
Citation médiévale du célèbre chevalier « sans peur et sans reproche », Pierre de Terrail de Bayard (1476 – 1524).
(ci-contre, détail de la statue du chevalier dauphinois, à Grenoble, Isère, XIXe siècle, sculpteur Raggi, 1823)

Période : haut moyen-âge, médiéval fantastique
Format : vidéo, série télévisée « culte »
Auteur/ Réalisateur : Alexandre Astier
Date de sortie : de 2005 à 2010
Production : CALT & Alexandre Astier
Diffusion : M6

Guethenoc, (Serge Papagalli ) Kaamelott.
Bonjour à tous,

Avec Kaamelott, la France, transportée dans le haut moyen-âge, découvrait  la légende du roi Arthur et de ses chevaliers de la table ronde sous un nouvel éclairage, et avec elle, une écriture, une famille et une troupe d’acteurs. Et c’est sans nul doute une des grandes forces de cette série, qui a désormais échappé  à son média pour devenir une œuvre à part entière, que d’être portée par un auteur
La trame de la série Kaamelott est celle de la légende d’Arthur et l’œuvre se décline en livres aux tons et aux formats changeants, au fil de l’Histoire et des exigences de son conteur pour mieux la servir.
En voici un résumé « relativement » court, compte tenu du fait que nous parlons de près de 30 heures de visionnage. Pour ceux qui n’ont pas vu la série, sachez que vous trouverez forcément quelques « spoils », aussi si vous êtes de ceux qui préfèrent ne rien savoir et découvrir par eux-mêmes, nous vous proposons un petit trailer en forme de mise en bouche. Pour le reste, vous pouvez avancer dans la confiance, avec Kaamelott, nous nous situons dans
KAAMELOTT :  SAISONS I à III, LA SAINTE  QUETE DU GRAAL ET LES CHEVALIERS DE LA TABLE RONDEFormat court :  7 minutes
Contenu  : 100 épisodes par saison, soit 300 au total.
« Le gras, c’est la vie » 
Karadoc, (Jean-Christophe Hembert)
Chevalier de la table ronde, Kaamelott.
De bonne volonté, tolérant et ouvert, l’Arthur d’Alexandre ASTIER est un roi résolument moderne. Quand la série débute, il a déjà libéré l’épée Excalibur de son rocher et a construit Kaamelott. Principalement entouré d’incapables, des chevaliers jusqu’à Merlin en passant par le moindre serviteur du château de Kaamelott, il lui faudra maintenant asseoir son autorité, ancrer la paix 
Pris dans un mariage politique arrangé avec la reine Guenièvre, Arthur devra aussi jouer de patience pour supporter les vicissitudes de la vie quotidienne, au milieu de sa belle famille qu’il héberge au château de Kaamelott, famille dont Léodagan (Lionel Astier) son beau père autoritaire et chicaneur, roi de Carmélide, n’est pas le moindre trublion, même si Dame Seli (Joelle Sevilla), la belle-mère, n’a pas grand chose lui envier (photo ci dessous: Léodagan et Dame Seli).



Bohort, (Nicolas Gabion), Chevalier, Kaamelott.
Grâce à l’ensemble des personnages entourant Arthur, nous aurons, quant à nous, l’occasion de toucher du doigt et de nous gausser des innombrables formes que peuvent prendre l’incompétence et le manque de vivacité d’esprit, ce que Michel Audiard aurait sûrement pu 

KAAMELOTT SAISON/LIVRE IV :Format court :  7 minutes
Contenu : 100 épisodes

Merlin (Jacques Chambon), Enchanteur officiel de Kaamelott


Tout autour, à la faveur de ces dissensions et de la passivité du roi, les complots se fomenteront pour changer la donne au royaume de Logres et les traîtres avanceront, bientôt, à visage découvert (photo ci-dessus, à droite le Roi Loth – François Rollin, à gauche Dagonet Antoine de Caunes et Galessin – Alexis Hénon). A la table ronde même, les intentions séparatistes se feront connaître auxquelles Arthur, dans sa mansuétude autant que
KAAMELOTT SAISON/LIVRE  VFormat  :  52 minutes
Contenu :  8 épisodes

Léodagan de Carmélide (Lionel Astier)  au roi Loth.
Changement de ton, changement de format, même si les choses semblent reprendre leur cours normal, les fractures sont encore ouvertes et les plaies ne sont pas soignées. Arthur s’est rangé à l’avis de tous, allant reprendre la reine Guenièvre et laissant sa maîtresse retourner vers son chevalier, mais les affres de la déprime et du découragement gagnent le roi. La quête du Graal n’a pas abouti

Ce livre est merveilleux, autant par son changement de tempo et de ton que par la profondeur de son intrigue, et c’est en virtuose du rythme et de l’écriture musicale et littéraire* que l’auteur le conduit.  La question de l’identité du héros y est posée, plus que dans aucun autre opus, et c’est d’ailleurs ce qui guidera Arthur tout au long de ce livre, puisqu’il ira chercher, dans une  quête solitaire, à la fois ses origines et sa possible descendance. 
* Rappelons qu’Alexandre Astier est également musicien-compositeur et qu’on lui doit aussi toutes les musiques de la série Kaamelott.

Format  : 40 minutes
Contenu : 9 épisodes 

César (Pierre Mondy), Empereur des Gaules, à Arthur, Kaamelott.
Avant d’entrer dans la suite de la légende, l’auteur décide ici de nous ramener en arrière dans le temps, pour mieux éclairer le départ de son œuvre et le personnage complexe d’Arthur. Nous  le suivrons donc, cette fois-ci, à Rome pour partager des épisodes marquants de l’adolescence du bon roi et son éducation romaine. Nous y croiserons un Pierre Mondy Césarisé et 

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A l’ère du DVD, ceux qui, à l’époque de sa sortie télévisuelle, ne purent accrocher sur le format court et quotidien de cette série ont, heureusement le bonheur et la joie de pouvoir l’acquérir d’un seul coup sous forme de coffrets. C’est comme ça que je l’ai moi-même découverte, en m’affranchissant ainsi de l’attente quotidienne pour la voir (et la revoir) de manière plus continue et tout à loisir. Franchement, n’hésitez pas, Kaamelott se regarde et se re-regarde et de nombreux amis et connaissances qui sont tombés dedans ne s’en sont toujours pas lassés.
L’intégrale de Kaamelott en DVD est en promotion depuis quelque temps, c’est l’occasion d’en profiter.


Perceval le Gallois, Chevalier, Kaamelott
O solitude et désespérance du « fan »! Il a revu déjà cinq à six fois tout ce qui est déjà sorti et il attend, transi, que l’auteur le régale d’un mouvement de plus. Combien de fois encore, telle la goutte d’eau sourd, inexorablement sur la pierre, a-t’il harcelé l’auteur de ses questions sur la suite? Impatience flatteuse et usante, ô Alexandre! soit salué pour ta magnanimité à chaque fois que te revient la sempiternelle ritournelle de l’amateur inquiet!
Pourtant, la suite est en marche, nous le savons, et les complications juridiques rencontrées par Alexandre Astier pour libérer son œuvre de l’ornière de ses premiers contrats semblent enfin se décanter. Ne pas avoir voulu y sacrifier est encore un signe de sa grande liberté car il l’a dit et répété, le temps étant passé depuis les premiers épisodes, si les conditions des premiers accords le limitaient, pour la suite, dans ses moyens comme dans ses mouvements, alors de suite il n’y aurait point.
Dans les méandres des pourparlers et depuis décembre 2015, il semble pourtant bien que les accords se fassent jour. Alors, si tout va bien, oui, il y aura une suite, oui il y aura des longs métrages et vraisemblablement une trilogie cinématographique Kaamelott qui contera le retour d’un nouvel Arthur dans son royaume. Concernant un retour télévisuel sur M6 sous forme d’une série appelée « Kaamelott résistance » qui conterait la période trouble durant laquelle Lancelot, ayant hérité du pouvoir au royaume de Logres de la main même d’Arthur, y régnera d’une main ferme et dictatoriale, pour l’instant, la situation semble gelé. Cela se transformera-t-il en film d’animation, en long métrage, en bandes dessinés, ou pourquoi pas en symphonie? En vérité, avec Alexandre Astier, tout reste possible tant son écriture est souple et protéiforme et tant il lui plait de suivre ses muses pour nous amener, à sa suite, dans des endroits toujours inattendus.

Alexandre Astier, Auteur-réalisateur de Kaamelott 
C’est une des particularités uniques de Kaamelott qu’Alexandre ASTIER se comporte en auteur et se met entièrement au service de la légende d’Arthur. Il a un vrai regard sur l’œuvre médiévale et une grande liberté par rapport à elle, mais il en suit la trame de manière implacable. Et, c’est sans doute là la différence entre l’auteur véritable et le comique troupier, le changement de ton ne lui fait jamais peur, pas plus que la tentation de tomber dans le stéréotype ne l’affecte. Et là où d’aucun ne prendrait aucun risque, de peur de semer leur public en route, misant ainsi sur le confort, il prend, lui, tous les risques et c’est une élégance qu’il nous fait de nous prêter l’intelligence que la médiamétrie a, semble-t-il, depuis longtemps confisquée au public.
Sans savoir si tout cela a été le fruit d’un passage en force avec la chaîne et sans en préjuger, il faut quoiqu’il en soit reconnaître à M6 d’avoir su suivre l’auteur et de lui avoir fait confiance en prenant avec lui ce risque qui, au final, s’est avéré largement payant. Comprenons nous bien, nous n’avons, quant à nous, aucun doute sur l’intelligence du public, mais d’une certaine manière, le succès de Kaamelott et son audacieuse écriture est une pied de nez à cette idée nauséabonde que l’on ne fait que servir au public ce qu’il demande et que c’est finalement lui qui tire toujours vers le bas la qualité télévisuelle des programmes et leur ambition. Kaamelott nous montre que le public est subtil et intelligent, et la télé, même, en ressort grandit. Puisse-t-elle en tirer les leçons.

André Malraux
Pour revenir à Alexandre Astier, il faut juger de l’évolution de l’écriture de Kaamelott comme de ses spectacles sur Bach (« que ma joie demeure ») ou sur la vie extra-terrestre (« l’exo conférence »), c’est un auteur talentueux qui nous demande de lui faire confiance et de le suivre, dans le drame comme dans l’humour, et refuse d’être attendu. C’est une liberté merveilleuse mais c’est aussi, encore une fois, la marque d’un grand auteur qui ne sacrifie pas son oeuvre à une vision réductrice et convenue de son public. Cela s’appelle aussi un vrai artiste. Aussi, merci mille fois encore à lui et son sens de l’Art, pour nous rendre cette intelligence et d’échapper ainsi totalement au schéma convenu. Etre un auteur libre ou ne pas être du tout, Alexandre Astier a choisi. Et comme les œuvres brillamment écrites sur les légendes deviennent, à leur tour, intemporelles, après la version de la légende Arthurienne de Chrétien de Troyes, et d’autres grands noms qui s’y sont essayés, l’Histoire devra aussi compter avec sa relecture et ré-écriture par Alexandre Astier.
Merci de votre lecture. j’ai conscience de la longueur de cet article mais d’aucuns ont consacré des sites entiers à Kaamelott, lui dédier un long article était bien le moins que nous puissions faire pour le servir.
Si vous souhaitez découvrir d’autres articles sur la série TV Kaamelott, les BD, les films et l’actu, suivez ce lien.
Une excellente journée à tous.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
« L’ardente passion, que nul frein ne retient, poursuit ce qu’elle veut et non ce qui convient. » 
Publilius Syrus   Ier s. av. J.-C


« Éteignez donc entre vous toute haine, que les querelles se taisent, que les guerres s’apaisent, et que toute l’aigreur de vos dissensions s’assoupisse. Prenez la route du saint sépulcre, arrachez ce pays des
Extrait du discours de Clermont d’Urbain II, transcription de Robert le Moine.
Lancée à l’appel du Pape Urbain II (1042-1099) à l’occasion d’une visite en France (concile de Clermond), ce que l’on a appelé plus tard dans l’histoire la première croisade visait à libérer le tombeau du Christ et reprendre Jérusalem, tombé aux mains de turcs. Il s’agissait aussi de partir à la défense des chrétiens d’Orient. Pour s’assurer que son appel soit entendu, l’Eglise accordera alors une « Trêve de Dieu » à tout ceux qui partiront, soit une indulgence plénière pour les péchés commis. (ci dessus la statue du pape Urbain II, Châtillon sur Marne, XIXe siècle)
L’appel rencontrera un succès total. Il sera relayé par des prédicateurs itinérants tel que Pierre l’Ermite et en 1096, des guerriers venus de toute la chrétienté se mettront en marche pour Constantinople, pas moins de trois armées de croisés pour un total de 150 000 hommes! Du point de vue militaire, la croisade sera un succès. Jérusalem sera repris dans ce premier mouvement, même si les années suivantes montreront que la ville Sainte ne se laisse pas si facilement conquérir quand tant de religions la convoitent. Ainsi, les croisades se succéderont et cet appel du Pape Urbain 
Des 150 000 hommes qui partirent, on dit que 15 000 seulement arrivèrent au terme de cette expédition guerrière qui aura connu dans son cours de notables débordements. Il faut aussi se replacer dans le contexte de l’époque et l’on a souvent écrit qu’outre ses objectifs chrétiens avoués, la première croisade avait fourni également l’occasion d’éloigner du royaume des chevaliers belliqueux et quelquefois désœuvrés que l’on préférait savoir loin des terres du royaume plutôt que guerroyant en ses murs.
Une très belle journée à tous!
Frédéric EFFE.
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du moyen-âge et du monde médiéval sous toutes ses formes.

Titre :  « chant de Croisade »
Compositeur : Thibaut IV de Champagne (1201-1253), roi de Navarre, Thibaut le chansonnier, Thibaut le posthume
Période : Moyen Âge central, XIIIe
Interprète : René Zosso, trouvère, vielliste, et le  Clemencic Consort


Nous partageons ici une des pièces les plus célèbres de ce chevalier gentilhomme étant parvenu jusqu’à nous, notamment grâce au troubadour moderne et vielliste suisse, passionné de musique médiévale, René Zosso (photo ci-contre). Accompagné ici du Clemencic Consort,
Du point de vue datation, on fait remonter cette chanson aux années 1238/1239 et elle aurait été écrite par Thibaut de Navarre, un peu avant son départ pour la sixième croisade, dite la croisade des Barons, à l’appel du pape Grégoire IX. Militairement, cette expédition se soldera par une déroute mais par le jeu diplomatique et tirant partie des querelles entre musulmans d’alors, elle permettra aux chrétiens de reprendre Jérusalem, Bethléem et Ashkelon, et de revenir ainsi à la situation de 1187, ce qui ne durera pas puisque tout sera perdu, à nouveau, dès 1244.

Seignor, sachiés : qui or ne s’en ira
 en cele terre ou Dex fu mors et vis,
 et qui la crois d’Outremer ne penra,
 a paines mais ira en Paradis.
 Qui a en soi pitié ne ramembrance
 au haut Seignor doit querre sa venjance
 et delivrer sa terre et son païs.
Tuit li mauvés demorront par deça
 qui n’aiment Dieu, bien, ne honor, ne pris.
 Et chascuns dit  » Ma feme, que fera ?
 Je ne lairoie a nul fuer mes amis ».
 Cil sont cheoit en trop fole atendance,
 qu’il n’est amis fors de cil, sans doutance,
 qui por nos fu en la vraie crois mis.
Or s’en iront cil vaillant bacheler
 qui aiment Dieu et l’ennor de cest mont,
 qui sagement vuelent a Dieu aler,
 et li morveux, li cendreux, demorront;
 avugle sont, de ce ne dout je mie,
 qui j secors ne fait Dieu en sa vie,
 et por si pou pert la gloire dou mont.
Diex se lessa en crois por nos pener
 et nos dira au jor que tuit vendront :
 « Vos qui ma crois m’aidastes a porter,
 vos en irez la ou mi angles sont;
 la me verrez et ma mere Marie.
 Et vos, par cui je n’oi onques aie,
 descendrés tuit en Enfer le parfont. »
Chacuns cuide demorer toz haitiez
 et que ja mes ne doie mal avoir;
 ainsi les tient anemis et pechiez
 que il n’ont sen, hardement ne pooir.
 Biax sire Diex, ostés leur tel pensee
 et nos metez en la vostre contree
 si saintement que vos puissons veoir.
Douce dame, roïne coronee,
 proiez por nos, Virge bien aüree !
 Et puis aprés ne nos puet meschoir.
Seigneurs, sachez : qui or ne s’en ira
En cette terre où Dieu fut mort et vif,
Et qui la croix d’outre-mer ne prendra,
A dure peine ira en paradis;
Qui n’a en soi pitié ni souvenance,
Au haut Seigneur doit chercher sa vengeance,
Et délivrer sa terre et son pays.
Tous les mauvais resteront à l’arrière
Qui, n’aimant Dieu, ne l’honorent, ni ne le prient.
Et chacun dit : « Ma femme que fera ?
La laisserai à nul, fut-il ami »,
Serait tomber en bien trop folle errance;
Il n’est d’amis hors celui, sans doutance,
Qui pour nous fut en la vraie croix mis.
Or, s’en iront ces vaillants écuyers
Qui aiment Dieu et l’honneur de ce mont,
Qui sagement veulent à Dieu aller;
Et les morveux, les cendreux resteront.
Aveugle soit – de ce, ne doute mie –
Qui n’aide Dieu une fois en sa vie,
Et pour si peu perd la gloire du monde.
Douce dame, reine couronnée,
Priez pour nous, Vierge bienheureuse !
Et après nul mal ne nous peut échoir.
Une très belle journée à tous et merci à nouveau pour votre présence. Longue vie!
Votre dévoué.
Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes.