Sujet : conférence, événement, Histoire de l’Art, Musicologie, monde médiéval. Période : Moyen-âge central à tardif Organisateur : Institut National d’Histoire de l’Art Dates : les 10 et 12 janvier 2018 Lieu : Galerie Colbert, salle Walter Benjamin
Institut national d’histoire de l’art 75002 Paris
Bonjour à tous,
es 10 et 12 janvier, l’Institut National d’Histoire de l’Art en collaboration avec l’Institut National de Musicologie donnera un cycle de trois conférences sur le thème : Arts et musique au Moyen-âge. Attention, toutefois, l’événement concerne des anglophones puisque toutes les conférences seront données dans cette langue.
Le mercredi 10 janvier 2018, de 18h à 20h.
Nightingales in literary texts and images:
diverse modes of subversion
« Renouvel« , amours naissantes, joies ou jeux plus cachés et interdits, cette conférence se donne pour objectif d’approcher les différentes représentations du rossignol dans les textes littéraires et les images en provenance du monde médiéval.
Morgan Dickson. Spécialisée dans la littérature médiévale, elle enseigne à l’Université de Picardie Jules Verne.
Representing the Music of Minnesang
Art poétique lyrique médiéval du moyen-âge central (XIIe au XIVe), le Minnesang allemand partage des éléments communs avec l’art de nos trouvères ou de nos troubadours. La conférence approchera cet art en se penchant notamment sur les représentations de la musique dans les manuscrits anciens, qui en témoignent.
Henry Hopeest chercheur à l’Institut de Musicologie de l’Université de Bern.
Le vendredi 12 janvier 2018, de 17h à 18h30
Music and Architecture: A Shared Aesthetic of the Flamboyant
Il s’agira ici, d’étudier les possibles rapprochements entre l’architecture flamboyante du XVe et la musique polyphonique de ce même siècle,
Graeme Booneest professeur de Musicologie à l’Université de l’Etat de l’Ohio.
Dans le cadre d’un programme de recherche sur l’histoire de l’Art du IV au XVe siècle, l’INHA s’est donné pour objectif, depuis 2015, d’approcher les relations entre arts visuels et musique, de l’antiquité au moyen-âge. Ce cycle de conférence s’inscrit dans ces développements et fait aussi un pont avec un séminaire autour de l’iconographie musicale et de l’art occidental que donnera cette année l’Institut de recherche en musicologie.
Sujet : musique médiévale, Cantigas de Santa Maria, galaïco-portugais, culte marial, miracles.
Epoque : moyen-âge central, XIIIe siècle
Auteur : Alphonse X (1221-1284)
Titre : Cantiga 23
Direction : Eduardo Paniagua (2006) Album : Merlín y otras Cantigas Celtas
Bonjour à tous,
‘est toujours un vrai plaisir de découvrir ou redécouvrir des pièces d’anthologie en provenance du monde médiéval, tout en faisant tribut aux musiciens et artistes contemporains qui les font revivre pour nous. Aujourd’hui, comme nous l’avons engagé il y a quelque temps déjà, nous continuons notre exploration des Cantigas de Santa Maria en essayant, sinon de toutes les traduire littéralement en français au moins d’en approcher clairement le sens.
C’est donc, cette fois, sur la Cantiga 23 que nous nous penchons, en vous proposant son interprétation par une formation dirigée par l’artiste et musicien madrilène Eduardo Paniagua, qui s’est fait une véritable spécialité des musiques de l’Espagne médiévale.
Nous le rappelons ici, mais si vous nous suivez, vous vous souvenez que ces Cantigas nous viennent du XIIIe siècle et du règne d’Alphonse X de Castille. Connu encore sous le nom d’Alphonse le sage ou le savant, le souverain, grand passionné de Culture (au sens large et pluriel) tout autant que de Littérature, en est d’ailleurs réputé l’auteur et il demeure certain qu’un grand nombre de ces chansons sont de sa plume. Elles restent un témoignage incontournable du culte marial et des pèlerinages du moyen-âge central, mais elles sont aussi des pièces uniques de galaïco-portugais, cette belle langue romane qui servit à merveille la lyrique médiévale.
La cantiga 23 sous la direction d’Eduardo Paniagua.
Eduardo Paniagua, insatiable explorateur
des musiques de l’Espagne médiévale
Né en 1952 à Madrid, architecte de formation, la passion de Eduardo Paniagua pour le moyen-âge l’a conduit, avec le temps, à devenir un des plus grand grand expert dans le champ de la musique médiévale espagnole.
Eduardo Paniagua, grand explorateur des musiques médiévales
Ayant débuté à l’âge de 16 ans et de manière très précoce son exploration du domaine des musiques anciennes (notamment dans le cadre du groupe espagnol Atrium Musicae), il a, depuis, fondé de nombreuses formations et a aussi crée, en 1994, sa propre maison d’édition, baptisée PNEUMA, afin de distribuer ses propres productions ainsi que celles d’autres artistes. A ce jour, la maison a édité plus de 135 albums dont 80 dirigés par son créateur.
Le répertoire de cet artiste est loin de se limiter aux Cantigas de Santa Maria même si ce champ est déjà immense en soi. Il a d’ailleurs dirigé et enregistré plus de 400 d’entre elles à travers de nombreux albums et dans le cadre de l’ensemble Musica Antiguaqu’il fonda en 1994. Durant cette même année, il cofonda également avec l’artiste marocain Omar Metioui, le groupe IBN BÁYA afin d’explorer les musiques de l’Andalousie médiévale.
En insatiable explorateur, Eduardo Paniagua a eu encore à coeur de faire découvrir ou redécouvrir au public de nombreux autres codex ou chansonniers, et des musiques allant des troubadours et jongleurs du moyen-âge central jusqu’à la période renaissante et pré baroque, en passant par le répertoire incontournable des musiques séphardiques (ou sépharades) de l’Espagne médiévale. Pour ses derniers travaux, il a d’ailleurs été récompensé en 2004 et conjointement par les quatre synagogues séfarades de Jérusalem.
Ajoutons encore que tout au long de sa carrière, ce grand artiste, directeur et musicien s’est vu primer à de nombreuses reprises dans ses répertoires de prédilection, au niveau national comme international.
Merlin y otras cantigas celtas
Alfonso X el Sabio, s. XIII
Merlin et les cantigas de Santa Maria
Dans cet album de 2006 sorti chez Pneuma, Eduardo Paniagua, accompagné du musicien multi-instrumentiste Jaime Muñoz et de quelques autres artistes, se proposait de revisiter une partie du répertoire des Cantigas, sous l’angle particulier de la matière de Bretagne et des chants en relation avec les terres celtiques. L’album contient donc neuf pièces de cette veine, toutes tirées de Cantigas de Santa Maria, dont cinq chantées et quatre instrumentales.
A cette occasion, on notera avec intérêt qu’Alphonse de Castille se piqua lui aussi de légendes arthuriennes puisque dans sa Cantiga 108, il nous parle même d’un Miracle pour le moins étonnant dans lequel Merlin fera appel à la Sainte Vierge pour prouver à un juif dubitatif la véracité de la résurrection.
Concernant cette production, elle peut encore être trouvée à la vente au format CD chez certains disquaires. A défaut, voici un lien utile pour vous la procurer en ligne: L’album Merlin-Celtic Cantigas de Musica Antigua
Une origine dans les écrit de Saint Dunstan ?
D’après le livret de l’album d’Eduardo Paniagua, l’histoire de la Cantiga 23 proviendrait, à l’origine, des récits de Saint Dunstan, prélat anglo-saxon et archevêque de Cantorbéry, contemporain du Xe siècle. Le roi dont il est ici question serait donc Aethelstam (Athelsan) de Glastonbury qui fut, nous dit encore le même livret « le souverain anglais qui ordonna la traduction de la bible en anglosaxon ».
Pour être très honnête, nous n’avons pas creusé plus loin ces assertions. En revanche on trouve bien la mention d’un Saint Ethelwold du même siècle, qui a effectivement visité la cour du roi Athelsan, et fut ordonné prêtre en même temps que Saint Dunstan. Il semble qu’on ait prêté à ce bénédictin la traduction de la règle de Saint-Benoit en anglosaxon (et pas la bible) et également un miracle du vin, multiplié à partir d’une simple jarre. Si vous avez à cœur d’aller plus loin sur ce point, vous aurez au moins cette piste.
La cantiga de Santa Maria 23 en galaïco-portugais & sa traduction en français actuel
Le poète nous conte ici un miracle, survenu en Bretagne qui fait écho et même référence directe au miracle biblique des noces de Cana. A l’image de son fils qui changea l’eau en vin, la Sainte fera, en effet, de même dans cette cantiga, en sauvant ainsi une dame très pieuse d’une situation délicate. En voici donc les paroles, ainsi que leur traduction/adaptation par nos soins :
Como Deus fez vo d’agua ant’ Archetecro, Ben assi depois sa Madr’ acrecentou o vinno.
Comme Dieu changea l’eau en vin devant le maître d’hôtel (1)De la même façon, par la suite sa mère multiplia* le vin (*augmenta la quantité)
Desto direi un miragre que fez en Bretanna Santa Maria por ha dona mui sen sanna, En que muito bon costum’ e muita bõa manna Deus posera, que quis dela seer seu vinno.
A ce propos, je conterai un miracle que fit en Bretagne, Sante-Marie pour une dame très saine d’esprit (de très bon sens)En laquelle de bonnes coutumes et de bonnes manièresDieu avait déposé, pour en faire une des siennes (2)
Como Deus…
Sobre toda-las bondades que ela avia, Era que muito fiava en Santa Maria; E porende a tirou de vergonna un dia Del Rei, que a ssa casa vera de camino.
D’entre toutes les bontés qu’elle avaitIl se trouvait qu’elle avait beaucoup foi en Sainte-MarieEt cela la tira d’embarras, un jourFace au roi, qui s’arrêta chez elle, en chemin
Como Deus…
A dona polo servir foi muit’ afazendada, E deu-lle carn’ e pescado e pan e cevada; Mas de bon vo pera el era mui menguada, Ca non tia senon pouco en un tonelcino.
La femme pour le servir, s’affaira beaucoup,Lui donnant viande et poisson, et pain et bièreMais de bon vin pour lui, elle se trouvait à courtCar elle n’en avait pas, sinon un peu, dans un tonnelet.
Como Deus…
E dobrava-xe-ll’ a coita, ca pero quisesse Ave-lo, non era end’ en terra que podesse Por deiros nen por outr’ aver que por el désse, Se non fosse pola Madre do Vell’ e Meno.
Elle était acculé car même si elle avait voulu en trouver Il n’y avait pas sur cette terre là un endroit pour s’en procurer avec de l’argent ou par tout autre moyenSi ce ne fut par le recours à la mère de Dieu et de l’enfant.
Como Deus…
E con aquest’ asperança foi aa eigreja E diss’ Ai, Santa Maria, ta mercee seja Que me saques daquesta vergonna tan sobeja; Se non, nunca vestirei ja mais lãa nen lo.
Et avec cet espoir elle se rendit à l’égliseEt dit « Ha, Sainte-Marie, j’implore votre pitiépour que vous me tiriez de cette grande hontesans quoi je ne me pourrai plus me vêtir ni de laine, ni de lin (3)
Como Deus….
Mantenent’ a oraçon da dona foi oyda, E el Rei e ssa companna toda foi conprida De bon vinn’, e a adega non en foi falida Que non achass’ y avond’ o riqu’ e o mesqo.
La prière de la femme fut entendue sur le champEt le roi, avec toute sa compagnieFut servi en bon vin, et la cave n’en manqua pas,Et le riche et le pauvre en trouva en abondance.
Como Deus fez vo d’agua ant’ Archetecro, Ben assi depois sa Madr’ acrecentou o vinno.
Notes
(1) L’officiant responsable de l’organisation des noces de Cana donc. Bible Latine : Architriclino. Le triclinium était la salle à manger romaine et le lieu où l’on pouvait trouver les lits de banquets et les tables.
(2) litt : « pour faire d’elle son vin » pour qu’elle soit proche de lui, pour en faire une des siennes
(3) Sans quoi je serais à visage découvert et n’aurais d’autre recours que boire toute ma honte.
Sujet : Musique médiévale, chant polyphonique, Jazz, quatuor, Période : Moyen Âge tardif, XIVe siècle Auteur : Guillaume de Machaut (1300-1377) Titre : Messe notre dame Interprète : Quatuor Machaut Album : Quatuor Machaut, Ayler Records (2015)
Bonjour à tous,
uand quatre musiciens et saxophonistes de Jazz partent à la conquête des musiques médiévales du XIVe siècle et tout particulièrement des compositions de Guillaume de Machaut, cela donne le Quatuor Machaut, une formation largement saluée par la critique et le monde du Jazz, depuis sa création.
Elle a vu le jour en 2012, à Orléans, à l’initiative du jeune et très actif artiste Quentin Biardeau. A l’écoute de la Messe de Notre Dame de Guillaume de Machaut, pièce polyphonique à 4 voix d’hommes, il sera saisi par la modernité de la composition et naîtra alors en lui l’idée d’explorer l’œuvre de manière tout à fait nouvelle et originale. Pour mettre à bien son projet, il s’entourera bientôt de trois autres saxophonistes : Gabriel Lemaire, Simon Couratieret Francis Lecointe. Le Quatuor Machaut était né.
Dès lors,les quatre artistes se feront un défi d’explorer les possibilités offertes par la composition du grand maître du Moyen Âge tardif, dans un esprit totalement Jazz, en laissant une large place à l’improvisation. A quatre saxophones, il y avait là un pari unique qui, sur le papier, pouvait relever de la gageure, mais que la formation a brillamment relevé.
Un album et des performances
largement salués par le monde du Jazz
Sorti en 2015, le premier album du Quatuor Machaut sera salué, entre autre, par Révélation Jazz magazine et Indispensable Jazz News. De son côté, le magazine en ligne Citizen Jazz parlera « d’audace folle » et encore « de coup de maître », soulignant une musique « d’une beauté saisissante ». Distribué par Ayler Records, l’album, enregistré à l’ombre des vieilles pierres de l’Abbaye de Noirlac, est toujours disponible sous forme digitale ou sous forme CD au lien suivant : Quatuor Machaut l’album.
Côté scène et concerts, le Quatuor Machaut se produit aujourd’hui dans les festivals, mais aussi les lieux les plus variés, Ils sont d’ailleurs toujours en tournée et seront le 14 novembre au Festival Jazzdor de Strasbourg. En décembre, quelques dates supplémentaires à Malakoff et à Toulouse clôtureront leur tournée 2017. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter leur page facebook ici.
Le Quatuor Machaut – Présentation
La messe Notre Dame
de Guillaume de Machaut
Pour en dire un mot, la Messe Notre Dame de Guillaume de Machaut, connue également comme Messe du Sacre de Charles V (même si depuis les historiens sont entrés en désaccord sur la pertinence de cette appellation) fit date dans l’histoire de la musique médiévale, autant que religieuse.
Première messe à être composée entièrement par un seul compositeur, elle est aussi l’une des premières à consacrer dans son entier le chant polyphonique pour toutes les pièces de l’ordinaire (jusqu’à l’Ite missa est qu’il mit aussi en musique); les compositeurs avaient introduit peu à peu ce dernier dans les messes avant cela, mais il s’y partageait encore la place avec les chants monodiques. Cette œuvre du compositeur médiéval est donc la plus ancienne du genre à nous être parvenue et on s’entend encore à dire qu’en proposant une œuvre organisée et cohérente, qui fait appel avec une grande virtuosité à tous les procédés d’écriture polyphonique de son temps, Guillaume Machaut a aussi ouvert la porte à la Messe, comme un genre pouvant faire l’objet d’une création artistique et musicale à part entière, écrit d’une seule plume.
Guillaume de Machaut, détail miniature, Manuscrit ancien Ms Fr 1584 (1370-1377) BnF, départements des manuscrits
Pour conclure, en revenant à notre quatuor du jour, voilà encore une façon totalement originale pour le Moyen Âge de s’inviter dans notre modernité. Quant au compositeur Guillaume de Machaut et sur ce plan, il n’en est pas à son premier galop d’essai puisqu’il semble, en effet et à juste raison, qu’il ne cesse de fasciner et d’interpeller nombre de nos musiciens contemporains sur ses œuvres, plus de six siècles après lui.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.
Sujet : poésie médiévale, poésie réaliste, auteur médiéval. ballade, folk médiéval. Auteur : François Villon (1431-?1463) Titre : Ballade de Mercy (Merci) Période : Moyen Âge tardif, XVe siècle. Interprétes : Corvus Corax. Album: Seikilos 2006
Bonjour à tous,
oilà quelque temps que nous n’avons parlé à la fois de François Villon et de Folk médiéval et ce sont, cette fois-ci, les allemands de Corvus Corax qui nous en fournissent l’occasion. En 2005, le groupe enregistrait en effet, dans le texte, La Ballade par laquelle Villon crye mercy à chascun, connue encore sous le nom de Ballade de Mercy, en nous proposant cette poésie médiévale avec force orchestration et rien moins qu’une sérieuse touche celtique.
Corvus Corax: rock folk néo-médiéval
La postérité de François Villon a dépassé les frontières de la France auprès des amateurs de poésie médiévale et même de poésie tout court. Cependant, il demeure souvent amusant de constater les étranges travers que les auteurs prennent, quelquefois, pour nous revenir. Cette fois-ci, ce n’est donc pas par la Russie (voir article), mais par l’Allemagne que Villon le fait.
Corvus Corax a été fondé, à l’origine, en 1989 par deux allemands de l’Est ayant profité de la chute du mur de Berlin pour passer en RFA. L’histoire conte que les deux musiciens durent laisser derrière eux un Corbeau apprivoisé d’où le nom du groupe. Depuis lors,, Corvus Corax a gratifié son public d’une bonne trentaine de productions énergiques entre albums studio, opéras, dvd et albums live.
Toujours actifs depuis leur création, avec quelques changements de musiciens et d’artistes en cours de route qui n’ont pas affecté l’existence du groupe, Corvus Corax se produit principalement en concert en Allemagne. Leurs tournées s’étendent quelquefois à d’autres dates dans d’autres pays européens.
La marque de fabrique de Corvus Coras
La formation allemande propose un style néo-médiéval, soit une musique aux tendances rock et folk et aux accents celtiques et nordiques qui prend sa source d’inspiration dans le Moyen Âge mais n’hésite pas à l’enrichir de sonorités modernes.
La bande utilise de nombreux instruments d’époque. cornemuses et autres chalumeaux et en fabriquent même de spéciaux pour chercher de nouvelles sonorités aux accents anciens.
Ajoutons que cette ballade de Villon, tiré de leur album Seikilos, sorti en 2002 est la seule de l’auteur sur ce CD. Cet album est disponible à la vente en ligne, sur le lien suivant : Seikilos de Corvus Corax.
La Ballade par laquelle Villon
crye mercy à chascun
Dans cette ballade, Villon, se sachant condamné, implore la pitié de tous, en égratignant encore au passage, les tortionnaires et bourreaux qui l’ont soumis au dur régime du pain, de l’eau et de la torture et, avec eux, Thibaud d’Aussigny, le sévère et puissant évêque d’Orléans, responsable de son enfermement à Meung-Sur-Loire et que Villon fit entrer dans la postérité avec lui.
Villon crie donc, ici, du fond de sa geôle, même si cette poésie semble plutôt être déclamée dans la rue, à l’attention de tout ce petit peuple qui y vit et que le poète connaît si bien. Dans le second tome de son excellent ouvrage sur la vie du poète médiéval « François Villon, sa vie, son temps » (1913),Pierre Champion y verra même, de son côté, une référence certaine aux crieurs de corps qui annonçaient alors les noms des morts.
La Ballade originale de Villon dans le moyen français de l’auteur
Pour en terminer, les paroles utilisées par Corvus Coraxdans leur interprétation de cette ballade de Villon, étant un peu modernisée, nous avons préféré publier ici une version plus fidèle à la langue originelle de Villon.
Elle est tirée des oeuvres de Maistre François Villon, par Jean-Henri-Romain Prompsault (1835) dont nous avons déjà parlé ici; l’ouvrage nous sert d’ailleurs aussi de guide principal pour les annotations.
A Chartreux et à Célestins, A Mendians et à Dévotes, A musars et claquepatins (1), A servans et filles mignottes Portants surcotz et justes cottes, A cuideraulx d’amours transis, (2) Chaussant, sans méhaing, fauves bottes, Je crye à toutes gens merciz.
A fillettes montrans tétins, Pour avoir plus largement hostes, A ribleurs meneurs de hutins (3) A basteleurs traynant marmottes, A folz et folles, sotz et sottes, Qui s’en vont sifflant cinq et six A marmousetz et mariottes, (4) Je crye à toutes gens merciz,
Sinon aux trahistres chiens mastins Qui m’ont faict manger dures crostes, (5) Et boire eau maintz soirs et matins, Qu’ores je ne crains pas trois crottes. Pour eulx, je feisse petz et rottes ; Voulentiers, si ne fusse assis; Au fort, pour éviter riottes, (6) Je crye à toutes gens merciz.
S’on leur froissoit les quinze costes De bons mailletz, fortz et massis ; De plombée, et de telz pelotes.(7) Je crye à toutes gens merciz.
Notes
(1) Musars : badauds. oisifs. Cliquepatins ; « galopins » qui court les rues. (2) Cuideraulx : de « cuideor »: présomptueux. Vaniteux élégamment chaussés. (3) Ribleurs : coureurs de nuit, crapules faisant du tapage de nuit (4) Marmousets : petits garçon et petites filles (5) Crostes : croûtes de pain (6) Au for pour éviter riottes ; Du reste pour éviter toute querelles (7) De plombées et de tels pelotes : garnis de plombs ou de choses semblables.
En vous souhaitant une très belle journée.
Fred
Pour Moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.