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Le chemin de la vie par François Pétrarque

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« Combien est épineux le chemin de la vie, et combien alpestre et dure est la montée que l’homme doit parcourir pour arriver à une véritable valeur ! »

François Pétrarque (1304-1374)

E_lettrine_moyen_age_passionrudit, poète, diplomate, homme de science, historien et humaniste florentin du XIVe siècle, François Pétrarque est reconnu, encore à ce jour, comme un de plus grands auteurs italiens du moyen-âge avec Dante. Considéré encore comme un des pères de l’humanisme, on lui prête une influence durable sur la poésie romantique et moderne occidentale, mais, au delà, sur les valeurs morales et politiques des siècles suivants.

« C’est pourquoi également l’art qui exprime avec le plus de rigueur et de perfection les sentiments et les aspirations les plus constants et les plus élevés de l’homme passe nécessairement par Pétrarque, de Bembo à Michel-Ange et à Ronsard, de Góngora et Milton à Klopstock, de Shelley et Heine à Leopardi, Heredia et D’Annunzio. »
Vittore BRANCA – Universalis – Pétrarque

Laure, l'amour, femme faite poésie, auquel que Petrarque renoncera pour sa foi et son ascèse, Miniature du Canzionere, XVe, bibliothèque de Venise
Laure, l’amour, femme faite poésie par Petrarque, Miniature du Canzionere, XVe, bibliothèque de Venise

A_lettrine_moyen_age_passionyant grandi en Provence, amoureux du Vaucluse et des sources de la Sorgue qui longtemps l’inspireront, Petrarque connaîtra aussi la vie bruyante d’Avignon, siège des papes d’alors. Plus tard, il finira par rentrer en Italie pour y passer le reste de sa vie.

citations_medievales_moyen-age_poesie_monde_medieval_petrarqueInfluencé par les confessions de Saint Augustin à l’âge de trente ans, son chemin se fraiera, dés lors, entre une foi chrétienne profonde et une ascèse à laquelle il aspire mais  que sa nature de bon vivant semble le condamner à ne pas pouvoir toujours atteindre. Ainsi, il encensera les périodes de solitude et de retraites méditatives mais les alternera aussi avec des périodes plus mondaines. Ambitieux, mais aussi apprécié et reconnu de son temps, il acceptera également un certain nombre de missions politiques et diplomatiques, après être retourné définitivement sur le sol italien.

Sur son chemin de vie « alpestre », comme il le décrit lui-même dans cette citation, sa foi triomphera pourtant et il sera considéré comme un poète profondément chrétien ayant même oeuvré pour le renouveau des valeurs chrétiennes et classiques de l’Italie du XIVe siècles et les quelques disciples d’Averroès qui, sur le tard, le prendront à partie en moquant ses croyances n’y pourront rien changé. Au delà de tout cela, il restera, quoiqu’il en soit, considéré comme un des plus grands érudits, poète de son temps, un auteur de grand talent et un homme à l’humanisme profond.

Une belle journée!
Fred
pour moyenagepassion.com
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Lecture audio: une belle ballade dans le Paris du XVe siècle avec la poésie médiévale d’Eustache Deschamps

poesie_medievale_satirique_eugene_deschamps_moyen_ageSujet : poésie médiévale, poète satirique, ballade médiévale,
Auteur : Eustache Deschamps dit Morel (~1340-1406)
Titre : « Quand j’ai la terre et mer avironnée »
Période : moyen-âge tardif

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous vous proposons aujourd’hui une belle poésie de Eustache Deschamps, auteur médiéval dont nous avons déjà parlé à plusieurs reprises ici.  Cette fois-ci, il nous convie à sa suite dans le Paris du XVe siècle. Le texte n’est pas particulièrement satirique et il y loue même, au contraire, les beautés de la capitale de ces années là. Bien sûr, les champs et les vignes se sont forcément éloignés au fil des siècles, mais cette ode conserve le charme incomparable d’un voyage dans le temps avec comme guide privilégié, ce grand poète médiéval.

Lecture audio de la poésie
d’Eustache Deschamps en vieux français


Quant j’ay la terre et mer avironnée
version originale vieux français

Quant j’ay la terre et mer avironnée,
Et visité en chascune partie
Jherusalem, Egipte et Galilée,
Alixandre, Damas et la Surie,
Babiloine, le Caire et Tartarie,
Et touz les pors qui y sont,
Les espices et succres qui s’i font,
Les fins draps d’or et soye du pays,
Valent trop mieulx ce que les François ont :
Riens ne se puet comparer à Paris.

C’est la cité sur toutes couronnée,
Fonteine et puis de sens et de clergie,
Sur le fleuve de Saine située :
Vignes, bois a, terres et praerie.
De touz les biens de ceste mortel vie
A plus qu’autres citez n’ont;
Tuit estrangier l’aiment et ameront,
Car, pour deduits et pour estre jolis,
Jamais cité tele ne trouveront :
Riens ne se puet comparer à Paris.

Mais elle est bien mieulx que ville fermée,
Et de chasteaulx de grant anceserie,*
De gens d’onneur et de marchans peuplée,
De touz ouvriers d’armes, d’orfaverie ;
De touz les ars c’est la flour, quoy qu’on die :
Touz ouvraiges a droit font ;
Subtil engin, entendement parfont
Verrez avoir aux habitans toudis**,
Et loyaulté aux euvres qu’ilz feront :
Riens ne se puet comparer a Paris.

*anceserie : ancienneté    **toudis : toujours

Quand j’ai la terre et mer avironnée
Version français moderne

Quand j’ai la terre et mer avironnée
Et visité en chacune partie
Jérusalem, Egypte et Galilée,
Alexandrie, Damas et la Syrie,
Babylone, le Caire et Tartarie,
Et tous les ports qui y sont,
Les épices et sucres qui s’y font,
Les fins draps d’or et soies du pays
Valent trop mieux ce que les Français ont :
Rien ne se peut comparer à Paris.

C’est la cité sur toutes couronnée,
Fontaine et puits de science et de clergie,
Sur le fleuve de Seine située :
Vignes, bois a, terres et prairies,
De tous les biens de cette mortel(le) vie
A plus qu’autres cités n’ont;
Tout étranger l’aiment et aimeront,
Car, pour plaisirs et pour sites jolis,
Jamais cité telle ne trouveront :
Rien ne se peut comparer à Paris.

Mais elle est bien mieux que ville fermée,
Et de châteaux de grande ancestrerie*,
De gens d’honneur et de marchands peuplée,
De tous ouvriers d’armes, d’orfèvrerie ;
De tous les arts c’est la fleur, quoi qu’on die :
Tous ouvrages adroits font ;
Subtil engin, entendement profond
Verrez avoir aux habitants toudis**,
Et loyauté aux œuvres qu’ils feront :
Rien ne se peut comparer à Paris.


Une bien belle journée à tous.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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Du Saint Graal V : Histoire médiévale (ou presque), citations oubliées, légendes arthuriennes

Du Saint Graal V

« Vous dérangez pas? Bin c’est à dire qu’on était un peu à table quand même, donc bon…. Si, en fait. Mais c’était pour quoi au juste? Houla! Mais vous venez encore pour cette histoire de machin sacré là? Non mais, j’aime autant leur dire de suite par contre, i z’ont fait le trajet pour rien. C‘est marron. Bord….lique comme il était l’aïeuI, on n’en a jamais vu la couleur, nous autres, de c’truc là. C’est balot parce que j’y connais pas grand chose dans les cartes mais il me semble quand même que ça doit leur faire une trotte d’ici la Bretagne. Bref, du coup, c’est pas pour les offenser, mais ça valait vraiment pas le coup de me faire becqueter froid pour ça… »
Simon Joseph d’Arimathie,
Descendant de Joseph d’Arimathie, Jerusalem, autour de l’an 500 (par là).

« Qui veut chasser une migraine » Une Chanson à boire de la renaissance qui s’invite dans le moyen-âge :

musique_chanson_a_boire_monde_medieval_gabriel_batailleSujet : chanson, musique médiévale, renaissance, chanson à boire, folk, musique ancienne.
Auteur : Gabriel Bataille (1575-1630)
Titre : qui veut chasser une migraine
Interprète : le groupe Tri Yann

Une chanson « médiévale » du début de la renaissance

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous faisons une incursion dans les XVI, XVIIe siècles pour présenter une chanson à boire que l’on dit souvent médiévale mais qui, en réalité, ne l’est pas, en tout cas, pas sous la forme musicale qu’on lui connait et qui est celle que nous vous proposons aujourd’hui. Ce ne sera pas la première fois, notez-bien, et il y a souvent une confusion ou quelquefois un abus, sur les choses du passé qui ont tôt fait de se retrouver médiévales quand elles sont, en réalité, de la renaissance, voir même des XVIIe, XVIIIe. De fait, il n’est pas rare que le monde médiéval glisse, en quelque sorte, de quelques siècles vers l’avant dans les esprits. Au fond, on peut en déduire que les lignes tracées par l’Histoire pour tenter de découper l’aventure humaine en période, ne sont pas toujours aussi évidentes ou claires que ça. Quoiqu’il en soit, cette composition: « qui veut chasser une migraine »  hérite de cela puisque elle date, quant à elle, de la renaissance plutôt que du moyen-âge.

Le vin, de l'église aux tavernes, enluminure tirée du Missel de Jacques de Beaune, Jean Bourdichon, début XVie siècle
Le vin, de l’église aux tavernes, enluminure tirée du Missel de Jacques de Beaune, Jean Bourdichon, début XVie siècle

Gabriel Bataille, maître de musique, joueur de Luth et compositeur à la cour

Pour mettre de l’eau au moulin de la confusion (de l’eau? quelle horreur!), on serait bien en peine de dater la tradition des chansons à boire; sans doute sont-elles aussi anciennes que les premières vignes et cette pièce du jour pourrait presque paraître sortie tout droit de la tradition des goliards du XIIe siècle, à ceci près qu’elle nous parvient en bon français du XVIIe siècle, à quelques lettres près pour la moderniser; elle devait, en effet, à fette époque compter plus de f que de s ou de c dans fon tefte que la verfion poftée ici.

musique_medievale_chanson_a_boire_gabriel_bataille_chanson_ancienneOn l’attribue à Gabriel Bataille (1575-1630), un musicien, joueur de luth et compositeur de la cour qui a connu un certain succès à son époque pour avoir notamment mis en tablature de luth un certain nombre de compositions et de chansons d’auteurs divers. Quand on feuillette ses ouvrages  et notamment le livre VI des Airs de Différents Auteurs mis en tablature de luth, – que l’excellente bnf a digitalisé et publié en ligne pour nous -, on trouve plutôt des histoires « d’amourettes » ou des textes à la gloire du bon roi et des princes, que cette ode à la boisson qui dénote même franchement du reste. La concernant, on en prête à Gabriel Bataille à la fois la paternité et la composition, même si je n’arrive rien à trouver qui établisse de manière certaine qu’il soit l’auteur du texte.

Tri-Yann, groupe folk mythique

Tri-yann une longue carrière au service du folk, et des musiques traditionnelles et anciennes

On trouve de nombreuses versions de cette joyeuse invitation à la débauche dans la qualité, interprétées par des formations diverses, avec certaines voix même quelquefois lyriques, mais, pour aujourd’hui, nous avons clairement penché pour cette version « roots », issue d’un esprit plus résolument « taverne » que « cour » (ouf! On s’y sent plus à l’aise).

Elle est Interprétée par le célèbre groupe Tri-Yann, la mythique bande folk de Nantes qui, depuis les années 70, nous font revivre avec bonheur les musiques celtiques et les chants de la Bretagne antique et traditionnelle et y ajoutent leurs propres créations et compositions. Pour notre plus grand plaisir, ils continuent de le faire 46 ans après et pour rester dans notre sujet, cela mérite un toast à leur santé! Longue vie Tri-Yann et merci pour toutes vos belles invitations au voyage! Le Dauphinois, en moi, pourrait être jaloux que ses terres n’aient point encore semblé trouver de troupes ou d’artistes qui puissent les chanter aussi haut et fort que vous chantez votre Bretagne de Coeur.

Logo groupe Tryann chansons folk folk medieval
Le logo du groupe Tryann revisité pour l’occasion avec les quatre éléments

Nous voulons aussi remercier ici Tri-Yann pour nous avoir répondu si gentiment et si rapidement sur ce projet d’article et pour nous avoir permis l’utilisation de cette vidéo mais aussi d’une photo, en accord également avec Eric Doll qui se charge du site web du groupe.  Merci encore!

Pour le reste, vous retrouverez ici sur le site web de Tri-Yann toute leur actualité et leurs nouvelles productions.


Les paroles de « qui veut chasser une migraine »

Qui veut chasser une migraine
N’a quoi boire toujours du bon
Et maintenir sa table pleine
De cervelas et de jambon.

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon,
Vide-nous ce verre et nous le remplirons.

Le vin goûté par ce bon père,
Qui s’en rendit si bon garçon,
Nous fait discours tout sans grammaire
Et nous rend savant sans leçon.

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon,
Vide-nous ce verre et nous le remplirons.

Buvons donc tous à la bonne heure
Pour nous émouvoir le rognon

Et que celui d’entre nous meurt
Qui dédira son compagnon.

L’eau ne fait rien que pourrir le poumon
Goûte, goûte, goûte, goûte, compagnon,
Vide-nous ce verre et nous le remplirons.


Une belle journée à tous et, il nous faut bien l’ajouter,  puisque les législateurs se sont mêlés de nous l’expliquer (comme si nous n’étions pas assez grands pour le savoir),  que tout cela  soit dans la modération!

Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
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