Sujet : Béhourd, Carcassonne, tournoi, escrime ancienne, sport, combat médiéval. Période : moyen-âge central à tardif Média : vidéo, chaîne youtube Auteur : Aquila Sequania Evénement : tournoi de la citadelle de Carcassonne, Avril 2017
Bonjour à tous
ous vous avions parlé, il y a quelque temps, du grand tournoi de la citadelle, à Carcassonne. Alors pour tous ceux qui n’ont pas pu s’y rendre, voici une belle vidéo qui vous met, pour quelques minutes, dans la peau d’un combattant de Béhourd et vous donne une bonne idée de l’intensité des combats et des échanges.
Aquila Sequania, Béhourd et passion médiévale en Franche Comté.
‘est l’équipe Aquila Sequania, originaire de Franche Comté, qui nous gratifie de ce montage original. Comme il se doit, cette association réunit de véritables passionnés de combat et d’Art martial mais aussi d’Histoire médiévale. Leur passion pour le Béhourd et leur investissement dans la discipline les ont conduit rien moins qu’à la deuxième place des championnats de France 2017 de Saint-Dizier. Depuis leur fondation en 2013, ils ne cessent d’ailleurs d’accumuler les titres et vous pouvez consulter leur excellent palmarès ici.
Pour plus de vidéos, n’hésitez pas à consulter leur chaîne youtube . Pour leur actualité et des interviews exclusives et complètes de leurs pratiquants, ils ont aussi un site web très complet ici.
Sujet : poésie médiévale, chanson, complainte, catalan, langue catalane Période : ^Moyen Âge central, XIIIe siècle
Titre : Pauvre Rutebeuf, Complainte Auteur : Rutebeuf (1230-1285), Léo Ferré. Interprète : Éric Fraj Album : Arranca-me (2014)
Bonjour à tous,
ans les diverses versions que nous avons déjà postées ici de la complainte de Rutebeuf de Léo Ferré en voici une qui nous donne l’occasion d’écouter un peu de poésie d’inspiration médiévale en catalan. Nous en profitons aussi pour toucher un mot de cette langue qui s’enorgueillit d’une histoire de plus de 1000 ans et qui continue de connaître un destin particulier que bien des catalans ont à coeur de continuer de faire vivre.
Pauvre Rutebeuf de Léo Ferré en catalan
Eric Fraj, auteur compositeur interprète
Nous devons cette très belle interprétation à Eric Fraj, un artiste qui chante en Occitan, en français, en Castillan, mais aussi en Catalan, comme ici. Actif dans le domaine de la diffusion de la langue occitane, qui est une de ses langues de coeur, il a monté de nombreux spectacles originaux, mixtes au niveau des langues et il a même, au début des années 2000, incarné le troubadour occitan Jaufre Rudel dans un spectacle vivant qui retraçait des épisodes de la vie de l’artiste médiéval. Pour le reste, quand Eric Fraj ne chante pas l’occitan, il l’enseigne, comme la philosophie, dans un lycée de la région de Toulouse.
Voici une belle vidéo qui permet d’en savoir un peu mieux sur l’univers de cet artiste à la trajectoire unique entre catalan, occitan et français.
Cette belle interprétation de la complainte de Rutebeufde Léo Ferré est tiré de son album Arranca-Me, sorti en 2014 et dont il nous parle dans cette vidéo.
Pauvre Rutebeuf, paroles et
adaptation en catalan de Eric Fraj
Els meus amics on han passat, Els que tenia al meu costat I que estimava ? I tot d’un cop s’han escampat ; Amb un sol buf de tramuntana, l’amor és morta…
Són amistats que el vent emporta, I en feia molt davant ma porta ; Se’ls va emportar…
Un vent dolent qu’arbres despulla, Les branques ja no tenen fulla Sense anar a terra. Una misèria que em desferra, De tot costat me fa la guerra, L’hivern m’aterra…
No val la pena que faci esment De ma vergonya i mon torment, De cap manera… Els meus amics on han passat, Els que tenia al meu costat I que estimava ?
I tot d’un cop s’han escampat ; Amb un sol buf de tramuntana, L’amor és morta… Un mal ja no vé mai tot sol I tot el que porta el seu dol M’ha ben desfet…
Pobres sentits, pobre memòria, M’ha donat Déu el rei de glòria I pobre renda… I dret al cul quan bufa el vent M’agafa el vent i el seu torment, L’amor és morta…
Són amistats que el vent emporta I en feia molt davant ma porta, Se’ls va emportar.
Concernant cette complainte de Rutebeuf, revisité par Léo Ferré, nous lui avons déjà dédié plusieurs articles que vous pouvez valablement consulter. Aussi, descendons sans attendre vers le sud des terres de France et longeons la côte de Perpignan et du Languedoc jusqu’à Barcelone, aux Baléares ou à Valencia pour partir à la rencontre de la langue catalane.
Le catalan, une langue à part entière parlée et formée depuis le Moyen Âge central
Pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec la langue catalane, vous y trouverez, en tendant l’oreille, une proximité indéniable avec le français, le provençal, le latin et même certains mots d’italien. Comme toutes les langues romanes, elle est née du latin qu’on parlait sur les terres romanisées durant le haut Moyen Âge. En l’écoutant, nos oreilles profanes pourraient être tentées quelquefois de la considérer comme un patois tant ses accents peuvent nous faire penser à certaines dialectes provençaux de nos terroirs, mais cela est une erreur qui n’en finit pas de déplaire aux catalans et à juste raison. Le catalan est, en effet, une langue à part entière et pas une forme dialectale dérivée du français ou de l’espagnol. Elle existait déjà dans sa forme établie au Xe siècle quand, de son côté, l’Oïl balbutiait encore et continuait de muer en ce qui allait devenir le français.
Les origines: ibéro-romanes ou gallo-romanes ?
Concernant l’origine du Catalan, un débat existe entre les linguistes, qui est, tout de même, relativement tranché. Le Catalan faisait-il partie du berceau occitan et de la famille des langues en provenance de l’héritage gallo-romain, duquel il se serait différencié ou était-il déjà une langue d’origine différente ? Les linguistes catalans ont définitivement opté pour cette dernière option, en rattachant la langue catalane au berceau Ibérico-roman septentrional, ce qui la différencierait indéniablement de l’Occitan qui lui est issu du berceau dialectal gallo-roman méridional. Cette théorie, a semble-t-il rallié la plupart des linguistes, même si certains continuent d’attribuer au catalan, une origine gallo-romane qui en ferait une forme de la langue occitane. Au niveau écrit, elle ressemble en bien des points au français, mais au niveau de sa prononciation elle se rapproche bien plus de l’espagnol.
Au niveau historique, les proximités politiques et linguistiques du Languedoc et de la Catalogne ne suffirent pas à résister à l’emprise des rois et à constituer ce qui aurait peut-être pu devenir, dans le courant du Moyen Âge central, un état à part entière. Les deux provinces se retrouvèrent, en effet, bientôt rattachées à des blocs différents, France d’un côté et Espagne de l’autre, au moment où les couronnes d’Europe exerçaient de fortes pressions militaires et politiques et cherchaient à renforcer leur pouvoir en étendant leur hégémonie territoriale. Elles finirent donc par se différencier et une partie de la Catalogne se retrouva même du côté de la frontière française. ( voir article sur Perpignan la Catalane)
A ce jour, toutes provinces confondues, le catalan est parlé par plusieurs millions de personnes entre la France, la péninsule ibérique et la Sardaigne. Certaines sources indiquent des chiffres dépassant les 10 millions. Province autonome espagnole, la Catalogne offre un large soutien au catalan qui est reconnu langue officielle de la province. Ses habitants le parlent depuis des siècles et se le transmettent comme une langue maternelle depuis des générations. La langue est aussi la langue officielle de la province d’Andorre. A travers leur langue, les catalans défendent à la fois une identité, une culture et une Histoire, et même si, officiellement, vous vous trouvez en Espagne, vous êtes d’abord en Catalogne.
En vous souhaitant une belle écoute et une très belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.
Sujet : citation, sagesse médiévale, poésie morale et satirique. Période : Moyen Âge central Auteur : Jean de Meung (Clopinel) (1250-1305) et Rutebeuf (1230-1285?) Ouvrage : le codicille
Bonjour à tous,
ous revenons, aujourd’hui, sur le codicille de Jean de Meung, que l’on trouve, la plupart du temps, annexé aux éditions du Roman de la rose dont il fut le co-auteur. Ce texte se présente sous la forme d’un poème critique, un legs moral que l’auteur médiéval fait à ses contemporains : clercs, hommes de religions ou puissants, notamment, et dans lequel il n’hésite pas à les égratigner ou les prendre à partie.
« Chascun scet que quant l’ame de sa charoigne part, De ce monde n’emporte avec soy point de part; Sa desserte l’emmaine, bien ou mal s’en départ, En aussi pou de temps comme il tonne ou espart.
Pensons que quant ly homs est au travail de mort, Ses biens ne ses richesses ne luy valent que mort Ne luy peuvent oster l’angoisse qui le mort, De ce dont conscience le reprent et remort » Jean de Meung – Le Codicille
Grand érudit, critique et moraliste, Jean de Meung n’en est pas à son galop d’essai pour ce qui est de manier la satire. Dans ce passage du codicille sur la conscience qui vient tourmenter le mourant sur son lit de douleur, il nous parlera tout à la fois :
de la vacuité de l’obsession d’accumuler des biens matériels et des richesses, pire encore quand ils sont acquis de manière malhonnête (« Bien mal acquis ne profite jamais »)
de ne pas transmettre à des héritiers de telles richesses mal acquises, au risque de leur empoisonner la vie et de les vouer eux-même « aux enfers ».
Le thème de la mauvaise conscience et des tourments qui se font jour face à la mort, au sujet de ses propres inconduites, n’est pas nouveau et reste cher au moyen-âge. Nous sommes dans l’Europe médiévale du XIIIe siècle et il est donc question ici de mettre en pratique les préceptes de morale et de conduite chrétienne, sans attendre qu’il soit trop tard : ce monde n’est qu’un passage et nous n’emmènerons rien dans l’au-delà que notre âme et nos actions passées.
On retrouvera pratiquement ses vers à l’identique chez Rutebeuf, et au vue des dates, Jean de Meung s’est certainement inspiré directement du célèbre jongleur et trouvère. Voici les vers de ce dernier, tirés de son dit de la croisade de Tunis :
« Vous vous moqueiz de Dieu tant que vient a la mort, Si li crieiz mercei lors que li mors vos mort Et une consciance vos reprent et remort ; Si n’en souvient nelui tant que la mors le mort. » Rutebeuf – Le dit de la croisade de Tunis
« Vous vous moquez de Dieu jusqu’à l’heure de la mort, et vous lui criez grâce lorsque la mort vous mord, que dans votre conscience sont reproches et remords; Nul n’y pense jusqu’au moment où la mort le mord. » Traduction de Michel Zink
Pour élargir au delà du moyen-âge chrétien occidental, dans nombre de cultures et de pratiques spirituelles, cultiver la conscience de sa propre impermanence et de sa propre mort est considéré, loin de toute forme de pensées négatives ou morbides, comme un guide efficace dans les actions de la vie (leur intensité, comme leur profondeur).
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
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Période : moyen-âge central, XIIIe siècle Conservation : Musée de Condé, Chantilly Manuscritancien : le Psautier d’Ingeburge
Bonjour à tous,
e week end pascal nous donne l’occasion de vous souhaiter de joyeuses pâques tout en vous parlant d’un célèbre manuscrit ancien du XIIIe siècle et du personnage historique qui s’y trouve attaché. Il s’agit d’un ouvrage religieux et même d’un livre de prières, connu sous le nom de Psautier d’Ingeburge, du nom de la reine de France Ingeburge de Danemark (Ingeborg), seconde et « éphémère » épouse du roi Philippe-Auguste, pour lequel le manuscrit aurait été réalisé et qui lui aurait appartenu.
La cène, Psautier d’Ingeburge, enluminures et peintures sur feuille d’or du XIIIe siècle
L’étrange et douloureux destin
de la reine Ingeburge de Danemark
Concernant le destin de cette jeune noble danoise, fille du roi Valdemar 1er, en tant que reine de France, on se souvient qu’il fut assez particulier puisque, dès le lendemain de la nuit de noces, le roi Philippe Auguste la rejeta et s’employa, dés lors, à faire annuler ce mariage. A ce jour, le mystère reste entier sur ce qui survint, cette nuit-là, dans la chambrée royale et les historiens s’y sont perdus en conjectures, sans que l’on puisse rien avérer.
Suite à son rejet par le roi, la jeune danoise qui n’a alors que 18 ans cherchera et obtiendra l’appui du pape et de Rome contre l’annulation du mariage. Le roi lui fera payer puisqu’il lui imposera une errance de plus de vingt ans, en la tenant recluse ou prisonnière dans divers monastères et forteresses royales. Il surseoira même à l’interdiction du pape en finissant par se remarier, même s’il n’eut jamais gain de cause face à l’Eglise. Quatre conciles se prononcèrent, en effet, en défaveur de l’annulation et rien ne fit jamais fléchir Rome, ni la détermination de Ingeburge à maintenir son honneur sauf et à défendre son statut de reine de France.
Vingt ans après, à la mort de sa troisième et illégitime épouse aux yeux de Rome, Agnès de Méran, Philippe-Auguste réhabilitera la noble danoise sur le trône, comme il l’avait répudié, sans aucune explication. Elle aura, entre temps, subi ses foudres pendant de longues années, de sévices psychologiques en humiliation, pour une raison encore, à ce jour, inconnue, comme nous le disions plus haut.
Concernant la réhabilitation tardive d’Ingeburge, elle fut à l’évidence plus le fruit de calculs et de manoeuvres politiques en vue d’alliance de la part de Philippe-Auguste que dénotant d’une quelconque volonté d’expiation face au sort qu’il avait réservé à la jeune femme. La stratégie fut vaine puisqu’il n’obtint rien des danois face aux anglais, mais la reine y gagna au moins sa liberté.
Une décennie plus tard, à la mort du roi, ce dernier tint, dans son testament, à que soit rendue à la reine, la dot de 10 000 marcs d’argent qu’il avait « injustement » perçue, à l’occasion de ce mariage; cette volonté inexpliquée d’effacer totalement cette union sera restée implacable jusqu’au bout. Après la mort de Philippe Auguste, Ingeburge fut reçu avec tous les égards de son rang par Blanche de Castille et le nouveau roi Louis VIII, elle put alors se consacrer à ses « oeuvres », jusqu’à 1238, date de sa mort.
Le prestigieux Psautier d’Ingeburge
omposé de 197 feuillets, ce manuscrit, riche en illustrations et enluminures, se trouve conservé au musée de Condé à Chantilly. A la faveur du week end de Pâques, nous en partageons ici quelques unes liées à cette fête religieuse. En plus du psautier et de ses enluminures, le manuscrit comprend aussi un calendrier décoré, ainsi que plus de cinquante peintures et encore d’autres prières et oraisons.
La reine Ingeburge y a fait écrire les dates de la mort de ses parents, ainsi que celle de la bataille de Bouvines qui consacrait la victoire de Philippe-Auguste, mais aussi la fin de sa période de souffrances et de réclusion.
Après la mort de cette dernière, le manuscrit resta attaché à la maison royale et il comporte une mention qui atteste qu’il aurait appartenu par la suite au roi Louis IX, Saint louis. Il fut d’ailleurs conservé dans le courant du XIVe siècle au château de Vincennes comme une relique de ce dernier roi.
Après le XIVe siècle, pour une raison inconnue, le manuscrit partit en périple jusqu’en Angleterre où il demeura jusqu’au milieu du XVIIe, date à laquelle il revint finalement en France. Une mention ajoutée par un faussaire sur le manuscrit tentait d’expliquer les raisons de ce passage en Angleterre mais ses affirmations ont été démontées depuis la fin du XIXe siècle, notamment par l’historien Léopold Delisle.
Après avoir été la possession de plusieurs familles ou collectionneurs, ce psautier fait partie désormais de la collection du Musée de Condé. Outre le fait qu’il est passé dans les mains de grands personnages historiques, il demeure un précieux témoin de l’art légué par les ateliers d’enluminures des débuts du XIIIe siècle.
En vous souhaitant une belle journée et de joyeuses pâques !
Fred
Pour moyeagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes