Sujet : citations médiévales, sagesse persane, poésie morale, miroirs des princes, sagesse politique, mauvais conseillers, précis de morale politique Période : Moyen Âge central, XIIIe siècle Auteur : Mocharrafoddin Saadi (1210-1291) Ouvrage : Le Boustan (Bustan) ou Verger, traduction de Charles Barbier de Meynard (1880)
Bonjour à tous,
n poursuivant nos lectures autour de Saadi, nous approchons maintenant de son « Verger » ou Boustan, autre ouvrage empreint de sagesse et de raison laissé par ce grand conteur persan du Moyen Âge central.
Le Boustan : miroir à l’usage
de l’éducation des puissants
Les histoires qui pavent le verger de Saadi sont comme autant de leçons de discernement et de mansuétude à l’usage de princes et des puissants. En voici pour commencer une simple citation. Elle est tirée du chapitre de l’ouvrage intitulé le ministre calomnié et dans lequel un roi fait montre de grande sagesse face aux manœuvres d’un conseiller jaloux et déchu.
« Il faut savoir repousser les inspirations perfides de la malveillance, pour ne pas s’exposer au regret de les avoir écoutées. »
Mocharrafoddin Saadi – « Le ministre calomnié », Le Boustan ou Verger
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
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Sujet : citation médiévale, temps, poésie médiévale, littérature médiévale Période : Moyen Âge central, XIIIe siècle Ouvrage : le Roman de la Rose (1235-1280) Auteurs : Guillaume de Lorris et Jean de Meung
« Li Tens qui ne puet sejourner, Ains vait tous jours sans retorner, Com l’iaue* (l’eau) qui s’avale toute, N’il n’en retorne arriere goute ; Li Tens vers qui noient* (contre quoi rien) ne dure, Ne fer, ne chose, tant soit dure, Car il gaste tout et menjue.
Li Tens qui tote chose mue,
Qui tout fait croistre et tout norist ;
Et qui tout use et tout porrist :
Li Tens qui enviellist nos peres,
Qui viellist rois et emperieres,
Et qui tous nous enviellira,
Ou Mort nous desavancera*(à moins que la mort nous devance). «
Le Roman de la Rose – Extraits, citation médiévale
PS : l’enluminure utilisée dans l’illustration provient du Manuscrit Selden Supra 57 de la Bibliothèque Bodléienne d’Oxford. Elle dépeint « Vieillesse ». C’est la rencontre avec cette dernière qui inspire à l’auteur le passage dont est extrait cette citation sur le temps.
Sujet : ballade, fortune, poésies médiévales, poésie morale, auteur(e) médiéval(e), roue de fortune, sort, impermanence, valeurs chrétiennes médiévales, Moyen Âge chrétien Auteur : Christine de Pizan (Pisan) (1364-1430) Période : Moyen Âge central à tardif Ouvrage : Œuvres poétiques de Christine de Pisan, publiées par Maurice Roy, Tome 1, (1896)
Bonjour à tous,
u Moyen Âge central au Moyen Âge tardif, Fortune court, Fortune tourne, jamais Fortune nul n’épargne qui peut faire dégringoler le plus puissant, sitôt qu’il s’élève au sommet.
La roue de Fortune
alliée de la morale chrétienne médiévale
Dans le monde médiéval, l’invocation de Fortune et sa roue sonne comme un rappel entêtant, une leçon perpétuelle sur la nécessité de pratiquer un certain détachement face aux caprices du sort, mais plus encore. Si gloire, pouvoir, richesses, avoirs, ne portent en eux que des joies illusoires et passagères, c’est bien parce que, pour l’homme du Moyen Âge , ce monde matériel aux lois changeantes n’est qu’un court passage vers l’éternité. Or, justement, le salut de l’âme au sens chrétien, implique qu’on sache se détacher des tentations de ce monde transitoire, mais aussi de la vanité. Et c’est une deuxième leçon de Fortune que d’expliquer aux hommes accrochés sur sa roue, qu’ils ne peuvent se glorifier totalement de leur propre ascension puisque, au fond, ils n’y sont pas pour grand chose.
Aujourd’hui, c’est dans une courte ballade sous la plume de Christine de Pizan que nous la retrouvons. La grande dame et auteur(e) du Moyen Âge savait des illusions de la permanence et de l’évanescence des bonheurs terrestres. Mariée à l’adolescence, veuve à 22 ans, elle a laissé, au sein de son œuvre considérable, de nombreuses poésies sur les douleurs de ce deuil. Elle y fait d’ailleurs allusion dans cette pièce.
« Que ses joyes ne sont fors que droit vent »
Une ballade de Christine de Pisan
Qui trop se fie es* (aux) grans biens de Fortune, En vérité, il en est deceü; Car inconstant elle est plus que la lune. Maint des plus grans s’en sont aperceü, De ceulz meismes qu’elle a hault acreü, Trebusche test, et ce voit on souvent Que ses joyes ne sont fors que droit vent.
Qui vit, il voit que c’est chose commune Que nul, tant soit perfait ne esleü, N’est espargné quant Fortune répugne Contre son bien, c’est son droit et deü De retoulir* (reprendre) le bien qu’on a eü, Vent chierement, ce scet fol et sçavent Que ses joyes ne sont fors que droit vent.
De sa guise qui n’est pas a touz une Bien puis parler; car je l’ay bien sceü, Las moy dolens! car la fausse et enfrune* (gloutonne, avide) M’a a ce cop trop durement neü* (de nuire), Car tollu m’a* (m’a ôté) ce dont Dieu pourveü M’avoit, helas ! bien vois apercevent Que ses joyes ne sont fors que droit vent.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes
Sujet : musique médiévale, Cantigas de Santa Maria, galaïco-portugais, culte marial, miracles, Sainte-Marie, vierge, pèlerin, guérison, El Puerto de Santa Maria. Période : Moyen Âge central, XIIIe siècle. Auteur : Alphonse X (1221-1284) Titre : Cantiga 375 En todo nos faz merçee Ensemble : Grupo de Música Antigua, dir Eduardo Paniagua Album : Remedios Curativos(1997)
Bonjour à tous,
u côté du culte marial médiéval, voici une nouvelle Cantiga de Santa Maria tirée du corpus d’Alphonse X de Castille. C’est un nouveau récit de miracle qui porte, cette fois, sur la guérison d’un cheval mourant sauvé par l’intervention de la Sainte. Il fait partie d’un groupe de chants dédiés a Santa Maria del Puerto.
Alphonse X et Santa Maria del Puerto
En 1260, le souverain de Castille reprit le port et la cité d’Alcanatif (Alcanate) des mains des conquérants musulmans qui l’occupaient depuis les débuts du VIIIe siècle. Il rebaptisa alors le lieu Santa Maria del Puerto. Un château y fut bientôt édifié (le Castillo de San Marcos) sur le site de l’ancienne mosquée et une église dédiée à Sainte-Marie del Puerto fut fondée. L’Ordre de Santa María de España crée par Alphonse X y fut également établi.
Aujourd’hui, El puerto de Santa María est visitée pour ses attraits balnéaires mais on peut encore y croiser des pèlerins. Une procession y est aussi organisée, chaque année, en septembre, autour de la Sainte, également connue sous le nom de la vierge des Miracles.
Le Cancionero de Santa Maria de El Puerto
Les chants dédiés a Sainte-Marie du port sont au nombre de vingt-quatre dans l’ensemble du corpus des Cantigas d’Alphonse le Savant. Ils sont généralement regroupés sous le nom de Cancionero de Santa Maria de El Puerto ( Santa Maria do Porto).
Eduardo Paniagua et les Remèdes curatifs
dans les Cantigas de Santa Maria
Nous vous avons déjà touché un mot ici de Eduardo Paniagua (Voir portrait détaillé ici). Ce passionné de musiques médiévales s’est forgé une grande réputation du côté de la péninsule ibérique. S’il ne s’est pas limité au répertoire des Cantigas d’Alphonse X, il leur a néanmoins dédié un nombre impressionnant d’albums, au moyen de divers regroupements thématiques. Il a même réussi à couvrir ainsi l’ensemble de ce corpus et, à ce jour, c’est une des seuls, à notre connaissance, à l’avoir fait.
En 1997, entouré de sa formation le Grupo de Música Antigua, le grand directeur de musique espagnol proposait un album de onze Cantigas de Santa Maria sur le thème des remèdes curatifs (pour une autre pièce issue de cet album, voir aussi Cantiga 189 : dragon, poison et guérison miraculeuse pour un courageux pèlerin) Il est toujours disponible à la vente et voici un lien qui vous permettra de le découvrir ou de l’acquérir au format CD ou MP3 : Remedios Curativos – Cantigas de Santa Maria
La Cantigas de Santa Maria 375
et sa traduction en français actuel
Como Santa María do Porro guariú un cavalo dun escrivá del Rey que lle quería morrer.
Comment Sainte-Marie du Port guérit le cheval mourant d’un scribe du roi.
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Elle nous est miséricordieuse (fait grâce) en tout La Dame qui voit tout
Merçee por humildade nos faz, e por sa bondade acorre con pïadade a quen lle pede merçee.
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Elle nous fait miséricorde par humilité
et par sa grande bonté
Et secourt avec piété, Qui lui demande sa grâce.
Refrain
Sequer enas bestias mudas nos mostra muitas aiudas grandes e mui conosçudas a Senor que todo vee.
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Au moins pour les bêtes muettes, Elle nous montre ses nombreuses aides Grandes et très célèbres La Dame qui voit tout.
Refrain
E de tal razon fremoso miragre maravilloso a Madre do Glor’ioso fezo , comprida merçee,
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Et sur ce beau sujet,
La Mère du Glorieux fit Un miracle merveilleux (démontrant sa) parfaite Miséricorde.
Refrain
Na çibdade de Sevilla, que é grand’ a maravilla, mostrou a Madr’ e a Filia de Deus que nos sepre vee,
En todo nos foz merr¡ee a Sennor que todo vee.
Dans la cité de Séville, Qui est grande par ses merveilles Elle a montré la mère et fille De Dieu qui toujours nous voit
Refrain
A Bonamic, que avía seu cavall’ e lle morría. Porend’ a Santa María do Porto pidiu merçee
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
A Bonamic (1), qui avait Son cheval qui se mourait Et pour cela, avait demandé grâce
à Sainte-Marie du Port.
Refrain
Que, se ll’o cavalo désse vivo, porende possesse un de cera que sevesse ant’ ela que todo vee.
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Que, si elle sauvait la vie du cheval, Il ferait don d’un de cire qu’il possédait, Devant celle qui voit tout (en son sanctuaire).
Refrain
Est’escrivan del Rey era, que do cavalo presera mui gran coita e soubera que morría; e merçee
En todo nos faz mercee a Sennor que todo vee.
Et celui-là qui était scribe du roi, Etait pris pour ce cheval, De grande douleur, sachant Qu’il allait mourir: et miséricorde.
Refrain
Pidiú aa Glorfosa que é Sennor pïadosa, que de ll’o dar poderosa é, ca nossas coitas vee.
En todo nos faz mercee a Sennor que todo vee.
Il a demandé à la Glorieuse Qui est dame de piété Qu’elle accorde de son pouvoir Car elle voit toujours nos ennuis.
Refrain
E ú iazía tendudo ia come mort’ e perdudo, fez-ll’o a que noss’escudo é viver por sa merçee.
En todo nos faz mercee a Sennor que todo vee.
Et à celui qui était étendu Comme mort et déjà perdu, Celle qui est notre bouclier le fit, Vivre par sa miséricorde.
Refrain
E tan toste deu levada e comeu muita çevada. E porem foi mui loada a Senor que todo vee.
En todo nos faz merçee a Sennor que todo vee.
Et aussitôt que la bête fut levée; Elle mangea de grandes quantités d’orge Et La dame qui voit tout
fut, de tous, grandement louée. .
Refrain
(1)Bonamic Zavila, clerc et scribe du roi établi à Murcia, qui, selon l’universitaire Jesús Montoya Martínez ( Cancionero de Santa María de El Puerto) a également accompagné le souverain Alphonse X durant un voyage qu’il effectua à Beaucaire pour visiter le pape.