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A la découverte des mottes castrales, épisode 3 : Donjon, Logis du seigneur & Haute-cour, le coeur du pouvoir féodal

donjon_motte_castrale_video_documentaire_histoire_medievaleSujet : mottes castrales, archéologie médiévale, château à mottes, vie médiévale, monde féodal, architecture défensive.
Période :  XIIe (1150), moyen-âge central
Média : vidéo, documentaire,  monde 3D, médiéval engineers
Auteur :
votre serviteur 
Titre :
  A la découverte des mottes castrales épisode 3

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous avons le plaisir de publier le troisième épisode de nos vidéos consacrées aux mottes castrales et aux châteaux forts de terre et de bois du moyen-âge central.

Après avoir vu le contexte historique et la topologie des lieux dans le premier épisode, les composantes de la basse-cour dans le second, il s’agit, dans celui-ci, de découvrir la haute-cour. Lieu de vie privilégié du seigneur, cette dernière est le coeur véritable du pouvoir féodal et, finalement, le point autour duquel gravite tout le petit monde du château à motte. Pour terminer cette série de vidéo, nous approchons donc ses bâtiments et montons  à l’assaut de la butte, pour y découvrir le donjon et le logis du maître des lieux.

« Reconstituer » l’architecture de bois défensive du moyen-âge central

Du point de vue reconstitution, il faut ici préciser quelques petites choses. Le moyen-âge central des XI et XIIe siècle ne nous a pas laissé des myriades de documents sur l’architecture de bois et sur les mottes. L’archéologie médiévale est venue à son secours depuis, mais il faut bien être conscient de plusieurs éléments:

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  • Le second élément est que les terrains de construction des mottes et leur butte quand ils n’ont pas été simplement abandonnés à la faveur de lieux plus propices que l’architecture de pierre et sa solidité ont, par la suite, permis de conquérir, ont accueillis, dans un certain nombre de cas, des châteaux de pierre. Quand cela s’est trouvé, on assiste alors souvent à un empilement sur les mêmes terrain des vestiges d’habitation et des traces, au fil des siècles, qui complique d’autant le travail de l’archéologue et la mise à jour de découvertes « claires ». Quand bien même, celles-ci ne donnent souvent que l’affectation des premiers niveaux d’habitations et peu d’éléments sur ce qui pouvait se trouver dans les étages, quand il y en avait.

hourd_architecture_defensive_medievale_chateau_fort_bois_motte_castrale_reconstitution_historique_video_documentaire_moyen-age

Tout cela étant dit, et même si en croisant toutes les données, on a quand même fini par avoir une bonne idée de la conformation générale de certains de ces châteaux de terre et de bois, les détails concernant l’agencement précis de leurs bâtiments, la disposition de leurs pièces, de leurs étages et leur affectation, restent souvent une énigme à trous. Reconstituer, dans ce contexte, consiste donc à user des éléments en présence, mais aussi de son imagination, en essayant de se replacer dans le contexte de l’époque et la réalité du monde féodal des XIe et XIIe siècles. Pour rappel nous avons choisi pour ces trois vidéo-documentaire de nous situer vers le milieu du XIIe siècle (1150 – 1170).

Les Chroniques de Lambert Curé d’Ardre

C’est un document qui est longtemps resté en marge de l’Histoire mais que l’on a redécouvert par la suite, et dont on a su tirer partie. On doit notamment à ce Lambert, curé d’Ardre une description d’un logis de seigneur de bois assez sophistiqué et complexe. Michel Bur nous la résume dans son article sur les châteaux fort (encyclopédie Universalis) mais l’on peut  également retrouver la source de ces chroniques en fouillant un peu. L’ouvrage original, qui date de 1170, est en latin mais on en trouve des traductions en vieux-français.

chronique_de_lambert_dardrePour autant, et même si l’on peut considérer la grande valeur de ce document pour les précisions qu’il nous donne, c’est en chroniqueur témoin « émerveillé » que le curé d’Ardre nous décrit cette grande bâtisse de bois. Ce n’est pas en maître d’oeuvre, et il n’en donne aucun plan, pas plus qu’il n’en fait la monographie précise. Le document se résume à un peu moins d’un page et on ne peut considérer qu’il soit exhaustif sur l’ensemble des fonctionnalités que l’on trouve dans ce bâtiment. Entre autre chose, on ne trouve rien sur l’hygiène, d’éventuelles pièces dédiées aux bains, toilettes, Il n’y a pas non plus mention d’installations défensives de type hourd ou même de précisions sur d’éventuels accès défensifs élevés sur le toit. Et si, à l’évidence, notre curé d’Ardre, connait suffisamment le logis du seigneur, pour savoir qu’il comporte un « lieu tenu secret » réservé aux malades, il confesse aussi que c’est un labyrinthe et il faut bien en déduire que sa description se limite donc à ce qu’il en sait et qu’on a bien voulu lui montrer.

Dans ce contexte, sans doute satisfaisant pour l’Historien mais qui reste un peu flou pour le « reconstituteur » , nous avons utilisé les grandes fonctionnalités décrites par notre Lambert, pour les agencer, en quelque sorte, à notre manière, et les faire entrer dans notre tour maîtresse ou notre grand donjon de bois. Comme nous l’indiquons dans ce vidéo documentaire, le logis seigneurial qu’il nous décrit ne semble pas être un tour, mais plutôt une grande bâtisse.

Composantes « psychologiques » de l’architecture médiévale défensive

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De Lambert, curé d’Ardre à Eugène Viollet le Duc

Pour le reste et aux sources de notre inspiration, nous faisons encore ici appel à Eugène Viollet le Duc et son incontournable article sur les châteaux tiré du Dictionnaire raisonné d’architecture médiévale. En croisant cette source avec la chronique du curé d’Ardre, nous recoupons cette idée d’habitation du seigneur franc qui passe sa vie avec mais surtout, sur ses gardes, (passez-moi le jeu de mots) et qui organise tout autour de lui, sa propre défense. Cette idée de labyrinthe dans laquelle la « défiance » devient une composante de l’architecture est une des sources importante de cette « reconstitution » à la croisée des possibles. Voici video_documentaire_chateau_fort_monde_medieval_dictionnaire_raisonne_architecture_eugene_viollet_le_ducdans le texte, les deux extraits qui nous ont inspiré sur le fond. Nous les citons dans la vidéo, mais il est naturel qu’ils trouvent aussi leur place dans cet article:

 » Retiré dans son donjon avec sa famille et quelques compagnons, la plupart ses parents moins riches que lui, il ne pouvait être assuré que ses hommes d’armes, dont le service était temporaire, séduits par les promesses de quelque voisin, n’ouvriraient pas les portes de son château à une troupe ennemie. Cette étrange existence de la noblesse féodale justifie ce système de défiance dont ses habitations ont conservé l’empreinte.

(…) Le château français ne s’élève qu’en vue de la garde du domaine féodal ; son assiette est choisie de façon à le protéger seul ; ses dispositions intérieures sont compliquées, étroites, accusant l’habitation autant que la défense ; elles indiquent la recherche d’hommes réunis en petit nombre, dont toutes les facultés intellectuelles sont préoccupées d’une seule pensée, celle de la défense personnelle. »

Eugène VIOLLET LE DUC –  Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle (1868)

________________________

« ledict Arnoul (seigneur d’Ardre) fist faire et ediffier en son chastiau et forteresse d’Ardre une maison de bois et d’aultres matieres, faicte par grand artifice et maniere, et qui excedoit en beaulté les aultres maisons que pour lors estoient au pais de Flandres. (…) et de ceste maison en fist ung lieu semblable à ung aultre labirinthe, et dont l’on ne scavoit trouver l’entrée ne l’issue. »

Chronique de Guines et d’Ardre / par Lambert, curé d’Ardre (1170)

Les autres sources d’inspiration

Au titre des références, nous devons encore quelques éléments empruntés à Jean Mesqui et encore d’autres petites choses connues de tous, mais qu’il nous a cru bon de devoir rappeler, entre autre le fonctionnement de l’ost médiéval, avant que les armées royales ne se professionnalisent.

Eléments techniques sur la réalisation

Comme pour les vidéos précédentes et pour la réalisation de ce monde 3D, nous avons encore opté pour le moteur du jeu Medieval Engineers. Il n’est pas impossible que nous soyons amenés à réviser ce medieval_engineers_jeu_video_logo_construction_châteauxchoix, dans le futur, au vue des nombreux déboires occasionnés.  Nous en dirons un mot plus détaillé dans un prochain article.

Voilà, mes amis, tout cela étant dit, nous espérons que vous apprécierez cette dernière vidéo publiée et que vous en tirerez quelques informations utiles, sur ce monde médiéval qui nous est si cher. Si toutefois, vous aviez manqué les premiers épisodes ce cette série sur les mottes castrales, voici les liens vous permettant de les voir :

Tout savoir sur les mottes  castrales: épisode 1 : contexte historique

Tout savoir sur les mottes  castrales: épisode 2 : la basse-cour

En vous souhaitant une très belle journée.
Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com.
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

Archéologie expérimentale et habitat rural du haut Moyen Âge: six trous de poteaux pour une belle maison de l’an mil

archeologie_experimentale_monde_medievalSujet: archéologie expérimentale, chantier, architecture, habitat médiéval, histoire vivante, reconstitution historique.
Période : haut Moyen Âge, an mille
Média : vidéo-documentaire
Distribution : artisans d’Histoire
les films de la trame (2013)
Réalisatrice : Florence Cerbaï


« L’habitat rural du premier Moyen Âge est composé d’une ou plusieurs unités agricoles ou fermes, comprenant un bâtiment principal (habitation) entouré de ses annexes (ateliers, granges, écuries, aires de stockage). Les bâtiments sont, pour la plupart, construits sur des poteaux plantés, et parfois sur des soubassements en pierre ou des sablières en bois. Les murs sont en terre (torchis) et en bois, et la toiture couverte de chaume. De petits bâtiments semi-enterrés assurent des fonctions multiples : annexe domestique, atelier de tissage, remise, abri pour jeunes animaux, laiterie… »
Inrap.fr  occupations, habitats, logement au Moyen Âge


Bonjour à tous,

Nous vous en parlions dans notre deuxième épisode vidéo sur l’histoire des mottes castrales, dans de nombreux cas, quand ils étudient des sites occupés du haut Moyen Âge, les archéologues n’ont bien souvent à se mettre sous la dent que des terrains parsemés de trous et de fosses.

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A partir de là, avec l’aide les artefacts que les fouilles permettent de mettre à jour, l’appui des relevés et des prélèvements de sol, et encore l’étude comparative des autres sites de datation semblable ou les apports documentaires de l’Histoire, il leur faut tenter d’imaginer et  de reconstituer les formes autant que les vocations de ces habitats de bois et de torchis dont il ne reste, après plusieurs centaines d’années, que quelques trous de poteaux dans le sol. (photo ci-dessus trous de poteaux bâtiment médiéval protégeant une fosse silo, fouilles de Décines 2011. Inrap.fr)

Des passionnés de reconstitution historique
et d’archéologie expérimentale

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Dans le documentaire que nous vous proposons aujourd’hui, les Films de la trame sont partis à la rencontre d’un groupe original, composé de compagnies spécialisées dans la reconstitution historique et l’Histoire vivante (Artisans d’Histoire, la compagnie de la branche rouge, la Druzhina Hansa, Leita at Bardagi etc) mais également d’artisans, étudiants ou amateurs passionnés d’archéologie. Réunis à la faveur d’un projet d’archéologie expérimentale, c’est en tout plus d’une vingtaine de personnes qui ont décidé de reconstruire une maison de l’an mille dans les règles de l’Art: les matériaux utilisés proviennent tous du site d’élection, les outils utilisés sont fabriqués par un forgeron qui travaille comme aux temps médiévaux (une forge en Mitgard), et nos « reconstituteurs » partent ainsi à la (re)découverte de toutes les techniques de construction d’époque: de la charpente à l’ancienne, en passant par les enduis, la construction des murs de torchis et le réalisation du toit de chaume.

Six trous de poteaux, le documentaire

Pour notre plus grand plaisir, cette expérience dédiée à l’Histoire vivante est filmée et restituée parfaitement dans cette vidéo.

En vous souhaitant un bon visionnage et une excellente journée!

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

A la bataille! Festivités, combat médiéval et tournoi de Behourd à Tourcoing

blason_heraldique_tourcoing_evenement_festival_sortie_medievalSujet ;  festivités médiévales, combats médiéval , reconstitution historique, armes, armures anciennes, art martial.
Nom: « Tournoi International de Combat Médiéval Full Contact »
Lieu : Tourcoing (Nord)
Dates : samedi 5 & dimanche 6 nov 2016

Bonjour à tous,

D_lettrine_moyen_age_passion
ans le cadre des idées sorties sur le thème du moyen-âge, cette fin de semaine, en la ville de Tourcoing, agglomération de la métropole lilloise, se tiendra un grand tournoi de Béhourd. Mais qu’est-ce que c’est donc que cette chose là?, vous demanderez-vous peut-être et je vous répondrai que le Béhourd est une forme d’affrontement martial pas comme les autres, puisqu’il s’agit, muni d’armures d’époque précisément reconstituées de s’affronter en duel ou en combat_medieval_tourcoing_tournoi_art_martial_behourd_armures_arrmures_anciennes_idees_sortieséquipe, armes anciennes à la main. Il faut être fondu, me direz-vous? Oui! Fondus d’histoire assurément, autant  que d’art martial, et de ces temps où la poudre ne venait point encore troubler la quiétude d’une bonne pelade à l’ancienne, aux sons métalliques des armes blanches de tous poils.

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Entre sport et passion historique:
une discipline martiale bien encadrée

Alors, bien sûr, et même s’il y a la protection des armures, cette passion n’a rien d’un hobby kamikaze et les conditions de sécurité sont fortement ménagées, autant que les mêlées et les duels soigneusement arbitrés et réglementés: les armes et toutes les parties contondantes des armures sont notamment émoussées parce qu’il ne s’agit pas non plus de s’étriper. Les règles sont aussi bien établies et il s’agit avant tout de faire choir l’adversaire. Une fois à terre, il est considéré défait. Pour étrange ou anachronique que peut avoir l’idée de se retrouver dans un gymnase tout ce qu’il y a de plus moderne ou même dans une arène plus ouverte, avec ses supporters, ses arbitres et ses scores, la discipline reste particulièrement spectaculaire et l’on sent bien dans ces échauffourées, le coeur qu’y mettent les art_martial_passion_histoire_armures_armes_anciennes_combat_medieval_federation_behourdpratiquants du Behourd et tout le plaisir qu’ils y prennent.

Comme tout bon sport avec ses règles, son cadre, ses licenciés, ses événements, ses tournois et ses championnats nationaux ou internationaux, le Béhourd a sa fédération: la Fédération Française de Béhourd, elle même rattachée à deux ligues internationales: l’IMCF & la HMBIA (Battle of the Nations). Elle dispose d’un site web très complet où l’on peut trouver l’ensemble des informations utiles ainsi que des éléments précis sur les sources historiques de cette discipline martiale médiévale pas comme les autres. En voici d’ailleurs l’adresse : Fédération Française du Behourd.

Une vidéo de présentation de la Fédération Française de Behourd qui donne envie!

V_lettrine_moyen_age_passion copiaoila une vidéo qui donne un très bon aperçu de la discipline. Vous verrez que bien que très encadré par les règles, les coups portés peuvent être assez impitoyables.

Contrairement à certaines reconstitutions historiques « jouées », nous sommes bien ici en présence d’un art martial  et le Béhourd combat_medieval_tourcoing_tournoi_art_martial_behourd_feminin_armures_arrmures_anciennes_idees_sortiesn’est pas vraiment, pour le dire trivialement, un sport de fillettes, même si on trouve un Béhourd féminin pratiqué par des filles qui n’ont pas froid aux yeux:  Jeanne d’Arc ou Brienne de Torth, sortez de ce corps! Quoiqu’il en soit, âmes sensibles s’abstenir!

Tourcoing ce week end :
un grand tournoi de niveau international

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L_lettrine_moyen_age_passion‘événement qui se tient à Tourcoing ce week end et qui s’étalera sur deux jours est un tournoi de niveau international. On y attend près de cent cinquante guerriers en armure et c’est donc un moyen royal de découvrir la discipline. Pour les amateurs d’histoire et de moyen-âge, comme d’armures et d’armes anciennes ce sera encore l’occasion de venir admirer des armures médiévales de tous pays, patiemment reconstituées, documents à l’appui, par ces passionnés d’histoire qui se plaisent à la faire revivre le glaive au poing. Pour être plus précis sur la période sur laquelle se centre le Béhourd en terme d’armures et d’armes anciennes,  il s’agit des XIIIe et XIVe siècles, mais cela peut aller jusqu’à des siècles postérieurs. En général, dans l’organisation des combats et par souci de réalisme autant que d’équité, les différences d’époque entre les combattants et leur équipement n’excèdent pas cinquante ans.

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Marjolaine, pratiquante de Behourd féminin présentée par le site epic-stories.com et photographiée avec talent par Alex Bonnemaison (www.alexbonnemaison.com)

Et si, cette fin de semaine à Tourcoing, à la ferveur des combats, ou même pour faire une pause entre deux mêlées, vous souhaitiez vous changer les idées, sachez que côté shopping, ballade, ripailles et petites emplettes, il y aura même sur place un marché médiéval.

Voilà pour la sortie week end mes amis. Comme toujours, que vous puissiez vous rendre ou non à ce grand tournoi de Béhourd, que la joie vous accompagne et guide vos pas! Une très belle fin de semaine!

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

La croisade albigeoise : Montsegur, haut lieu du Catharisme (1)

croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_moyen-age_centralSujet : reconstitution historique, château, Cathares, catharisme, siège, Montségur, Albigeois,
Période : moyen-âge central
Média : vidéo-documentaire, mondes 3D, Des racines et des ailes, France 3.
Production : IZIgraph Patrimoine

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, à la faveur d’une belle reconstitution 3D que nous devons à la société IZIgraph Patrimoine, nous abordons l’histoire du château de Montségur assiégé en 1243-1244 lors de la croisade contre les cathares et, du même coup, nous en profitons pour ouvrir une série d’articles sur cette croisade contre les Albigeois.

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Pour qui s’est déjà rendu sur place pour visiter les ruines de ce qui reste de Montségur,  la hauteur à laquelle est bâtie la forteresse sur son piton rocheux (ou son pog en bon languedocien) ne peut que faire forte impression. Ses murailles ou ce qu’il en reste, qui sont en réalité les vestiges d’un château construit postérieurement à celui qui subit le terrible siège des années 1240, plafonnent, en effet, à près de 1 200 mètres d’altitude sur un dôme de calcaire qui, un peu à l’image des hauteurs du château de Foix, semble avoir été planté là, depuis des temps immémoriaux, dans l’attente qu’on y juche une forteresse.

Arrivé au pied de cet étonnant relief, on ne se surprend pas que ce mythique château de Montsegur, dernier bastion d’une communauté cathare alors encore significative en nombre ait pu donner tant de fil à retordre aux armées des croisés chrétiens qui, avec la bénédiction des papes et des rois avaient  entrepris, au milieu du XIIIe siècle, de mettre fin à une hérésie, elle-même chrétienne. Au moment du siège de Montségur en 1243, une grande majorité des cathares a abjuré, a été décimée ou bannie des terres du Languedoc ou a même fui pour se réfugier vers la Catalogne ou vers l’Italie et la Lombardie notamment),

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Une expédition à l’assaut de l’Histoire

O_lettrine_moyen_age_passionn se gare en bas du piton rocheux et on grimpe à l’assaut de la forteresse de Montségur par un petit sentier étroit qui serpente entre la végétation et les arbres et qui semble n’en plus finir. Une fois arrivé en haut, on découvre bien vite qu’il ne reste plus que quelques ruines du château qui fut construit postérieurement au siège de Montségur, mais cela n’importe peu car nous sommes bien sur les terres du drame et les guides très dynamiques et enthousiastes qui vous attendent, au sommet de ce pog, ont tôt fait de vous transporter à travers ses heures les plus glorieuses et les plus sombres.

croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_siege_visite_montsegur_moyen-age_centralSe tenant au milieu de sa cour trapézoïdale, la surface laissée semble si petite que l’on peine même à imaginer qu’ici durant près de quarante ans vivaient en moyenne entre 500 et 800 personnes. D’après les sources archéologiques, un véritable village s’y tenait. On avance même que lors du siège de Montségur, quelques mille cathares, fuyant l’inquisition qui sévissait alors dans la plaine du Languedoc, y avaient trouvé refuge. En réalité, outre le fait que les notions d’espace sont quelques fois trompeuses et qu’il est difficile de se les représenter édifiées quand elles sont à nues, la cour du Castrum était loin d’être la seule occupée sur cette montagne. Les quelques murs encore debout ne sont que les vestiges du centre de la place forte. Les autres remparts ont été totalement détruits après coup, ainsi que les autres édifices qui se trouvaient sur les hauts de Montségur et cette excellente reconstitution 3D a le grand avantage de nous permettre de mieux se les représenter, tout en donnant quelques éléments sur le siège que connut le château entre 1243 et 1244.

M_lettrine_moyen_age_passionême si le treizième siècle avait vu les armées s’aguerrir de l’expérience des croisades successives en terre lointaine, par la nature même de son site,  le pog de Montségur a donc été le théâtre d’un des plus longs sièges de l’histoire de la croisade contre les albigeois. Pas moins de dix mois furent, en effet, nécessaires pour faire tomber la forteresse où s’étaient réfugiés non pas les derniers, mais les « presque » derniers cathares.

Quand, en ce début d’année 1243, les quelques cinq mille hommes de l’armée du Sénéchal de Carcassonne Hugues des Arcis, accompagnés de l’archevêque de Narbonne, Pierre Amiel, se regroupent au pied du piton de calcaire en vue de l’assiéger, c’est, en réalité un château et un seigneur chrétien auxquels ils font face, même si ce lieu est devenu, depuis plus de dix ans déjà, un haut lieu du catharisme. Le seigneur auquel la forteresse appartient, un noble occitan du nom de Raymond de Péreille, a, en effet, concédé, en 1230, à l’évêque cathare Guilhabert de Castres de faire de Montségur  la tête de pont et le siège de l’église cathare.

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croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_reconstitution_3D_chateau_fort_002  croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_reconstitution_3D_chateau_fort_005

1230 Montségur haut lieu du catharisme

L_lettrine_moyen_age_passione traité de Meaux-Paris a été signé un an auparavant, consacrant la paix entre Paris et Toulouse et ce qui sera le premier pas vers l’annexion définitive de la région par la couronne française moins d’un demi-siècle plus tard. L’inquisition n’est alors pas encore créée, elle ne le sera qu’en 1233 par le pape Grégoire IX, désireux d’en terminer avec le catharisme tout en créant un cadre permettant d’établir des procédures et d’éviter, dit-on aussi, les abus des justices civiles.

Même si cette idée peut faire grincer des dents, certains historiens et juristes avancent en effet que la création de l’inquisition et l’instauration d’une démarche inquisitoriale représentèrent un « progrès » en terme de procédure par rapport à la situation précédente. Si on la compare avec les abus et les massacres auquel la croisade avait donné lieu – on se souvient du siège de Béziers et du passage par le fer de populations entières, sans aucune forme de procès – il ne fait pas tellement de doute que ce fut le cas. D’après les sources historiques, on sait aujourd’hui encore que les inquisiteurs trouvaient bien plus de satisfactions dans l’abjuration par les cathares de leur foi et dans leur retour dans le troupeau des brebis catholiques que dans leur crémation. Or, il semble que, de son côté, la justice civile en faisait moins de cas, étant de nature plus expéditive dans son croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_pape_gregoire_IXapplication des lois, des consignes et des sentences. Pour illustrer cela, nous citons ici Jean Louis Biget, Historien spécialiste de ces questions:

« L’Inquisition substitue à la procédure accusatoire publique une procédure d’office totalement secrète, à huis clos et sans avocat. Malgré ses aspects arbitraires, elle offre autant de garanties que les justices traditionnelles, qui soumettent les accusés à une présomption de culpabilité et les obligent à subir l’épreuve, fort aléatoire, du fer rouge, ou d’autres de même style, pour prouver leur innocence. Les enquêtes fouillées et exhaustives des inquisiteurs laissent ses chances à l’accusé, s’il n’est pas coupable, et les faux témoins encourent la prison perpétuelle. L’Inquisition prononce cependant des châtiments sévères : la remise au bras séculier – c’est-à-dire le bûcher –, la prison, qu’elle instaure comme peine afflictive, le port de signes infamants – des croix, homologues à la rouelle des juifs. Elle recourt à des techniques modernes : elle se constitue une mémoire écrite, fortement structurée, avec des répertoires commodes, révolution analogue à celle de l’informatique. »
jean-Louis Biget : Catharisme et Cathares en Languedoc

Du reste, comme l’église ne pouvait pas mettre en oeuvre les sentences d’ordre punitives, c’est bien sur la justice civile que les inquisiteurs allaient s’appuyer pour faire avaliser leurs décisions. Si cette dernière ne s’y était pas pliée, aucun bûcher n’aurait sans doute été allumé, ni aucun cathare emmuré mais l’Europe médiévale est politico-religieuse, comme les couronnes le sont, et il est alors difficile de tracer clairement les frontières entre les deux. Disant tout cela, on comprend bien qu’il n’est pas question ici de justifier quoique ce soit, mais simplement d’être réaliste sur les motivations et les forces en présence, au vue du contexte historique et politique du XIIIe siècle. Bien sûr, pour beaucoup, il aurait été plus simple que l’appel à la croisade n’ait pas été lancé, que l’inquisition n’ait pas été créée, que l’église en reste là avec le catharisme, mais la machine était lancée et il semble bien que rien n’aurait pu alors la faire reculer. Il ne s’agissait plus depuis longtemps pour Rome, de laisser courir l’hérésie cathare mais de l’éradiquer.

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croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_reconstitution_3D_chateau_fort_006    croisade_cathare_albigeois_languedoc_inquisition_montsegur_reconstitution_3D_chateau_fort_008

Un climat d’occupation

S_lettrine_moyen_age_passionur les terres languedociennes, une fois le traité de Meaux-Paris signé, en 1229 et une paix relative retrouvée entre la couronne royale et du comté de Toulouse en la défaveur de cette dernière, la croisade militaire était donc officiellement terminée. De nombreux seigneurs languedociens dépossédés de leurs terres et leurs fiefs, on installa dans leur château des seigneurs français et, sur le terrain, des officiers royaux, baillis et autres viguiers, qui se chargeaient d’encadrer la situation. Cette dernière fut rapidement vécue par les languedociens comme une occupation et c’est compréhensible, puisque techniquement c’en était une. Avant tout cela, la province était autonome et ne faisait pas partie de la couronne française. Le climat est d’autant plus délicat que les abus de la part de ces officiers royaux sont, dit-on, alors nombreux et vont graduellement achever d’exaspérer les populations.

De son côté, la victoire politique étant une chose, Grégoire IX entreprit de continuer la traque des cathares par ses propres représentants. Alléguant  que les évêques étaient trop occupés pour conduire cette tâche, il confia l’inquisition à l’ordre mendiant des dominicains qui s’étaient signalés, un peu avant, dans le Languedoc par leur démarche de prêche et de prédications, moins fastueuse et plus dépouillée que celle des autres représentants de l’église d’alors. Lordre monastique était d’ailleurs né, en grande partie, de l’expérience et des tentatives de son fondateur, Dominique de Guzmán (Saint-Dominique) pour rallier les adeptes du catharisme à une foi chrétienne plus proche des origines.  Quoiqu’il en soit, par cette inquisition, Rome acheva d’ajouter à l’humiliation des seigneurs du pays d’Oc et au climat de tension et de peur qu’avaient généré les croisades autant que l’intrusion des seigneurs et des gens du nord sur les terres languedociennes, en créant sur la durée un climat de persécution et de délation au sein des populations.

L’organisation de Montségur après 1230:
Eglise cathare et chevaliers faydits

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour revenir à 1230, la trêve étant signée et l’inquisition pas encore créée, dans cet entre-deux peut-être le seigneur de Montségur a-t-il alors pensé que les conflits étaient derrière eux? Toujours est-il qu’il finira par céder à la requête de l’évêque cathare et ne reviendra pas dessus, à aucun moment, dans les années qui suivront. Montsegur deviendra donc le haut lieu officiel  du catharisme. Les cathares aideront à financer la garnison permettant d’assurer la protection du château, et, peu de temps après, Raymond de Péreille confiera l’organisation de sa défense à un homme qui est son cousin et deviendra bientôt son gendre puisqu’il lui donnera sa fille en épousailles: Pierre-Roger de Mirepoix. Ce dernier jouera un rôle majeur dans la défense de Montségur lors du siège mais aussi dans le déclenchement de l’opération militaire d’envergure qui signera la destruction de la forteresse dans sa forme cathareblason_chateau_montsegur_pays_cathare_albigeois_reconstitution_3D_monde_medieval. Au moment de l’attaque du château, cela dit, le site est déjà largement repéré, dénoncé et regardé de biais, depuis longtemps par l’Eglise romaine et on peut imaginer que face aux enjeux et aux forces en présence, Montségur allait bien devoir, tôt ou tard,  tomber.

A l’image de la garnison qui se trouve alors sur place et des hommes dont il s’est entouré, Pierre-Roger de Mirepoix est un chevalier et seigneur languedocien « faydit ». Il s’est vu confisquer ses biens et ses possessions en 1209 par Simont de Monfort, soit le château de Mirepoix, pour son implication aux côtés des albigeois dans les conflits. Il le reprendra en 1223 pour le perdre à nouveau sur l’ordonnance royale de 1229. Dépossédé de tout par deux fois, si l’on admet que cette croisade fut en réalité une guerre de conquête tout à la fois géo-stratégique, politique, économique et religieuse et on ne peut guère faire autrement au vue de ses conséquences historiques concrètes sur le terrain, du point de vue languedocien, l’homme deviendra un résistant.

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A propos du faidiment 
Sans être soi-même cathare, il suffisait alors de s’en déclarer protecteur ou de ne pas vouloir participer volontairement à la croisade ordonnée par Rome pour tomber sous le coup du faidiment et de nombreux nobles languedociens étaient de fait tombés sous le coup de cette mesure. Elle n’était pas définitive et pour récupérer ses terres, il « suffisait » en passant par les instances de Rome ou en s’adressant directement au pape, d’abjurer si l’on était cathare et, dans tous les cas de figure, de rejoindre les rangs de la croisade pour lutter activement contre l’hérésie. Facile à dire mais sans doute plus difficile à faire au vue du contexte. Pourquoi?

Nous aborderons toutes ces questions dans l’article suivant. En attendant je vous souhaite une excellente journée.

Fred
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