Archives par mot-clé : manuscrit médiéval

Joyeuses fêtes de fin d’année 2019

Bonjour  à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionvec un peu d’avance, nous vous souhaitons un joyeux Noël ainsi que d’excellentes fêtes de fin d’année 2019.  Nous envoyons une pensée toute particulière   à tous ceux qui les passeront au travail  ou, d’une manière générale, dans des circonstances difficiles ou défavorables.

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Notes sur l’illustration

manuscrit-ancien-enluminure-noël-Psautier-moyen-ageL’enluminure qui a servi de fond  à notre illustration a été empruntée à un manuscrit médiéval daté des débuts du XIVe siècle (1310). Il s’agit  du Psautier de Robert de Lisle, référencé   Arundel MS 83. On peut le trouver au format numérique sur le site  web de la British Library   où il est actuellement conservé. Consulter ce manuscrit en ligne.

Nous profitons également de ce court message pour  vous remercier de  votre fidélité au long de cette année 2019.

Encore de joyeuses fêtes à tous .

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
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« Puisque Belle dame m’eime », un chant polyphonique courtois du XIIIe

trouveres_troubadours_musique_poesie_medievale_musique_ancienneSujet : codex de Montpellier,   musique, chanson médiévale, amour courtois, vieux-français,  chants polyphoniques, motets,
Période :   XIIIe siècle, Moyen Âge tardifcentral
Titre:   
Puisque Bele Dame m’eime
Auteur :    Anonyme

Interprète :  Anonymous 4
Album : 
Love’s Illusion Music from the Montpellier Codex 13th Century (1993)

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous vous avions déjà présenté, il y a quelques semaines, une pièce du Chansonnier médiéval de Montpellier  ( ou   Codex de Montpellier  H196 )  et nous poursuivons aujourd’hui son exploration.

Pour rappel, ce manuscrit ancien des débuts du XIVe fait un immense tribut aux chants polyphoniques et aux motets  du  XIIIe siècle. Il présente, en effet, pas moins de 336 pièces de ce type ( voir article précédent sur le Codex de Montpellier). La chanson médiévale que nous vous présentons, ici, est  àamour-courtois-musique-medievale-motets-chansonnier-montpellier-Moyen-age_s  l’image de la majorité d’entre elles puisqu’il s’agit d’un motet  d’amour courtois ayant pour titre « Puisque Bele Dame m’eime ».   On peut  la trouver interprétée par un certain nombre d’ensembles sur la scène des musiques anciennes et médiévales. De notre côté, nous avons choisi la version de la formation américaine Anonymous 4 pour vous la faire découvrir et nous en profiterons pour vous présenter ce quatuor vocal  à la longue    carrière.

« Puisque Belle Dame m’eime » par L’Ensemble  New-Yorkais Anonymous 4


Anonymous 4 sur les ailes des chants polyphoniques  de  l’Europe médiévale

L’ensemble Anonymous 4 est le fruit de la rencontre de  quatre chanteuses américaines, à l’occasion d’une session d’enregistrement dans un studio new-yorkais, au printemps 1986. Réunies autour d’une même passion pour  les chants polyphoniques et de musique médiévale,   il n’en fallut pas moins pour donner naissance à cette formation.   A plus de  trente ans de là, Anonymous 4  s’est  produit sur scène au cours de plus de 1500 représentations  sur tout le territoire américain. La quatuor a aussi   fait connaître et voyager son art dans la bagatelle de  trente -cinq pays.

amour-courtois-musique-medievale-chants-polyphoniques-anonymous-4Au cours de cette longue carrière qui  a vu son dernier concert en 2015,   Anonymous 4  a fait paraître  près de 30 albums, incluant quatre anthologies pour saluer leur large contribution à la scène des musiques anciennes et médiévales.   La formation ne s’est pas cantonnée au répertoire médiéval et on la retrouve également sur des chants de Noël, des chansons  du temps de la guerre civile américaine ou encore sur des chants celtiques ou anglais plus folkloriques. Du côté du Moyen Âge qui reste tout de même son terrain de prédilection,  Anonymous 4 a eu l’occasion d’exercer son talent sur de nombreux thèmes :  les visions d’Hildegarde de Bingen, les chants dédiés au culte marial médiéval,   le répertoire de Francisco Landini,  et encore bien d’autres  chansons de l’Europe médiévale : France, Angleterre, Hongrie,  Espagne, etc…

Membres de la formation   Anonymous  4

La dernière formation  était composée de   Ruth Cunningham, Marsha Genensky, Susan Hellauer et Jacqueline Horner-Kwiatek.   Au départ, elle fut  fondée par Ruth Cunningham, Marsha Genensky, Susan Hellauer et Johanna Maria Rose.

Voir le site web de Anonymous  4   (en anglais) – Page FB

Love’s Illusion,   l’illusion de l’amour (courtois) autour  du  chansonnier de Montpellier

En  1993, Anonymous 4   proposait au public un album  intitulé « Love’s Illusion » autour du codex de Montpellier et de ses chants courtois  polyphoniques. Ces pièces étant courtes, le quatuor féminin décidait d’en proposer un bon    chanson-musique-medievale-album-amour-courtois-codex-montpellier-moyen-age nombre et on en retrouve ainsi pas moins de 29 sur cette production.

Publié chez Harmoni Mundi, on peut encore trouver des exemplaires de cet album à la vente  en ligne. Voici un lien pour en savoir plus  : Love’s Illusion – Motets français des XIIIe et XIVe siècles (CD catalogue). Vous pourrez même y écouter des extraits de chacune des pièces.


Flos filius, « Puisque bele dame m’eime« 

Partition de cette chanson médiévale

On retrouve la partition moderne de cette pièce médiévale  chez Hans Tischler.  En 1978,   le compositeur et musicologue américain  a, en effet, réalisé un excellent travail de transcription musicale sur les pièces du Codex de Montpellier : The Montpellier Codex Fascicles 6,7 and 8.

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« Puisque Bele dame m’eime » – chanson médiévale du Codex de Montpellier. Partition de Hans Tischler

Les paroles en    vieux français
et leur traduction en français moderne

Puisque bele dame m’eime
Destourber ne m’i doit nus;
Quar iere si loiaus drus
Que je n’iere ja tensus
Pour faus amans ne vantanz.
Ja li mesdisant
N’en seront joiant,
Car nul mal ne vois querant;
Mes qu’ami me cleime
Je ne demant plus.

 » Puisque belle dame m’aime
Nul ne doit m’en  empêcher ;
Car j’ai toujours été amant loyal
Et jamais on ne m’a accusé d’être
Faux amant (infidèle) ou vantard.
Désormais, les médisants
Ne pourront plus se réjouir,
Car nul autre mal, je ne cherche ;
Qu’elle me proclame  son ami (amant)
Je ne demande rien de plus. »


En vous souhaitant une  excellente journée

Fred
Pour moyenagepassion.com
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Une Ballade médiévale satirique d’Eustache Deschamps sur les manières de table à la cour

poesie_ballade_morale_moralite_medievale_Eustache_deschamps_moyen-age_avidite_gloutonnerieSujet : poésie médiévale, littérature,  ballade médiévale, humour médiéval, moyen-français, poésie satirique, satire, vie curiale, manières de table
Période : Moyen Âge central, tardif, XIVe siècle
Auteur : Eustache Deschamps  (1346-1406)
Titre :  « Oncques ne vis gens ainsi requignier.»
Ouvrage :  Oeuvres complètes d’Eustache Deschamps, Tome V Marquis de Queux Saint-Hilaire, Gaston Raynaud (1893)

Bonjour,

N_lettrine_moyen_age_passionous partons, aujourd’hui, en direction de la fin du XIVe et les débuts du XVe siècle, avec une ballade de Eustache Deschamps. Dans cette poésie fort caustique, l’auteur médiéval nous invitait à le suivre à la cour pour y découvrir d’étranges manières de table.

Critique de la vie curiale

S’il a fréquenté longtemps les cours, du fait de ses différents offices en tant qu’employé royal, Eustache s’en est largement détourné à un moment donné de sa vie. Depuis lors, il n’a pas manqué de les critiquer vertement : jeux de couloirs, jeux de pouvoir, vie dissolue, excès, etc…  (voir notamment Va a la cour et en use souvent, mais également Deux ballades sur la cruauté des jeux de cour). C’est au point qu’on imagine que ses nombreux textes corrosifs sur la vie curiale, ont pu s’assurer de lui en fermer définitivement les portes si ce n’était le cas avant.

Eustache Deschamps n’a pas été le seul, ni le premier poète, à se livrer à ce genre de critique et il ne sera pas le dernier. On pourrait presque y voir une tradition : de Rutebeuf, à Jean de Meung, Alain Chartier,   Meschinot, et d’autres encore. Au delà de l’exercice de style, ces jeux cruels que tous ces auteurs médiévaux nous dépeignent recouvrent, sans nul doute, une réalité de la vie du cour qui se poursuivra, d’ailleurs, au delà du Moyen Âge central. Quoiqu’il en soit, sous le ton de l’humour et face à cette tablée grimaçante et « mastiquante », on ne eustache-deschamps-ballade-poesie-satirique-francais-840-manuscrit-medieval-moyen-age-tardif_speut que rattacher cette ballade d’Eustache au triste tableau qu’il nous fait, par ailleurs des cours princières et de leurs courtisans : perfidie, médisance, et, en définitive, mauvaise morale, mauvaise vie et mauvaises manières.

Le MS Français 840  & les poésies d’Eustache

Notre texte du jour a pour source le manuscrit Français 840 conservé à la BnF (voir photo ci-dessus). Cet ouvrage médiéval de 300 feuillets et daté du XVe siècle contient principalement Les Poésies d’Eustache Deschamps dit Morel. Il peut être consulté à l’adresse suivante : consulter le Français 840 sur Gallica.


Oncques ne vis gens ainsi requignier 
dans le moyen français d’Eustache Deschamps

Tristes, pensis, mas* (abattu, affligé) et mornes estoye
Par mesdiser et rappors de faulx dis
A une court royal ou je dinoye
Ou pluseurs gens furent a table assis;
Maiz oncques* (jamais) mais tant de nices* (moes, moue, grimace) ne vis
Que ceulx firent que l’en veoit mengier.
D’eulx regarder fu de joye ravis:
Oncques ne vis gens ainsi requignier* (grimacer, montrer les dents).

Li uns sembloit truie enmi* (au milieu d’) une voye* (voie)
Tant mouvoit fort ses baulifres* (lèvres) toudiz;
L’autre faisoit de ses dens une soye* (scie) ;
L’autre mouvoit le front et les sourcis;
L’un requignoit, l’autre torcoit son vis* (tordait son visage),
L’autre faisoit sa barbe baloier* (s’étaler);
L’un fait le veel* (veau), l’autre fait la brebis:
Oncques ne vis gens ainsi requignier.

D’eulx regarder trop fort me merveilloye
Car en machant sembloient ennemiz* (des diables).
Faire autel l’un com l’autre ne veoie:
L’un machoit gros, l’autre comme souriz;
Je n’oy oncques tant de joye ne ris
Que de veoir leurs morceaulx ensacher (faire disparaître, engloutir).
Or y gardez, je vous jure et diz:
Oncques ne vis gens ainsi requignier.

L’envoy

Princes, qui est courroussez et pensis
Voist gens veoir qui sont a table mis.
Mieulx ne porra sa trisse laissier.
Des grimaces sera tous esbahis
Que chascun fait; j’en fu la bien servis:
Oncques ne vis gens ainsi requignier.


En vous souhaitant une excellente journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
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« Ne m’oubliez mie », une chanson polyphonique courtoise du XIIIe siècle par l’Ensemble médiéval La Rota

trouveres_troubadours_musique_poesie_medievale_musique_ancienneSujet : musique, chanson médiévale, amour courtois, vieux-français, langue d’oïl,  chants polyphoniques, motets, manuscrit médiéval
Période :  XIIe siècle,  XIIIe siècle, Moyen Âge central
Titre: 
Ne m’oubliez mie
Auteur :  Anonyme

Interprète :  Ensemble La Rota
Album : Heu, Fortuna  (2007)

Bonjour à tous,

N_lettrine_moyen_age_passionous revenons, aujourd’hui, vers l’amour courtois avec un chant polyphonique médiéval, daté de la deuxième partie du XIIIe siècle. Cette pièce est demeurée anonyme et on peut la retrouver dans un beau manuscrit ancien dont nous vous dirons un mot ici. Nous partagerons également sa belle interprétation par l’Ensemble La Rota, ensemble médiéval québécois crée au début des années 2000.

Le Chansonnier ou codex de Montpellier H196 : trésor de la polyphonie médiévale

manuscrit-montpellier-chanson-poesie-medievale-amour-courtois-moyen-age-central-XIIIe-siecle_sAvec 336 oeuvres polyphoniques et motets, le Codex de Montpellier H196, connu encore comme Chansonnier de Montpellier est un précieux témoin de la musique polyphonique du moyen-âge central. Pour son contenu, autant que ses enluminures et l’état de sa conservation, il est, à juste titre, considéré comme un véritable trésor patrimonial. Les pièces présentées dans ce manuscrit médiéval, daté de 1300, s’étalent, dans leur grande majorité, sur la deuxième moitié du XIIIe siècle.

Vous pouvez consulter le manuscrit original en ligne ici. Vous trouverez également toutes ses pièces retranscrites dans l’ouvrage Recueil de Motets français des XIIe et XIIIe siècles, de Gaston Raynaud (1881)

Ne m’oubliez mie chanson médiévale anonyme par l’Ensemble la Rota

L’ensemble médiéval la Rota

Installés originellement au Québec, le quatuor La Rota s’est spécialisé, dès sa création, dans le répertoire des musiques médiévales. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que le nom  qu’ils ont choisi pour leur formation, fait référence à une danse du moyen-âge, mais surtout et de leurs propres mots, à la roue de la fortune médiévale dont nous vous avons souvent parlé ici.

ensemble-medieval-la-Rota-musiques-chansons-moyen-ageFondé en 2002, l’ensemble a vu ses efforts récompensés quelques années plus tard ; en 2006, il a, en effet, été primé, outre atlantique, pour son travail dans le domaine des musiques anciennes et médiévales par la Early Music América. Un an plus tard, la formation sortait un premier album qui, sauf erreur, n’a pas été suivi d’autres productions à ce jour.

Actualité

Après des débuts très prometteurs sur la scène musicale médiévale, l’Ensemble La Rota ne nous a plus laissé grand chose à nous mettre sous la dent depuis les années 2011-2012. De fait, du point de vue de leur actualité, il semble bien que la formation soit totalement en sommeil, On peut, toutefois, retrouver certains de ses membres toujours affairés dans des projets autour des musiques anciennes et du moyen-âge, notamment outre-atlantique.

Membres de l’ensemble Sarah Barnes (chant, soprano), Tobie Miller (flûte, vièle à roue, soprano), Baptiste Romain (Vielle),  Esteban La Rotta (luth, harpe gothique)

Heu Fortuna, l’album

En 2007, avec son premier album, l’Ensemble La Rota a choisi de mettre en exergue les musiques de la France médiévale de la deuxième partie du XIIIe siècle. Enregistré en l’église Saint-Augustin de Mirabel, au Québec), l’album propose vingt-une pièces de choix puisées dans différents manuscrits médiévaux dont le Codex de Montpellier.

ensemble-la-rota-musique-medievale-moyen-ageLes compositions anonymes de cette période (chansons, estampies,  rondeaux, jeu parti,…) y côtoient des œuvres d’auteurs plus célèbres comme Philippe de Vitry, Blondel de NesleGuiot de Dijon,  Gillebert de Berneville, Jehan de Lescurel.  On peut encore trouver cet album à la vente, au lien suivant :  Heu, Fortuna / la Rota.

« Ne m’oubliez mie » : chant d’amour courtois

Dans cette courte pièce anonyme du XIIIe siècle, l’amant courtois, loin de sa dame, lui chante son amour et sa loyauté, en ne tarissant pas de louanges sur les valeurs tant physiques que morales de cette dernière. Il n’en aimera jamais d’autres et il se tient dolent et affligé, dans la douleur de cet amour de loin qui est le lot coutumier des fine(s) amants médiévaux.

Le vieux-français en usage dans cette chanson ne pose pas de difficultés particulières mais nous vous en proposons, tout de même  une traduction simple et sans prétention. Pour les musiciens qui souhaiteraient s’essayer à cette partition, nous l’avons trouvée retranscrite par Han Tischler dans un ouvrage de 1978 (The Montpellier Codex, Fascicles 6, 7 and 8) et nous vous la livrons donc ici.

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Les paroles de cette chanson médiévale
dans le vieux français du XIIIe siècle

Ne m’oubliez mie,
Bele et avenant :
Quant je ne voz voi, s’en sui plus dolens,
Car je n’oubli mie
Vostre grant valour
Ne la compaignie
A nul jour.
N’avré mes envie
D’amors
D’autre feme née.
C’est la jus en la ramée,
Amours ai ! Marions i est alée !
Bone amour ai qui m’agrée !

Ne m’oubliez pas,
Belle juste et agréable !
Quand je ne vous vois plus, j’en suis d’autant plus affligé
Car je n’oublie jamais
Votre grande valeur
Ni votre compagnie, 
A chaque jour qui passe.
Et je ne désirerai jamais
D’amour
D’une autre femme.
C’est là-bas, sous le buisson,
Je suis amoureux ! Marion y est allée :
J’ai bel amour qui m’agrée.

En vous souhaitant une  excellente journée.

Fred
Pour moyenagepassion.com
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