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Chant de croisade : les vers du lavoir ou l’appel de Marcabru à la reconquista

troubadour_moyen-age-central_musique_chanson_poesie_medieval_occitan_oc_occitanie_MarcabruSujet : troubadours, langue d’oc, poésie, chanson, musique médiévale,  chant de croisade. poésie satirique, occitan
Période : moyen-âge central, XIIe siècle
Auteur : Marcabru  (1110-1150)
Titre :  « Lo vers del lavador»
Interprète : Jordi Savall, Hespérion XXI
Album:  Jerusalem, la ville des deux paix
 (2014)

Bonjour à tous,

E_lettrine_moyen_age_passionn plein cœur du Moyen-âge central, le troubadour Marcabru exhortait ses contemporains à la croisade, celle d’outre-mer mais plus encore celle, bien plus proche, des terres d’Espagne et de la « Reconquista ». Nous vous proposons, aujourd’hui, d’étudier de près cette chanson médiévale du XIIe siècle, ainsi que de vous en fournir la traduction. Du côté de l’interprétation et pour le temps de ce voyage, nous serons accompagnés de  l’Ensemble médiéval Hespèrion XXI et la grande voix de Marc Mauillonsous la direction de Jordi Savall.

Les vers du lavoir de Marcabru, par Hespérion XXI et Jordi Savall

Jerusalem, la ville des deux paix,
sous la direction de Jordi Savall

En 2008, Jordi Savall et Montserrat Figueiras accompagnés de La Capella Reial de Catalunya, la formation Al-Darwish et l’ensemble Hespèrion XXI, partaient à la redécouverte musicale de Jerusalem. Ils signaient ainsi un livre double-album, riche de 52 pièces, au carrefour de nombreuses influences musicales et civilisationnelles. La virtuosité de l’exercice fut salué par la scène des musiques anciennes et l’album fut primé d’un Diapason d’Or.

jordi_savall_fusion_art_et_recherche_musique_ancienne_medievaleComme à son habitude, Jordi Savall était bien décidé à transcender la simple interprétation musicale, pour se situer dans un message résolument humaniste et pacifiste. Sous sa maestria, Jérusalem devenait ainsi la ville des deux paix, paix céleste et paix terrestre et il déclarait à son sujet:

« Ce projet a été conçu comme un hommage à Jérusalem, la ville construite et détruite à l’infini par l’homme, dans sa quête du pouvoir sacré et du pouvoir spirituel. Par le pouvoir de la musique et des paroles, ce fruit de la collaboration passionnée et engagée de musiciens, poètes , chercheurs, écrivains et historiens de 14 pays, ainsi qu’Alia Vox et les équipes de la Fondation CIMA, est devenu une fervente invocation pour la paix. »  Jordi Savall

Au delà de son agencement savant de compositions et chants profanes, chrétiens, juifs ou musulmans, le maître de musique catalan nous proposait ici un véritable appel à la paix, en réunissant aussi autour de lui des musiciens européens, juifs, palestiniens et jordi_savall_hesperion_XXI_album_jerusalemvenus encore du monde arabe. D’un point de vue narratif, l’oeuvre évoquait la cité sainte, à travers les âges, au large d’un périple de plus de 3000 ans : Jérusalem la juive de l’antiquité, Jérusalem la chrétienne et médiévale des pèlerinages, puis l’ottomane et musulmane, pour, finalement, s’ouvrir sur une dernière partie plus contemporaine et qui se voulait porteuse de réconciliation et d’espoirs, envers toutes les cultures en présence,

Cet album est toujours édité et vous pouvez le retrouver sur le site Alia-Vox ou encore au lien suivant :Jérusalem, la ville des deux paix

Pax in nomine Domini,
la chanson du lavoir de Marcabru

Contexte historique, 2e croisade et reconquista

Dans ce Pax in nomine Domini, plus connu encore sous le nom de les vers ou la chanson du lavoir (Vers del lavador), le célèbre troubadour comparait l’engagement aux croisades à un « lavoir » dans lequel tout chevalier et combattant chrétien pouvait et devait même « se laver » (se purifier de ses péchés). Mise à l’épreuve de sa foi véritable mais aussi purification de l’âme avec assurance d’y gagner le Paradis, il y pointait du doigt, au passage, les péchés de luxure et l’absence de foi de certains de ces contemporains.

Au sujet des nobles et seigneurs auxquels le poète médiéval fait allusion dans ce chant de croisade, on peut se risquer avec l’appui des médiévistes à quelques conclusions, même si certains éléments sont encore sujets à débat, Du point de vue datation, il semble que cette chanson ait été composée dans l’année 1149 et sans doute dans sa deuxième moitié.

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(ci-contre le Pax in nomine Domini de Marcabru tronqué, mais accompagné de sa partition, Mss Français 844 de la Bnf)

Un an auparavant, la deuxième croisade s’enlisait devant Damas et, au début de l’année 1149, Louis VII levait le siège en mettant fin à la deuxième croisade, expliquant sans doute les critiques que Marcabru adresse aux français, dans sa dernière strophe. Du côté espagnol, et depuis quelques années, le comte de Barcelone Raimond-Berenguer IV avait accumulé les succès dans la reconquête de l’Aragonais contre les Maures. Autour de 1147, il leur avait notamment repris Tortosa, héritant ainsi du titre de Marquis de Tortosa. C’est sans doute de lui dont le troubadour nous parle dans l’avant dernière strophe de cette poésie.

Quant au comte défunt auquel Marcabru souhaite le repos de l’âme, à la toute fin de ce chant de croisade, et bien que les avis soient mitigés sur la question, on peut tout de même avancer qu’il s’agit sans doute de Raymond d’Antioche (1098-1149) (1). Les débats entre experts au sujet de cette identité gravitent principalement autour du fait que le noble était désigné sous le titre de « prince d’Antioche » et non de « comte » (2). Pour le reste, outre le fait qu’il était le second fils de Guillaume IX de Poitiers, lui-même duc d’Aquitaine et comte de Poitiers, Raymond d’Antioche est justement décédé dans le courant de l’année 1149, lors de la prise d’Antioche par le sultan Nur ad-Din, et durant la bataille d’Inab (29 juin 1149). Dès lors et si c’est bien de lui dont il s’agit ici, on peut supputer que Marcabru rédigea ses vers, peu après avoir appris la nouvelle. Cela, du reste, cadrerait tout à fait avec cette « Antioche » dont  « le prix et la valeur sont pleurés par la Guyenne et le Poitou » dans la même strophe.

Concernant le lieu où le troubadour écrivit ses vers, là encore les avis ne sont pas tranchés. Il peut les avoir écrit alors qu’il était à la cour d’Espagne (probablement au service d’Alphonse VII) ou bien, ce que pourrait suggérer son chant, alors qu’il se trouvait encore en Aquitaine.

De l’Oc de Marcabru  au français moderne

Pour la traduction de cette chanson, nous nous appuyons, à nouveau, largement, sur l’ouvrage de JML Dejeanne (Poésies complètes du troubadour Marcabru (1909) mais en les croisant avec quelques autres sources (notamment l’article de Silvio Melani (1)) et recherches complémentaires.

Dans l’interprétation musicale proposée plus haut, Jordi Savall a fait le choix de tronquer deux des strophes de la poésie originale (la 3 et la 4). De notre côté, nous vous la livrons dans son entier.


I
Pax in nomine Domini
Fetz Marcabrus los motz e.l so.
Aujatz que di :
Cum nos a fait, per sa doussor,
Lo Seingnorius celestiaus
Probet de nos un lavador,
C’anc, fors outramar, no.n fon taus,
En de lai deves Josaphas:
E d’aquest de sai vos conort.

Pax in nomine Domini
Marcabru a fait les paroles et l’air* (la musique) .
Écoutez ce qu’il dit :
Comme nous a fait, par sa bonté,
Le Seigneur céleste,
Il a fait près de nous un lavoir
tel qu’il n’y en eut jamais, sinon outre-mer, 
là-bas, vers Josaphat,
et c’est pour celui qui est près d’ici que je vous exhorte.

II
Lavar de ser e de maiti
Nos deuriam, segon razo,
Ie.us o afi.
Chascus a del lavar legor!
Domentre qu’el es sas e saus,
Deuri’ anar al lavador,
Que.ns es verais medicinaus!
Que s’abans anam a la mort,
D’aut en sus aurem alberc bas.

Nous devrions nous laver, soir et matin,
Si nous étions raisonnables,
Je vous l’assure;
Chacun peut s’y laver à loisir !
Pendant qu’il est encore sain et sauf,
Chacun devrait aller au lavoir
Car c’est pour nous un véritable remède;

De sorte que si nous allons à la mort avant cela,
notre demeure ne sera pas là-haut, mais nous
l’aurons bien bas.

III
Mas Escarsedatz e No-fes.
Part Joven de son compaigno.
Ai cals dois es,
Que tuicl volon lai li plusor,
Don lo gazaings es enfernaus!
S’anz non correm al lavador
C’ajam la boca ni·ls huoills claus,
Non i a un d’orguoill tant gras
C’al morir non trob contrafort.

Mais Mesquinerie et absence de foi
Séparent de Jeunesse son compagnon.
Ah! quelle douleur c’est
Que le plus grand nombre vole là
Où on ne gagne que l’Enfer !
Si nous ne courons au lavoir
Avant d’avoir la bouche et les yeux clos,
Il n’en est pas un si gonflé d’orgueil
Qui, dans la mort, ne trouve(ra) son adversaire (3) 

IV
Que·l Seigner que sap tot quant es
E sap tot quant er e c’anc fo,
Nos i promes
Honor e nom d’emperador.
E-il beutatz sera, sabetz caus
De cels qu’iran al lavador?
Plus que l’estela gallz ignalls
Ab sol que vengem Dieu del tort
Que’ill fan sai, e lai vas Domas.

Car le Seigneur, qui sait tout ce qui est,
Et sait tout ce qui sera et qui fut,
Nous y a promis
Honneur au nom de l’empereur.
Et savez-vous quelle beauté sera celle
De ceux qui se rendront au lavoir?
Plus grande que celle de l’étoile du matin,
Pourvu que nous vengions Dieu du tort
Qu’on lui fait ici, et là-bas, vers Damas.

V
Probet del lignatge Cai,
Dei primeiran home felho,
A tans aissi
C’us a Dieu non porta honor!
Veirem qui.ll er amics coraus!
C’ab la vertut del lavador
Nos sera Jhezus comunaus!
E tornem los garssos atras
Qu’en agur crezon et en sort

Proches du lignage de Caïn,
De ce premier homme félon,
Il y en a tant ici
Qui à Dieu ne portent honneur !
Nous verrons qui sera son ami cordial !
Car, par la vertu du lavoir,
Jésus sera avec nous tous.
Et nous ferons reculer les misérables* (JML Dejeanne :  « mauvais garnements »)
Qui croient aux augures et aux sorts.

VI
C.il luxurios corna-vi,
Coita-disnar, bufa-tizo,
Crup-en-cami
Remanran inz ei felpidor!
Dieus vol los arditz e.ls suaus
Assajar a son lavador!
E cil gaitaran los ostaus!
E trobaran fort contrafort,
So per qu’ieu alor anta.ls chas.

Ces libertins, cornes-à-vin* (ivrognes),
Presse-dîner, souffle-tison,
Ces accroupis sur le chemin (4)
Resteront dans les souillures* (folpidor, fumier)
Dieu veut les hardis et les doux
Éprouver à son lavoir !
Et ceux-là guetteront les maisons !
Et trouveront un rude adversaire
C’est pourquoi, à leur honte, je les chasse.

VII
En Espaigna, sai, Io Marques
E cill del temple Salamo
Sofron Io pes
E.I fais de l’orguoill paganor,
Per que Jovens cuoill avollaus.
E.I critz per aquest lavador
Versa sobre.ls plus rics captaus
Fraitz, faillitz, de proeza Ias,
Que non amon Joi ni Deport.

En Espagne, ici, le Marquis
Et ceux du Temple de Salomon
Souffrent le poids
Et le fardeau de l’orgueil des païens
Par quoi Jeunesse recueille mauvaise louange.
Et le blâme, à cause de ce lavoir,
Tombe sur les plus puissants seigneurs,
Brisés, faillis, vides de prouesse
Et qui n’aiment ni joie ni amusements.

VIII
Desnaturat son li Frances,
Si de l’afar Dieu dizon no,
Qu’ie.us ai comes.
Antiocha, Pretz e Valor
Sai plora Guiana e Peitaus.
Dieus, Seigner, ai tieu lavador
L’arma dei comte met en paus:
E sai gart Peitieus e Niort
Lo Seigner qui ressors dei vas

Dépravés sont les Français
S’ils se refusent à soutenir Dieu,
Car je les ai mis en demeure.
Antioche, ton Prix et ta Valeur
Sont pleurés ici par Guyenne et Poitou.
Dieu, Seigneur, en ton lavoir
Donne paix à l’âme du comte,
Et ici, puisse garder Poitiers et Niort!
Le Seigneur qui ressuscita du Sépulcre.


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En vous souhaitant une agréable journée.

Frédéric EFFE
Pour moyenagepassion.com
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Sources

(1) « Intorno al Vers del lavador. Marcabruno e la riconquista ispanica », Medioevo romanzo, XXII (s. iii, ii), 1997, Silvio Melani.

(2) Marcabru: A Critical EditionMarcabrun, Simon Gaunt, Ruth Harvey and Linda Paterson Brewer, Cambridge, UK, 2000.

(3) « C’al morir non trob contrafort ».  Contrafort  : adversaire. JML Dejeanne (op cité) traduit : « Qui dans la mort ne trouve un vainqueur » ou « Qui ne soit vaincu par la mort ».  Concernant  cet adversaire, Silvio Melani (1) y voit plutôt sous-entendu « le diable ». 

(4) Crup-en-cami. Là encore divergence de traduction entre JML Dejeanne « Accroupi sur le chemin » et une interprétation de Silvio Melani qui se référera de son côté au « Crup-en-cendres » utilisé par ailleurs par Giraut de Borneil.  Autrement dit, ceux qui restent accroupi sur le chemin pour l’un et pour l’autre ceux qui restent accroupi auprès de la cheminée ou de l’âtre, pour se chauffer le dos et ne rien faire.

 

« Les troubadours, une histoire poétique » par Michel Zink et avec France-Culture

troubadours_poesie-medievale_Michel-Zink-livre_moyen-ageSujet :  poésie médiévale, amour courtois, troubadours, fine amor, lyrique courtoise, langue d’oc
Période  : moyen-âge central
Auteur :  Michel Zink
Ouvrage :  Les troubadours, une histoire poétique (éditions Perrin, 2013)
Programme : Ça Rime à Quoi
Sophie Nauleau,  France Culture

Bonjour à tous,

E_lettrine_moyen_age_passionn 2014, l’auteur(e), productrice et animatrice de Radio Sophie Nauleau recevait Michel Zink, sur France Culture, dans le cadre de son programme Ça Rime à Quoi.  L’académicien et grand spécialiste de littérature médiévale venait lui présenter son ouvrage, daté de 2013 et ayant pour titre « les troubadours une histoire poétique« .


michel_zink_litterature_medievale_academicien_philologie_citation_moyen-age_medievalisme« C’est le Moyen-âge qui a mis l’amour au centre de la poésie (…) mais il y a quelque de particulier dans la poésie des troubadours, qui est tout à fait délibéré et qui est extrêmement fascinant, c’est que les troubadours considèrent que l’amour est un sentiment essentiellement contradictoire. C’est, à la fois, une exaltation  et une dépression, c’est une joie et une souffrance. L’amour c’est le désir, le désir va vers son assouvissement, mais redoute d’être assouvi, parce qu’assouvi, il disparaîtra comme désir. Donc l’amour est en lui-même quelque chose de contradictoire. »  Michel Zink extraits entretien France Culture (2014)


Après nous avoir touché un  mot de son parcours et sa prédilection pour la poésie médiévale. Michel Zink en profitait pour faire ici, avec sa générosité et sa passion habituelles, une belle incursion dans l’art poétique et l’esprit des troubadours occitans du moyen-âge central, ce « moment où l’amour est devenu la grande affaire de la poésie ». On abordera ainsi, à ses côtés, les particularités de l’Amour Courtois, les liens entre exercice poétique et Fine Amor (fin’amor),  entre savoir-faire littéraire et « compétence amoureuse », le rapport au langage et aux sentiments, le tout ponctué de quelques troubadours_histoire_poetique_Michel-Zink_moyen-age_poesie-medievale_livrelectures et extraits.

Au passage, le médiéviste philologue nous gratifiera encore de quelques « anecdotes » issues des  Vidas et Razos, On sait que leur étude lui a toujours été cher, pour peu qu’on les approche pour ce qu’ils sont :  des « objets » littéraires. Si ces récits postérieurs à la vie des troubadours sont, dans bien des cas, demeurés les seules traces « biographiques’ que nous ayons conservées d’un certain nombre d’entre eux, on sait, en effet, qu’ils mêlent sans complexe, détails factuels et extrapolations, pour nous présenter une véritable romance de la vie des troubadours des XIIe, XIIIe siècles.

Ça rime à quoi :  Les Troubadours : Une histoire poétique. Michel Zink

(si vous avez des difficultés à lire le podcast,  retrouvez le ici sur le site de France Culture  ou même au lien suivant sur youtube)

Depuis 2017, ce livre de Michel Zink  est disponible au format poche chez Tempus Perrin. Voici un lien utile pour vous le procurer : Les troubadours. Une histoire poétique

En vous souhaitant une belle journée.
Fred

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« Ab l’alen tir vas me l’aire » : l’ode à la Provence, mâtinée d’amour courtois, d’un troubadour en exil

peire_vidal_troubadour_toulousain_occitan_chanson_medievale_sirvantes_servantois_moyen-age_central_XIIeSujet : musique, poésie, chanson médiévale, troubadours, occitan, langue occitane, langue d’oc, amour courtois, Provence médiévale.
Période : moyen-âge central, XIIe, XIIIe siècle
Auteur : Peire Vidal (? 1150- ?1210)
Titre : Ab l’alen tir vas me l’aire
Interprète : Camerata Mediterranea, Joel Cohen.
Album : Lo Gai Saber : Troubadour and Minstrels 1100-1300 (1990)

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionujourd’hui, nous vous proposons de partir à la découverte (ou la redécouverte) d’une chanson médiévale du troubadour toulousain Peire Vidal. En plus de sa traduction, cette pièce nous fournira l’occasion de parler d’un ensemble de renom : le Boston Camerata.  Né outre atlantique dans les années 60-70, cette formation a trouvé également des prolongements sur les terres européennes, sous l’impulsion de son directeur Joel Cohen et à travers la Camerata Mediterranea.

« Ab l’alen tir vas me l’aire », Peire Vidal par la Camerata Mediterranea

Joel Cohen : de la Boston Camerata
à la Camerata Mediterranea

Ensemble dédié aux musiques anciennes, le Boston Camerata a vu le jour au milieu des années 50. Attaché dans un premier temps au Musée des Arts de la ville, il prit son indépendance 20 ans plus tard, joel-cohen_boston-camerata_passion_musiques-anciennes_troubadoursdans le courant de l’année 74. Sous la direction du luthiste passionné de « Early Music » Joel Cohen, assisté bientôt de la chanteuse soprano française Anne Azéma (son épouse), la formation a produit dès lors un nombre considérable d’albums et de programmes. Son répertoire de prédilection s’étend du moyen-âge à la période baroque, mais va même jusqu’à des musiques classiques, populaires ou folkloriques du XIXe siècle. Le Boston Camerata est, à ce jour, toujours actif et Anne Azéma en a repris l’entière direction depuis 2008. A côté de cela, cette dernière a également créé,  dans le courant des années 2000, l’Ensemble Aziman.

anne-azema_boston-camerata_passion_musiques-anciennes_troubadoursDans le courant de l’année 1990, Joel Cohen fut également à l’initiative de la création de la Camerata Mediterranea,  organisme à but non lucratif visant à promouvoir la recherche, les échanges et la communication entre artistes issus particulièrement du berceau méditerranéen et des trois religions monothéistes, autour du répertoire des musiques  traditionnelles et anciennes, C’est sous l’égide de cette organisme que s’inscrivait l’album Lo Gai Saber : Troubadour and Minstrels 1100-1300, enregistré en France et dont est issue la chanson de Peire Vidal que nous vous présentons ici.

Pour plus d’informations sur les productions et les activités du Boston Camerarata, vous pouvez consulter le leur site web au lien suivant

Lo Gai Saber : un album de choix
autour des troubadours du moyen-âge central

Fort de vingt-une pièces, ce bel album tout entier dévoué à l’art des troubadours du sud de France médiévale, s’étendra même jusqu’à l’Espagne et au galaïco-portugais puisque ce sont les « Ondas de Mar » de Martim Codax qui en feront l’ouverture, Elles seront suivies de près par deux compositions de Peire Vidal, mais encore des chansons des plus célèbres représentants de la langue d’oc du moyen-âge central : Gaucelm Faidit, Bertrand de Born, Raimbault de Vaqueiras, Guillaume IX de Poitiers, Marcabru, Bernard de Ventadorn et bien d’autres encore.

troubadour_trouvere_peire_vidal_musique_chanson_medievale_boston-camerata_moyen-age_XIIeDès sa sortie, l’album fut encensé par la presse spécialisée. Entourés de grands noms de la scène des musiques anciennes, Joel Cohen et Anne Azema y prêtent leur voix et leur talent. A leur côtés, on retrouve Cheryl Ann Fulton  à la harpe, Shira Kammen à la vielle et au rebec, mais aussi Jean-Luc Madier et François Harismendy à la voix. On peut encore trouver cette production à la vente au format CD ou même au format MP3 dématérialisé. A toutes fins utiles, voici un lien utile pour vous le procurer : Joel Cohen: Lo Gai Saber – Troubadours and Minstrels 1100-1300.

« Ab l’alen tir vas me l’aire » :  la Provence médiévale de Peire Vidal

P_lettrine_moyen_age_passion-copiaour revenir à la pièce du jour, Joel Cohen se livrait ici à l’exercice (au demeurant très médiéval) du contrefactum, puisqu’il plaquait sur les vers et la poésie de Peire Vidal, une mélodie datant du XIIIe siècle, par ailleurs attachée à une chanson du trouvère Conon de Bethune  : « Chanson legiere a entendre ».

« Ab l’alen tir vas me l’aire qu’eu sen venir de Proensa« , « avec l’haleine, je tire vers moi l’air que je sens venir de Provence »,  ce texte est sans doute l’un des plus célèbres du troubadour du moyen-âge central. Voyageur par goût, mais, on le suppute aussi, un peu contraint par la force des événements, l’auteur médiéval faisait ici tribut à sa Provence natale et aimée. Dans un élan de lyrique courtoise, il y évoquait aussi immanquablement la dame qu’il avait dû laisser derrière lui mais qui continuait d’occuper toutes ses pensées. S’agit-il de l’épouse de son protecteur, Raymond Geoffrey, Vicomte de Marseille, dit Barral de Marseille ? Une légende court sur un baiser volé et on avance quelquefois que les transports du poète  à  l’égard de la noble dame lui aurait peut-être valu de se faire bannir de la ville. Le mystère demeure et il peut encore s’agir de cette dame autour de Carcassonne auquel le poète fait allusion dans d’autres poésies.

Pour la traduction, nous nous basons sur celle de Joseph Anglade, dans son ouvrage consacré aux Poésies de Peire Vidal en 1913, tout en les revisitant un peu sur la base de recherches personnelles .


Les paroles de la chanson de Peire Vidal
avec leur traduction en français moderne

I
Ab l’alen tir vas me l’aire
Qu’eu sen venir de Proensa :
Tôt quant es de lai m’agensa,
Si que, quan n’aug ben retraire,
Eu m’o escout en rizen
E – n deman per un mot cen :
Tan m’es bel quan n’aug ben dire.

Avec mon haleine j’inspire l’air
que je sens venir de Provence;
tout ce qui vient de là me plaît ;
De sorte que quand j’en entends bien rapporter,
moi,  j’écoute en souriant
et 
 j’en demande pour un mot, cent.
Tant il m’est agréable d’en entendre dire du bien.

II
Qu’om no sap tan dous repaire
Com de Rozer tro qu’a Vensa,
Si com clau mars e Durensa,
Ni on tan fis jois s’esclaire.
Per qu’entre la franca gen
Ai laissât mon cor jauzen
Ab leis que fa*ls iratz rire.

Car on ne connaît pas de si doux pays
que celui qui va du Rhône à Vence
et qui est enclos entre mer et Durance ;
et il n’en est pas qui procure tant  de joie ;
c’est pourquoi chez ces nobles gens 
j’ai laissé mon cœur  joyeux,
auprès de celle qui rend la joie aux affligés.

III
Qu’om no pot lo jorn mal traire
Qu’aja de leis sovinensa,
Qu’en leis nais jois e comensa.
E qui qu’en sia lauzaire,
De ben qu’en diga no’i men ;
Quel melher es ses conten
E-l genser qu’el mon se mire.

Car on ne peut être malheureux le jour
Quand on a d’elle souvenance;
car en elle naît et commence la joie ;
quel que soit celui qui fait son éloge
et quelque bien qu’il en dise, il ne ment pas ;
car elle est la meilleure sans conteste
et la plus gracieuse et aimable qu’on puisse trouver en ce monde.

IV
E s’eu sai ren dir ni faire,
Ilh n’aja*l grat, que sciensa
M’a donat e conoissensa,
Per qu’eu sui gais e chantaire.
E tôt quan fauc davinen
Ai del seu bel cors plazen,
Neis quan de bon cor consire.

Et je ne sais rien dire, ni faire
dont le mérite ne lui revienne, car science
elle m’a donné et talent (connaissance? )
Grâce auxquels je suis gai et chantant.
Et tout ce que je fais de beau
m’est inspiré par 
son beau corps plaisant,
même quand cela vient du plus profond de mon coeur.
(1)

(1) Joseph Anglade traduit ce dernier vers comme  « même quand je rêve de bon cœur (?) » ce qui n’a pas tellement de sens. Nous penchons plus en faveur d’une traduction dans laquelle il fait de la dame de son cœur, la source d’inspiration de ses plus beaux vers, même quand ils viennent du plus profond de son être.


En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
pour moyenagepassion.com
A la découverte du Moyen-âge sous toutes ses formes

Une chanson médiévale satirique du troubadour Peire Vidal sur les maux de son siècle

peire_vidal_troubadour_toulousain_occitan_chanson_medievale_sirvantes_servantois_moyen-age_central_XIIeSujet : musique, poésie, chanson médiévale, troubadours, occitan, langue occitane, langue d’oc, poésie satirique, servantois, sirvantès, amour courtois, viole de gambe.
Période : moyen-âge central, XIIe, XIIIe siècle
Auteur : Peire Vidal (? 1150- ?1210)
Interprète : Jordi Savall, Hespèrion XXI, Capella Reial de Catalunya
AlbumLe Royaume Oublié / La Croisade Contre Les Albegeois / La Tragédie Cathare (2009)

Bonjour à tous,

A_lettrine_moyen_age_passionprès avoir fourni quelques éléments sur la biographie et l’oeuvre du  troubadour Peire Vidal, nous vous proposons, aujourd’hui, de découvrir une de ses chansons médiévales. C’est un texte satirique, un servantois (sirventès) dans la pure tradition des poètes du Sud de la France. L’auteur toulousain y passe en revue, d’un oeil critique, les maux de son temps pour finir, tout de même, sur une note plus distanciée et plus joyeuse.

L’interprétation que nous vous en proposons nous fournit le grand plaisir de retrouver la direction du du maître de musique Jordi Savall, sa viole de gambe  et son incomparable talent.

Jordi Savall et la tragédie cathare – Le royaume oublié

Hespèrion XXI et la Capella Reial de Catalunya à la recherche du royaume oublié

En 2009, à la faveur du 800e anniversaire de la croisade albigeoise, Jordi  Savall, accompagné de Montserrat Figueras, et de leur deux formations, Hespèrion XXI et la Capella Reial de Catalunya partait, en direction de la Provence médiévale, sur les traces des Cathares.

Sur le concept du livre album, il proposait ainsi un véritable opéra en 3 actes réparti sur 3 CD différents. Avec un total de 61 pièces, le triple album suivait l’épopée cathare de son émergence dans l’Occitanie de la fin du Xe siècle jusqu’à sa diaspora et sa disparition tardive au moyen-âge tardif, en passant bien sûr par sa répression. Pour la première fois dans l’histoire de la chrétienté, ce tragique épisode de la croisade des albigeois qui divise encore quelquefois aujourd’hui les experts, les historiens et les occitans de coeur, jeta les seigneurs de la France médiévale les uns contre les autres, ceux du Nord contre ceux du Sud.

L’appel de l’Eglise jordi_savall_royaume-oublie_tragedie-cathare_croisade-albigeois-moyen-age-central_musique-chanson-medievale_sRomaine fut long et insistant et s’il tarda à se faire entendre, cette croisade déborda largement la seule répression de l’hérésie et ne manqua pas de servir les ambitions des uns et des autres. Au bout du compte, la couronne de France qui avait tardé à l’entendre en ressortit comme une des grandes gagnantes.

Pour revenir à ce livre-album d’exception, on y retrouve,  au titre de contributions vocales, Montserrat  Figueras aux cotés de Pascal Bertin, Lluís Vilamajó, Furio Zanasi, et encore Marc Mauillon.  Il fut, à juste titre, largement salué sur les scènes dédiées aux Musiques Anciennes d’Europe. Pour prendre un peu de hauteur, il faut dire que, là encore et comme pour tous les sujets qu’il touche, Jordi Savall se situait au delà de la simple évocation musicale, dans une réflexion profonde et spirituelle sur l’histoire des hommes, et toujours empreinte d’un grand humanisme.

Cette production est encore éditée et vous pourrez la retrouver facilement à l’achat, en ligne. Distribuée par Alia-vox, la maison d’édition de Jordi Savall, elle est disponible au format original livre-CD mais vous pourrez aussi y butiner quelques pièces au format digital MP3 avant de vous décider. Voici un lien utile pour la pré-écouter ou l’acquérir : The Forgotten Kingdom

« A per pauc de Chantar no’m lais »
Il s’en faut peu que je renonce à chanter

A l’hiver du XIIe siècle,
une chanson satirique teintée d’amour courtois

Au vue des thèmes abordés, cette chanson a dû être composée entre 1192 et 1194 date de l’emprisonnement de Richard Coeur de Lion au retour de la troisième croisade. Critique directe du roi de France, mentions des conflits nobiliaires en Espagne, et encore dénonciation du Pape et du Clergé qu’il désigne comme seul responsable d’avoir favorisé la propagation de l’hérésie Cathare (la croisade n’interviendra que quelques 10 années plus tard), notre troubadour balaye tous ses sujets sans mâcher ces mots. Il s’en dit si affligé que pour peu il renoncerait à son art, mais malgré tout, dans la dernière partie du texte, il prend ses distances pour nous conter ses états d’âme et sa joie dans un belle élan de courtoisie et de fine amor pour sa dame de Carcassonne.

De l’Occitan au français moderne

Précisons que la traduction en français moderne que nous vous proposons de ce texte occitan colle fortement de celle de Joseph Anglade (Les Poésies de Peire Vidal, chez Honoré Champion, 1913) même si nous l’avons quelque peu revisitée. Nous avons en effet changer quelques tournures mais également quelques vocables à la lumière de recherches personnelles sur l’Occitan ancien et tâchant aussi de croiser un peu la version de Anglade, pour la mettre en perspective avec celle de Veronica Mary Fraser dans son ouvrage The Songs of Peire Vidal: Translation & Commentary (Peter Lang Publishing, 2006). Grande spécialiste de littérature médiévale,  cette dernière est professeur(e) de littérature, ainsi que de vieux Français et d’occitan ancien à l’université américaine de Windsor dans l’Ontario.

A per pauc de Chantar no’m lais

I

A per pauc de chantar nom’lais,
Quar vei mort joven e valor
E pretz, que non trob’on s’apais,
Qu’usquecs l’empenh e.l gita por;
E vei tan renhar malvestat
Que.l segle a vencut e sobrat,
Si qu’apenas trop nulh paes
Que.l cap non aj’en son latz près.

Il s’en faut peu pour que je renonce  à chanter
Car je vois morts, jeunesse et valeur
Et mérite,  qui ne trouvent plus refuge où s’apaiser
Quand tous les repoussent et rejettent;
Et je vois  régner partout la vilenie,
Qui a soumise et vaincu le monde
Tellement que je ne trouve nul pays
Qui n’ait la tête prise dans son lacet

II

Qu’a Rom’ an vout en tal pantais
L’apostolis e.lh fais doctor
Sancta Gleiza, don Deus s’irais;
Que tan son fol e peccador,
Per que l’eretge son levat.
E quar ilh commenso.l peccat,
Greu es qui als far en pogues;
Mas ja no volh esser plages.

A Rome, le pape et les faux docteurs,
ont mis dans un tel trouble (agitation)
La Saint Eglise, mettant Dieu en colère;
Ils sont si fous et si pécheurs
Qu’ils ont fait se lever les hérétiques.
Et comme ce sont eux qui ont commencé à pécher (Rome)
Il est difficile pour les autres de réagir autrement
Mais je ne veux prêcher à leur place.

III
E mou de Fransa totz l’esglais,
D’els qui solon esser melhor,
Que.l reis non es fis ni verais
Vas pretz ni vas Nostre Senhor.
Que.l Sépulcre a dezamparat
E compr’e vent e fai mercat
Atressi coin sers o borges:
Per que son aunit sei Frances.

Et c’est beaucoup de France que vient tout l’effroi
De ceux qui d’habitude étaient les meilleurs
Car le roi n’est ni fiable ni sincère
envers l’honneur, ni envers notre Seigneur.
Puisqu’il a abandonné le Saint-Sépulcre
Et qu’il achète, vend et fait commerce
Tel un serf ou un bourgeois;
Pour cela ses sujets français sont honnis.

IV

Totz lo mons es en tal biais
Qu’ier lo vim mal et oi pejor ;
Et anc pos lo guitz de Deu frais,
Non auzim pois l’Emperador
Creisser de pretz ni de barnat.
Mas pero s’oimais laiss’ en fat
Richart, pos en sa preizon es,
Lor esquern en faran Engles.

Le monde est pris dans un tel biais
Que hier nous le trouvions mauvais et aujourd’hui c’est pire :
Et depuis qu’il a renoncé à  la guidance de Dieu,
Nous n’avons pas appris que l’Empereur
Ait accru son honneur, ni sa réputation.
Mais pourtant si désormais, il abandonne sottement
Richard* (*coeur de Lion), qui est dans sa prison
Les anglais montreront leur  mécontentement (raillerie)

V

Dels reis d’Espanha.m tenh a fais,
Quar tan volon guerra mest lor,
E quar destriers ferrans ni bais
Trameton als Mors per paor:
Que lor orgolh lor an doblat,
Don ilh son vencut e sobrat;
E fora melhs, s’a lor plagues,
Qu’entr’els fos patz e leis e fes.

Quant aux rois d’Espagne, ils m’affligent
Parce qu’ils veulent tant se faire la guerre entre eux.
Et parce que destriers gris et bais
Ils envoient aux maures, par peur.
En doublant l’orgueil de ces derniers
Qui les ont vaincus et surpassés
Il serait meilleur, s’il leur plait,
Qu’entre eux  se maintiennent paix, loi et foi.

VI

Mas ja no.s cug hom qu’eu m’abais
Pels rics, si’s tornon sordejor ;
Qu’us fis jois me capdela e.m nais
Que.m te jauzent en gran doussort;
E.m sojorn’ en fin’ amistat
De leis qui plus mi ven en grat :
E si voletz saber quais es
Demandatz la en Carcasses.

Mais ne laissez jamais qu’un homme pense que je m’abaisse
Pour les riches, s’ils se mettent à s’avilir (à empirer):
Car une joie pure en moi me guide
Qui me réjouit en grande douceur
Et je me tiens dans la fine amitié (amor)
De celle qui me plait le plus:
Et si vous voulez savoir qui elle est
Demandez-le dans la province de Carcassonne.

VII

Et anc no galiet ni trais
Son amie ni.s pauzet color,
Ni.l cal, quar cela qu’en leis nais
Es fresca com roz’ en pascor.
Bel’es sobre tota beutat
Et a sen ab joven mesclat :
Per que.s n’agrado’l plus cortes
E’n dizon laus ab honratz bes.

Elle n’a jamais déçu, ni trahi
Son ami, ni ne s’est fardé devant lui
Elle n’en a pas besoin car son teint naturel
Est frais comme une rose de Pâques
Elle est belle, au dessus de toute beauté
Et elle a sens (raison, intelligence) et jeunesse à la fois,
Qui la rendent agréable aux plus courtois
Qui en font l’éloge avec une honnêteté (honneur?) bienveillante.

En vous souhaitant une excellente journée.
Fred
pour moyenagepassion.com
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