Sujet : poésie, épigramme, amour courtois, renouveau, printemps. Période : fin du moyen-âge, renaissance Auteur : Clément MAROT(1496-1544) Titre : « Du moys de May et d’Anne » Ouvrage : œuvres complètes de Clément MAROT, par Pierre Jannet, Tome 3 (1870)
Bonjour à tous,
vec l’arrivée du mois de mai, nous poussons nos pas jusqu’au XVIe siècle, à la rencontre de Clément Marot et de son style poétique incomparable qui, sans l’y réduire, brille tout particulièrement dans les pièces courtes et leur chute.
Nous sommes rendus au siècle de transition qui, de manière conventionnelle pour bien des d’historiens, vit s’éteindre le moyen-âge pour laisser place à la renaissance. Pourtant, on ne gomme pas si facilement 1000 ans d’histoire ; le monde médiéval et son esprit auront encore de beaux restes et de beaux jours devant eux. Entre autre thème, l’amour courtois, né dans son berceau, continuera, pour longtemps, d’inspirer l’expression amoureuse littéraire et nombre d’exercices poétiques. Avec son talent habituel, le poète de Cahors s’y adonne dans cet épigramme. Au renouveau printanier (référence clairement médiévale et courtoise), il engage un dialogue avec le mois de mai et ses floraisons pour louer la dame de son cœur, en lui faisant le plus beau des compliments.
Du moys de May et d’Anne
May, qui portoit robe reverdissante, De fleur semée, un jour se meit en place, Et quand m’amye il veit tant fleurissante, De grand despit rougit sa verte face, En me disant : « Tu cuydes qu’elle efface, A mon advis, les fleurs qui de moy yssent (1); » Je luy respons : « Toutes tes fleurs perissent Incontinent (2) qu’yver les vient toucher; Mais en tous temps de ma Dame fleurissent Les grans vertus, que Mort ne peult secher.
(1) sortent, surgissent (2) Aussitôt, dès l’instant que
Une belle journée.
Fred
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Sujet : citations médiévales, sagesse persane, poésie morale, conte moral, cupidité, avidité, justice, devoir politique, abus de pouvoir. Période : moyen-âge central, XIIIe siècle Auteur : Mocharrafoddin Saadi (1210-1291) Ouvrages: Gulistan, le jardin des roses, par Charles Defrémery (1838) et Gulistan le Parterre de Fleurs du Cheick Moslih-Eddin Sadi De Chiraz par N Semelet, (1834)
Bonjour à tous,
ujourd’hui, nous levons les voiles en direction du moyen-orient médiéval pour découvrir une nouvelle histoire d’un des plus célèbres conteurs de la Perse du moyen-âge central : Mocharrafoddin Saadi. D’entre tous ses écrits, Le Gulistan ou Le Jardin des Roses demeure un véritable miroir des princes, un guide de la morale et de l’action pour les hommes, les puissants ou ceux qui les côtoient, et dans lequel seul le vrai sage saura tirer son épingle du jeu, par ses actes et non par ses mots.
Mansuétude, écoute, discernement, la sagesse dont il est question ici transcende l’application de quelque loi écrite, elle est la qualité suprême et intrinsèque qui peut élever le plus puissant comme le plus miséreux. Et Saadi fustige sans merci : cupidité, stupidité, égoïsme, orgueil, ambition, flatterie, négligence ou abus dans l’exercice du pouvoir, … Sous l’œil du conteur, il n’est nul homme, fut-il roi ou vizir, qui ne finisse par rencontrer sa propre destinée : l’impunité n’existe pas et tout finit, tôt ou tard, par se payer. C’est encore le cas dans le conte moral du jour. On y assistera à la ruine et la déroute d’un tyran contre les larmes de sang qu’il avait arrachées, par cupidité, aux plus déshérités et on trouvera, au passage, cette belle image de « la fumée des cœurs » des miséreux spoliés, montée en prière et entendue. » Ne trouble pas un coeur, parce qu’un soupir bouleversera tout un monde. «
Une fois de plus, le sage persan plaide pour la raison du plus faible contre la tyrannie du plus fort, la justice contre l’abus de pouvoir et l’avidité et c’est une justice à la fois transcendantale et sociale qui est ici à l’oeuvre, un peu, peut-être, dans l’esprit de celle que Saint-Louis avait rendue sous son chêne. Enfin, chez le conteur persan, comme dans notre moyen-âge central occidental, la roue de la fortune et du temps tourne et vient fournir un argument supplémentaire à la morale. Le temps de l’existence passe comme le vent du désert et le pouvoir comme la royauté demeurent éphémères.
Abus de pouvoir et avidité :
le pouvoir d’un cœur blessé
On raconte qu’un Tyran achetait, par la violence, le bois des pauvres et les donnait aux riches, moyennant un prix qu’il fixait arbitrairement. Un sage passa auprès de lui, et dit :
– Es-tu un serpent, toi qui piques tous ceux que tu vois ? Ou un hibou, puisque tu fouilles partout où tu te poses ? Si ta violence te réussit avec nous, elle ne réussira pas avec le maître qui connaît tous les secrets (ie: Dieu). N’exerce pas la violence sur les habitants de la terre, afin que leurs prières contre toi ne parviennent au-dessus du ciel.
L’oppresseur fut irrité de cette parole, fronça le sourcil a cause de ce conseil et n’y fit aucune attention; jusqu’à ce qu’une certaine nuit le feu tombât de la cuisine dans son magasin de bois, brûlât toutes ses richesses et lui laissât pour seul siège, au lieu d’un coussin bien rembourré, la cendre chaude.
Par hasard, le même sage passa auprès de lui, et l’entendit qui disait a ses amis : » Je ne sais d’où ce feu est tombé dans mon palais. » ll dit : » Il a été allumé par la fumée du coeur des pauvres (les soupirs). »
Distique : Garde-toi de la fumée des coeurs blessés, car la blessure du coeur se montre, à la fin, au dehors. Tant que tu le peux, ne trouble pas un coeur, parce qu’un soupir bouleversera tout un monde.
Sentence. Il était écrit sur la couronne du roi Qaï-Khosrou* (3eme roi de Perse, de la dynastie des Caïanides ) :
« Pendant combien d’innombrables années et de longs siècles les hommes marcheront sur la terre, au-dessus de notre tête* (notre tombeau) ? De même que la royauté nous est parvenue de main en main, ainsi elle parviendra aux mains des autres ».
Puisse cette belle leçon continuer de résonner à travers les siècles, aux oreilles des intéressés.
Une belle journée à tous.
Fred
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Sujet : fête médiévale, agenda sortie, moyen-âge, artisanat, troupes, compagnies médiévales, guilde de la grenouille, marché médiéval. Evénement : Les Médiévales de Saint-Jean-de-Maruéjols-et-Avéjan Lieu : Saint-Jean-de-Maruéjols-et-Avéjan,
Gard, Occitanie. Dates : les 27 avril et 28 avril 2019
Bonjour à tous,
omme tous les ans, à la fin avril, la commune de Saint-Jean-de-Maruéjols confiera à nouveau, ce week end, l’organisation de ses Médiévales, à la Guilde de la Grenouille. Dans un cadre verdoyant, au bord des gorges de la Cèze, cette belle fête aux couleurs du moyen-âge attire à chaque édition, plusieurs milliers de personnes et il s’agira là de son 9e anniversaire.
Animations médiévales, campements
et marché artisanal
Entre campements d’époque, démonstrations de combats et mêlées à l’ancienne, découverte de la vie médiévale, musique médiévale et autres surprises, on pourra compter sur les mercenaires et bretteurs de la Guilde pour assurer l’animation et l’ambiance de cette fête. Afin que le spectacle soit complet, une quinzaine d’autres mesnies de reconstituteurs viendront renforcer leurs rangs. A l’habitude, un marché artisanal et d’inspiration médiévale se tiendra également sur place et l’on y trouvera aussi largement de quoi ripailler et festoyer.
Compagnies médiévales (liste non exhaustive)
Les Hospitaliers de Terre d’Oc – Gamela Nostra – Les Bâtards d’Occitanie – Arché Bourguignon – Les Chevaliers des Terres d’Occitanie – L’Ordre de la Tour – La Mesnie de Fos – Le Clan d’Helvie – Les Compagnons de Simon – La Guilde de la Grenouille
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Sujet : chanson médiévale, poésie, amour courtois, roi troubadour, roi poète, lyrisme courtois, trouvères, vieux-français, Oïl. Période : Moyen Âge central Auteur : Thibaut IV de Champagne (1201-1253), Thibaut 1er de Navarre Titre : « De fine amor vient seance et biautez» Interprètes : Alla Francesca, Brigitte Lesne Album : Thibaut de Champagne, le Chansonnier du Roi (2011).
Bonjour à tous,
oilà quelque temps déjà que nous n’avions présenté de chansons du célèbre Thibaut de Champagne. En route donc, pour le XIIIe siècle à la découverte de sa poésie : De fine amor vient seance et biautez. Le titre l’annonce clairement, il s’agit là d’une nouvelle pièce courtoise, comme le comte de Champagne les affectionnait tant.
Sources historiques et manuscrits
On retrouve cette chanson du seigneur et trouvère champenois dans de nombreux manuscrits avec, bien sûr, quelques variantes. En suivant les pas de Gaston Reynaud et sa Bibliographie des Chansonniers français des XIIIe et XIVe siècles (1894), on citera notamment le Manuscrit de Bern 389, le MS Français 12615, le Manuscrit du Vatican 1490, et encore le MS Français 844(voir image ci-dessus), dont nous avons déjà parlé et qui a servi de base à l’interprétation que nous propose ici l’Ensemble Alla Francesca.
« De fine amor vient seance et biautez » par la formation Alla Francesca
Alla Francesca et le Chansonnier du Roy
En 2011, l’Ensemble médiéval Alla Francesca partait à la rencontre de Thibaut de Champagne et avec lui, de « l’amour courtois et la chevalerie au XIIIe siècle« , en se basant sur le MS français 844 conservé à la BnF, plus connu encore sous le nom de Chansonnier ou Manuscrit du Roy,
Avec un total de seize pièces, l’album réalisé sous la direction de Brigitte Lesne proposait de nombreuses chansons du seigneur et roi de Navarre, mais encore quelques pièces instrumentales et danses de la même période, demeurées anonymes. A noter qu’on pouvait aussi y retrouver un servantois d’Hue de la Ferté et dans lequel ce dernier s’en prenait sans ménagement au comte de champagne.
La traduction que nous vous proposons, ci-dessous, de cette chanson en langue d’oïl de Thibaut de Champagne vers le français moderne provient du livret très complet accompagnant l’album. Une fois n’est pas coutume, nous n’en n’avons pas retouché une virgule.
De fine amor vient seance et biautez
Dame, vers vos n’ai autre messagier Par cui vos os mon corage envoier Fors ma cbançon, se la volez chanter.
Dame, je n’ai d’autre messager Par qui j’ose vous envoyer ce que j’ai dans le cœur, Sinon ma chanson, si vous voulez bien la chanter
Et amors vient de ces deus autressi. Tuit troi sont un, que bien i ai pensé, Ja ne seront a nul jor departi. Par un conseil ont tuit troi establi Lor correors, qui sont avant alé. De moi ont fet tout lor chemin ferré, Tant l’ont usé, ja n’en seront parti.
Et l’amour procède lui aussi de ces deux-là. Tous trois ne font qu’un, j’y ai bien réfléchi, Et jamais ils ne pourront être séparés. D’un commun accord, ils ont tous trois désigné Leurs messagers, qui ont pris les devants. Ils ont fait de moi leur grand chemin, Et l’ont tant parcouru qu’ils n’en partiront pas de sitôt.
Li correor sunt de nuit en clarté Et de jors sont par la gent obscurci. Li douz regart et li mot savoré, La grant biauté et li bien que g’i vi, N’est merveille se ce m’a esbahi. De li a Dex cest siecle enluminé: Quant nos aurons le plus biau jor d’esté Lés li serait obscurs de plain midi.
Ces messagers-là sont dans la lumière pendant la nuit Et le jour, à cause des gens, ils sont dans l’obscurité. Le doux regard et les paroles suaves, La grande beauté et les qualités que je vis en elle, Rien d’étonnant si j’en ai été tout ébahi. Par elle Dieu a illuminé ce monde : Si nous avions le plus beau jour d’été, Il serait obscur auprès d’elle, en plein midi.
En amor a paor et hardement. Cil dui sont troi et dou tierz sont li dui, Et granz valors s’est a aus apendanz Ou tuit li bien ont retrait et refui. Por ce est amors li hospitaus d’autrui Que nus n’i faut selonc son avenant. Mès j’ai failli, dame qui valez tant, En vostre ostel, si ne sai ou je sui.
Dans l’amour, il y a crainte et hardiesse. Ces deux-là sont trois, et ils procèdent du troisième ; Une grande valeur s’est attachée à eux, En laquelle se sont réfugiés tous les biens. Amour est le logis qui accueille tous les autres, Car nul ne manque d’y trouver la place qui lui convient. Mais moi, dame qui avez tant de valeur, j’ai échoué à me loger En votre maison, et je ne sais plus où je suis.
Je n’i voi plus mes a lui me conmant, Que toz penserz ai laissiez par cestui. Ma bele joie ou ma mort i atent, Ne sai lequel, desques devant li fui. Ne me firent lors si oeil point d’anui, Ainz me vindrent ferir si doucement Dedens le cuer d’un amoreus talent, Q’encor i est le cox que j’en reçui.
Je ne vois plus que faire, sinon me recommander à elle, Car je n’ai plus d’autre pensée que celle-ci. J’en attends ma belle joie ou ma mort, Je ne sais laquelle des deux, depuis que je me trouvai devant elle. Alors ses yeux ne me causèrent point de contrariété ; Au contraire, ils vinrent me frapper si doucement En plein cœur, d’un amoureux désir, Que la marque du coup que j’en reçus s’y trouve encore.
Li cox fu granz, il ne fet qu’enpirier; Ne nus mirez ne m’en porroit saner Se cele non qui le dart fist lancier, Se de sa main me voloit adeser. Bien en porroit le cop mortel oster A tot le fust, dont j’ai tel desirrier; Mès la pointe du fer n’en puet sachier, Qu’ele brisa deudenz au cap douner. [Dame. vers vos n’ai autre messagier Par cui vos os mon eorage envoier Fors ma chançon, se la volez chanter.
Ce coup fut fort, la blessure ne cesse de s’aggraver. Nul médecin ne m’en pourrait soigner, Sinon celle qui fit lancer la flèche, Si elle voulait bien me toucher de sa main. Elle pourrait bien guérir le coup mortel En ôtant le bois de la flèche, ce que je désire tant ; Mais la pointe de fer, elle ne peut pas la retirer, Car elle s’est brisée à l’intérieur au moment du coup.
En vous souhaitant une belle journée.
Fred
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