Sujet : poésie médiévale, satire, mots d’esprit auteur, poète, humour, querelle, épigramme. Période : fin du moyen-âge, début renaissance Auteur : Clément Marot (1496-1544) Titre : « A maistre Grenouille, poëte Ignorant »
Bonjour à tous,
‘il était encore besoin de démontrer l’esprit et l’humour caustique de Clément MAROT quand il s’y adonne, autant que sa maîtrise du verbe et de la rime jusque dans les formes courtes, nous vous proposons aujourd’hui un de ses savoureuses épigrammes. Celui-ci prend la forme d’une flèche assassine en direction d’un poète concurrent. Nous avions déjà abordé le thème des querelles par poésies et plumes interposées en abordant la biographie de cet auteur du début de la renaissance et vous pouvez valablement consulter l’article en question pour plus de détails : Clément Marot, portrait d’un esprit libre
« Bien ressembles à la grenouille : Non pas que tu sois aquatique; Mais comme en l’eau elle barbouille, Si fais tu en l’art poétique. » Clément Marot- Epigramme – A Maistre Grenouille, poète ignorant.
En vous souhaitant un excellent lundi sous les meilleurs auspices.
Fred
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“Accordez aussi aux fous une qualité qui n’est pas à dédaigner: seuls, ils sont francs et véridiques.”
Erasme de Rotterdam, (1461-1536)- L’Eloge de la folie.
Philosophe, humaniste, écrivain de la toute fin du moyen-âge ou du début de la renaissance.
Bonjour à tous,
e fais juste une petite précision pour éclairer cette citation de Erasme qui peut être mal comprise quand on la prend hors contexte. Le fou dont il est question ici est le bouffon, le fou du prince. Plus loin le philosophe ajoutera d’ailleurs :
« On me dira que les oreilles princières ont précisément horreur de
la vérité et que, si elles fuient les sages, c’est par crainte d’ouïr parmi eux une voix plus sincère que complaisante. Je le reconnais, la vérité n’est pas aimée des rois. Et pourtant, mes fous réussissent cette chose étonnante de la leur faire accepter, et même de leur causer du plaisir en les injuriant ouvertement. Le même mot, qui, dans la bouche d’un sage, lui vaudra la mort, prononcé par un fou réjouira prodigieusement le maître. C’est donc que la vérité a bien quelque pouvoir de plaire, si elle ne contient rien d’offensant, mais les Dieux l’ont réservée aux fous. »
En ces temps imbéciles où un rien nous offense si souvent et, en accord avec Erasme, ajoutons encore ceci : bienheureux le royaume ou les terres de ce monde où le fou peut encore se rire même des princes et où il n’a crainte que la vérité ne sorte par sa bouche.
Une belle journée à tous.
Fred
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Sujet : poésie médiévale, auteur, poète, épître, mécénat, François 1er, poésie de cour Période : fin du moyen-âge, début renaissance Auteur : Clément Marot (1496-1544) Titre : « Petit épître au roi »
Bonjour à tous,
lément Marot n’a que vingt-deux ans quand il écrit cette courte poésie, que l’on a souvent appelé le petit épître au roi, épître étant à prendre, ici, dans son sens littéraire et non pas liturgique, soit une poésie en vers qui prend la forme d’une missive.
En m’esbatant je fais rondeaulx en rithme, Et en rithmant bien souvent je m’enrime; Brief, c’est pitié d’entre nous rithmailleurs. Car vous trouvez assez de rithme ailleurs. Et quand vous plaist, mieulx que moy rithmassez. Des biens avez et de la rithme assez : Mais moy, à tout ma rithme et ma rithmaille, Je ne soustiens (dont je suis marry) maille. Or ce me dit (un jour) quelque rithmart : « Viença, Marot, treuves tu en rithme art Qui serve aux gens, toy qui a rithmassé? Ouy vrayement (respond je) Henry Macé, Car vois tu bien la personne rithmante Qui au jardin de son sens la rithme ente, Si elle n’a des biens en rithmoyant, Elle prendra plaisir en rithme oyant; Et m’est advis que, si je ne rithmoys, Mon povre corps ne seroit nourry moys. Ne demy jour : car la moindre rithmette C’est le plaisir où fault que mon ris mette Si vous supply qu’à ce jeune rithmeur Faciez avoir un jour par sa rithme heur*, Affin qu’on die, en prose ou en rithmant : « Ce rithmailleur qui s’alloit enrimant, Tant rithmassa, rithma et rithmonna. Qu’il a congneu quel bien par rithme on a.
*heur : sort, chance, bonheur
Le texte se veut léger et Marot y joue sur les mots autour de son art de rimer, tout en plaidant pour sa cause auprès de François 1er. Nous sommes en 1518, l’auteur veut alors entrer, comme son père, au service du roi. Cela fera dire à certains auteurs et notamment à Louis A. Montalant-Bougleux dans son ouvrage: « Etudes sur les poètes dans leurs relations avec les cours et, par extension, sur les bouffons, les nains, les abbés, etc » que Marot s’abaisse, ici, à des bouffonneries qui le placent un ton en dessous de l’Art poétique.
C’est une critique un peu acerbe, même si on peut comprendre d’où elle vient. Nous sommes ici en plein dans la poésie de complaisance et il faut bien reconnaître que le ton léger, l’esprit, le style, autant que les facéties du poète de cour que Marot aspirait à être et qu’il fut aussi, se donnent à lire dans cet épître, sans fausse-pudeur. Il est, par ailleurs, encore jeune quand il écrit ce texte et n’a pas encore essuyé les déboires qu’il connaîtra plus tard. Ajoutons à cela que, même après, s’il n’est pas non plus le poète sans aucune épaisseur auquel on l’a quelquefois réduit, ses accidents de parcours n’en feront jamais, non plus, le « poète maudit » qu’on fera de François Villon. De manière égale, du point de vue de son engagement politique au sens large, il reste tout autant difficile de le rapprocher d’un Rutebeuf, ou d’un Eustache Deschamps. et on n’a encore souvent avancé que ses déboires naquirent plus d’un trop grand excès de confiance dans ses protecteurs que d’une volonté farouche de se tenir dans la marge et dans l’adversité.
Pour autant, quant à ce qui est de tendre la main pour demander pitance, ce fut le lot de tous. Sauf à être puissant soi-même et s’adonner à la poésie comme un amusement ou, pour le dire autrement, le ventre plein, en vivre sans être fortuné passe nécessairement, depuis des temps reculés par le bon vouloir et la générosité de bienfaiteurs argentés; le monde médiéval n’y a pas dérogé. Plus près de nous et depuis la fin du XXe siècle, et c’est une question tout à fait ouverte, je ne sais même plus s’il est possible de « vivre » uniquement de sa poésie, même miséreux; je veux donc dire survivre. Hors des anthologies d’auteurs confirmés, des éditeurs se risquent-ils sur de nouveaux auteurs? Les gens la lisent-elle encore? Ou ne peut-elle passer que par l’art musical et la chanson, même si les deux arts ne se recouvrent pas toujours, loin s’en faut.
(ci-contre portrait de François 1er, Van Clève, 1530-1535, Musée Carnavalet, Paris)
Pour revenir à notre épître et notre auteur du jour, il en faut pour tous les goûts et c’est aussi sans doute dans cette légèreté revendiquée et assumée, dans ses mots d’esprits, ses épigrammes ou sa moquerie que Clément Marot brille le mieux. D’ailleurs, à plus de quatre cent ans de son écriture, ce petit épître au roi se lit encore très agréablement, pour l’exercice de style qu’il est resté.
En vous souhaitant une très belle journée.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
Sujet : musique ancienne, folk, chanson traditionnelle anglaise, version vocale Période : XVIe, début de la renaissance, toute fin du moyen-âge. Titre : Lady Greensleeves, Greensleeves to a Ground, Greensleeves Groupe : Estampie, Graham Derrick Album : Under The Greenwood Tree (1997)
Aujourd’hui, pour faire suite à l’adaptation-traduction que nous vous avions alors proposé des paroles de cette chanson, vraisemblablement née sous le règne des Tudors et dont la popularité ne s’est pas démentie dans le monde anglo-saxon depuis près de quatre cents ans, nous vous en proposons une version vocale. On la doit à une formation anglaise, du nom d’Estampiedans un album de 1997, dédié aux musiques médiévales et anciennes intitulé ; Under The Greenwood Tree.
Même si les paroles de Greensleeves furent, à l’évidence, écrites par un homme pour (ou à propos) d’une femme, la version du jour est interprétée par une très belle voix féminine mezzo soprano, celle de Anne Falloon. Pour de nombreuses chansons médiévales, il n’est pas rare que l’art ou le chant lyrique s’en soient emparé, et de fait les chanteurs masculins semblent plus rares que les chanteuses sur le répertoires des troubadours.
Dans les interprétations vocales masculines que vous pourrez trouver à la ronde, de nombreuses sont polyphoniques et tirent un peu plus cette Lady Greensleeves du côté des chants de noël, ce qu’elle est aussi devenue avec le temps mais comme cela l’éloigne encore plus de ses origines, nous leur avons largement préféré la version du jour. Pour suivre les paroles et tout savoir sur cette chanson n’hésitez pas à consulter le précédent article sur le sujet!
En vous souhaitant une bonne écoute et une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com. « L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » Publiliue Syrus Ier s. av. J.-C