Archives de catégorie : Musiques, Poésies et Chansons médiévales
Vous trouverez ici une large sélection de textes du Moyen âge : poésies, fabliaux, contes, chansons d’auteurs, de trouvères ou de troubadours. Toutes les œuvres médiévales sont fournis avec leurs traductions du vieux français ou d’autres langues anciennes (ou plus modernes) vers le français moderne : Galaïco-portugais, Occitan, Anglais, Espagnol, …
Du point du vue des thématiques, vous trouverez regroupés des Chansons d’Amour courtois, des Chants de Croisade, des Chants plus liturgiques comme les Cantigas de Santa Maria d’Alphonse X de Castille, mais aussi d’autres formes versifiées du moyen-âge qui n’étaient pas forcément destinées à être chantées : Ballades médiévales, Poésies satiriques et morales,… Nous présentons aussi des éléments de biographie sur leurs auteurs quand ils nous sont connus ainsi que des informations sur les sources historiques et manuscrites d’époque.
En prenant un peu le temps d’explorer, vous pourrez croiser quelques beaux textes issus de rares manuscrits anciens que nos recherches nous permettent de débusquer. Il y a actuellement dans cette catégorie prés de 450 articles exclusifs sur des chansons, poésies et musiques médiévales.
J’espère que cette journée vous trouve en grande joie.
ous publions encore un petit index thématique pour faciliter un peu l’accès à certaines parties du site. Nous en profitons pour repasser en revue les articles!
Dans quelque temps, des sous-catégories vont s’avérer nécessaires pour ordonner un peu mieux tout cela, d’autant que nous sommes maintenant arrivé à deux-cents articles sur le monde médiéval! O joie!
Aujourd’hui, l’index concerne la poésie de maître François Villon, le grand poète du moyen-âge tardif que, vous le savez, nous affectionnons particulièrement sur moyenagepassion:
Sujet : poésie médiévale, poète satirique, ballade médiévale, Auteur : Eustache Deschamps dit Morel (~1340-1406) Titre : « Quand j’ai la terre et mer avironnée » Période : moyen-âge tardif
Bonjour à tous,
ous vous proposons aujourd’hui une belle poésie de Eustache Deschamps, auteur médiéval dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises ici. Cette fois-ci, il nous convie à sa suite dans le Paris du XVe siècle. Le texte n’est pas particulièrement satirique et il y loue même, au contraire, les beautés de la capitale de ces années là. Bien sûr, les champs et les vignes se sont forcément éloignés au fil des siècles, mais cette ode conserve le charme incomparable d’un voyage dans le temps avec comme guide privilégié, ce grand poète médiéval.
Lecture audio de la poésie
d’Eustache Deschamps en vieux français
Quant j’ay la terre et mer avironnée
version originale vieux français
Quant j’ay la terre et mer avironnée, Et visité en chascune partie Jherusalem, Egipte et Galilée, Alixandre, Damas et la Surie, Babiloine, le Caire et Tartarie, Et touz les pors qui y sont, Les espices et succres qui s’i font, Les fins draps d’or et soye du pays, Valent trop mieulx ce que les François ont : Riens ne se puet comparer à Paris.
C’est la cité sur toutes couronnée, Fonteine et puis de sens et de clergie, Sur le fleuve de Saine située : Vignes, bois a, terres et praerie. De touz les biens de ceste mortel vie A plus qu’autres citez n’ont; Tuit estrangier l’aiment et ameront, Car, pour deduits et pour estre jolis, Jamais cité tele ne trouveront : Riens ne se puet comparer à Paris.
Mais elle est bien mieulx que ville fermée, Et de chasteaulx de grant anceserie,* De gens d’onneur et de marchans peuplée, De touz ouvriers d’armes, d’orfaverie ; De touz les ars c’est la flour, quoy qu’on die : Touz ouvraiges a droit font ; Subtil engin, entendement parfont Verrez avoir aux habitans toudis**, Et loyaulté aux euvres qu’ilz feront : Riens ne se puet comparer a Paris.
*anceserie : ancienneté **toudis : toujours
Quand j’ai la terre et mer avironnée
Version français moderne
Quand j’ai la terre et mer avironnée Et visité en chacune partie Jérusalem, Egypte et Galilée, Alexandrie, Damas et la Syrie, Babylone, le Caire et Tartarie, Et tous les ports qui y sont, Les épices et sucres qui s’y font, Les fins draps d’or et soies du pays Valent trop mieux ce que les Français ont : Rien ne se peut comparer à Paris.
C’est la cité sur toutes couronnée, Fontaine et puits de science et de clergie, Sur le fleuve de Seine située : Vignes, bois a, terres et prairies, De tous les biens de cette mortel(le) vie A plus qu’autres cités n’ont; Tout étranger l’aiment et aimeront, Car, pour plaisirs et pour sites jolis, Jamais cité telle ne trouveront : Rien ne se peut comparer à Paris.
Mais elle est bien mieux que ville fermée, Et de châteaux de grande ancestrerie*, De gens d’honneur et de marchands peuplée, De tous ouvriers d’armes, d’orfèvrerie ; De tous les arts c’est la fleur, quoi qu’on die : Tous ouvrages adroits font ; Subtil engin, entendement profond Verrez avoir aux habitants toudis**, Et loyauté aux œuvres qu’ils feront : Rien ne se peut comparer à Paris.
Une bien belle journée à tous.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
Sujet : chanson, musique médiévale, renaissance, chanson à boire, folk, musique ancienne. Auteur : Gabriel Bataille (1575-1630) Titre : qui veut chasser une migraine Interprète : le groupe Tri Yann
Une chanson « médiévale » du début de la renaissance
Bonjour à tous,
ujourd’hui, nous faisons une incursion dans les XVI, XVIIe siècles pour présenter une chanson à boire que l’on dit souvent médiévale mais qui, en réalité, ne l’est pas, en tout cas, pas sous la forme musicale qu’on lui connait et qui est celle que nous vous proposons aujourd’hui. Ce ne sera pas la première fois, notez-bien, et il y a souvent une confusion ou quelquefois un abus, sur les choses du passé qui ont tôt fait de se retrouver médiévales quand elles sont, en réalité, de la renaissance, voir même des XVIIe, XVIIIe. De fait, il n’est pas rare que le monde médiéval glisse, en quelque sorte, de quelques siècles vers l’avant dans les esprits. Au fond, on peut en déduire que les lignes tracées par l’Histoire pour tenter de découper l’aventure humaine en période, ne sont pas toujours aussi évidentes ou claires que ça. Quoiqu’il en soit, cette composition: « qui veut chasser une migraine » hérite de cela puisque elle date, quant à elle, de la renaissance plutôt que du moyen-âge.
Le vin, de l’église aux tavernes, enluminure tirée du Missel de Jacques de Beaune, Jean Bourdichon, début XVie siècle
Gabriel Bataille, maître de musique, joueur de Luth et compositeur à la cour
Pour mettre de l’eau au moulin de la confusion (de l’eau? quelle horreur!), on serait bien en peine de dater la tradition des chansons à boire; sans doute sont-elles aussi anciennes que les premières vignes et cette pièce du jour pourrait presque paraître sortie tout droit de la tradition des goliards du XIIe siècle, à ceci près qu’elle nous parvient en bon français du XVIIe siècle, à quelques lettres près pour la moderniser; elle devait, en effet, à fette époque compter plus de f que de s ou de c dans fon tefte que la verfion poftée ici.
On l’attribue à Gabriel Bataille (1575-1630), un musicien, joueur de luth et compositeur de la cour qui a connu un certain succès à son époque pour avoir notamment mis en tablature de luth un certain nombre de compositions et de chansons d’auteurs divers. Quand on feuillette ses ouvrages et notamment le livre VI des Airs de Différents Auteurs mis en tablature de luth, – que l’excellente bnf a digitalisé et publié en ligne pour nous -, on trouve plutôt des histoires « d’amourettes » ou des textes à la gloire du bon roi et des princes, que cette ode à la boisson qui dénote même franchement du reste. La concernant, on en prête à Gabriel Bataille à la fois la paternité et la composition, même si je n’arrive rien à trouver qui établisse de manière certaine qu’il soit l’auteur du texte.
Tri-Yann, groupe folk mythique
Tri-yann une longue carrière au service du folk, et des musiques traditionnelles et anciennes
On trouve de nombreuses versions de cette joyeuse invitation à la débauche dans la qualité, interprétées par des formations diverses, avec certaines voix même quelquefois lyriques, mais, pour aujourd’hui, nous avons clairement penché pour cette version « roots », issue d’un esprit plus résolument « taverne » que « cour » (ouf! On s’y sent plus à l’aise).
Elle est Interprétée par le célèbre groupe Tri-Yann, la mythique bande folk de Nantes qui, depuis les années 70, nous font revivre avec bonheur les musiques celtiques et les chants de la Bretagne antique et traditionnelle et y ajoutent leurs propres créations et compositions. Pour notre plus grand plaisir, ils continuent de le faire 46 ans après et pour rester dans notre sujet, cela mérite un toast à leur santé! Longue vie Tri-Yann et merci pour toutes vos belles invitations au voyage! Le Dauphinois, en moi, pourrait être jaloux que ses terres n’aient point encore semblé trouver de troupes ou d’artistes qui puissent les chanter aussi haut et fort que vous chantez votre Bretagne de Coeur.
Le logo du groupe Tryann revisité pour l’occasion avec les quatre éléments
Nous voulons aussi remercier ici Tri-Yann pour nous avoir répondu si gentiment et si rapidement sur ce projet d’article et pour nous avoir permis l’utilisation de cette vidéo mais aussi d’une photo, en accord également avec Eric Doll qui se charge du site web du groupe. Merci encore!
Pour le reste, vous retrouverez ici sur le site web de Tri-Yann toute leur actualité et leurs nouvelles productions.
Les paroles de « qui veut chasser une migraine »
Qui veut chasser une migraine N’a quoi boire toujours du bon Et maintenir sa table pleine De cervelas et de jambon.
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon, Vide-nous ce verre et nous le remplirons.
Le vin goûté par ce bon père, Qui s’en rendit si bon garçon, Nous fait discours tout sans grammaire Et nous rend savant sans leçon.
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon, Vide-nous ce verre et nous le remplirons.
Buvons donc tous à la bonne heure Pour nous émouvoir le rognon Et que celui d’entre nous meurt Qui dédira son compagnon.
L’eau ne fait rien que pourrir le poumon Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon, Vide-nous ce verre et nous le remplirons.
Une belle journée à tous et, il nous faut bien l’ajouter, puisque les législateurs se sont mêlés de nous l’expliquer (comme si nous n’étions pas assez grands pour le savoir), que tout cela soit dans la modération!
Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes
Sujet : poésie médiévale, poésie satirique, ballade, ballade amoureuse Auteur : François Villon (1431 – disparition 1463) Période : moyen-âge tardif, XVe siècle. Titre : Ballade
Bonjour à tous
uand le maître de poésie médiévale François Villon s’adonne à l’écriture amoureuse, même si ce n’est pas pour lui, son verbe et ses rimes s’envolent aussi hauts que l’épervier de sa ballade. Cela n’a rien de commun avec certains autres de ses textes dans lesquels il nous conte, avec une pointe de satire, ses amours volages ou encore ses autres plus contrariées, mais nul sujet ne résiste au talent immense de Villon et l’on s’en rend bien compte ici.
Bien sûr, il s’agit là encore de Villon et, comme c’est lui, il fallait bien que la ballade qu’il donna à ce gentilhomme, afin que ce dernier l’offrit à son épouse, ait pour contexte une situation spéciale; et c’est ici un combat à l’épée durant lequel nous conte l’histoire, le-dit gentilhomme conquit la belle.
Ballade de Villon donnée à un gentilhomme
Que Villon donna à un gentilhomme, nouvellement marié, pour l’envoyer à son espouse, par luy conquise à l’espée.
Au poinct du jour, que l’esprevier se bat, Meu de plaisir et par noble coustume, Bruyt il demaine et de joye s’esbat, Reçoit son per et se joint à la plume: Ainsi vous vueil, à ce désir m’allume. Joyeusement ce qu’aux amans bon semble. Sachez qu’Amour l’escript en son volume, Et c’est la fin pourquoy sommes ensemble.
Dame serez de mon cueur, sans debat, Entierement, jusques mort me consume. Laurier soüef qui pour mon droit combat, Olivier franc, m’ostant toute amertume. Raison ne veult que je desaccoustume, Et en ce vueil avec elle m’assemble, De vous servir, mais que m’y accoustume; Et c’est la fin pourquoy sommes ensemble.
Et qui plus est, quand dueil sur moy s’embat,* Par fortune qui sur moy si se fume, Vostre doulx oeil sa malice rabat, Ne plus ne moins que le vent faict la fume. Si ne perds pas la graine que je sume En vostre champ, car le fruict me ressemble: Dieu m’ordonne que le fouysse et fume; Et c’est la fin pourquoy sommes ensemble.
ENVOI.
Princesse, oyez ce que cy vous resume: Que le mien cueur du vostre desassemble Jà ne sera: tant de vous en presume; Et c’est la fin pourquoy sommes ensemble.
*Quand « dueil sur moy s’embat »: dans un ouvrage de 1835, Jean Henri Romain Prompsault traduit cela par « Quand la tristesse m’accable ».
En vous souhaitant une belle journée où que vous vous trouviez sur notre belle terre, mes amis!
Fréderic EFFE
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