucune autre, si cet amour devait s’arrêter à jamais.

Ce n’est pas la première fois que Landini s’épanche sur sa douleur et ses déconvenues amoureuses. On se souvient même que la formation médiévale La Reverdie avait dédié un album complet à cette partie du répertoire du maître de musique italien (voir l’occhio del cor et les yeux tristes de Francesco Landini).

La chanson médiévale de Landini dans le Codex Squarcialupi (Ms Med Pal 87), manuscrit ancien du XVe siècle.

Aux sources manuscrites de cette ballade

A l’habitude, du point de vue des sources anciennes et manuscrites, c’est le très beau Codice Squarcialupi (Ms Med Pal 87) qui nous servira ici de guide. Ce manuscrit daté des débuts XVe siècle est actuellement conservé à la Bibliothèque Laurentienne de Florence. Sur l’image ci-dessus, vous retrouverez la chanson polyphonique du jour, accompagnée de sa partition d’époque.

Pour la version en musique de cette pièce de Francesco Landini, nous vous proposons de découvrir l’interprétation de l’Ensemble 400, à l’occasion d’un concert donné, en décembre 2022 à l’Eglise de Saint-Georges Martyre, de Milan. On doit cet enregistrement à Edoardo Lambertenghi, youtubeur et technicien du son milanais passionné de musiques anciennes dont la chaîne est très riche en contenu.


L’ensemble 400 et la passion
des musiques médiévales et anciennes

Actif depuis plus de 15 ans sur la scène des musiques anciennes, l’Ensemble 400 est une formation italienne spécialisée dans un répertoire médiéval et renaissant qui s’étend du XIIIe au XVe siècle. Fondée par des experts dans le domaine des musiques anciennes, elle explore un territoire qui s’étend aux musiques profanes et liturgiques de la France, l’Angleterre et l’Italie médiévales.

L’Ensemble 400 est issu de Musicaround, association italienne établie à Gênes et qui se dédie à la promotion des musiques anciennes, depuis l’organisation de concerts et d’événements à l’enseignement de ces dernières. Vous pourrez retrouver l’actualité de cette formation sur le site officiel de l’association . A date, ils se sont déjà produits dans de nombreux festivals, principalement en Suisse et en Italie.

Membre de l’Ensemble 400

Marcello Serafini (viele), Giuliano Lucini (luth), Maria Notarianni (harpe, vièle), Vera Marenco (voix), Alberto Longhi (voix).


Gran piant agli ochi ou la douleur amoureuse
par Francesco Landini

Gran piant agli ochi, greve dogli al core
Abbonan sempre l’anima, si more.

Per quest’amar’ et aspra diapartita
Chiamo la mort’ e non mi vuol udire.
Contra mia volglia dura questa vita,
che mille morti mi convien sentire.

Ma bench’i’ viva, ma’non vo’seguire
Se non vo’, chiara stella et dolce amore.

Gran piant agli ochi …

Traduction française de cette pièce

Grande peine aux yeux, grande douleur au cœur
Abondent toujours, tandis que l’âme se meurt.

A cause de cette séparation amère et âpre
J’appelle la mort mais elle ne veut m’entendre.
Contre ma volonté, cette vie perdure,
Et il me faut endurer plus de mille morts.

Mais même si je suis en vie, je ne veux plus poursuivre
Aucune autre que vous, brillante étoile et doux amour.

Grande peine aux yeux, grande douleur au cœur


En vous souhaitant très belle journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
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NB : sur image d’en-tête, on retrouve l’enluminure de Francesco Landini dans le Codex Squarcialupi, ainsi que le feuillet correspondant à la ballade polyphonique du jour.

Revivre l’an 1372 aux Médiévales du château de Tiffauges

Armoirie et blason de la ville de Tiffauges (Vendée)

Sujet :  animations médiévales, reconstituteurs, marché médiéval, compagnies médiévales, histoire vivante, guerre de cent ans.
Période :  Moyen Âge central, XIVe siècle.
Evénement  :  les Médiévales de Tiffauges
Lieu :  château de TiffaugesVendée
Pays de la Loire.
Date :  23 &  24 septembre 2023

Bonjour à tous,

eux qui suivent de près notre agenda médiéval le savent bien, les festivités autour du Moyen-Âge sont tellement à la mode en terres de France que la notion finit par recouvrir des réalités extrêmement disparates.

Bertrand Du Guesclin aux Médiévales du château de Tiffauges 2023 - Affiche officielle.

Il en faut pour tous les goûts et, au fond, ces réalités ne font que refléter les visions souvent un peu fourre-tout d’un Moyen-âge qui a largement débordé de sa réalité historique pour s’étendre à un ailleurs médiéval imaginaire, littéraire ou fantastique.

Dans ce vaste champ de pratiques, certaines fêtes médiévales, plus rares, insistent pourtant, pour se situer du côté d’une évocation historique plus rigoureuse et plus exigeante. Cela va, en général, avec les hauts lieux d’intérêt patrimonial dans lesquelles elles se tiennent, mais c’est aussi souvent le fruit d’une volonté et d’un véritable parti-pris de leurs organisateurs. En fait de simples divertissements librement inspirés de « temps médiévaux » un peu flous, on y trouve alors une ambition plus clairement affichée de transmission et de défense d’une certain patrimoine historique et intellectuel.

Dans ces événements remarquables, les passionnés de Moyen Âge et d’histoire vivante se trouvent heureux comme des poissons dans l’eau. Mais personne n’est exclu et les visiteurs en quête de distraction y trouvent aussi leur compte. Ils peuvent y faire le plein d’émotions et de divertissement tout en revenant, au passage, sur quelques idées reçues (elles sont nombreuses) sur la période médiévale.

Les Médiévales de Tiffauges :
un vrai parti-pris d’évocation historique

La manifestation médiévale que nous vous proposons de découvrir, ce week-end, se situe justement dans cette famille d’événements plus exigeants du point de vue de l’historicité et dont il faut saluer la tenue. Impulsée en 2018 par le département de Vendée et toujours soutenue par lui, elle se tient, une fois l’an, au château de Tiffauges, et affiche clairement son ambition de transmission et d’immersion dans le Moyen Âge historique.

Pour mener à bien ce projet, elle est confiée, depuis son lancement, aux bons soins de la très sérieuse Association Roi Uther de Gérard Paugam et son équipe. Les compagnies médiévales, parmi les plus renommées de France et d’ailleurs, y sont invitées et des centaines de reconstituteurs en armure et en tenues d’époque répondent à l’appel.

Bertrand du Guesclin et l’ost de France
aux portes de Tiffauges

A chaque nouveau cru de ces Médiévales, un nouveau thème et un nouveau scénario sont proposés. Pour cette édition 2023, les organisateurs ont décidé de convier les visiteurs à un voyage au milieu de XIVe siècle qui marquera l’apparition à Tiffauges du célèbre Bertrand du Guesclin.

Armoirie de Bertrand du Guesclin
Blason de Bertrand du Guesclin

Nous sommes en 1372, dans le contexte de la guerre de cent ans et en plein guerre de succession de Bretagne. A la tête de l’ost royal, le connétable de France et de Castille a déjà fait tomber la plupart des villes du secteur. Tiffauges a déjà été reprise et du Guesclin s’apprête désormais à assiéger Thouars. La ville reste à la main d’Amaury de Craon et Péronnelle de Thouars, eux-mêmes alliés des anglais.

Mais pour mener à bien son siège et s’y préparer, le chef de guerre français doit d’abord réunir ses hommes et ses alliés. L’objectif est de lancer une vaste revue de troupes mais aussi de s’assurer de les mettre en condition. Ce week-end au château de Tiffauges, on pourra donc suivre de près ce fourmillement d’activités sous la houlette du célèbre héros médiéval, tout au long des deux jours de la manifestation.

Animations médiévales et reconstitution historique à Tiffauges (2023)

Tournois et entraînements militaires

Pour faire bonne mesure et aiguiser les compétences des nobles en présence comme celles des combattants moins titrés, du Guesclin organisera divers tournois à cheval ou à pied. Les combattants spécialistes des armes de jet auront aussi leurs défis à relever, et archers et arbalétriers seront là pour s’entraîner et se mesurer aux épreuves de tir. Pour clore le tableau militaire, l’artillerie sera, elle aussi, présente à la manœuvre avec ses canons d’époque et autres bombardes.

Vie de camp, soins de guerre
& taverne comme au XIVe siècle

Au titre de cette vie médiévale reconstituée sous la houlette de Bertrand du Guesclin, on pourra encore découvrir un camp de soins d’époque avec ses barbiers et ses blessés , mais aussi une taverne avec ses animations et ses jeux. Un grand campement médiéval sera également installé et on pourra y retrouver tout un mélange de vie civile et militaire, avec ses artisans médiévaux dans des domaines divers, et encore les populations et personnels qui suivaient alors les soldats en campagne.

Les dominicains seront également là pour donner une messe à la façon du XIVe siècle et s’assurer du salut des âmes. Enfin, au milieu de cette effervescence, on pourra encore se faire une idée de la vie d’un chef de guerre en campagne, en visitant le logement itinérant de Du Guesclin.

Compagnies médiévales & troupes invitées

Comme nous le disions, pour faire revivre à plein cette ambiance de nombreuses mesnies et troupes de reconstituteurs sont attendues des quatre coins de France, mais aussi de Belgique, d’Angleterre et de République Tchèque.

La Mesnie Enguerran – L’Alliance des Lions d’Anjou – Emptivus Miles – Maisnie de l’Hermine – La Confrérie de la Quintefeuille – L’ost du Castel – Les Tards Venus – Mignoned ar Bro – Ar Soudarded – La guerre des couronnes – Via Historiae – L’Ost du Phénix – Elsass Tempora – Les Chiens de St Martin – Les Armoises – Les Heures de Bedford – les Genz d’Armes 1415 – La Guilde des 3 couronnes – La Grant Compaigne – La Compagnie Gwesclen – Milite Nothie – Les écorcheurs Simwé – Kes Francs Compaings Brabançons – Societas Anglicis – Le Feu Liégeois – Les Plantegênets – Compagnies de république Tchèque – La Volte Gaillarde – Sonj – Smedelyn

Marché médiéval, musique et danses

En plus des nombreux temps forts de la reconstitution, un marché médiéval de 25 artisans dument sélectionnés se tiendra sur place. Musiciens et danseurs seront aussi là pour animer la fête.

Pour plus d’informations sur le programme voir le site du Roi Luther ou Réservations sur le site du département de Vendée


Retrouver nos articles sur les éditions précédentes de cette manifestation : Edition 2019Edition 2022

En vous souhaitant une belle journée et de belles médiévales au château de Tiffauges si vous vous y rendez.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

NB : les photos utilisées dans cet article sont non contractuelles et n’ont vocation qu’à donner une idée de ces Médiévales. Crédit photo @Barry ‘s photography. Pour la superbe affiche 2023, elle a été réalisée par le célèbre illustrateur Ugo Pinson.