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Kaamelott: Merlin le boulet et Elias le Fourbe, druide et enchanteurs de Bretagne

kaamelott_cinema_trilogie_humour_alexandre_astier_news_infos_serie_culteSujet : humour, détournement, série télévisée, légendes arthuriennes, Kaamelott, Alexandre Astier, comédie, série culte, Merlin, Elias, druides, enchanteurs
Période : moyen-âge central et haut moyen-âge
Auteur original: Alexandre  Astier
Distribution :   CALT production, M6
Média : détournement

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passion la faveur du week end, voici un nouveau clin d’oeil à la série Kaamelott d’Alexandre Astier avec un petit mélange de reposts détournements, mêlé de nouveautés, mais aussi quelques réflexions sur le Merlin de la célèbre série télévisée et encore un peu d’actualité sur les acteurs qui donnent vie à l’écran au deux « enchanteurs » du royaume.

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Kaamelott, Elias & Merlin, humour, détournement affiche cinématographique

De Excalibur à Kaamelott, Merlin VS Merlin

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour comparer deux versions modernes de ce personnage des légendes arthuriennes, il y a entre le Merlin d’Alexandre Astier et celui d’Excalibur de John Boorman, à peu près autant de points communs qu’entre une sole meunière et un scie circulaire. Outre les différences indéniables de ton dans les dialogues, mais aussi dans le jeu d’acteur – on se souvient que le Merlin de Boorman campé par Nicol Williamson partait presque, par instants, dans des envolés théâtrales lyriques et shakespeariennes – le Merlin de Kaamelott, incarné par le très drôle Jacques Chambon est bien plus druide, que magicien ou même enchanteur.

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Est-ce le fait, comme il le dit lui-même, qu’il n’est pas fait pour vivre entre quatre murs dans un château mais bien plutôt au milieu de mère nature, dans la forêt et au grand air qui freine quelque peu son efficacité ? Rien n’est moins sûr. Il reste en tout cas ce personnage en décalage, étourdi, un peu gauche, venu d’un autre monde, souvent incompris et, il faut bien le dire, tordant. Pour notre plus grand plaisir, Alexandre Astier s’amuse, là encore, à prendre le mythe arthurien à contre pied, au point qu’on finirait presque par se demander comment ce même Merlin là a pu prodiguer à Uther Pandragon  le sort lui ayant permis d’abuser de Dame Ygraine en prenant l’apparence de son époux le Duc de Cornouailles, concevant ainsi malgrè elle, l’enfant qu’allait devenir  Arthur.

kaamelott_legendes_arthuriennes_roi_arthur_alexandre_astier_citations« Mais à un moment donné, il est vraiment druide ce mec là ou ça fait 15 ans qui m’prend pour un con ? »
Arthur, au sujet de Merlin, Kaamelott,  Alexandre Astier.

Ne soyons pas trop dur avec ce Merlin, il a tout de même quelques savoir-faire à son actif: il réalise quelques potions utiles (quand il ne se trompe dans  les ingrédients), il dispose également de quelques puissants parchemins de sorts (quand il ne les égare pas sur les sentiers en les abandonnant par mégarde aux pires ennemis de la couronne) et il sait aussi (bien que la chose ne se soit pas révélée d’une utilité extrême jusque là), se transformer en animal, en fonction d’un calendrier druidique dont lui seul connait les arcanes.

Arthur_Alexandre_Astier_kaamelott_serie_tele_culte_legendes_arthuriennesHormis cela, d’une manière générale, un « léger » voile plane sur ses réelles aptitudes en magie et du côté de la divination, n’attendez pas non plus de sa part  qu’il vous livre des prophéties ou vous conseille sur la marche à tenir pour mener le royaume, ses compétences sont largement plus élevées en soins et en langages animaliers (et encore pas toutes les espèces) qu’en cette matière.

Pas toujours de bonne volonté, la plupart du temps sur la défensive, le Merlin  de Kaamelott n’est souvent pas au rendez-vous des attentes de son souverain, et il brille par son inutilité dans la plupart des situations. Il est d’ailleurs  tellement en dessous que le roi Arthur a nommé un autre personnage pour le seconder au château, dans le domaine des sciences magiques, druidiques et mystiques : Elias de Kelliwic’h (le talentueux Bruno Fontaine à l’écran). Ce dernier est résolument magicien et même surpuissant et redouté dans son domaine, mais, hélas, outre sa légendaire fourberie, ses intérêts personnels et pécuniaires passent, la plupart du temps, bien au dessus de ceux du royaume.

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Merlin Le boulet et Elias le Fourbe
1 enchanteur en 2, dédoublement troublant

D_lettrine_moyen_age_passione fait, il est amusant de noter que le personnage d’Elias vient combler le déficit de compétences magique de Merlin tout en ne rétablissant pas totalement l’équilibre, puisqu’il a ses propres travers et, comique oblige, il faut bien qu’il les ait.

En plus de tout cela et c’est sans doute le plus troublant au niveau ressemblance physique (âge, pilosité faciale, etc) mais aussi vêtements et  accessoires (manteau,  couleur, sceptre), Elias est Merlin_jacques_chambon_kaamelott_druide_enchanteur_serie_tele_alexandre_astier_2finalement bien plus proche du Merlin de l’Excalibur de John Boorman que ne l’est le Merlin de Kaamelott. Ce dernier ne porte pas de sceptre, il est vêtu de blanc.

Il se rapproche, en définitive, beaucoup plus de l’image du druide celte, proche de la nature et pourrait évoquer plus favorablement le célèbre Panoramix d’Asterix et Obelix. Il n’en a pas encore le grand âge mais il en a, en tout cas, plus l’apparence générale (pilosité, couleur de vêtements, etc). Par ailleurs, le goût d’Alexandre Astier, pour l’oeuvre d’Uderzo et de Gosciny, autant que son talent de réalisateur la concernant n’est plus à prouver et est même en passe, d’être démontré une seconde fois. 

Redif : une colère gratinée. Episode hommage.

P_lettrine_moyen_age_passion copiaar ses effets et sa longue barbe, on pourrait encore rapprocher ce Merlin de l’image du Merlin sage et ancien que nous livre une certaine littérature anglo-saxonne et, là encore, il est intéressant de remarquer le clin d’oeil visuel fait dans Kaamelott d’un Merlin vêtu de gris du temps de la jeunesse romaine d’Arthur (Livre VI) , à un Merlin drapé  de blanc au moment de la quête du Graal. A-t-il comme le Gandalf de JRR Tolkien passé les épreuves suffisantes et acquis la maîtrise de son art, pour avoir laisser le gris au profit du blanc? Il laissera à nouveau la couleur pure et diaphane de côté, au profit de couleurs plus sombres quand il Merlin_jacques_chambon_kaamelott_druide_enchanteur_humour_serie_tele_alexandre_astierquittera le château et tout au long du livre V,

Ce n’est qu’une hypothèse mais, finalement, au delà de leurs travers comiques, dans cette sorte de dédoublement du personnage de l’enchanteur qu’il nous propose avec Merlin et Elias, peut-être Alexandre Astier nous invite-t-il à considérer deux faces de Merlin, à travers les légendes, en le scindant, d’une certaine manière, en deux personnages différents : d’un côté, le druide breton et celte traditionnel, de l’autre le magicien enchanteur capable de tout et surpuissant. D’un côté encore Merlin l’ancien, un peu fatigué, un peu en dessous, avec la bonhomie d’un Panoramix, de l’autre Merlin, l’enchanteur puissant et terrifiant, redouté de tous et manipulateur, ce qui est finalement le propre d’Elias dans Kaamelott.

kaamelott_legendes_arthuriennes_elias_alexandre_astier_citations« Une pluie de pierres en intérieur, donc ! Je vous prenais pour un pied de chaise, mais vous êtes un précurseur, en fait ! »
Elias (Bruno Fontaine à Merlin. A Astier – Kaamelott

Quoiqu’il en soit, ne cherchez pas entre les deux enchanteurs de Kaamelott la marque d’une fine équipe, pas d’avantage que l’esprit d’entraide ou une belle  de complicité. Elias n’aide Merlin que contraint et forcé par Arthur et, en réalité, s’il le traite volontiers de boulet, il est loin de le porter ses épaules. Au grand dam du roi, cette collaboration ne tient pas.

L’actualité théâtrale
de Bruno Fontaine & Jacques Chambon

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P_lettrine_moyen_age_passion copiaour dire deux mots de l’actualité de ces deux talentueux acteurs, vous pouviez retrouver Bruno Fontaine récemment sur les scènes théâtrales et en région lyonnaise. Il incarnait le célèbre commissaire San Antonio de Frédéric Dard. Retrouvez toute son actualité sur sa page Facebook .

bruno_fontaine_actu_acteur_kaamelott_elias_enchanteur_san_antonio_frederic_dardQuant à Jacques Chambon,, très actif également sur la scène théâtrale, il écrit des pièces humoristiques et joue aussi dans d’autres créations. Là encore l’abonnement à son Facebook semble le moyen le plus simple de suivre son agenda de spectacles.

Avant de nous quitter, il en est encore temps, souhaitons un joyeux anniversaire à Alexandre Astier qui fêtait hier ses 43 ans. Longue vie à lui !

En vous souhaitant une excellente fin de week-end.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes.

Excalibur, l’épée d’Arthur: aux origines de la légende

excalibur_legendes_arthuriennes_conference_histoire_medieval_litterature_moyen-age_michel_pastoureauSujet : Roi Arthur, légendes arthuriennes, roman arthurien, Excalibur, épée, tradition celtes, mythologie et légendes.
Période : haut moyen-âge et moyen-âge central
Sources : Excalibur, Britannia.com
Auteur : David Nash Ford (historien britannique),
Traduit de l’anglais

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous remontons aux sources des légendes arthuriennes et notamment à la partie qui concerne la célèbre épée du roi : Excalibur. Nous le faisons en bonne compagnie puisque nous vous proposons, cette fois-ci, la traduction d’un article issu du très sérieux site Britannia.com.

Nous le devons à David Nash Ford, jeune historien et archéologue britannique littéralement tombé, enfant, dans les légendes arthuriennes, après avoir visité le site du château de Tintagel et qui s’en est fait, depuis, une spécialité.  Pour faire bonne mesure, en plus de sa traduction depuis l’anglais, nous y adjoignons quelques notes et éléments explicatifs, ainsi que des illustrations provenant d’autres sources.

En vous souhaitant une très bonne lecture !

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EXCALIBUR
Une discussion sur les origines de l’épée du Roi Arthur, par D Nash Ford

La tradition

Llegendes_arthuriennes_excalibur_symbole_origine_archeologiee nom Excalibur fut utilisé pour la première fois par les romanciers français pour désigner l’épée du Roi Arthur . Ce n’était pas alors la célèbre « épée du rocher » (qui s’est brisée lors d’une bataille), mais une deuxième épée acquise par le roi par l’intermédiaire de son conseiller  druidique Merddyn (Merlin). Inquiet qu’Arthur puisse tomber à la bataille, Merlin emmena le roi jusqu’à un lac magique où une main mystérieuse jaillit de l’eau, brandissant une épée magnifique. C’était la Dame du lac offrant à Arthur une épée magique incassable, forgée de la main même d’un elfe forgeron d’Avalon, ainsi qu’un fourreau qui permettrait de la protéger autant que son porteur, tant qu’il l’aurait sur lui. (ndt; le fourreau en lui-même était doté du pouvoir magique d’empêcher la mort de son porteur en cas de perte de sang occasionnée par des blessures). 

Près de la fin du règne d’Arthur, durant les temps troublés de la rébellion de Medrod (Mordred ou Mordred), Excalibur fut volée par la demi-soeur sorcière d’Arthur, la Fée Morgane. Bien que l’épée fut retrouvée, le fourreau, quant à lui, fut perdu à jamais.

excalibur_legendes_arthuriennes_epee_arthur_fee_morgane_jete_fourreau_magiqueLa fée Morgane se débarrasse du fourreau magique d’Excalibur (gravure de Henri Justice Ford 1902)

C’est ainsi qu’Arthur fut mortellement blessé durant la bataille de Camlann*. Suite à cela, le roi donna l’instruction à Bedwyr (ou Girflet) (le chevalier de la table ronde nommé Bedivere)  de rendre Excalibur au lac d’où elle était venue. Toutefois, questionné sur les circonstances autour du retour d’Excalibur dans l’eau, Bedwyr clama n’avoir rien noté d’extraordinaire. Arthur sut dès lors que Bedwyr avait gardé Excalibur pour lui-même et le renvoya une nouvelle fois au Lac. Ayant cette fois lancé l’épée dans les eaux troubles, Bedwyr vit la main mystérieuse apparaître et s’emparer d’Excalibur pour l’entraîner dans les fonds du lac pour la dernière fois.

L’évolution du nom

Les histoires arthuriennes les plus anciennes nomment l’épée du Roi Arthur Caladwich, un nom gallois dérivé de Calad-Bolg et qui signifie « Foudre puissante » (« Hard Lightning »). Par la suite, le nom a évolué pour devenir « Caliburn » chez Geoffroy de Monmouth, ce qui a finalement donné lieu au francisé Excalibur que nous connaissons aujourd’hui.

Les origines anciennes

Des figures légendaires sont associées à des épées magiques à travers le monde, ces dernières représentant souvent le symbole de leur pouvoir royal. Il est intéressant de noter que Curtana, une épée  datant du XVIIe siècle et succédant à l’épée originale de Ogier de Danemarche (Ogier the Dane, chevalier Danois légendaire) est encore utilisée jusqu’à ce jour durant les cérémonies de couronnement anglaises.  La légende du roi Arthur a aussi des similarités particulières avec la légende nordique de Sigurd, mais des parallèles encore plus frappants peuvent être faits avec le héros irlandais: Cu Chulainn (Cúchulainn) qui possédait lui aussi une épée du nom de Caladbolg.

Cuchulainn_heros_mythologie_irlandaise_celtique_legendes_arthuriennes_excaliburCúchulainn héros et guerrier aux pouvoirs extraordinaires parmi les plus importants personnage de la mythologie celte irlandaise.

De telles épées étaient en général réputées avoir été créées par un forgeron elfe. Dans la mythologie saxonne, on le connait sous le nom de Wayland, mais pour les celtes il s’appelait Gofannon. On peut encore l’identifier au Dieu romain Vulcain et au Dieu grec Hephaistos (Hephaestus) qui forgèrent des armes magiques que les muses donnèrent à Persée, et que Tétis (Thétis) donna a Achille. La capitulation ou la destruction ultime de l’épée est une symbole universel bien connu de défaite. Dans le cas présent, elle est emblématique de la mort elle-même.

Curtana, épée cérémonielle britannique du XVIIe siècle
Curtana, épée cérémonielle britannique du XVIIe siècle

Le « dépôt » d’épée, d’armes ou d’autres objets de valeurs dans les lacs sacrés et les rivières était une pratique répandue chez les peuple celtes. Strabon (historien géographe grec -64 BC. +25 AC)  a mentionné de tels rituels près de Toulouse en France et a noté que d’autres lacs sacrés ont existé à travers l’Europe. Grégoire de Tours (538-594) fait une allusion à des festivités de trois jours autour du lac Gévaudan dans les Cévennes, dédiées à ces rites_celtiques_legendes_arthuriennes_excalibur_origine_legende_dame_du_lacrituels. Certains érudits avancent que de telles pratiques faisaient parties des rites funéraires celtes.

Guerriers celtes et « dépôt » d’armes. Illustration sur la base de découvertes archéologiques dans la Ljubljanica  (rivière de Slovènie).

Des découvertes archéo-logiques de dépôts de pièces de métal venues de lointaines destinations, sont attestés dans le lac de Llyn Fawr  dans le comté de Glamorgan (Morgannwg- Sud du pays de Galles). Elles incluent des haches et des faucilles datant de l’an 600 avant JC. D’autres armes ont été découvertes dans le lac de Llyn Cerrig Bach de l’île galloise d’Anglesey. Leur datation va du 2e siècle avant J.C. jusqu’au 1er siècle Après J.C. De tels dépôts dans les rivières, durant l’âge de fer celtique,  sont si nombreux qu’on ne peut les compter. Parmi les plus célèbres d’entre eux, on peut mentionner le superbe bouclier de Battersea ainsi que le Casque du Waterloo Bridge trouvés dans la Tamise. La grande majorité des rivières anglaises semble avoir été communément  utilisée pour y déposer des épées du type de celle d’Arthur.« 

art_celte_pre_romain_tradition_celte_legendes_arthuriennes_excalibur

David Nash Ford (historien britannique),
Traduit de l’anglais par moyenagepassion.com.

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*Bataille de Camlann : dernière bataille auquel Arthur aurait pris part, la plus ancienne référence historique de sa mention se trouve dans les annales de Galles (Annales Cambriae). Ce manuscrit datant du Xe siècle est vraisemblablement une compilation d’auteurs divers. Voilà ce que dit l’entrée pour l’année 516 et 537 de notre ère:

« 516. La bataille de Badon, durant laquelle Arthur porta la croix de notre seigneur Jésus-Christ durant trois jours et trois nuits sur ses épaules et les bretons furent victorieux.
« 537. La bataille de Camlann, durant laquelle Arthur et Medraut (Mordred) tombèrent. Et il y eu de nombreux morts (« plague ») sur l’ïle de Bretagne (Britain) et en Irlande. »

Une belle journée à tous.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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Une parenthèse d’humour autour de Kaamelott et un mot sur ses produits dérivés

excalibur_legendes_arthuriennes_conference_histoire_medieval_litterature_moyen-age_michel_pastoureauSujet : Kaamelott, légendes arthuriennes, roi Arthur, humour,  comédie, série télévisée culte,  détournement, produits dérivés.
Période : moyen-âge central et haut moyen-âge
Auteur original: Alexandre  Astier
Distribution :   CALT production, M6
Média : détournement

Bonjour à tous,

V_lettrine_moyen_age_passion copiaoilà quelques petits détournements inspirés de la série télévisée Kaamelott pour égayer votre journée et faire tribut encore, une fois à son auteur, Alexandre Astier, Sauriez-vous reconnaître de quels épisodes sont inspirés ces faux ?

Kaamelott, merchandising, produits dérivés, et exploitation mercantile de l’oeuvre

kaamelott_serie_culte_alexandre_astier_leodagan_lionnel_astier_humour_detournement_peche_truite_ptits_enfantsCe n’est pas faute d’avoir eu des propositions mais, hormis les DVD’s, les livres ou les BDs qui sont des productions directes dérivées de l’œuvre ou encadrées par ses soins, l’auteur de Kaamelott a, jusque là, refusé toute exploitation mercantile tiers ou tout merchandising autour  de sa célèbre série télévisée. Il s’en est expliqué à plusieurs reprises : il n’a pas souhaité perdre le contrôle de son œuvre, et prendre, se faisant, le risque de la dévoyer au profit d’une exploitation aveugle et purement intéressée.

Il existe, bien entendu, sur le marché « sauvage » des produits dérivés mais, à un jeu de plateau près et sauf erreur de notre part, à ce jour, ils sont tous joyeusement illégaux. Il existe peut-être des exceptions pour des créations qui seraient de véritables créations artistiques uniques et/ou qui se situeraient plus dans la référence allégorique en ne faisant pas un usage direct du logo, des marques et des citations mais, quoiqu’il en soit, dès lors qu’il y a exploitation commerciale directe, sérialisée et/ou « massive », il y a préjudice potentiel pour l’auteur et le fil est donc extrêmement ténu. Encore une fois, du côté de Calt  comme de celui de Rain Dog, la société de production qui se charge de promouvoir et distribuer, entre autres oeuvres et spectacles, ceux d’Alexandre Astier, il n’y a pas eu, pour l’instant, de concession officielle de la « marque » Kaamelott à des exploitants ou guethenoc_kaamelott_detournement_humour_serie_culte_serge_papagalli_alexandre_astier_legendes_arthur_graaldes commerçants tiers.

C’est donc tout cela bien en tête et en manière de clin d’oeil que nous vous présentons ici quelques détournements humoristiques. Les produits dérivés dont il est question sont rien moins qu’absurdes et s’ils font référence à des épisodes de la série, ils renvoient surtout à un département marketing  un tantinet décalé dont les produits sont tout, sauf distribuables.

D’éventuelles concessions de licences
d’exploitation dans le futur ?

G_lettrine_moyen_age_passionageons que ce positionnement concernant le merchandising et les produits dérivés pourra encore changer au moment de l’exploitation cinématographique de Kaamelott au cinéma. De nombreux fans en seraient certainement ravis et puisque la demande existe, il vaudrait autant qu’elle soit gérée par les créateurs légitimes de l’oeuvre.

Le dernier spectacle en date d’Alexandre Astier « l’exoconférence » avait déjà ménagé un peu de merchandising, sous forme principalement de tee-shirts. Les freins sur l’exploitation indirecte de l’œuvre  ne relèvent donc pas d’une allergie de principe de sa bohort_kaamelott_humour_detournemennt_serie_tele_legendes_arthuriennespart, mais simplement d’une volonté bien légitime de conserver la maîtrise de son sujet. Si la marque Kaamelott se conjugue en produits dérivés, dans le futur proche, peu de doute subsiste donc sur le fait qu’il en conservera la mise en œuvre ou qu’il sera au moins étroitement partie-prenant de ses déclinaisons.

Ajoutons que la position prise jusqu’à maintenant est un réflexe d’auteur qui l’honore parce qu’on se doute bien qu’il eut été largement plus juteux et lucratif pour lui de laisser faire le marché en concédant quelques licences, avant d’en retirer tranquillement les fruits. On touche ici à une différence fondamentale entre l’œuvre et le produit, qui est celle entre la nature de l’auteur/artiste et du « marketeur ». L’artiste suit son inspiration, sa conviction profonde, son intuition même: dans l’absolu, il ne lâche rien (même si bien souvent la faim peut l’amener à faire des concessions) ou en tout cas, il ne dévoie pas son œuvre à n’importe quel prix. Le marketing quant à lui, dans sa forme la plus sauvage, est la discipline qui consiste à pouvoir tout vendre sans restriction et quelquefois justement, à « n’importe quel prix ».

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Le légendaire Perceval revu et corrigé par la plume d’Alexandre Astier

D’une certaine façon, les deux activités sont à l’opposé même si elles peuvent, bien sûr, coexister intelligemment au moment de la distribution. kaamelott_serie_culte_alexandre_astier_produits_derives_humour_detournement_merchandising_elias_enchanteur_bruno_fontaine_potion_de_viriliteAjoutons encore à cet argument une assertion plus générale d’Alexandre Astier lui-même qui, dans un autre interview, se défendait de faire des choses « attendues » ou même de chercher, par avance, « à plaire ». C’est encore la marque d’un artiste. La création dans ce domaine est une activité solitaire. Son résultat ne se livre qu’une fois l’œuvre « terminée » et l’artiste n’a surtout pas à se soucier de séduire, pendant ce temps de gestation. L’art est une forme de langage qui cherche à exprimer et à dire, et non pas à plaire ou à vendre. Toute sa différence avec le marketing est contenue dans cette forme d’absence de préparation à un marché, ou dans cette absence d’intentionnalité.

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Débordements et exploitations indirectes

C_lettrine_moyen_age_passione clair positionnement sur l’exploitation mercantile dérivée de Kaamelott  ne prive pas de grandes sociétés de chercher à utiliser, de manière détournée, des références plus ou moins indirectes à la série pour surfer sur sa côte de sympathie et rabattre du chaland. Une apps vient encore récemment de le faire au bénéfice d’un grand groupe bancaire et nul kaamelott_kadoc_brice_fournier_detournement_legendes_arthur_monde_medieval_humour_merchandisingdoute que Rain Dog saura y mettre bon ordre. D’ailleurs, une autre apps mobile qui proposait des sonneries de téléphone sur le thème de Kaamelott en a dernièrement fait les frais, puisque son programmeur s’est vu contraint de fermer l’application, à la demande des producteurs de l’œuvre.

Au final, c’est sans doute sur les réseaux sociaux et semble-t-il,  sur Twitter ou dans le marketing mobile que l’on trouve le plus de récupérations sauvages à visées mercantiles ou commerciales indirectes de la série. Entre retape de gifs animés, de créations graphiques ou de citations de Kaamelott empruntées ou détournées par des comptes twitter qui sont en réalité ceux de sociétés ou d’entreprises ayant pignon sur rue, animées de désirs mercantiles à court ou moyen terme, toutes les attentions kaamelott_serie_culte_merchandising_humour_detournement_autour de la série ne sont pas motivées que par du « Fan like ».

Le constat est navrant, mais sans même parler d’exploitation de la marque à des fins commerciales « directes », l’acquisition frénétique d’audience ou de « followers » passe souvent devant le sens de la propriété d’une œuvre, pour des sociétés qui sont, par ailleurs, largement solvables et qui, pour avoir souvent des services juridiques intégrés, savent très exactement ce que signifie tout cela. Dur dans ce contexte de contrôler chaque abus ou même d’en évaluer le préjudice quand les visées mercantilistes se drapent du visage de la référence « sympathique » et de l’humour complice. Pour anecdote et dans le même esprit, la création de la « poulette Kadoc » que nous avions publié dans un article en hommage à Brice Fournier et Kaamelott, s’est retrouvée, moins de quelques heures après, re-uploadé directement sur le compte Twitter de la marque d’une grande surface réputée. CQFD.

Pour terminer sur une note un peu plus sérieuse, les vrais lectures et ouvrages autour de Kaamelott, c’est par ici.

En vous souhaitant une belle journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.

« Belle qui tiens ma vie », quand une chanson de la renaissance s’invite dans les légendes arthuriennes

musique_danses_medievales_manuscrit_ancien_moyen-age_tardif_renaissanceSujet : danse ancienne, pavane, basse danse, danse royale, chant polyphonique, chanson ancienne, kaamelott, chanson, musique ancienne, amour courtois.
Période : renaissance, XVIe siècle (1588)
Auteur : Thoinot Arbeau, (1520-1595) Jehan Tabourot.
Titre : « Belle qui tiens ma vie »
Ouvrage : Orchésographie
Interprète : Ensemble DEUM,  Chorale Thomas Tallis de Arduino Pertile.

Bonjour à tous,

P_lettrine_moyen_age_passion copiaour tout ceux qui aiment et ont aimé la série culte Kaamelott, la chanson « Belle qui tiens ma vie » est entrée définitivement dans le corpus des légendes arthuriennes. Ce chant est, en effet, repris de la bouche même du roi Arthur (Alexandre Astier à l’écran) dans quelques épisodes.

Alors provient-il du moyen-âge, le haut ou le « Dark age » comme l’appellent les anglais, cette période supposée contemporaine des légendes arthuriennes ou nous vient-il plutôt du moyen-âge central et des siècles qui ont vu naître la littérature et le roman arthurien ? Et bien, en réalité, la chanson ne se rattache à aucun de ces deux moyen-âge(s) et leur est postérieure de plusieurs siècles.

(désolé pour la qualité vidéo, l’audio est très bon  en revanche)

Une pavane du XVIe siècle
qui s’invite dans les légendes arthuriennes

Composée et créée par  Thoinot Arbeau, pseudonyme de Jehan Tabourot, chanoine de Langres, ce beau chant polyphonique à quatre voix date en réalité du XVIe siècle et est une pavane, soit une basse danse royale et seigneuriale de la Renaissance.

danse_ancienne_renaissance_jehan_tabourot_belle_qui_tiens_ma_vie_serie_kaamelott_legendes_arthuriennesComme nous l’avons vu ici à plusieurs reprises, ce n’est pas la première fois qu’un air ou une chanson de la renaissance ou même des siècles ultérieurs au moyen-âge s’y invite. Paradoxe ou message voilé, dans Kaamelott, le roi Arthur entonne même cette jolie pièce d’Amour courtois avec la reine Guenièvre (la très drôle Anne Girouard) qui, dans la série, est loin d’incarner celle qui tient véritablement son coeur, loin s’en faut. Dans les libertés que l’auteur prend avec son oeuvre, en voici donc une de plus, mais, encore une fois, nous l’avons mentionné ici, les légendes arthuriennes revues et corrigées par Alexandre Astier, n’ont pas l’ambition du réalisme historique. Elles se situent dans un espace imaginaire totalement assumé entre moyen-âge et modernité.

Quand la belle qui tient la vie du roi Arthur n'est pas celle qui pourrait le mieux y prétendre
Quand la belle qui tient la vie du roi Arthur n’est pas celle qui pourrait le mieux y prétendre

Du reste, peut-être même est-ce là le propre des légendes de savoir ménager, en leur sein, des espaces de liberté « contemporains » qui permettent à chacun de pouvoir mieux s’identifier.  Au fond, lors de leurs premières écritures déjà, les aventures du bon roi de Bretagne et de ses chevaliers étaient en décalage de 600 ans avec leur propos et ne se privaient pas d’y inviter des valeurs, mais aussi de beaux châteaux de pierre et des chevaliers qui étaient bien plus de leur temps que du VIe siècle auquel elles se référaient.

chanson_renaissance_kaamelott_belle_qui_tient_ma_vie_jehan_tabourot_Thoinot_Arbeau

danse_ancienne_renaissance_jehan_tabourot_belle_qui_tiens_ma_vie_kaameloot« Le gentil-homme la peult dancer ayant la cappe & l’efpée: Et vous aultres, veftuz de voz longues robes, marchant honneftement avec une gravité posée. Et les damoifelles avec une contenance humble, les yeulx baiffez, regardant quelquefois les affiftans avec une pudeur virginale. Et quand à la Pavane, elle fert aux Roys, Princes et Seigneurs graues, pour fe monftrer en quelque jour de feftin folemnel avec leurs grands manteaux & robes de parades. »
Thoinot Arbeau – Orchésographie (basse danses et pavanes)

Comme la citation ci-dessus, la chanson « belle qui tiens ma vie » fait donc partie d’un ouvrage paru en 1588 et intitulé Orchésographie. On en trouve encore quelques exemplaires originaux, même s’il a été réédité depuis. C’est un traité de danse qui fournit des éléments de méthode, autant que des illustrations et des compositions musicales pour en faciliter l’apprentissage.

Si cela vous intéresse, vous pouvez retrouver ce petit précis de danse ancienne sur le site de la Bnf et en version numérisée ici : Orchésographie en ligne.

Ensemble DEUM et la Chorale Thomas Tallis

L’ensemble D.E.U.M. auquel nous devons la belle interprétation de cette chanson que nous vous proposons aujourd’hui est un quartet vocal italien, issu de la chorale  Thomas Tallis de Arduino Pertile. Vous pouvez retrouver de nombreuses interprétations de cette formation sur leur chaîne youtube. Elle existe en réalité depuis 1975 et a changé de nom entre temps, mais elle continue de se produire régulièrement en concert, en Italie.

chorale_musique_ancienne_pavanne_danse_musique_renaissance_medieval_belle_qui_tiens_ma_vie

chorale_formation_musique_ancienne_chaine_youtubeAu passage même si le site web de la formation vocale dont sont issus ces quatre artistes est totalement en italien et même si vous n’êtes pas italophone, je vous conseille vivement de consulter la page où ils présentent leurs membres et les portraits tordants dont ils se sont fendus (nous vous en donnons un avant-goût ci-dessus). Classicisme et sérieux dans l’interprétation ou dans le choix de répertoire ne sont, à l’évidence, pas incompatibles avec humour et bonne humeur et c’est très agréable de se le voir rappeler.

Les paroles originales de la chanson
« belle qui tiens ma vie »

« Belle qui tiens ma vie
Captive dans tes yeux,
Qui m’as l’âme ravie
D’un sourire gracieux,
Viens tôt me secourir
Ou me faudra mourir.(bis)

Pourquoi fuis-tu mignarde
Si je suis près de toi,
Quand tes yeux je regarde
Je me perds dedans moi,
Car tes perfections
Changent mes actions.(bis)

Tes beautés et ta grâce
Et tes divins propos
Ont échauffé la glace
Qui me gelait les os,
Et ont rempli mon cœur
D’une amoureuse ardeur.(bis)

Mon âme voulait être
Libre de passions,
Mais Amour s’est fait maître
De mes affections,
Et a mis sous sa loi
Et mon cœur et ma foi.(bis)

Approche donc ma belle
Approche, toi mon bien,
Ne me sois plus rebelle
Puisque mon cœur est tien.
Pour mon mal apaiser,
Donne-moi un baiser.(bis)

Je meurs mon angelette,
Je meurs en te baisant.
Ta bouche tant doucette
Va mon bien ravissant.
À ce coup mes esprits
Sont tous d’amour épris.(bis)

Plutôt on verra l’onde
Contre mont reculer,
Et plutôt l’œil du monde
Cessera de brûler,
Que l’amour qui m’époint
Décroisse d’un seul point.(bis) « 

Thoinot Arbeau (1520-1595)


Notes :  suite à une question sur la dernière strophe de la chanson, je poste ici, à toutes fins utiles, quelques éléments de réponse.

« Plutôt on verra l’onde
Contre mont reculer »

Contremont : vers le haut. En l’occurrence, en parlant d’un cours d’eau « vers l’amont » : on aura plus de chances de voir (ou on verra avant) l’eau remonter vers l’amont ou à contre-courant… »

« Et plutôt l’œil du monde
Cessera de brûler »

L’oeil du monde est le soleil. Dans l’univers platonicien, les analogies existent entre l’astre et l’oeil. On retrouve aussi cet « Oeil du monde » dans la remonstrance au peuple de France de Ronsard, poésie qui date du même siècle que la chanson :

« La nuit j’adorerais les rayons de la Lune,
Au matin le Soleil, la lumière commune,
L’oeil du monde ; et si Dieu au chef porte des yeux,
Les rayons du Soleil sont les siens radieux,
Qui donnent vie à tous, nous maintiennent et gardent,
Et les faits des humains en ce monde regardent.

Dans la même poésie de Ronsard, il est également fait allusion à l’épisode biblique de Moïse et de la mer rouge et des ondes repoussées par lui. Jehan Tabourot y fait-il une référence lointaine dans son allégorie sur l’onde ? Difficile de l’affirmer. Peut-être ne faut-il pas aller chercher si loin.

« Pour guider ses enfants par monts et par vallées,
Qui noya Pharaon sous les ondes salées
Et fit passer son peuple ainsi que par bateaux
Sans danger, à pied sec par le profond des eaux. »

Quoiqu’il en soit donc, dans l’esprit de l’auteur, ces deux choses ne peuvent survenir et si elles le devaient, elles se produiraient avant que l’amour « qui l’étreint » ait baissé en intensité (ne décroisse d’un seul point).


En vous souhaitant une excellent journée et une belle fin de semaine!

Fred
Pour moyenagepassion.com
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