Sujet : citations, histoire, monde médiéval, foi, fidélité au seigneur, monde féodal et valeurs du moyen-âge central, rattachement au fief, mentalités médiévales. Période : moyen-âge central Auteur : Jacques le Goff Ouvrage : la civilisation de l’occident médiéval
“Mais on sent ce qui se passe de décisif à l’époque carolingienne pour le monde médiéval. Chaque homme désormais va dépendre de plus en plus de son seigneur, et cet horizon proche, ce joug d’autant plus lourd qu’il s’exerce dans un cercle plus étroit seront fondés en droit. La base du pouvoir sera de plus en plus la possession de la terre, et le fondement de la moralité sera la fidélité, la foi qui remplaceront pour longtemps les vertus civiques gréco-romaines.-romaines. L’homme antique devait être juste et droit, l’homme médiéval devra être fidèle.” Jacques Le GOFF, historien médiéviste (1924-2014)
La civilisation de l’occident médiéval.
Sujet : troubadours, poésie satirique, poésie morale, chanson, musique médiévale, pastourelle. occitan. Période : moyen-âge central, XIIe siècle Auteur : Marcabru (1110-1150) Titre : « L’autrier jost’ una sebissa » Album : Bestiarium (1997) Interprète : La Reverdie
Bonjour à tous,
Nous partons aujourd’hui à la découverte des origines de l’art des troubadours occitans et provençaux avec l’un des premiers d’entre eux, à tout le moins un parmi les plus anciens connus à ce jour, pour nous avoir légué une oeuvre écrite, soit Marcabru ou Marcabrun quand on francise son nom.
Marcabru: éléments de biographie
‘histoire et la biographie de Marcabrusont à mettre au conditionnel car on n’en sait peu de lui. Enfant illégitime, « jeté à la porte d’un homme puissant »* élevé sans doute par le noble Audric del Vilar, seigneur d’Auvillar dans l’Occitanie du XIIe siècle, celui qui se fait aussi surnommer Pain Perdu est d’origine apparemment Gasconne. Son nom est-il un pseudonyme, fils de dame brune nous dit-il ou faut-il plutôt y voir un clin d’oeil occitan à un bouc, un mâle caprin ? Difficile de l’affirmer. On sait encore de lui qu’il côtoya un troubadour du nom de Cercamon(cherche-monde) dont il fut vraisemblablement l’ami et, peut-être même l’élève, quand on n’en fait pas plutôt, à l’inverse, le maître.
Il y a, concernant Marcabru,tant de zones d’ombre que certains spécialistes de littérature médiévale et, notamment, la professeur Laura Kendrick ont même formé l’hypothèse que les quelques quarante trois ou quarante quatre poésies qu’on lui attribue pourraient être, en réalité, un corpus plus qu’un auteur. Ajoutons que cette hypothèse semble, à ce jour, peu suivie et qu’on s’accorde encore tout de même bien plus souvent sur l’idée que Marcabru fut une personne réelle, même si l’absence de données fiables ou d’archives le concernant pourrait, il est vrai, donner quelques vertiges.
Une pastourelle de Marcabru par le groupe italien La Reverdie
Une poésie lyrique, satirique et morale
« Marcabru, fils de dame Brune, fut engendré sous une étoile telle qu’il sait comme Amour se déroule, écoutez car jamais il n’aima nulle femme, et d’aucune ne fut aimé. » Le chant de Marcabru.
Avec sa poésie satirique et morale, son langage quelquefois « vert », avec encore ses critiques du « fin ‘amor », cet amour courtois qu’affectionneront tant d’autres poètes et chanteurs occitans après lui, Marcabru n’apparaît pas comme l’archétype du troubadour, mais plutôt comme un être en marge. Poète de cour, chassé lit-on, par endroits, pour avoir convoité la dame d’un seigneur, il serait passé de la cour du Duc d’Aquitaine à celle de Castille et aurait vécu nombre d’années en Espagne. Au vue de la morale qu’il défend et de sa misanthropie qu’on a quelquefois pris pour de la misogynie tant il s’en prend aux femmes légères et volages, cela paraît un peu étonnant. Luxure, prostitution, infidélités, adultères multiples, entre les lignes de sa satire qui ne s’en tient pas qu’aux moeurs de son temps qu’il juge dépravés, mais s’aventure aussi sur des terrains plus politiques, sa poésie prendra souvent un tour moral, mais on y retrouvera également de belles envolées lyriques et bucoliques avec de nombreux vers chantant la nature, ses animaux et ses saisons.
(Ci-contre La bergère William Bouguereau, XIXe siècle.)
Pour le reste, ce troubadour occitan des débuts du XIIe siècle demeure l’auteur de la plus ancienne pastourelle connue, ce genre dont nous avons déjà parlé ici et qui met en scène une bergère mignonnette qu’un noble seigneur ou chevalier tente en vain de séduire ou même pire force dans certains cas, quand cette dernière ne se laisse pas tourner la tête par la condition sociale, ni les richesses de ce passant aux mauvaises manières quand elles ne sont pas détestables ou exécrables.
Ajoutons enfin qu’on trouve aussi dans la poésie de Marcabru des mentions faites du Roi Arthur de Bretagne et de ses chevaliers ce qui en fait encore l’un des premiers troubadours à avoir abordé le sujet des légendes arthuriennes dans ses chansons.
Les interprètes du jour : « La reverdie »
Aujourd’hui, nous vous proposons la version de cette pastourelle par l’ensemble italien La Reverdie dans l’album Bestarium qu’il dédiait en 1997 aux animaux et à la présence de la nature dans la musique du moyen-âge.
Formé originellement en 1986 par quatre chanteuses, musiciennes et instrumentistes, qui se trouvent être aussi deux couples de soeur, l’ensemble La Reverdie s’est bientôt entouré de nouveaux collaborateurs dont le chanteur et instrumentiste Doron David Sherwin qui accompagne la formation dans ses aventures artistiques et musicales depuis le début de années quatre-vingt dix. A titre anecdotique, on retrouvera même une collaboration avec Gérard Depardieu à l’occasion d’un festival à la Basilique de Saint Vital, à Ravenne, autour de lectures de Saint Augustin.
En vingt ans de production artistique, on doit au très actif ensemble italien, près de vingt-cinq albums, dans un répertoire purement médiéval qui couvre les XIIIe et XIVe siècles. Leur champ d’investigation va de la musique sacrée à la musique profane et inclut encore des prestations autour de chants de noël. Le registre est souvent composé de chants polyphoniques ou monophoniques à capela mais les instruments viennent aussi soutenir les voix des artistes sur certaines pièces, quand le besoin s’en fait sentir.
Leur site web est en italien mais tout y est et il n’y manque rien des concerts aux festivals et actualités de la formation. Le groupe dispose également de sa propre chaîne youtube sur laquelle vous pourrez encore trouver quelques vidéos supplémentaires de leurs prestations.
La très belle version de cette pastourelle du troubadour occitan interprétée ici par cette formation est sans doute un peu éloignée de sa version originale, en terme de tessiture de voix, puisqu’on apprend dans une autre des poésies de Marcabru que ce dernier qu’il avait la voix plutôt « rude » et « rauque », mais la virtuosité et la pureté dans l’exécution nous le font bien vite oublier. Il en existe d’autres versions à la ronde que le futur nous donnera assurément l’occasion de vous faire partager, mais nous ne résistions pas au plaisir de vous parler, aujourd’hui, de cet excellent ensemble médiéval italien.
Les paroles de la chanson et pastourelle
de Marcabru en occitan avec adaptation
On notera qu’il s’agit ici d’une version raccourcie de la pastourelle originale de Marcabru qui contient en réalité treize strophes. L’adaptation en français moderne est tirée des Poésies Complètes du Troubadour Marcabrupar J M Dejeanne (1909).
Ajoutons que la dernière strophe est traduite très « début de XXe siècle » tout de même et avec un rien de pudibonderie. La version originale est nettement plus rude, mais en puisant dans les racines latines communes de l’occitan et du français, je suis certain que vous trouverez vous-même une traduction plus conforme.
L’autrier jost’ una sebissa de Marcabru
L’autrier jost’ una sebissa trobei pastora mestissa, de joi e de sen massissa. Si cum filla de vilana, cap’ e gonel’ e pelissa vest e camiza treslissa, sotlars e caussas de lana.
L’autre jour, près d’une haie,
je trouvai une pastoure métisse (de moyenne condition),
pleine de gaieté et de sens;
elle était fille de vilaine;
vêtue d’une cape, d’une gonelle
et d’une pelisse, avec une chemise maillée,
des souliers et des chausses de laine. »
Ves lieis vinc per la planissa: — »Toza », fi·m ieu, « res faitissa, dol ai car lo freitz vos fissa ». — »Merce Dieu e ma noirissa, pauc m’o pretz si·l vens m’erissa, pauc m’o pretz si·l vens m’erissa, qu’alegreta sui e sana ».
Vers elle je vins par la plaine
« Jouvencelle, lui dis-je, être enchanteur,
j’ai grand deuil que le froid vous pique. »
« Sire, dit la vilaine, grâce à Dieu et ma nourrice,
peu me chaut que le vent m’échevèle,
car je suis joyeuse et saine. »
— »Bela », fi·m ieu, « cauza pia, destors me sui de la via per far a vos compaignia; quar aitals toza vilana no deu ses pareill paria pastorgar tanta bestia en aital terra, soldana ».
« Jouvencelle, lui dis-je, objet charmant,
je me suis détourné du chemin
pour vous tenir compagnie
car une jeune vilaine telle que vous
ne doit pas, sans un compagnon assorti,
paître tant de bétail
dans un tel lieu, seulette. »
— »Don, tot mon ling e mon aire vei revertir e retraire al vezoig et a l’araire, Seigner », so·m dis la vilana; « Mas tals se fai cavalgaire c’atrestal deuria faire los seis jorns de la setmana ». « Sire, tout mon lignage et toute ma famille,
je les vois retourner et revenir
à la bêche et à la charrue,
Seigneur, dit la vilaine;
mais tel se dit chevalier
qui devrait faire le même métier
durant six jours de la semaine. »
— »Bela », fi·m ieu, « gentils fada, Vos adastret, quam fos nada, d’una beutat esmerada sobre tot’ autra vilana; e seria·us ben doblada si·m vezi’ una vegada, sobeira e vos sotrana ».
«Jouvencelle, dis-je, gentille fée vous dota, quand vous naquîtes, d’une beauté suprême sur toute autre vilaine et vous seriez doublement belle si je vous voyais une fois Moi dessus et vous sous moi.
— »Don, hom coitatz de follatge jur’ e plieu e promet gatge: Si·m fariatz homenatge, Seigner », so·m dis la vilana; « non vuoil ges mon piucellatge, non vuoil ges mon piucellatge camjar per nom de putana ».
« Sire, homme pressé de folie jure, garantit et promet gage; ainsi vous me feriez hommage, Seigneur, dit la vilaine; mais, en échange d’une légère récompense, je ne veux pas laisser mon bien le plus cher pour être perdue de réputation. »
En vous souhaitant une très belle journée.
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
* Les biographies des troubadours en langue Provençale, Camille Chabaneau, 1885.
Sujet : édito mars 2017, plus de 400 articles sur le monde médiéval, divertissement, moyen-âge historique, moyen-âge imaginaire.
Bonjour à tous,
our ceux qui arrivent sur le site à la faveur d’une recherche sur les moteurs de recherches ou par hasard, sachez que vous y trouverez plus de 400 articles sur le sujet du moyen-âge. Pour les autres, nous vous remercions chaleureusement de nous être fidèles et de nous suivre dans notre exploration du monde médiéval sous toutes ses formes.
Moyenagepassion est né d’un intérêt et d’une passion, autant que d’un questionnement. Qu’est-ce que le monde médiéval et pourquoi interpelle-t-il autant certains d’entre nous? Cette question en recouvre en réalité deux autres : qu’est-ce que le moyen-âge historique et qu’est-ce que le moyen-âge « reconstruit », soit celui que nous percevons ou que nous nous représentons encore aujourd’hui ? Quelle est la frontière entre les deux? Y-a-t’il des dénominateurs communs? Pour répondre à ces questions, nous avons décidé d’avancer avec un parti-pris, celui de vous divertir tout en vous informant. Vous trouverez donc ici de quoi vous amuser, de quoi explorer et, nous l’espérons, de quoi réfléchir.
Du moyen-âge « moyenâgeux » au monde médiéval: les enseignements de l’Histoire
epuis sa création, Moyenagepassion couvre donc des sujets qui touchent à l’Histoire du monde médiéval : sa musique, sa littérature, sa poésie, sa chevalerie, ses batailles et ses personnages, sa science, sa médecine, son vieux français aussi. A travers tout cela, il est question d’approcher la vie au moyen-âge dans sa réalité autant que de déconstruire les idées reçues qui, souvent, l’ont accompagnées. Pour compliqué et exigent que cela puisse être, c’est l’esprit véritable de cette période et sa restitution fidèle que nous recherchons .
Même si les historiens médiévistes continuent d’effectuer un grand travail depuis le XXe siècle pour faire le deuil des préjugés qui, du siècle des lumières au XIXe, ont projeté sur ce long moyen-âge, des caricatures « commodes », nos usages langagiers trahissent encore sur ces mille ans d’Histoire nombre de fausses idées.
« C’est le moyen-âge », dit-on d’un air entendu pour se référer, tout à la fois à un monde archaïque, violent », « barbare », « sale », mâtiné d’obscurantisme et d’ignorance. « chaque siècle a son propre moyen-âge » peut-on encore entendre citer dans le même esprit. Au listing des phrases creuses, ont-ils encore nos siècles leur propre antiquité, leur propre renaissance ou leur propre préhistoire ? Tant d’idées reçues se sont cristallisées dans nos imaginaires que nous en sommes même venus à confondre « médiéval » l’adjectif correct qui se rapporte à cette période et « moyenâgeux » l’adjectif péjoratif qui se rapporte à ce moyen-âge « obscur », ces « temps sombres », comme si notre monde moderne se tenait, lui, dans la grande lumière du savoir et de la paix retrouvée.
Alors oui, une des ambitions premières de moyenagepassion reste bien d’aller rechercher dans l’Histoire sérieuse, celle des laboratoires d’universités, des thèses, et des sources fiables, ce que pouvait être véritablement le moyen-âge et même quelquefois, à travers nos recherches et nos articles, de montrer que les influences du monde médiéval qui perdurent jusqu’à nos jours ne sont pas toujours celles que l’on croit. Cela demande des recherches, des lectures, le passage obligé par l’histoire comparative mais également, autant que faire se peut, le recours à l’historiographie, cette discipline qui consiste à mettre en comparaison les différentes versions que l’Histoire nous propose d’un même fait, à travers les âges et les idéologies dont elle est si difficilement exempte parce que les historiens sont aussi des hommes produits d’un contexte, d’un terroir, d’une culture.
Funambule en équilibre sur le fil :
restituer sans encenser, éviter les écueils
uand le monde moderne tout imbu de ses propres lumières, de ses idéologies, et quelquefois souvent de son auto-satisfaction, pointe le « barbarisme » du passé et de ce moyen-âge « obscur et ignorant » comme pour mieux chercher à briller, il n’est donc pas question pour nous, on l’aura compris, de se laisser duper. D’une certaine façon, peut-être avons-nous perdu quelques leçons de ce monde médiéval qu’il pourrait nous être utile de nous souvenir pour mieux nous comprendre nous-mêmes. Peut-être même encore est-ce cela que nous cherchons pour partie, en nous retournant quelquefois vers lui, avec des envies festives et une pointe de nostalgie ?
Pour autant, s’il s’agit de rétablir la justesse des vues, il serait tout aussi absurde d’encenser de manière aveugle ce moyen- âge retrouvé, en tombant dans un excès inverse de « passéisme ». Si l’on n’en reste pas moins homme, le travers du jugement moral est un premier écueil de principe que les Sciences Humaines se doivent d’éviter mais, au delà même, les historiens nous enseignent avec défiance, à ne pas céder à la tentation de la transposition à l’emporte-pièce. Le moyen-âge reste un ailleurs, un monde complexe de signes et de symboles dont les parentés de langage avec le nôtre pourraient quelquefois nous induire à des rapprochements faciles si nous n’y prenions garde et c’est encore un autre écueil auquel il ne faut pas céder. Doit-on pour autant s’interdire de jeter entre cette longue période de l’histoire et notre modernité des ponts ? Sans doute pas.
Miroir Miroir, le moyen-âge aujourd’hui
t comme si tout cela n’était pas suffisant, dans ce jeu de miroirs où notre monde moderne se mire, avec plus ou moins de justesse, dans l’eau de son passé, suivant qu’il le fasse par l’oeil d’historiens soucieux de méthode ou de contemporains plus éloignés de ces préoccupations d’exactitude et de rigueur, nous voulons encore, ici, aller plus loin. Et c’est, en effet, une autre des ambitions qui nous guident que de rechercher, au sens le plus large possible, les marques du moyen-âge et les signes de notre engouement actuel pour cette période jusque dans notre présent, car ils existent de toute part. Alors, ce moyen-âge qui a la « cote », quel est-il ?
Avec la belle saison qui approche, pas une semaine ne passera sans qu’on le fête, ici ou là. Dans la France entière, mais encore dans de nombreux lieux d’Europe, les festivals et les festivités sont chaque année, innombrables; on se costume, on parade, on festoie, on joue et on danse à l’ombre des remparts de nos moindres châteaux et chaque ville fait chanter ses vieilles pierres. Histoire vivante, archéologie, archéo-sites, de nombreuses associations célèbrent aussi le monde médiéval, à leur manière, en tentant de le recréer le plus fidèlement possible et même parfois de le revivre au quotidien dans des lieux protégés et qui se tiennent comme hors du temps. Vous y trouverez des passionnés intarissables sur leur sujet qui y occupent leur week-end et leurs heures libres.
Dans la musique, qu’ils s’agissent de formations classiques s’abreuvant à la source des manuscrits anciens et médiévaux, ou même de groupes plus folkloriques mettant en scène un moyen-âge imaginaire qui puise dans le répertoire profane, festif ou même encore dans des légendes celtiques réinventées, la référence à la période médiévale a, là encore, la vie belle et trouve largement son public. Dans nos médias, un certain moyen-âge a aussi bien trouvé sa place. Les succès télévisuels de séries comme le Trône de fer ou comme Kaamelott l’ont démontré, mais encore celui des films de Peter Jackson sur l’oeuvre de JRR Tolkien. De ce point de vue là, sans doute cette période du passé a-t-elle supplanté l’engouement pour les péplums sur la mythologie ou sur l’antiquité qui fleurissaient de toute part au XXe siècle et dans les années-soixante. Dans notre littérature enfin, nos rayons de librairie regorgent de sagas palpitantes ayant souvent pour théâtre un moyen-âge fantastique et imaginaire et même quand les ouvrages sont historiques et quelquefois plus âpres à la lecture, les succès sont au rendez-vous, des ouvrages comme la « cathédrale de la mer » ou le « nom de la rose » l’ont largement démontré.
Embrasser tous les moyen-âges: découvrir, expérimenter, s’informer, rire et se divertir
otre monde a faim de moyen-âge et ce qui, aujourd’hui,s’y donne à lire et y résonne encore nous intéresse donc tout autant, qu’il s’agisse de très sérieuse histoire vivante ou d’archéologie, ou même d’événements et de représentations plus fantaisistes ou fantastiques. Car même si ces dernières évocations n’ont souvent plus grand chose à voir avec la réalité de ces mille ans d’Histoire, elles nous disent beaucoup de notre monde actuel, des espaces qu’il remplit autant de ceux qu’il laisse vides. Alors bien sûr, sans doute voudra t’on faire la différence entre un moyen-âge des puristes, animés de l’ambition de sa restitution exacte et un autre plus fantasmagorique et rêvé, moins criant de vérité historique ? De notre côté, nous ne voulons pas faire l’impasse justement parce que comprendre ou même tracer des lignes claires, imposent que l’on puisse s’aventurer sur tous les territoires, y compris ceux de l’imaginaire. C’est vraiment avec un grand angle observons tout ces « moyen-âges » et de cette façon aussi, chacun peut y trouver sa place.
Au sortir de tout cela, l’ambition est vaste et l’objet est large. Pour le cerner, nous privilégions, pour l’instant, l’approche focalisée, un peu à la manière de la peinture impressionniste. Par petits points, par petites touches, en nous défiant des grandes généralités ou pire des généralisations, l’idée est de faire un travail patient de compulsion, de recherche et d’information précis sur les sujets que nous traitons, avec l’exigence de l’objectivité et celle des sources sérieuses. Avec le temps, dans cette confrontation du moyen-âge « reconstruit » par les historiens et les sources qui nous en sont parvenus, et le moyen-âge représenté ou remis en scène par notre monde moderne, nous espérons que nous saurons un peu mieux tracer les lignes de démarcation, entrevoir les ponts aussi pour, finalement, avoir une vision plus claire du moyen-âge historique, autant que de notre monde moderne, de ses racines médiévales et de ses aspirations.
Comme un alchimiste derrière un athanor en forme de plume, avec ses encres pour ingrédients, cet espace web reste aussi un laboratoire d’expérimentation. Et encore une fois, comme il s’agit aussi de divertissement, nous ne nous privons pas, par instants, d’être facétieux ou de nous adonner au goût de la farce. Pour autant que les sujets que nous y abordons puissent être sérieux, nous ne voulons, pour rien au monde, laisser l’ombre d’un personnage qui serait tout droit sorti d’un roman de Umberto Eco, nous ravir le plaisir de rire et de vous divertir !
Merci encore à tous d’être là et de nous accompagner dans ce voyage. En vous souhaitant une très belle semaine!
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
NB : les illustrations et enluminures de cet article sont tirées du manuscrit ancien du XIIIe siècle connu sous le nome de la bible de Morgan ou de Maciejowsky.
Sujet : Kaamelott, légendes arthuriennes, roi Arthur, pécores, Guethenoc, Roparzh, bête du Gévaudan, humour, non sens, , audio, inédit, comédie, hommage. Période : moyen-âge central, haut moyen-âge pour la légende. Auteur : Votre serviteur à la manière de l’auteurAlexandre Astier
Série télévisée culte, M6, Calt Production Média : épisodes audio, chaîne youtube
Bonjour à tous,
ous en avions déjà posté deux ici et en voici un nouveau. Il s’agit donc d’épisodes inédits et d’un travail d’écriture et audio autour de la série télévisée culte Kaamelott et « à la manière » d’Alexandre Astier.
Cette fois-ci, l’histoire est en deux parties et il s’agit là du première épisode. Il met en scène les deux paysans principaux de la série. Roparzh (Gilles Graveleau à l’écran) et Guethenoc (Serge Papagalli), ainsi que le Roi Arthur (Alexandre Astier).
Dans Kaamelott, les deux « pécores », comme les appelle le Roi Arthur, n’ont de cesse de se battre et de se chamailler pour un oui ou pour un non. Ils ont tous les deux, bien sûr, de forts accents l’un, Guethenoc est sans doute plus dauphinois et drômois (Serge Papagalli), l’autre, Roparzh, tire un peu plus du côté de l’Isère, de Grenoble, avec peut-être même une légère pointe de savoyard dedans (Gilles Graveleau). Comme pour les épisodes précédents, l’audio est accéléré au niveau du traitement, comme d’autres séries audio du type de celles que François Pérusse faisait à la radio, il y a quelques années, ou encore du Donjon de Naheulbeuk.
Pour ceux d’entre vous qui relèveront d’emblée l’anachronisme du titre de cet épisode – cette affaire de la bête du Gévaudan, datant du XVIIIe siècle (1764) – , je précise que c’est un clin d’oeil à l’auteur Alexandre Astier. Une partie de sa famille est en effet originaire de l’endroit et il s’est dit, à plusieurs reprises, particulièrement intéressé sur le sujet. Il projette même d’écrire sur la question (peut-être un long métrage ?) à un moment donné et dans le futur.
Kaamelott, épisode audio inédit
en hommage à la série d’Alexandre Astier
Les légendes arthuriennes au service d’une comédie & un humour résolument modernes
ncore une fois, dans la série originale Kaamelott, il s’agit d’humour à propos du moyen-âge, et même plutôt d’humour tout court mais pas du tout d’humour médiéval. L’ambition n’est pas là et l’écriture, au contraire, est résolument moderne. Si le moyen-âge ne s’y réduit pas non plus qu’à une toile de fond, il n’est pas question d’avantage de coller totalement aux valeurs de la chevalerie médiévale ou de les encenser, pas plus que de suivre le fil des versions très chrétiennes du Graal d’un Chrétien de Troyes ou d’autres auteurs de la période médiévale. Nous sommes ici plutôt dans le mythe de « l’anti-héros ». Si les marques et les temps forts de la légende sont respectés (bien que l’auteur ne s’interdise pas certaines libertés), la série se présente avant tout comme un contre-pied humoristique.
L’auteur, Alexandre Astier se joue, dans une dérision constante, d’abord et avant tout de la nature humaine, de ses travers et de ses facéties. Au final, le Roi Arthur de Kaamelottqu’il campe à l’écran, a plus de maille à partir avec la stupidité incommensurable de ceux qui l’entourent qu’avec des intrigues touchant la quête véritable du Graal. Nous sommes ici résolument dans la « comédie » moderne, assumée et définie au sens large puisqu’elle ne s’enferme pas dans le genre du « faire rire » à tout prix.
Pour analyser plus finement les relations entre le moyen-âge littéraire historique des légendes Arthuriennes et le moyen-âge restitué dans sa modernité « Kaamelottienne » (passez-moi le néologisme), il faudra sans doute attendre les minutes de colloque de l’université de la Sorbonne sur la question, en espérant qu’elles soient publiées pour ceux qui ne peuvent s’y rendre, ou même, un peu plus tard dans le temps, la thèse de Florian Besson sur la question. Mais tout cela nous sort un peu de notre sujet du jour, alors en attendant voici le script de nos âneries « à la manière » d’Alexandre Astier.
La bête du Gévaudan 1 : le script
(ambiance exterieur, bruit de piquet)
Extérieur, campagne, Guethenoc et Roparzh sont affairés ensemble à bricoler vaguement une clôture.
Guethenoc: Nom d gu, mais faites un peu attention à c’que vous faites, vous voyez bien que vous y plantez tout de traviole là.
Roparzh : Ah vouais. Tout à l’heure quand vous prendrez ma main dans votre tronche, vous m’direz si vous la trouverez assez droite pour vous ou si ça vous fait des problèmes d’angles !
Guethenoc: Non mais avec vous c’est simple on peut jamais rien vous dire…
Roparzh : Vouais bin d’toute façon, c’est pas de le savoir qui vous empéche d’l’ouvrir !
Guethenoc: Non, mais donnez moi cette masse, tiens ! j’vais le faire, là de voir ces piquets tout tordus comme ça, ça m’fait mal au coeur ! De toute façon, tout ce que vous faites, vous l’faites toujours tout de traviole…
Roparzh : Bin, tiens, faites moi plaisir ! V’nez la chercher la masse, que j’vous la mette directement dans la gueule !
Générique.
I se battent en silence. Arthur arrive
Arthur : QU’EST CE QUE VOUS FOUTEZ LA ENCORE LES DEUX? ENCORE EN TRAIN DE VOUS TAPER DESSUS ?
Guethenoc: Ah sire, bonjour, non mais rien ça va. On essaye d’écouter vos conseils, on travaille un peu en équipe.
Roparzh : oui voila. tout à fait!, en équipe. Un qui bosse et un gros con de moustachu qui veut pas lui lâcher le fond de culotte!
Arthur : Non mais effectivement, on la sent bien la fine équipe là…
Guethenoc : Non mais on fait une clôture pour protéger nos bêtes. Justement vous tombez bien.Sire, on voulait pas venir vous déranger avec ça mais maintenant qu’vous êtes là.
Arthur :Tiens c’est nouveau ça… Normalement vous n’êtes pas trop du genre à vous embarrasser de ça. Bon alors, il se passe quoi?
Roparzh : Bin, dison s que depuis quelques temps on a repéré une bête bizarre qui tourne autour d’nos maisons et d’nos bêtes. D’la vraie saloperie !
Arthur : Tiens donc et elle ressemble a quoi cette bête?
Roparzh ; non mais ça on y jamais trop vu par ici ça, Sire. C’est un genre d’machin tout moisi… ça marche a moitié a quatre pattes avec des genre de cornes et pis des poils tout dégueulasses.
Guethenoc : Voui voila c’est ça, c’est comme i dit. Et pis ça fait des drôles de bruits comme des genres de grognements aigus, un peu ent’ la poule et le cochon, voyez. D’la vraie salop’rie.
Arthur : Bin dites donc, c’est bizarre en effet mais elle s’en est pris à vos bêtes?
Roparzh : Non à ce jour les seuls qu’on crevé, chez moi c’est de mort naturelle. Et puis chez lui comme d’habitude, à force de patauger dans la merde ses pauv’ bêtes elles sont à moitié dépressives et elles claquent toute seules. Y a même des poules qui se suicident chez lui! J’y avais jamais vu avant ça, moi!
Guethenoc : Dites ? Et mon pied dans votre cul vous l’avez déjà vu ?
Roparzh : Allez y j’vous attends, par contre c’te fois ci ,ça sera pas la peine de gueuler j’vais vous dératiser, mais dans votre totalité !
Arthur : STOP! NE RECOMMENCEZ PAS ! Bon bin j’vais voir c’que j’peux faire et on s’en reparle. Allez j’m casse. J’vous assez vu…
NOIR
Guethenoc : bon, alors on en était ou?
Roparzh : Ah bin bougez pas, j’vous faire un petit résumé. On en était à peu prés la.
Bruit de coups
Guethenoc : Aie! … Bon dieu, prévenez sa famille, y a d’la veillée funèbre dans l’air!
Générique
En vous souhaitant une belle journée!
Fred
Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.