Sujet : musée, conférences, ateliers, manuscrits anciens, enluminures, art médiéval, manuscrits médiévaux, enlumineurs médiévaux Période : Moyen Âge central à tardif Lieu : KBR Museum, Mont des Arts 28, Bruxelles. Belgique Dates : samedi 2 et dimanche 3 juillet 2022
Bonjour à tous,
ur l’agenda du week-end prochain, le KBR Museum de Bruxelles se mettra aux heures médiévales, avec un programme spécial autour de l’art des couleurs et des enlumineurs du Moyen Âge, mais aussi de la fabrication de manuscrits anciens. L’occasion en est fournie par le retour dans la capitale belge du Brussels Renaissance Festival et ces activités s’étaleront sur les journées du samedi 2 et du dimanche 3 juillet. Elles comprennent des conférences découvertes mais aussi des ateliers participatifs.
La fabrication des couleurs au Moyen Âge
Le samedi, en fin de matinée, une première conférence vous attend sur les enlumineurs médiévaux et les méthodes employées, à cette époque, pour créer les couleurs.
Titre de la conférence : couleurs et matériaux dans les livres de recettes – Un « Rouge » de Paris ? Intervenante : Sylvie Neven Horaires : samedi 2 juillet 2022 . Attention, le musée vient de nous signifier que cette conférence a été reportée à une date ultérieure.
Titulaire d’un doctorat en Histoire de l’art, Sylvie Neven est également en charge de la coordination du projet Colour ConText en collaboration avec l’Institut Max Planck d’histoire des sciences de Berlin. Cette initiative a pour objectif la mise en place d’une base de données numérique ouverte, recensant les recettes permettant de produire des couleurs à travers l’histoire et, ce, dans les domaines les plus variés. Plusieurs milliers de procédés/recettes ont déjà été répertoriés (6500 à date) issus de 600 manuscrits anciens.
Un atelier sur les pas des enlumineurs
L’après-midi du même samedi un atelier de 3 heures vous permettra de passer à la pratique, en marchant dans les pas des enlumineurs médiévaux. Vous y découvrirez concrètement comment fabriquer des couleurs et des pigments à partir de plantes, de racines et de divers matériaux.
Atelier : dans l’antre des enlumineuses Horaires : samedi 2 juillet 2022 – De 14:00 à 17:00
Le dimanche, une visite guidée spéciale vous permettra de vous initier aux secrets de la fabrication des manuscrits anciens. Elle vous fournira également l’occasion de découvrir une partie des collections du KBR.
Visite guidée : découvrez les secrets de fabrication des manuscrits Horaires : dimanche 3 juillet 2022 – De 11h00 à 12h30
Enfin, l’après-midi du dimanche, le même atelier que le samedi sera proposé sur la création de couleurs au temps médiévaux.
Atelier : dans l’antre des enlumineuses Horaires : dimanche 3 juillet 2022 – De 14:00 à 17:00
Pour les réservations et tarifs de ces activités, nous vous invitons à consulter le site officiel du KBR museum. Une fois sur place vous pourrez, bien sûr, en profiter pour découvrir les autres trésors du musée.
Sujet : musique médiévale, chanson médiévale, maître de musique, chanson, amour courtois, chant polyphonique, ballade, bestiaire médiéval, moyen-français, manuscrit médiéval. Titre : «En cuer ma dame une vipère maint» Auteur : Guillaume de Machaut (1300-1377) Période : XIVe siècle, Moyen Âge tardif Interprète : Ensemble Ferrara Album : Machaut, Mercy ou mort. Chansons et motets d’amour (1998)
Bonjour à tous,
ans un précédent article, nous vous parlions d’un concert de musique médiévale qui se donnera, prochainement, à la tour Jean-sans-Peur de Paris. Pour faire suite à ce billet, nous approcherons, aujourd’hui, dans le détail, une des pièces mises à l’honneur dans ce concert. Il s’agit d’une chanson courtoise de Guillaume de Machaut sur le thème du bestiaire médiéval et ayant pour titre : « En cuer ma dame une vipère maint« .
Une vipère au cœur d’une dame indifférente
Ce chant polyphonique du maître de musique du Moyen Âge tardif est une ballade à 3 voix dans le pur style de l’Ars nova. En bon amant courtois, le poète désespère et se meurt devant l’indifférence de sa dame tout en lui restant attaché et loyal. Pour invoquer la dureté de cette dernière envers lui et l’étendue de ses propres souffrances, le compositeur n’hésitera pas à faire appel au bestiaire médiéval et, notamment, aux plus terribles animaux venimeux et à sang froid qui soient : la vipère, le scorpion ou encore le basilic.
Si l’on connait bien les dangers des deux premiers, le basilic peut nous être moins familier. Créature mythique redoutée, ce monstre reptilien possède un corps de serpent avec une tête d’oiseau et on le trouve même représenté avec des pattes. Extraordinairement venimeux, il peut, dit-on, d’un seul regard endormir ses proies, voir les occire à distance. Contre toute attente, le seul animal capable de le vaincre serait la « redoutable » belette (dans les bestiaires médiévaux, le lapin des Monty Python ne semble jamais très loin). Cet atavisme entre la belette et le basilic vous explique l’enluminure en tête de cet article. On y découvre, en effet, un basilic ayant endormi ou empoisonné une victime, troublé dans sa quiétude par une téméraire belette.
Pour revenir au contenu de cette chanson tirée de LaLouange des Dames de Guillaume de Machaut, si l’on connait assez bien les souffrances habituelles de l’amant courtois face à l’indifférence ou au manque d’empathie de son élue, il faut avouer que l’auteur médiéval nous met, ici, face à une description sentimentale aussi éloquente que cruelle. Toute proportion gardée, sa soumission affichée face à ses douloureuses déconvenues pourrait presque friser une forme de « masochisme » si on la transposait de manière moderne. On pense notamment à des phrases comme « Et son Regard se rie et éprouve une grande joie de voir mon cœur qui fond et frit et brûle« . Est-ce le regard de « Refus » personnifié ou celui de la dame ? Sans doute appartient-il plus à cette dernière. Dans tous les cas, cela nous emmène, un peu plus loin, que de la simple l’abnégation de la part du loyal amant.
Aux sources manuscrites de cette chanson
On peut retrouver cette ballade de Guillaume de Machaut dans un certain nombre de manuscrits médiévaux ou renaissants. Pour vous en fournir la partition, nous avons choisi de vous la présenter telle qu’on la trouve dans le manuscrit médiéval Français 9221 (photo ci-dessus). Daté de la toute fin du XIVe siècle, cet ouvrage contient une grande partie de l’œuvre du compositeur et poète, sur 243 feuillets. Il est actuellement conservé au département des manuscrits de la BnF (consulter en ligne).
Pour la transcription de cette chanson médiévale en graphie moderne, nous nous sommes appuyés sur l’ouvrage Guillaume de Machaut Poésies lyriques de Vladimir Chichmaref, paru chez Honoré Champion au début du XXème siècle (1909). Ci-dessous, nous vous en proposons une interprétation par l’Ensemble médiéval Ferrara.
L’ensemble médiéval Ferrara à la découverte de l’Europe musicale médiévale
L’ensemble Ferrara s’est formé au début des années 80, dans la ville de Bâle. On le sait, la cité est privilégiée sur la scène médiévale grâce à sa prestigieuse Schola Cantorum Basiliensis, école spécialisée dans l’apprentissage des musiques anciennes. Il n’y a guère de coïncidence dans tout cela puisque le directeur et fondateur de l’ensemble Ferrara, Robert Crawford Young y a enseigné le luth et la musicologie, dès l’année 1982, après avoir lui-même suivi, un cursus au conservatoire de Boston. Installés dans ce cadre privilégié, cette formation médiévale et son fondateur ont pu puiser dans une grande réserve de musiciens, issus eux-mêmes de l’école suisse.
En terme de contribution à la scène des musiques anciennes, on peut encore ajouter au crédit de ce pédagogue doublé d’un talentueux joueur de luth et d’instruments à cordes, la création de l’ensemble Project Ars Nova (PAN) dont nous vous avions déjà dit un mot dans un article précédent. En réalité, les deux formations médiévales PAN et Ferrara ont été formées pratiquement simultanément par Crawford Young et s’intéressent toutes deux à un répertoire à la lisière de la renaissance et du Moyen Âge tardif.
L’ensemble Ferrara a été particulièrement actif de 1988 à 2010, en matière de discographie. Il a laissé, pour l’instant, à la postérité 10 albums et 2 compilations. Sa période de prédilection s’étend du XIVe au XVe siècle et couvre une zone aussi large que la France, l’Angleterre et l’Italie et même l’Allemagne médiévale.
Guillaume de Machaut, Mercy ou mort, l’album
L’album dont est tiré la chanson du jour date de 1998. Il a pour titre : Guillaume de Machaut, Machaut, Mercy ou mort. Chansons et motets d’amour. Entièrement dédié au célèbre compositeur médiéval,il propose, sur un peu plus de 1 heure 15 de durée, 20 pièces de Guillaume de Machaut entre ballades, motets, rondeaux et virelais. Originellement édité chez Arcana, on peut encore en trouver quelques exemplaires à la vente. Voici un lien utile pour plus d’informations.
Musiciens ayant participé à cet album
Kathleen Dineen (soprano, harpe), Lena Susanne Norin (alto), Eric Mentzel (ténor), Stephen Grant (basse), Karl Heinz Schickhaus (dulcimer), Randall Cook (vielle, chifonie), Crawford Young (guiterne)
En cuer ma dame une vipère maint en moyen-français avec traduction
En cuer ma dame une vipère maint Qui estoupe de sa queue s’oreille Qu’elle n’oie mon doleureus complaint : Ad ce, sans plus, toudis gaite et oreille. Et en sa bouche ne dort L’escorpion qui point mon cuer à mort ; Un basilique a en son dous regart. Cil troy m’ont mort et elle que Dieus gart.
Dans le cœur de ma dame, une vipère demeure, Qui, de sa queue, bouche son oreille, Afin qu’elle ne puisse entendre ma dolente complainte : Voilà, sans plus, ce qui la tient toujours en alerte. Et, dans sa bouche, jamais ne dort Le scorpion qui perce mon cœur à mort ; Et un basilic repose, encore, dans son doux regard. Ces trois là m’ont tué, quant à elle que Dieu la garde.
Quant en plourant li depri qu’elle m’aint, Desdains ne puet souffrir qu’oir me vueille, Et s’elle en croit mon cuer, quant il se plaint, En sa bouche Refus pas ne sommeille, Eins me point au cuer trop fort ; Et son regart rit et a grant deport, Quant mon cuer voit qui font et frit et art. Cil troy m’ont mort et elle que Dieus gart.
Quand en pleurs je la supplie de m’aimer, Dédain ne peut admettre qu’elle veuille m’écouter, Et si elle prête foi à mon cœur, lorsqu’il se plaint, Dans sa bouche, Refus ne sommeille jamais, Ainsi me perce-t-il le cœur avec force ; Et son Regard se rit et éprouve une grande joie De voir mon cœur qui fond et frit et brûle. Ces trois là m’ont tué, quant à elle que Dieu la garde.
Amours, tu scez qu’elle m’a fait mal maint Et que siens sui toudis, vueille ou ne vueille. Mais quant tu fuis et Loyautés se feint Et Pitez n’a talent qu’elle s’esveille, Je n’y voy autre confort Com tost morir ; car en grant desconfort Desdains, Refus, regars qui mon cuer part, Cil troy m’ont mort et elle que Dieus gart.
Amour, tu sais qu’elle m’a fait maintes maux Et que je lui appartiens pour toujours, que je le veuille ou non, Mais quand tu fuis et que Loyauté se dissimule tandis que Pitié n’a aucune envie qu’elle s’éveille, Je ne trouve d’autre consolation Que de mourir au plus vite ; car, à mon grand découragement, Dédain, Refus et Regard me brisent le cœur, Ces trois là m’ont tué, quant à elle que Dieu la garde.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred Pour moyenagepassion.com A la découverte du monde médiéval sous toutes ses formes.
NB : l’enluminure en en-tête représente un basilic. Elle provient du manuscrit Royal MS 12 C XIX : Bestiarum uocabulum proprie conuenit Incipit : liber de naturis bestiarum et earum significationibus. Ce superbe bestiaire médiéval est conservé à la British Library (à consulter en ligne ici). Il est daté du tout début du XIIIe siècle.
Sujet : musique médiévale, ars nova, bestiaire médiéval, tour médiévale, concert médiéval, moyen-âge tardif. Période : XIVe siècle, XVe siècle Evénement : Concert « Une vipère en cuer », Interprètes : ensemble Palin-e Lieu: Tour Jean-sans-Peur, 20 Rue Étienne Marcel, 75002 Paris Dates : Samedi 23 avril 2022 (19h-20h15)
Bonjour à tous,
e 23 avril 2022, la Tour Jean-sans-Peur ouvrira sa programmation musicale de saison avec un concert centré sur les chants polyphoniques et l’ars nova du moyen-âge tardif. Donné par l’ensemble médiéval Palin(e) (ou Palin-e), cet événement prometteur affiche une programmation sur le thème du bestiaire médiéval avec un focus particulier sur les reptiles et autres animaux rampants à venin ou écailles.
« Une vipère en cuer« , par l’ensemble Palin(e)
Du point de vue musical, le concert de Palin(e) explorera un répertoire qui s’étend du XIVe au XVe siècle. L’ars nova de France et d’Italie y sera donc à l’honneur et on pourra retrouver une grande variété de chants polyphoniques, entre madrigaux et ballades à plusieurs voix, mais aussi des contrafacta et quelques estampies.
Les pièces anonymes y côtoieront des compositeurs plus célèbres du moyen-âge tardif et des grands noms comme Guillaume de Machaut, Francesco Landini, Jacopo de Bologna, Donato da Cascia y seront représentés. Du côté des sources manuscrites, on retrouvera des musiques et chansons issues d’ouvrages aussi connus que le Codex Squarcialupi (Mediceo Palatino 87), le Codex Faenza ou encore le manuscrit de Londres (ms. 29987).
Programme musical
Selvaggia fera di Diana serva, Francesco. Landini – L’aspido sordo, Donato da Cascia – Tre fontane, Anonyme – Langue puens envenimée, Anonyme – De tout flors, Anonyme – Une vipère en cuer ma damemaint, Guillaume de Machaut – Phyton le mervilleus serpent, Guillaume de Machaut – Lamento di Tristano, La Rotta, Anonyme – Pianze la bella Iguana, Anonyme – Bel fiore dança, Anonyme – Si come al canto della bella Yguana, Jacopo da Bologna.
Pour plus d’informations, voir le site officiel de la Tour Jean-sans-Peur. Pour en dire un mot, cette tour médiévale très dynamique au cœur de la capitale propose de nombreuses événements et expositions toute l’année (dont certaines sont même à louer). A noter que sur le site web de ce monument classé, vous trouverez également des supports pédagogiques et des jeux pour les plus jeunes. Ce concert de la formation Palin(e) s’inscrit dans une série d’événements prévus sur place, d’avril à juin, autour de la jeunesse au moyen-âge (exposition, conférences, spectacles divers, …)
Fred Pour moyenagepassion.com A la découverte du moyen-âge sous toutes ses formes
NB : les enluminures (vipère dans l’en-tête et lézard dans le corps de l’article) sont toutes tirées du manuscrit Royal MS 12 C XIX : Bestiarum uocabulum proprie conuenit Incipit : liber de naturis bestiarum et earum significationibus. Daté du début du XIIIe siècle ( 1200-c 1210), ce superbe bestiaire médiéval est conservé à la British Library (à consulter en ligne ici).
Sujet : poésie médiévale, auteur médiéval, moyen-français, manuscrit ancien, poésie, Virelay, devoir, poésie morale, bienséance, virelai. Période : Moyen Âge tardif, XIVe siècle. Auteur : Eustache Deschamps (1346-1406) Titre : «Fay tousjours ce que tu doys» Ouvrage : Œuvres complètes d’Eustache Deschamps, T IV, Marquis de Queux de Saint-Hilaire (1878)
Bonjour à tous,
ous repartons, aujourd’hui, à l’exploration de l’œuvre d’Eustache Deschamps. Ce poète du Moyen Âge tardif, qui a vécu entre la deuxième partie du XIVe et le début du XVe siècle, nous a laissé une œuvre abondante en moyen-français, aux thèmes extrêmement variés.
Les vertus de l’homme de bien
Français 840 les œuvres d’Eustache Deschamps
Une fois de plus, nous délaisserons la partie la plus courtoise et sentimentale de son héritage, pour aller vers sa poésie plus morale et sociale. L’occasion nous en sera donnée par un virelai qui se présente, à la fois, comme une leçon de conduite, d’éthique et de vie. Les valeurs qu’Eustache y adresse sont assez nombreuses : maintien et calme face à l’adversité, droiture et éloge du contentement, le tout dans la douceur et la courtoisie. Ce sont là les qualités de l’homme de bien.
Quant aux écueils à éviter, ils sont eux aussi trempés de morale sur fond chrétien : convoitise, envie, malhonnêteté, vaine poursuite des mérites mondains; etc… Au bout du chemin, le temps d’une étincelle, la vie est déjà passée. La leçon reste simple, mais profonde. Etonnement, la fin de ce virelai est presque prémonitoire puisque cet auteur médiéval s’est éteint à soixante ans. Or, c’est l’âge qu’Eustache mentionne lui-même dans la dernière strophe de cette poésie comme celui pour l’homme de tirer sa révérence.
Sources historiques et œuvre d’Eustache
Vous pourrez retrouver ce virelai dans le manuscrit médiéval Français 840, conservé à la BnF et accessible à la consultation sur Gallica. Pour sa transcription en graphie moderne, nous continuons de nous baser sur les ouvrages du Marquis de Queux de Saint-Hilaire et de Gaston Raynaud et leur publication de l’œuvre complète d’Eustache Deschamps, dans la deuxième moitié du XIXe siècle.
Fay tousjours ce que tu doys dans le moyen-français d’Eustache
NB : Le moyen français des XIVe et XVe siècles se comprend assez bien mais il peut présenter quelques difficultés cachées, voire quantité de faux-amis ou de mots dont le sens a notablement évolué depuis. Aussi, pour une meilleure compréhension, nous vous fournissons quelques clefs de vocabulaire.
Fay tousjours ce que tu doys : Ne t’esbahy se tu voys Aucune chose grevayne* (fâcheuse) ; Ce qui puet avenir veigne : Dieux cognoist tout une foys.
Convoitise ne te praigne, N ‘envie ne te souspraigne , Maiz soyes douls et courtoys, Qu’au fort* (à la fin) li mauvaiz ont payne Et renommée villayne, Et les bons bien, car c’est droiz* (juste).
Maulx regne un temps comme roys Et fait les bons trop destroys (1), Puis chiet (*de chaoir : choir) par cause soudayne , Et biens tient droite s’ansaigne (2) . Pour ce dy celon les droys : Fay tousjours ce que tu doys.
Que vault richesse mondayne Mal acquise ? n ‘est pas sayne ; Mieux vaudroit mangier ses poys Et boyre yaue* (eau) de fontayne, Que consentir chose vayne Ne pechier pour avoir voys (3).
Soixante ans ne sont c’un moys Ou un jour souventesfoys , Que la mort vient tressoudayne Qui le corps et l’ame enmayne ; Si te conseille a mon choys : Fay tousjours ce que tu doys.
(1) destreindre : tourmenter, angoisser (2) Son enseigne : bannière, banderole de la lance (3) posséder renommée, faire autorité
En vous souhaitant une belle journée.
Frédéric EFFE Pour moyenagepassion.com A la découverte du Moyen Âge sous toutes ses formes
NB : l’enluminure de premier plan sur l’image d’en-tête, ainsi que sur l’illustration, est tirée du manuscrit ms 1130 : Les trois pèlerinages et le Pèlerinage de la Vie Humaine de Guillaume de Digulleville (moine et poète français du Moyen Âge central (1295-1360). Elle représente le pèlerin en route pour la Jérusalem céleste. Ce manuscrit de la deuxième moitié du XIVe siècle est actuellement conservé à la Bibliothèque Sainte-Geneviève de Paris. Il peut être consulté en ligne ici.